Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du vendredi 13 janvier 2012

N° de pourvoi: 10-28169
Non publié au bulletin Rejet

Sur le moyen unique, tel que reproduit en annexe :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2010) et les productions, que M. X..., né en 1975 et atteint depuis l'âge de 9 mois d'une hémophilie A sévère qui a nécessité de nombreuses transfusions sanguines, a été contaminé à partir de l'année 1985 par les virus de l'hépatite B, de l'hépatite C, de hépatite delta et par le virus d'immunodéficience humaine (VIH) l'ayant contraint à suivre une trithérapie à partir de juillet 1998 ; que son représentant légal a accepté le 1er juillet 1993 l'offre du Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles (FITH) au titre du préjudice spécifique de contamination ; qu'il a sollicité ultérieurement de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) la réparation de son préjudice économique résultant de l'arrêt prématuré de ses études et de l'impossibilité d'exercer une activité professionnelle du fait de cette contamination ; que l'ONIAM ayant rejeté cette demande, M. X... a formé un recours devant la cour d'appel, qui, par arrêt du 6 novembre 2008, l'a débouté de sa demande d'indemnisation d'un préjudice scolaire et, avant dire droit sur la demande d'indemnisation de préjudices professionnels, a ordonné une expertise médicale ayant pour objet de vérifier si la contamination de M. X... par le VIH et le traitement antirétroviral de première ligne qui lui est administré depuis juin 1998 ont eu une incidence sur sa capacité de travail au regard des autres pathologies qu'il a présentées ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de condamner l'ONIAM à lui payer la somme de 120 000 euros en réparation de la perte de chance d'exercer une activité professionnelle normale ;

Mais attendu d'abord, sur les trois premières branches réunies, que sous couvert du grief non fondé de violation de l'article 455 du code de procédure civile, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la cour d'appel, qui, par des motifs clairs, précis et suffisants, a répondu aux conclusions, et, par là-même, satisfait aux exigences de ce texte ;

Et attendu, ensuite, sur les trois dernières branches réunies, que sous le couvert du grief non fondé de violation de l'article 1382 du code civil et du principe de réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la cour d'appel, qui, faisant siennes les conclusions du rapport d'expertise médicale, et, sans être tenue de s'en expliquer mieux, a rejeté par là même les demandes distinctes d'indemnisation au titre d'un préjudice professionnel futur et au titre de l'incidence professionnelle ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa première branche, qui, tendant à dénoncer une erreur matérielle pouvant être réparée selon la procédure prévue à l'article 462 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation, ne peut qu'être rejeté pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la condamnation prononcée à l'encontre de l'ONIAM au profit de Monsieur X... à la somme de 120. 000 euros et d'AVOIR rejeté le surplus de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE le docteur BRION, au terme d'une longue expertise contradictoire, détaillée et approfondie, a conclu après de nombreux dire que :
« il apparaît que dès le début du traitement antirétroviral (à tout le moins en 2000), Monsieur Victor X... a été victime d'une diarrhée à 8 à 10 selles par jour de façon impérieuse, inopinée, qui a totalement inhibé une vie professionnelle et sociale qui aurait pu être normale. L'hémophilie, l'infection par le virus B quiescente, par le virus delta quiescente et par le virus C spontanément guérie n'ont pas d'influence sur la sémiologie et les doléances de Monsieur Victor X.... La date d'apparition de cette incapacité est la date du début du traitement antirétroviral soit juin 1998 ou au plus tard en avril 2000. Son importance est telle que les études ont dû être interrompues, la vie sociale a été rendue impossible » ;
que depuis la rédaction de ce rapport, Monsieur Victor X... a essayé d'autres traitements qui ont eu d'une part des effets secondaires et d'autre part n'ont pas, à ses dires, diminué les troubles digestifs de type diarrhéiques ce qui fait qu'actuellement on ne peut pas répondre à l'activité définitive ou temporaire mais on n'a jusqu'à présent pas observé d'interruption de cette incapacité ; que les termes de ce rapport et les indications qui y sont notées relativement à la capacité en droit obtenue en année universitaire 1998/ 1999 soit une année après le début de la trithérapie, à une activité « purement téléphonique » selon Monsieur Victor X... dans la société de son frère et ensuite en sa qualité de gérant « comme prête nom » encore selon Monsieur Victor X... dans la seconde société de son frère permettent à la Cour de reconnaître l'existence d'une perte de chance d'exercer une activité professionnelle normale qui sera indemnisée à hauteur de la somme de 120. 000 euros ;

