Sujet : (Commentaire d’arrêt
)
Cour de cassation chambre criminelle
Audience publique du mardi 13 janvier 2015
Statuant sur les pourvois formés par : - M. Stéphane
X..., - La société Direct marketing solutions, contre
l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date
du 19 novembre 2013, qui, pour tromperie, a condamné, le premier,
à 30 000 euros d'amende, la seconde, à 60 000 euros d'amende
et a prononcé sur les intérêts civils ;
…
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles
6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 212-1 et
L. 213-1 du code de la consommation, 3, 15 et 16 du décret n°2006-352
du 20 mars 2006 relatifs aux compléments alimentaires, 8 du décret
n°91-827 du 29 août 1991 relatif aux aliments destinés
à une alimentation particulière, 121-2 du code pénal,
591 et 593 9 du code de procédure pénale, défaut
et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M.
X... et la société Direct marketing solutions coupables
de tromperie, a condamné M. X... à une amende de 30 000
euros et la société DMS à une amende de 60 000 euros
et a prononcé sur les intérêts civils ;
"aux motifs que l'article L. 213-1 du code de la consommation dispose
«sera puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 37
500 euros ou de l'une de ces deux peines seulement quiconque, qu'il soit
ou non partie au contrat, aura trompé ou tenté de tromper
le contractant, par quelque moyen ou procédé que ce soit,
même par l'intermédiaire d'un tiers :
1- soit sur la nature, l'espèce, l'origine, les qualités
substantielles, la composition ou la teneur en principes utiles de toutes
marchandises ;
2- soit sur la quantité des choses livrées ou sur leur identité
par la livraison d'une marchandise autre que la chose déterminée
qui a fait l'objet du contrat ;
3- soit sur l'aptitude à l'emploi, les risques inhérents
à l'utilisation du produit, les contrôles effectuées,
les modes d'emploi ou les précautions à prendre» ;
qu'il est constant que le texte vise quiconque a participé à
la chaîne visant à commercialiser le produit et non pas,
comme le soutiennent les prévenus, le responsable de la première
mise sur le marché du produit ;
qu'en l'espèce le témoin, M. A... qui est le pharmacien
salarié, responsable du service achat-choix des produits au siège
de la DMS, a bien déclaré à la barre que son rôle
était le choix des produits et la mise en forme de ces produits
pour AMA ; que les enquêteurs de la DDCCRF ont rencontré
Mmes Y... et Z..., assistance de M. A... pour la formulation des compléments
alimentaires et cosmétiques, le choix des façonneurs, la
conception de l'étiquetage ainsi que Mme B..., gestionnaire de
stock, s'occupant de l'approvisionnement des produits et de leur achat
et consulté deux «dossiers de relecture» d'où
ressort la responsabilité de M. A... pour la vérification
des contenus des messages publicitaires et, notamment, pour leur conformité
avec la réglementation en vigueur ; qu'il n'est ainsi pas contestable
que DMS gérait la publicité mais également l'approvisionnement
et l'achat des matières premières composant les produits
et leur conception puis procédait à la publicité
par l'envoi massif de catalogues et de documents publicitaires, qu'en
résumé, elle était responsable des produits et du
marketing et intervenait donc bien dans la chaîne d'élaboration
et de commercialisation des produits ; que M. X... qui en était
bien le président est donc bien auteur des infractions qui sont
visées dans l'acte de poursuite ;
"1°) alors qu'en application des articles L. 212-1 et L. 213-1
du code de la consommation, l'obligation de conformité du produit
pèse sur le responsable de la première mise sur le marché
du produit et à la date de cette mise sur le marché ; que
les prévenus soulignaient, dans leurs conclusions régulièrement
déposées, que la décision de mise sur le marché
du produit incombait à la société AMA et que la société
DMS n'intervenait que, préalablement, pour l'achat des matières
premières et le marketing ; qu'en l'état des motifs de l'arrêt
desquels il résulte que la société DMS n'était
pas le responsable de la mise sur le marché des produits litigieux,
ni le responsable d'une quelconque commercialisation desdits produits,
la cour d'appel qui a cependant prononcé sa condamnation, n'a pas
donné de base légale à sa décision ;
