Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 9 mars 1992
Rejet
REJET des pourvois formés par : 1°) T. Michel, 2°) F. Claudine, contre l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse, chambre correctionnelle, en date du 31 octobre 1990, qui les a condamnés, pour culture illicite de cannabis, le premier à 1 mois d'emprisonnement et 3 000 francs d'amende, la seconde à 1 mois d'emprisonnement avec sursis et 1 500 francs d'amende.

LA COUR,.
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit commun aux deux demandeurs ;

(…)
Les moyens étant réunis ;
Attendu que pour condamner, sur le fondement des articles L. 626 et L. 627 du Code de la santé publique, Michel T. et Claudine F. du chef de culture illicite de cannabis, l'arrêt attaqué, écartant l'exception d'incompatibilité du décret d'application du 29 novembre 1988 avec la réglementation communautaire, énonce que " le cannabis dont la culture est punissable, se définit par référence à la Convention internationale sur les stupéfiants du 30 mars 1961 laquelle assimile, en son article 1-l, culture et trafic, et renvoie en son article 36-1 a) aux dispositions répressives du droit interne, savoir pour la France aux articles L. 626 et L. 627 du Code de la santé publique, étant observé qu'en l'espèce les prévenus ont reconnu se livrer à la culture du chanvre, non pour en extraire les fibres, mais dans le seul but d'en consommer la substance vénéneuse qu'il contient " ;

Attendu qu'en cet état, la cour d'appel qui, au demeurant, n'a nullement retenu dans le visa des textes allégués l'article R. 5181 du Code de la santé publique, issu du décret du 29 novembre 1988, a caractérisé l'ensemble des éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, du délit dont les prévenus ont été déclarés coupables, et a ainsi, sans encourir les griefs allégués, justifié sa décision ;
Qu'en effet, le cannabis se définit non par référence aux dispositions réglementaires du Code de la santé publique, mais à la Convention internationale unique du 30 mars 1961, qui, en application de l'article 55 de la Constitution, a acquis une autorité supérieure à la loi interne dès sa publication au Journal officiel du 2 mai 1969 ;

Que cette Convention, qui exclut de son champ d'application la culture de la plante de cannabis à des fins uniquement industrielles, n'opère aucune distinction entre la culture de cannabis en vue du trafic et la culture aux fins de consommation personnelle, ses articles 23 et 28 précisant au contraire que le producteur de cannabis est tenu de livrer la totalité de sa récolte à l'organisme national de contrôle ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois
Publication : Bulletin criminel 1992 N° 103 p. 267
Droit pénal 1990, n° 202

Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 4 mai 2006 Rejet

Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Gerda,
contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBERY, chambre correctionnelle, en date du 21 juillet 2005, qui, pour importation sans déclaration de marchandises non prohibées ou fortement taxées, l'a condamnée à des pénalités douanières ;
Vu le mémoire personnel en demande et le mémoire en défense produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 30 avril 2003, les agents des douanes ont procédé au contrôle, à son entrée en France, d'un véhicule immatriculé en Suisse conduit par Gerda X... ; que cette dernière ayant déclaré qu'elle n'avait pas accompli les formalités de dédouanement de son véhicule bien qu'elle résidât en France cinq jours par semaine, les agents des douanes lui ont signifié l'infraction d'importation sans déclaration de marchandises fortement taxées et ont saisi le véhicule ; que Gerda X... est poursuivie pour importation sans déclaration de marchandises non prohibées ou fortement taxées ;
En cet état :
(…)
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des dispositions du protocole des conférences de Paris du 3 novembre 1815, du traité de Paris du 20 novembre 1815, du traité de Turin du 16 mars 1816 et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 112-1 du code pénal ;