1°) ALORS QU'en jugeant que « depuis la rédaction de ce rapport, Monsieur Victor X... a essayé d'autres traitements qui ont eu d'une part des effets secondaires et d'autre part n'ont pas, à ses dires, diminué les troubles digestifs de type diarrhéiques ce qui fait qu'actuellement on ne peut pas répondre à l'activité définitive ou temporaire mais on n'a jusqu'à présent pas observé d'interruption de cette incapacité » (arrêt p. 3, § 1er), la Cour d'appel a statué par des motifs inintelligibles et a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE Monsieur X... avait demandé l'indemnisation de deux chefs de préjudice distincts : son préjudice professionnel et l'incidence professionnelle ; qu'en lui allouant la somme globale de 120. 000 euros en réparation « d'une perte de chance d'exercer une activité professionnelle normale », par des motifs qui ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer que les deux demandes distinctes de la victime ont bien été examinées, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE, en toute hypothèse, Monsieur X... avait demandé l'indemnisation de deux chefs de préjudice bien distincts : son préjudice professionnel et l'incidence professionnelle ; qu'en allouant à la victime une indemnité de 120. 000 euros au titre d'une « perte de chance d'exercer une activité professionnelle normale » (arrêt p. 3, al. 2), la Cour d'appel n'a indemnisé que l'un des deux chefs de préjudice invoqués, à savoir l'incidence professionnelle subie par la victime ; qu'en refusant d'indemniser la victime de son préjudice professionnel, sans s'en expliquer, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE, en toute hypothèse, Monsieur X... avait demandé l'indemnisation de deux chefs de préjudice bien distincts : son préjudice professionnel et l'incidence professionnelle ; qu'en allouant à la victime une indemnité de 120. 000 euros au titre d'une « perte de chance d'exercer une activité professionnelle normale » (arrêt p. 3, al. 2), la Cour d'appel n'a indemnisé que l'un des deux chefs de préjudice invoqués, l'incidence professionnelle subie par la victime ; qu'en refusant d'indemniser la victime de son préjudice professionnel après avoir relevé que l'expert avait constaté que le traitement antirétroviral avait « totalement inhibé une vie professionnelle et sociale qui aurait pu être normale » et que l'incapacité est telle « que les études ont dû être interrompues et que la vie sociale a été rendue impossible » (arrêt p. 2, antépénultième et dernier alinéas) et après avoir constaté que « on n'a jusqu'à présent pas observé d'interruption de cette incapacité » (arrêt p. 3, al. 1er), la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le principe de la réparation intégrale et l'article 1382 du Code civil ;

5°) ALORS QU'en l'absence d'aléa quant à la survenance de l'événement favorable qui n'a pu advenir du fait de la contamination par le VIH, le préjudice subi par la victime du fait de cette contamination doit être indemnisé dans son intégralité ; qu'en jugeant, après avoir relevé que l'expert avait conclu que « l'hémophilie, l'infection par le virus B quiescente, par le virus delta quiescente et par le virus C spontanément guérie n'ont pas d'influence sur la sémiologie et les doléances de Monsieur Victor X... » (arrêt, p. 2, pénultième alinéa) et que les effets secondaires du traitement antirétroviral qui lui est administré ont « totalement inhibé une vie professionnelle et sociale qui aurait pu être normale » (arrêt p. 2, antépénultième alinéa), que Monsieur X... ne pourrait prétendre qu'à l'indemnisation « d'une perte de chance d'exercer une activité professionnelle normale » (arrêt p. 3, al. 2) tout en constatant que la contamination par le VIH était la cause exclusive de cette absence d'activité professionnelle, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 1382 du Code civil ;