"2°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les
motifs propres à justifier la décision ; que pour retenir
la culpabilité de la société DMS et de son président
M. X..., la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur les faits
commis par M. A..., pharmacien salarié, Mmes Y... et Z..., ses
assistantes, et Mme B..., gestionnaire de stock, qui n'ont aucun pouvoir
de direction ni de représentation au sein de la société
DMS ; qu'en l'état de ces énonciations qui n'établissent
pas la commission de faits constitutifs d'une infraction, par un organe
ou un représentant de la société DMS et pour le compte
de celle-ci, la cour d'appel n'a pas légalement justifié
sa décision ;
Attendu que, pour déclarer M.Alech et la société
Direct marketing solutions coupables de tromperie, l'arrêt prononce
par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès
lors, d'une part, que l'article L. 213-1 du code de la consommation, en
vue d'assurer la loyauté des transactions commerciales, s'applique
à tous les stades de commercialisation du produit, d'autre part,
que la responsabilité pénale de la personne morale a été
engagée par son représentant, M.Alech, président
de la société, qui a agi en son nom et pour son compte,
la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté
;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des
articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme,
49 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,
111-1, 111-2, 111-3 et 111-4 du code pénal, L. 212-1, L. 213-1,
L. 214-1, L. 214-2, R. 112-7, R. 112-9, R. 112-9-1, R. 112-12 et R. 112-16-1
du code de la consommation, 2, 8 et 12 du décret n°2006-352
du 20 mars 2006 relatifs aux compléments alimentaires, 1er, 5 et
7 du décret n°91-827 du 29 août 1991 relatif aux aliments
destinés à une alimentation particulière, préliminaire,
6, 8, 9, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut
de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits
de la défense, excès de pouvoir ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M.
X... et la société Direct marketing solutions coupables
de tromperie pour avoir omis de mentionner dans des envois publicitaires
la présence d'additifs allergènes concernant les produits
gelée royale 1000, Myrtille et Gaspacho et pour avoir violé
l'interdiction de faire état concernant des compléments
alimentaires, de propriétés de prévention, de traitement
et de guérison d'une maladie humaine, a condamné M. X...
à une amende de 30 000 euros et la société DMS à
une amende de 60 000 euros, a prononcé sur les intérêts
civils ;
"aux motifs que sur l'absence de mention de la présence d'additif
allergène dans les envois publicitaires concernant les produits
gelée royale 1000, myrtille et gaspacho, M. X... ne conteste pas
la matérialité du manquement puisque la mention n'était
effectivement pas portée sur les envois publicitaires mais indique
qu'elle l'était sur l'emballage du produit et donc qu'il n'y a
pas d'intention frauduleuse ; que les omissions sur les publicités
de mentions obligatoires, qui sont de nature à altérer substantiellement
le bien-fondé des choix d'achat du consommateur normalement informé
et raisonnablement attentif, constituent des pratiques commerciales trompeuses,
le fait qu'il puisse en avoir connaissance à réception de
la commande et bénéficier d'un droit de retour des marchandises
ne suffit pas à faire disparaître l'infraction, l'élément
intentionnel se déduisant d'ailleurs de l'attitude délibérée
de M. X... qui estime qu'une information a posteriori est suffisante alors
que le consommateur ne reçoit pas les informations substantielles
dont il a besoin pour décider d'acheter tel produit en connaissance
de cause ; qu'il convient de confirmer le jugement sur ce point ; que
sur les allégations et présentations fausses sur les propriétés
et résultats pouvant être attendus sur les produits, que
l'article R. 112-7 du code de la consommation, l'article 8 du décret
2006/352 du 20 mars 2006 relatifs aux compléments alimentaires
et l'article 7 du décret 91/827 du 29 août 1991 relatif aux
aliments destinés à une alimentation particulière
interdisent de faire état de propriétés de prévention,
de traitement et de guérison d'une maladie humaine ni d'invoquer
ces propriétés ; qu'en l'espèce, les mentions suivantes
: - augmente la résistance au froid et aux infections sur la gelée