Les moyens étant réunis ;
Attendu que la demanderesse ne saurait faire grief à l'arrêt d'avoir jugé qu'un véhicule importé de Suisse par une personne qui réside dans la zone franche existant en Haute-Savoie est soumis à la TVA, dès lors que, selon l'article 1er de la loi du 27 décembre 1933, non contraire aux dispositions conventionnelles invoquées, la franchise ne s'applique pas aux impôts recouvrés à l'occasion de la consommation de marchandises ;
Qu'ainsi les moyens doivent être écartés ;
(…)
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;

Publication : Bulletin criminel 2006 N° 120 p. 449

En matière de polution maritime : la liberté de preuve du droit pénal français n'est mise en cause par aucun traité

Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 13 mars 2007
Rejet
Publié au bulletin

Statuant sur les pourvois formés par :
- X... M.C,
- LA SOCIETE THENAMARIS SHIP MAMAGEMENT, civilement responsable,
contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 3e chambre, en date du 19 janvier 2006, qui, pour pollution marine, a condamné le premier à 140 000 euros d'amende, a dit que cette amende serait supportée à concurrence de 120 000 euros par la seconde, a ordonné une mesure de publication, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire, commun aux demandeurs, les observations complémentaires pour la société Thenamaris Ship Management, et le mémoire en défense produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 14-2 du Pacte des nations Unies sur les droits civils et politiques, 9 et 10 de l'annexe I de la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires du 2 novembre 1973, telle que modifiée par le protocole du 17 février 1978, L. 218-10 et L. 218-21 du code de l'environnement, 121-1 et 121- 3 du code pénal, de l'article préliminaire et des articles 427, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel de Rennes a confirmé la culpabilité de M.C X... du chef de rejet d'hydrocarbures dans les eaux territoriales par un navire-citerne étranger autre que citerne d'une jauge brute égale ou supérieure à cent cinquante tonneaux ;