6°) ALORS QUE, en toute hypothèse, l'indemnisation accordée à la victime au titre de la perte de chance ne saurait présenter un caractère forfaitaire et doit correspondre à une fraction des différents chefs de préjudice supportés par l'intéressé ; que lorsqu'ils estiment que le fait dommageable n'a fait que faire perdre une chance à la victime de subir le dommage les juges du fond doivent évaluer son préjudice global et préciser dans quelle mesure le fait dommageable lui a fait perdre une chance de ne pas le subir ; qu'en allouant à la victime la somme forfaitaire de 120. 000 euros en réparation de la chance que la victime aurait perdue d'exercer une activité professionnelle normale, sans évaluer au préalable le préjudice global qu'elle subit du fait de l'impossibilité d'exercer une telle activité et sans préciser dans quelle proportion la contamination par le VIH lui aurait fait perdre une chance de subir un tel préjudice, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du mercredi 1 juin 2011

N° de pourvoi: 10-11599
Non publié au bulletin Cassation

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., victime d'une contamination par le virus VIH dont l'origine post-transfusionnelle a été admise par le Fonds d'indemnisation de transfusés et hémophiles, aux droits duquel se trouve l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), a demandé l'indemnisation de son préjudice économique à compter de l'année1994 ; que Mme X... a contesté devant la cour d'appel de Paris l'offre d'indemnisation notifiée par l'ONIAM pour les années 1995 à 2007 et a sollicité la réévaluation de son indemnisation ;

Attendu que le pourvoi incident n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses première, deuxième et quatrième branches :

Vu l'article L. 3122-5 du code de la santé publique ;

Attendu, selon ce texte, que l'offre d'indemnisation présentée par l'ONIAM indique l'évaluation retenue par lui pour chaque chef de préjudice ainsi que le montant des indemnités qui reviennent à la victime compte tenu, d'une part, des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, d'autre part, des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice ;

Attendu que pour allouer une certaine somme à Mme X..., l'arrêt retient que seules doivent être imputées sur l'indemnité réparant l'atteinte à l'intégrité physique d'une victime les prestations versées par les tiers payeurs qui ouvrent droit au profit de ceux-ci un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ; que les allocations telles que les allocations chômage ou l'allocation de solidarité spécifique ne constituent pas des revenus de remplacement à caractère indemnitaires mais sont versées en raison de l'insuffisance des ressources de la personne à la recherche d'un emploi et ne donnent pas lieu à un recours subrogatoire du tiers payeur contre la personne tenue à réparation ; qu'il n'y a donc pas lieu non plus de déduire les rémunérations versées par le CNASEA qui sont de même nature que celles versées par les Assedic ; qu'en conséquence, les allocations sous toutes leurs formes versées par les Assedic ou le CNASEA ne feront pas l'objet de déduction des revenus annuels calculés par l'ONIAM ;

Qu'en statuant ainsi, alors que doivent être imputées par l'ONIAM sur l'indemnité réparant l'atteinte à l'intégrité physique de la victime les indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice, indépendamment de l'existence d'un recours subrogatoire des tiers payeurs, et que doivent être précisés la nature et l'objet de chacune des allocations versées à Mme X... afin d'apprécier leur caractère indemnitaire ou non, la cour d‘appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen du pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales, demandeur au pourvoi principal

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir alloué à Madame X... la somme de 78.753,88 euros en indemnisation des pertes de revenus par elle subies entre 1995 et 2007 et la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et d'avoir dit que cette somme serait versée par l'ONIAM qui, à compter de l'année 2008, devrait lui allouer une indemnité sur pertes annuelles sur la base de la différence existant éventuellement entre le revenu net imposable revalorisé tel qu'il est calcul depuis 1995 et les salaires effectivement perçus par la victime ;

Aux motifs que seules doivent être imputées sur l'indemnité réparant l'atteinte à l'intégrité physique d'une victime les prestations versées par les tiers payeurs qui ouvrent droit au profit de ceux-ci un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ; que les allocations telles que les allocations chômage ou l'allocation de solidarité spécifique ne constituent pas des revenus de remplacement à caractère indemnitaires mais sont versées en raison de l'insuffisance des ressources de la personne à la recherche d'un emploi et ne donnent pas lieu à un recours subrogatoire du tiers payeur contre la personne tenue à réparation ; qu'il n'y a donc pas lieu non plus de déduire les rémunérations versées par le CNASEA qui sont de même nature que celles versées par les ASSEDIC ; qu'en conséquence, les allocations sous toutes leurs formes versées par les ASSEDIC ou le CNASEA ne feront pas l'objet de déduction des revenus annuels calculés par l'ONIAM ;

