Vol de biens immatériels :
La Cour de cassation reconnaît le vol d’électricité
mais pas de téléphone…

Cour de cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 19 décembre 1956
Rejet
REJET du pourvoi de l'Electricité de France, partie civile, contre un arrêt de la Cour d'appel de Paris, en date du 6 janvier 1953 qui a condamné L. à des réparations civiles pour vol d'électricité.
LA COUR, Vu le mémoire produit ; Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1, 2, 3, 637 et 638 du Code d'instruction criminelle, des articles 379 et 401 du Code pénal, de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810 ;
En ce que, s'agissant d'un vol de courant électrique au moyen d'un dispositif bloquant le compteur et retiré par moments de façon à dissimuler le vol et à en permettre la continuation, la Cour d'appel a estimé que les diverses interventions de volonté manifestées par les enlèvements et rétablissements du dispositif créaient une série de vols réitérés dont la prescription s'accomplissait indépendamment les uns des autres ; Alors que ces interventions de volonté n'empêchaient pas l'existence d'une infraction continue ou au moins d'une infraction continuée, laquelle suppose la pluralité d'actions coupables, et qu'en conséquence le point de départ de la prescription de l'infraction unique commise devait être fixé au jour de la cessation des actes délictueux ; Attendu que par jugement devenu définitif dans ses dispositions relatives à l'action publique, L. a été déclaré coupable de s'être frauduleusement approprié, au préjudice de l'Electricité de France, une certaine quantité de courant électrique, en introduisant dans son compteur un dispositif agencé de manière à bloquer le mécanisme et à empêcher l'enregistrement de la consommation ; Que, condamné à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et 20000 francs d'amende ainsi qu'à payer à l'Electricité de France, partie civile, une somme de 179,927 francs à titre de dommages-intérêts, le prévenu a relevé appel du jugement en ce qui concerne seulement les réparations civiles ;

Attendu que la Cour d'appel constate, par l'arrêt attaqué, que, tous les mois, L. retirait du compteur son dispositif frauduleux, attendant un temps plus ou moins long avant de le remettre en place, de manière à laisser enregistrer une consommation suffisante pour donner le change ; Qu'elle en déduit que, loin de constituer un délit unique continuellement prolongé, la fraude incriminée s'analyse en une pluralité d'infractions, successivement répétées, mais distinctes, qui se sont à chaque fois renouvelées dans leurs éléments, tant moraux que matériels ; que chacune d'elles s'est instantanément accomplie ou du moins, n'a eu d'effets que pendant une période limitée ;
Attendu que l'arrêt a déclaré en conséquence que, s'agissant de délits différents, encore que le mobile et le mode de perpétration aient été chaque fois les mêmes, la prescription se trouvait acquise pour tous ceux qui avaient été commis au cours de la période antérieure, de plus de trois ans, à l'ouverture des poursuites ; Attendu qu'en appréciant ainsi qu'elle l'a fait les conséquences légales de faits par elle souverainement constatés, la Cour d'appel n'a violé aucun des textes visés au moyen et qu'elle a justifié sa décision ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.
Publication : Bulletin 1956 n° 853
Les grands arrêts de la jurisprudence criminelle, éditions Cujas, n° 61 p. 233, note Marc PUECH. Jurisclasseur périodique 1957 II p. 9923, note DELPECH. Revue de science criminelle 1957 p. 630, observations LEGAL

Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 12 décembre 1990
Rejet
LA COUR,.
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 379 du Code pénal ;
Attendu que X a été traduit devant la juridiction correctionnelle pour avoir, en utilisant un minitel sans autorisation de l'abonné, frauduleusement soustrait des communications téléphoniques au préjudice de l'union départementale des coiffeurs ;
Attendu qu'en relaxant le prévenu des fins de la poursuite, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi ;
Qu'en effet les communications téléphoniques constituent des prestations de service non susceptibles d'appropriation et n'entrent pas dans la catégorie des choses visées par l'article 379 du Code pénal ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi
Publication : Bulletin criminel 1990 N° 430 p. 1070.
Revue trimestrielle de droit commercial et de droit économique, 1991-09, n° 3, p. 475, note P. BOUZAT.
Semaine juridique, Edition entreprise, 9 janvier 1992, n° 106 note J. DEVEZE.
Dalloz, 1991-06-27, n° 25, p. 364, note S. MIRABAIL.

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