royale 1000 - renforce les défenses naturelles sur ginseng, - meilleure
résistance aux formes d'angoisse sur gelée royale pure,
- régulation de la tension artérielle sur oméga 3
- insuffisance veineuse chronique sur pépins de raisin - douleurs,
gonflements, varices, hémorroïdes sur vigne rouge - effet
et étude sur les patients souffrant de DMLA sur lutéine
- diminution du risque cardiaque, de l'hypertension, du cholestérol
sur pom activ sont bien des mentions faisant état de propriétés
de prévention, de traitement et de guérison d'une maladie
humaine ou invoquant ces propriétés ; qu'en conséquence,
l'infraction est donc bien constituée et qu'il convient de confirmer
le jugement sur ce point ;
"1°) alors que les modes de présentation et les inscriptions
des produits sont constitutifs, en application des articles R. 112-7 et
suivants du code de la consommation et des décrets pris pour leur
application, de contraventions de troisième classe ; qu'il résulte
des dispositions des articles L. 214-1 et L. 214-2 du code de la consommation
que les contraventions au code de la consommation ne se cumulent avec
un délit de fraude ou de falsification prévu par les articles
L. 213-1 à L. 213-4 de ce code que si les faits contraventionnels
s'accompagnent de manoeuvres distinctes et destinées à tromper
le consommateur ; qu'en l'espèce, la prévention concerne
les infractions contraventionnelles prévues par les articles R.
112-7 et suivants du code de la consommation et les décrets pris
pour leur application, et ne vise pas de telles manoeuvres ; que la cour
d'appel qui n'a relevé dans ses motifs l'existence d'aucune manoeuvre
distincte des contraventions formelles relevées à l'encontre
des prévenus, ne pouvait pas entrer en voie de condamnation à
l'encontre de M. X... et de la société Direct marketing
solutions du chef de tromperie et prononcer à leur encontre des
amendes délictuelles ;
"2°) alors que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut
à son absence ; qu'en s'abstenant de toute énonciation quant
à des manoeuvres extérieures commises par les prévenus
et destinées à tromper les consommateurs tandis qu'au contraire
il résulte des constatations de l'arrêt que les additifs
allergènes, dont la présence était omise dans les
envois publicitaires, étaient dûment indiqués sur
les produits eux-mêmes, la cour d'appel qui a néanmoins qualifié
ces faits de pratique commerciale trompeuse n'a pas donné de base
légale à sa décision ;
"3°) alors que de même il ne résulte d'aucune des
constatations de l'arrêt que les mentions indiquées sur l'emballage
des compléments alimentaires en méconnaissance des articles
R. 112-7 et suivants du code de la consommation et des textes pris pour
leur application, ne correspondaient pas à la qualité intrinsèque
des produits contenus dans ces emballages et constituaient des allégations
fausses sur les propriétés et résultats pouvant être
attendus sur les produits ; qu'en entrant cependant en voie de condamnation
à l'encontre de M. X... et de la société Direct marketing
solutions sous la qualification de tromperie, la cour d'appel n'a pas
justifié sa décision ;
"4°) alors que la prescription est d'ordre public et que le procès
verbal base des poursuites ayant été établi le 24
mars 2009, remis le 6 avril 2009 à M. X... et transmis le même
jour au procureur de la République et les infractions retenues
par l'arrêt attaqué étant de nature contraventionnelle,
la cour d'appel aurait dû d'office constater la prescription des
contraventions relevées dans le procès-verbal base des poursuites,
antérieures au 6 avril 2008" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de
cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance
ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions
régulièrement déposées devant elle et caractérisé
en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel,
le délit de tromperie dont elle a déclaré les prévenus
coupables
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question
l'appréciation souveraine par les juges du fond, des faits et circonstances,
ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus,
ne saurait être accueilli ; Et attendu que l'arrêt est régulier
en la forme ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ; REJETTE
les pourvois ;
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