"aux motifs que, le 5 septembre 2000, à 7 heures 50 Z UTC, soit 9 heures 50 locales, Philippe Y... et Marc Z..., contrôleurs des douanes affectés à la brigade de surveillance aéro-maritime de Lann-Bihoué, assuraient une surveillance maritime de routine à cent soixante-dix nautiques de la pointe de Penmarch au moyen d'un avion Cessna 406 n° FZ13ES dont Philippe Y... était le commandant de bord, lorsque, se trouvant en zone Océan, au 46'07N de latitude et 007'W 3 8 de longitude, ils constataient la présence d'une traînée continue irisée argentée de couleur vive avec des zones foncées de catégories B, D et F, axée au 2 10, d'une largeur d'un demi nautique pour une longueur de dix nautiques dans le sillage d'un navire citerne de cent cinquante-neuf mille tonneaux battant pavillon maltais nommé "Concordia I" ; que le bâtiment, qui naviguait à quinze noeuds, se trouvait en zone économique ; que les traces se trouvaient dans son sillage, à son contact et qu'aucune autre trace ne se trouvait à l'avant du navire, le rejet provenant de la poupe côté babord ; que la nappe révélait la présence d'hydrocarbures ; qu'ayant pris contact avec le navire sur canal V.H.F. Marine, le contrôleur Philippe Y... était mis en relation avec une personne se présentant comme étant le capitaine, qui se défendait d'être à l'origine de la pollution, déclarant qu'il vidangeait les toilettes du bord ; que le rejet cessait à ce moment-là ; que, s'étant présentés comme les occupants d'un avion de la patrouille maritime des douanes, les fonctionnaires signalaient à leur interlocuteur qu'il procédait à un rejet d'hydrocarbures et qu'ils allaient rédiger un procès-verbal de constatation de pollution maritime ; qu'ils relevaient le nom du capitaine, qui déclarait se nommer X..., et la raison sociale de l'armateur qu'il leur indiquait comme étant Nobility Navigation Company ; que les fonctionnaires ayant repris leur mission de surveillance, le capitaine reprenait contact avec eux pour protester et demander des précisions sur le contenu du procès-verbal ; qu'il était relevé une infraction aux dispositions de la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires, signée à Londres le 2 novembre 1973, modifiée par le protocole du 17 février 1978 et de la loi n° 83 -593 du 5 juillet 1983 réprimant la pollution de la mer par les hydrocarbures ; que, le 7 septembre 2000, de 18 heures 30 à 21 heures, il était procédé par le capitainerie maritime d'Algesiras dépendant de la direction générale de la marine marchande du ministère espagnol des travaux publics à l'inspection du navire citerne Concordia I lors de son passage par le détroit de Gibraltar sur sa route de Rotterdam à Sidi Kerir (Egypte) ; que cette inspection, réalisée à la suite d'une plainte des autorités maritimes françaises, permettait de constater que le navire, qui avait été construit en 1977 en Norvège, disposait de sept citernes de charge centrales, de deux citernes latérales à ballast séparées de quatorze citernes de charge/ballast et de deux citernes de décantation ; qu'à l'examen des livres registres des hydrocarbures, il était constaté qu'au moment de l'inspection par l'aéronef, le navire était en train de faire une décharge de dix mètres cubes d'eaux huileuses de fond de cale de la salle des machines au moyen de l'équipement séparateur eau-huile, ainsi qu'un nettoyage des citernes de charge en envoyant le résidu du nettoyage aux citernes de rétention et sans effectuer aucune décharge à la mer ; qu'il avait été procédé, au port de Rotterdam, à la vérification du scellage de la vanne hydraulique de contrôle de charge qui actionne la décharge à la mer et se trouve du côté bâbord à la hauteur du commencement du château ; que la décharge à la mer, située au-dessous de la ligne de flottaison dans la voûte de tribord était scellée au moment de l'intervention des fonctionnaires espagnols ; que l'examen du journal de navigation a permis de relever, à une certaine position précisée dans le rapport d'inspection, plusieurs taches d'hydrocarbures sur le côté bâbord du navire jusqu'à deux encablures, et ce, pendant à peu près vingt minutes ; qu'à 9 heures 15, le journal de navigation mentionne la présence d'un aéronef à proximité du navire ; l'attestation du séparateur d'eau de fond de cale était caduque depuis le 31 mars 1990 ; qu'enfin, il était constaté que le fond de cale était propre ; qu'il n'était procédé, en cours d'enquête, à aucune audition des personnes en cause, qu'il s'agisse du capitaine ou de l'armateur ;
