Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du mercredi 25 février 1998

N° de pourvoi: 95-20419
Publié au bulletin Rejet.
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 23 mai 1995), que X..., majeur handicapé placé sous l'administration légale de son père, X..., et demi-pensionnaire à l'Institut médico-pédagogique géré par l'association Aide aux enfants infirmes (AEIM), était reconduit à proximité du domicile de ses parents par le car de ramassage scolaire de cet établissement ; qu'après être descendu du véhicule X... est entré par effraction dans le domicile de Mme Y... et y a allumé un incendie, qui a détruit l'immeuble ; que Mme Y..., indemnisée partiellement par son assureur, a, avec la compagnie PFA, assigné en réparation l'AEIM et son assureur, la compagnie Abeille Paix, ainsi que M. X... et son assureur, le GAN, M. X... étant pris tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administrateur légal de X... ;
Sur le premier moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ces demandes, en tant que dirigées contre l'AEIM et la Compagnie Abeille Paix, alors, selon le moyen, que les établissements d'enseignement spécialisés pour les handicapés mentaux ont sur ceux-ci un pouvoir général de direction et de contrôle et sont en conséquence responsables des actes de leurs élèves ; que X..., atteint de débilité, était scolarisé en tant que demi-pensionnaire dans un établissement de l'AEIM au moment où il a incendié la maison de Mme Y... ; qu'en décidant que cette association ne pouvait pas être responsable des actes de son élève la cour d'appel a violé l'article 1384, paragraphe 1, du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient qu'après être descendu du car, X... ne se trouvait plus sous l'autorité de l'association, laquelle n'avait plus, à partir de ce moment, la surveillance et l'organisation des conditions de vie de l'handicapé ;

Qu'en l'état de ces constatations et énonciations la cour d'appel a décidé, à bon droit, que la responsabilité de l'AEIM n'était pas engagée sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1, du Code civil ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ces demandes, en tant que dirigées contre M. X..., du fait de sa qualité d'administrateur légal de son fils, et contre le GAN, alors, selon le moyen, que l'administrateur légal d'un incapable majeur est responsable de la personne de l'incapable et possède un pouvoir de direction sur celui-ci ; qu'il doit par conséquent répondre des actes du majeur incapable ; que M. X... était l'administrateur légal de son fils X... lorsque celui-ci a mis le feu à la maison de Mme Y... ; qu'en jugeant que la responsabilité de M. X... ne pouvait pas être engagée du fait de son fils la cour d'appel a violé les articles 497 et 1384 du Code civil ;

Mais attendu que, s'il résulte de l'article 490 du Code civil que la mesure édictée en faveur d'un majeur, dont les facultés mentales sont altérées, concerne non seulement la gestion de ses biens mais aussi la protection de sa personne, il ne s'ensuit pas que son tuteur ou l'administrateur légal sous contrôle judiciaire du juge des tutelles est responsable des agissements de la personne protégée sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du même Code ;

Et attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt qui a écarté l'existence d'une faute de M. X..., retient, à bon droit, que la responsabilité de ce dernier ne saurait être engagée du seul fait de sa qualité d'administrateur légal ;

Que, par ce seul motif, l'arrêt est légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

Publication : Bulletin 1998 II N° 62 p. 38
D. 1998, p. 315, concl. R. Kessous ;
RTD civ. 1998, p. 345, obs. J. Hauser ;
JCP G 1998, II, 10149, note G. Viney.