Alors, de première part, qu'aux termes de l'article L.3122-5 du Code de la santé publique, l'évaluation retenue par l'Office pour chaque chef de préjudice, doit tenir compte non seulement des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ouvrant droit au profit des tiers payeurs un recours subrogatoire, mais également des indemnités de toute nature ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice, indépendamment de l'existence d'un tel recours ; en affirmant que seules seraient susceptibles de déduction les indemnités ouvrant droit à un recours subrogatoire, la Cour d'appel a méconnu cette disposition ;

Alors, et en toute hypothèse, de deuxième part, qu'en refusant de déduire le montant des indemnités d'allocation chômage versées par les ASSEDIC ou par le CNASEA à Madame X... par cela seul qu'elles ne donnaient pas lieu à un recours subrogatoire du tiers payeur contre la personne tenue à réparation, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L.3122-5 du Code de la santé publique ;

Alors, de troisième part, que les textes régissant les allocations chômage autres que l'allocation de solidarité spécifique n'en subordonnent pas le versement à l'insuffisance des ressources de la personne à la recherche d'un emploi ; qu'en affirmant le contraire, la Cour d'appel a méconnu les dispositions des articles L.3122-5 du Code de la santé publique, L.5422-1 et suivants du Code du travail, ensemble l'article L.5423-1 du Code du travail ;

Et alors qu'en statuant de la sorte, sans préciser la nature et l'objet des allocations versées à Madame X..., la Cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur sa décision au regard des distinctions posées par ces dispositions, a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes ;

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour Mme X..., demanderesse au pourvoi incident

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR alloué à mademoiselle Corinne X... la somme de 78.753,88 euros en indemnisation des pertes de revenus par elle subies entre 1995 et 2007, et d'AVOIR dit que cette somme sera versée par l'Oniam qui, à compter de l'année 2008, devra allouer des indemnités sur pertes annuelles sur la base de la différence, si elle existe, calculée entre le revenu net imposable revalorisé tel qu'il est calculé depuis 1995 et les salaires effectivement perçus par mademoiselle Corinne X... ;

AUX MOTIFS QUE le 2 janvier 1985, mademoiselle Corinne X..., alors âgée de 17 ans, a été victime d'un grave accident de la circulation et son état de santé a justifié une transfusion de produits sanguins ; que sa séropositivité a été révélée en février et mars 1988 (arrêt, p. 2) ;