que des poursuites ayant dans un premier temps été exercées devant le tribunal correctionnel de Paris, cette juridiction rendait, le 16 juin 2003, un jugement d'incompétence en raison des lieux, au visa des dispositions de l'article L. 218-29 du code de l'environnement, modifié par l'article 4 de la loi du 15 avril 2003 ; que les poursuites ayant été reprises devant le tribunal correctionnel de Brest, l'affaire a été examinée à l'audience tenue par cette juridiction, le 14 septembre 2004, et à laquelle M.C X... a comparu ; qu'il a notamment déclaré qu'au moment du contrôle par les douanes françaises, il traversait une zone de nappes d'hydrocarbures, qu'il n'y a rien sur les photos qui prouve la pollution, ce qui sort de la coque n'étant que de l'eau de refroidissement du navire, c'est-à-dire du gaz inerte, brassée par le sillon naturel produit par l'hélice ; qu'il a prétendu que la péremption du certificat du séparateur, mentionnée par les fonctionnaires espagnols, était une erreur et que tout était en ordre lors de l'inspection effectuée cinq jours auparavant à Rotterdam ; qu'il a déclaré être sûr que rien ne sortait du bateau, pourvu d'un système 0DM de surveillance des décharges d'hydrocarbures qui contrôle tout ce qui est jeté "par" la mer, qui sonne en cas de problème et qui n'avait pas été activé depuis Rotterdam ; que, pour retenir la culpabilité de M.C X... et la responsabilité civile de la société Thenamaris Ship Management, les premiers juges ont considéré que les constatations et les déclarations des enquêteurs permettaient d'exclure toute erreur d'identification, de même que la présence de toutes autres nappes d'hydrocarbures et que le séparateur quinze ppm n'était pourvu, selon les constatations faites par les autorités espagnoles, que d'un certificat qui n'était plus valable depuis le 31 mars 1990 ; que le prévenu et la personne morale poursuivie en qualité de civilement responsable discutent l'élément matériel de l'infraction en contestant tout d'abord la capacité scientifique de l'agent verbalisateur à apprécier la réalité de la présence d'hydrocarbures ainsi que son indépendance et son impartialité qui, d'après ces appelants, ne seraient pas suffisamment assurées par son statut de fonctionnaire de l'administration des douanes qui le rendrait dépendant de l'Etat ; mais que la mission des fonctionnaires habilités, au sens des dispositions de l'article 11 de la loi n° 83-583 du 5 juillet 1983 (actuellement article L. 218-26 du code de l'environnement), à constater les infractions aux dispositions des règles 9, 10 et 20 de l'annexe 1 de la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires faite à Londres le 2 novembre 1973, telle que modifiée par le protocole du 17 février 1978 et par ses modificatifs ultérieurs régulièrement approuvés ou ratifiés, ne consiste nullement à réaliser des opérations expertales, mais seulement à procéder à des constatations, mission qui est aussi celle, entre autres, des fonctionnaires de police et des militaires de la gendarmerie pour les infractions à la loi pénale, et qui n'a pas été outrepassée par Philippe Y... et ses collègues en ce qu'ils ont rapporté dans leur procès-verbal du 5 septembre 2000 et, en ce qui concerne Philippe Y... et Marc Z..., dans leurs déclarations à la gendarmerie, les indices qu'ils avaient relevés et qualifié le degré probatoire de ces indices dans le sens d'une pollution par des hydrocarbures rejetés par le navire Concordia I ; que les appelants principaux prétendent, en second lieu, déduire de l'examen des photographies prises par les fonctionnaires verbalisateurs l'existence, dans toute la zone traversée par le navire, devant, derrière et sur les côtés du bâtiment, de taches d'hydrocarbures préexistantes à son passage mais les clichés photographiques - et leurs agrandissements - auxquels se référent le prévenu et la société Thenamaris ne révèlent nullement la présence de taches distinctes de la nappe allongée située derrière le navire et pouvant correspondre à des nappes d'hydrocarbures susceptibles d'être confondues avec un rejet provenant du navire ; qu' ils invoquent, d'autre part, le rapport de visite des inspecteurs espagnols qui n'établit ni déficience ni mauvais entretien à l'origine d'un rejet d'hydrocarbures, précisant en particulier que les vannes de décharge des citernes de ballast étaient scellées à Algesiras comme elles l'étaient à Rotterdam, alors que l'utilisation de telles vannes serait indispensable pour rejeter des résidus pétroliers à la mer ; qu'il n'est cependant pas contesté qu'il y avait bien un rejet en provenance du navire, mais qu'il est soutenu qu'il s'agissait des eaux usées utilisées pour la fabrication de gaz inerte, étant précisé que, le navire étant équipé d'une propulsion par turbine à vapeur, le seul pétrole présent se trouve dans un conduit entre la chaudière et les soutes à combustible, de sorte que la totalité du combustible nécessaire à la propulsion est brûlé dans les chaudières et que rien ne peut s'écouler dans la cale machine pour être ensuite évacué à la mer ; que, cependant, les éléments apportés par la défense n'obligent pas à considérer que ce rejet d'eaux usées présenté comme normal soit incompatible avec la présence simultanée, par le même orifice ou par un autre, d'un rejet polluant ; que, dès lors, que les éléments recueillis par les enquêteurs établissent que la nappe qui se formait immédiatement dans le sillage du navire était bien composée d'hydrocarbures, la détermination exacte du moyen par lequel ce produit a pu s'en échapper n'est pas un élément nécessaire à la constitution matérielle de l'infraction de pollution ; que, d'ailleurs, l'observation de la défense, selon laquelle la capacité du navire à contenir les eaux usées étant de seize mètres cubes (selon le certificat "sludge tank"), une nappe de dix miles de long et de cinq cent mètres de large correspond à un volume de cent soixante-dix mètres cubes, de beaucoup supérieur à cette capacité, est précisément de nature à exclure que le rejet constaté fût uniquement constitué de ces eaux usées ; que, de même, les indications du rapport de déballastage du 13 septembre 2000, selon lesquelles le navire contenait encore, à son arrivée à Sidi Kérir, trente-sept mille neuf cent vingt-cinq mètres cubes d'eau propre, cinquante-quatre mille cinq cent vingt-cinq mètres cubes d'eau sale et deux cent quarante-cinq mètres cubes de résidus pétroliers, ne sont pas incompatibles avec le fait d'avoir procédé à des rejets d'hydrocarbures au cours du voyage ; qu'enfin, le prévenu et la personne morale poursuivie comme civilement responsable font valoir, au vu de l'analyse effectuée par Charles A..., que, si elle provenait du Concordia, la trace n'aurait pas dû être droite et continue car, compte tenu de la vitesse du navire, soit douze noeuds, de sa direction et de l'influence d'un vent de quinze noeuds, elle aurait nécessairement dérivé et n'aurait pas pu, surtout dans sa partie la plus éloignée du navire, se trouver dans son sillage ; mais que la dernière des sept photographies annexées au procès-verbal du 5 septembre 2000 montre une traînée qui n'est pas rectiligne, ce qui est effectivement compatible avec l'action du vent relevée par le technicien mandaté par la défense, mais qui rejoint le navire que l'on aperçoit au loin, dispositif confirmé par les autres photos, en particulier la sixième et la cinquième ; qu'en outre, un rejet provenant d'un navire lui est nécessairement rattaché, malgré la dérive pouvant être due, notamment, à l'action des vents et des courants, ce qui lui fait subir une déformation tout à fait compréhensible, mais sans aller jusqu'à un détachement de la traînée par rapport à sa source tant que le rejet n'est pas interrompu ; que, tel est le cas dans la situation observée le 5 septembre 2000 par les fonctionnaires des douanes françaises rattachés à la B.S.A.M. de Lann-Bihoué, constatée dans le procès-verbal qu'ils ont dressé le même jour et dont il convient de rappeler que ses énonciations font foi jusqu'à preuve contraire (article 12 de la loi n° 83-583 du 5 juillet 1983), et relatée en détails par Philippe Y... et Marc Z... dans leurs auditions effectuées les 6 et 9 novembre 2000 par la gendarmerie maritime ; que leurs observations visuelles sont corroborées par les photographies prises de l'avion dont l'examen démontre l'absence de pollution à l'avant du navire dans le sillage duquel se trouvait, à l'arrière et à son contact, une traînée continue irisée argentée de couleur vive avec des zones foncées ;