ET AUX MOTIFS QUE mademoiselle X... fait valoir que c'est la connaissance de sa séropositivité en 1988 alors qu'elle avait dix neuf ans qui l'a empêchée de faire des études et l'a contrainte à des choix qu'elle n'aurait pas faits si elle avait eu un état de santé inaltéré ; que cependant, il résulte des pièces produites par mademoiselle Corinne X... elle-même (en particulier l'attestation de stage Greta) qu'elle a arrêté sa formation Greta le 2 janvier 1985 soit avant même l'accident dont elle a été victime le 17 janvier suivant ; qu'il s'agissait d'une formation professionnelle financée par le Cnasea et non d'une formation initiale ; qu'eu égard à l'âge auquel la victime a suivi cette formation, il s'en déduit qu'elle avait quitté le cursus scolaire à 16 ans ; qu'entre 1985 et 1988, soit avant la connaissance de sa contamination à VIH, mademoiselle Corinne X... n'a suivi aucune formation et n'a pas travaillé ; que, de 1988 à 1995, elle a exercé des emplois de secrétaire au rythme de périodes entrecoupées de temps sans emploi et de stages de formation professionnelle toujours financés par le Cnasea au centre Formamod de Paris pour l'activité de mécanicienne en 1992 et de patronnier gradeur sur système informatique en 1993, puis à l'Afpa de Marseille en 1994 pour être créateur d'entreprise ; que compte tenu de ces différents éléments, si mademoiselle Corinne X... a suivi des formations professionnelles, pour autant elle avait fait le choix que, par leur variété d'objectifs, elles ne fussent pas diplomantes pour acquérir une valeur universitaire ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que la contamination l'a empêchée de suivre un cursus d'études supérieures ; que, lors de la dernière formation de créateur d'entreprise, la rémunération mensuelle payée par le Cnasea à mademoiselle Corinne X... était de 4.070,40 francs ; qu'entre le 1er septembre 1994 et le 31 décembre 1994, la rémunération était, en qualité de vendeuse, de 4.792,63 francs ; qu'elle a poursuivi cette même activité jusqu'au 30 juin 1995 avec le même niveau de rémunération ; que ce niveau de salaire correspond à celui que le Cnasea versait à mademoiselle Corinne X... pendant les différentes périodes de formation de mademoiselle Corinne X... qui est ainsi mal fondée à soutenir qu'elle aurait pu choisir une activité plus rémunératrice si elle n'avait pas été contaminée alors même qu'elle avait fait le choix de formations non diplomantes dès son premier stage ayant commencé en octobre 1984 ; qu'en conséquence, la méthode retenue par l'Oniam sera confirmée, rien ne permettant de considérer que mademoiselle Corinne X... aurait pu percevoir un salaire équivalent au salaire moyen voire médian d'une française de son âge ; que sur la base des revenus mensuels nets imposables calculés avec revalorisation annuelle par l'Oniam et des salaires perçus non contestés par les deux parties à déduire, la somme totale des pertes de revenus sur la période de 1995 à 2007 est donc de 78.753,88 € (arrêt, pp. 3-4) ;

1°) ALORS QUE le propre de la responsabilité est de rétablir, aussi exactement que possible, l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu ; que l'arrêt retient que mademoiselle X... a fait le choix, entre 1988 et 1995, de suivre des formations non diplomantes pour acquérir une valeur universitaire, et qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir que la contamination l'a empêchée de suivre un cursus d'études supérieures ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la connaissance acquise par mademoiselle X... de sa séropositivité dès 1988, à l'âge de 19 ans, ne lui avait pas fait perdre une chance de suivre un cursus d'études supérieures que ses faibles perspectives de survie, en l'état des connaissances scientifiques alors acquises, semblaient exclure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, ensemble l'article L. 3122-1 du code de la santé publique ;

2°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ;
qu'après avoir constaté que mademoiselle X... avait été victime d'un accident de la circulation le 2 janvier 1985, la cour d'appel a énoncé qu'elle avait « arrêté sa formation de photographie Greta le 2 janvier 1985 soit avant même l'accident dont elle a été victime le 17 janvier suivant », pour en déduire qu'elle ne pouvait prétendre avoir pu choisir une activité plus rémunératrice, notamment celle de photographe, et percevoir un salaire équivalent au salaire moyen voire médian des françaises si elle n'avait pas été contaminée ; en statuant ainsi, la cour d'appel s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE l'arrêt retient que mademoiselle X... a fait le choix, dès son premier stage ayant commencé en octobre 1984, de suivre des formations non diplomantes pour acquérir une valeur universitaire, et qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle aurait pu percevoir un salaire équivalent au salaire moyen voire médian des françaises si elle n'avait pas été contaminée ; que le bénéfice d'un salaire moyen ou médian n'étant pas subordonné, à titre impératif, à l'obtention d'un diplôme universitaire, la cour d'appel qui s'est fondée sur un motif inopérant, a violé l'article 1382 du code civil, ensemble l'article L. 3122-1 du code de la santé publique ;

4°) ALORS QUE l'arrêt retient que mademoiselle X... a fait le choix de suivre des formations non diplomantes pour acquérir une valeur universitaire, et qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle aurait pu percevoir un salaire équivalent au salaire moyen voire médian des françaises si elle n'avait pas été contaminée ; qu'en décidant ainsi, sans répondre aux conclusions récapitulatives de l'intéressée, en date du 5 novembre 2009 (p. 6), qui soutenait, bulletins de salaire à l'appui, que son absence de diplôme universitaire n'avait pas fait obstacle à ce qu'elle occupe en 2006 un poste de chargée de production, pour un salaire supérieur au salaire moyen des françaises, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.