que le contrôleur de première classe Philippe Y..., entendu comme témoin à l'audience de la cour, a précisé, en se référant au code d'apparence de l'Accord de Bonn, que la partie la plus importante de la nappe correspondait au code 1, soit un reflet gris argenté (0,04 à 0,30 m d'épaisseur) avec une irisation en surface, que la zone périphérique correspondait au code 2, soit une teinte arc-en-ciel (0,30 à 5 m d'épaisseur) et que l'apparence métallique correspondant au code 3 (5 à 50 m d'épaisseur) s'appliquait à des petites taches localisées au centre de la nappe ; que les catégories mentionnées dans le procès-verbal étaient les suivantes : aspect d'une nappe argentée à la surface de l'eau (B), ruban de couleur vive (D), couleurs plus foncées(M) ; qu'en conséquence, les critères d'apparence caractéristiques des hydrocarbures étaient bien présents dans la nappe créée de façon continue dans le sillage du navire Concordia I, ce dont il résulte de façon certaine que ce navire procédait à un rejet d'hydrocarbures en violation des textes visés à la prévention et en particulier, de la règle 9 de l'annexe I à la Convention du 2 novembre 1973 ; que cette déduction se trouve confirmée par le fait que le rejet a cessé au moment où les fonctionnaires des douanes françaises se sont signalés par radio au capitaine du navire : que les moyens de défense invoqués par le prévenu et la société citée en qualité de civilement responsable, exposés à la rubrique 11) A 4.- pages 12 à 15 - de leurs conclusions, et examinés ci-dessus dans les présents motifs ne sont pas de nature à rapporter la preuve contraire aux énonciations du procès-verbal dans les conditions fixées par l'article 431 du code de procédure pénale ; que, par conséquent, la preuve de l'élément matériel du rejet d'hydrocarbures par le navire Concordia I se trouve rapportée et les conditions d'exonération énoncées au point 1 de la règle 9 de l'annexe 1 à la Convention Marpol ne sont pas réunies ;
qu'en l'absence de justification, par le commandant de ce navire, d'une raison ou d'un incident qui aurait occasionné ou nécessité le rejet constaté dans son sillage, ce rejet doit être présumé volontaire et la référence à la prétendue rigueur des contrôles exercés par les groupes pétroliers affréteurs n'est pas de nature à faire disparaître l'élément intentionnel ainsi caractérisé et confirmé dans son existence par la cessation du rejet polluant au moment où le capitaine a été averti de l'intervention des fonctionnaires des douanes ;
"alors que, d'une part, la preuve de l'existence d'une pollution maritime par rejet d'hydrocarbures incombe à la partie poursuivante, en particulier sur la nature du rejet incriminé ; que les constatations visuelles des agents se référant à la Convention Marpol et aux Accords de Bonn doivent être corroborées par des éléments objectifs au sens du recueil des preuves issu de la signature desdits textes ; que pareille exigence, insuffisamment prise en compte par la pratique des douanes françaises, appartient aux premiers droits de la défense qui grèvent de sujétions particulières l'exercice d'un pouvoir de police spécial, en particulier sur les conditions de l'établissement objectif de l'élément matériel de l'infraction ; qu'en l'espèce, une simple observation visuelle ne saurait tenir lieu de l'enquête recommandée par les instruments internationaux ; qu'en l'état, les prévenus n'ont pu légalement être reconnus coupables d'une pollution maritime en l'absence du moindre élément matériel susceptible de faire l'objet d'une contradiction utile de la part de la défense dont les droits fondamentaux ont, partant, été délibérément méconnus par les services et par l'arrêt ;
"alors que, d'autre part, dans une matière technique, une simple observation visuelle, s'inscrirait-elle dans le cadre de la Convention Marpol et des Accords de Bonn, n'est qu'une constatation sujette à interprétation ; que, si les agents verbalisateurs prétendent interpréter leurs constatations, ils jouent un rôle d'expert qui ne leur a pas été dévolu par les textes ; qu'en avalisant ainsi l'interprétation propre aux agents quand ces derniers n'avaient pris aucune précaution pour objectiver leur opinion par tout procédé technique, notamment des prélèvements, susceptibles de donner sens et portée à leur première impression, la cour a derechef violé les textes visés au moyen et a privé le demandeur d'un procès équitable ;
"alors que, enfin, en l'état du constat d'une apparence de rejet d'hydrocarbures résultant du procès-verbal des douanes faisant simplement foi jusqu'à preuve contraire, la défense démontrait qu'aucun rejet interdit n'avait matériellement pu être effectué lors de la traversée de Rotterdam à Sidi Kerir par Gibraltar où le navire, lors de son passage, avait fait l'objet d'un contrôle à la demande des autorités françaises qui ne révèlera aucune anomalie de fonctionnement ; qu'en se fiant, dès lors, à la seule estimation visuelle initiale, sans autre égard pour la portée de l'inspection effectuée à Gibraltar, la cour a considéré que les démonstrations techniques de la défense corroborées par ladite inspection, n'excluaient pas nécessairement l'hypothèse d'un rejet prohibé durant la traversée, sans autrement expliciter la valeur de cette hypothèse, se déterminant ainsi à la faveur d'un motif purement hypothétique et accordant de facto une portée irréfragable au procès-verbal initial, en violation du principe de la présomption d'innocence" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 5 septembre 2000, il a été constaté par des contrôleurs des douanes en mission de surveillance aérienne, dans la zone économique au large de la pointe de Penmarch (Finistère), la présence d'une traînée continue argentée dans le sillage du navire citerne Concordia I, battant pavillon maltais ; qu'à son passage, le 7 septembre, dans le port d'Algésiras, le navire a fait l'objet d'un contrôle des autorités espagnoles ; que son capitaine, M.C X..., a été poursuivi pour rejet d'hydrocarbures par un navire citerne d'une jauge brute égale ou supérieure à cent cinquante tonneaux ; qu'il a été condamné de ce chef à une amende, dont une partie a été mise à la charge de la société Thenamaris Ship Management ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable des faits reprochés, la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, retient que le procès-verbal établi par les fonctionnaires des douanes, corroboré par les photographies prises depuis l'avion de surveillance, relève la présence, au contact de la poupe du Concordia I d'une traînée continue irisée argentée de couleur vive avec des zones foncées ; que cette description correspond à des critères d'apparence caractéristiques des hydrocarbures ; qu'aucune trace de pollution n'est visible à l'avant du navire et que le rejet a cessé dès qu'un contact radio a été établi avec le bord ; que le capitaine a indiqué qu'au moment du contrôle le navire effectuait une décharge d'eaux huileuses de fond de cale de la salle des machines, au moyen du séparateur quinze ppm, et un rejet d'eaux usées;
que les juges retiennent toutefois que, selon les autorités espagnoles, le certificat du séparateur n'était plus valable depuis le 31 mars 1990, et qu'ils ajoutent que la circonstance alléguée d'un rejet d'eaux usées n'exclut pas l'écoulement simultané d'hydrocarbures, la capacité de stockage des eaux usées par le navire ne permettant pas d'expliquer l'émission d'une nappe de dix miles de long sur cinq cent mètres de large ; que les juges énoncent encore que les indications du rapport de déballastage du 13 septembre 2000 selon lesquelles le navire contenait encore trente-sept mille neuf cent vingt-cinq mètres cubes d'eau propre, cinquante-quatre mille cinq cent vingt-cinq mètres cubes d'eau sale et deux cent quarante-cinq mètres cubes de résidus pétroliers, ne sont pas incompatibles avec le fait d'avoir procédé à des rejets d'hydrocarbures en cours de voyage ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Que, d'une part, aucun instrument international n'impose qu'il soit dérogé, en matière de rejets illicites d'hydrocarbures, au principe de liberté de la preuve ; que, dès lors, les juges ont pu fonder leur conviction sur un faisceau d'indices tirés de l'aspect de la nappe polluée, de sa position par rapport au navire et de son interruption à la suite du contact radio ;
Que, d'autre part, en décrivant l'aspect de la nappe polluée par référence à des codes d'apparence, dont la validité est reconnue sur le plan international comme mode de preuve de la teneur d'un rejet en hydrocarbures, l'agent verbalisateur ne procède pas à une expertise, mais se borne à emprunter des catégories, établies sur la base d'études scientifiques, qui lui permettent de rendre compte, précisément et objectivement, de ce qu'il a personnellement observé, dans un procès- verbal qui fait foi jusqu'à preuve contraire, conformément aux dispositions de l'article L. 218-67 du code de l'environnement ;
D'où il suit que ne saurait être admis le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, à laquelle les juges du fond ont procédé sans inverser la charge de la preuve ;

(...)
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M.C X... devra payer au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale, à chacune des parties civiles, l'association France nature environnement, l'association TOS, le Syndicat mixte de protection du littoral landais, et le Syndicat mixte de protection du littoral Breton ;


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