Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 23 septembre 2009
N° de pourvoi: 07-21634 07-21782
Publié au bulletin
Cassation partielle
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi incident
des époux X..., ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel ne s'est pas contredite en retenant, d'une part,
que M. Y..., exerçant une activité d'entreprise générale
sous l'enseigne " Renoma habitat " (M. Y...), avait négligé
d'établir les études d'exécution et avait fait preuve de
carence dans l'organisation et la direction du chantier ainsi que dans la coordination
des travaux, d'autre part, que cet entrepreneur général
n'avait pas lui-même exécuté les travaux qu'il avait intégralement
sous-traités, pour les lots électricité, chauffage, plomberie,
à M. Z..., exerçant sous l'enseigne " EGB Vasi le Pro du
bâtiment " (M. Z...), et, pour tous les autres lots, à la
société Vito Bât ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches,
réunies, du pourvoi incident des époux X..., ci-après annexé
:
Attendu, d'une part, que la cour d'appel, qui n'a pas énoncé que
le contrat " Responsabilité civile des entrepreneurs et artisans
de la construction " ne couvrait pas la maison des époux X..., maîtres
de l'ouvrage, n'a pas dénaturé ce contrat en retenant qu'il ne
couvrait pas les dommages causés à l'ouvrage, mais seulement ceux
causés aux tiers par cet ouvrage, soit la construction de l'assuré,
ou l'activité de celui-ci ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant constaté que la demande des époux
X... se rapportait aux travaux nécessaires pour reprendre les désordres
affectant l'ouvrage ainsi qu'aux préjudices immatériels, et relevé
qu'étaient exclus de la garantie du contrat " responsabilité
civile des entrepreneurs et artisans de la construction " les dommages
matériels et immatériels atteignant l'ouvrage en cours d'exécution
ou non réceptionné et résultant de l'action de l'eau quelle
qu'en soit la cause ou l'origine, la cour d'appel a, sans dénaturation,
retenu que la garantie du contrat ne s'appliquait pas aux conséquences
des pénétrations d'eau de pluie sur l'ouvrage assuré survenues
en cours de chantier à raison de l'absence de bâches de protection
;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident
des époux X..., sur le premier moyen du pourvoi principal n° K 07
21. 634, et sur le moyen unique du pourvoi incident de M. Y..., réunis,
ci-après annexé :
Attendu, d'une part, que les troisième et quatrième branches du
premier moyen du pourvoi incident des époux X... étant rejetées,
d'autre part, que la société Souscripteurs du Lloyd's de Londres
(la société Lloyd's), prise en sa qualité d'assureur de
la société I2 E rénovation, la société I2
E rénovation et M. Y... n'ayant pas critiqué les autres motifs
retenus par la cour d'appel pour décider que la garantie du contrat d'assurances
" Responsabilité civile des entrepreneurs et artisans de la construction
" ne s'appliquait pas, le motif de l'arrêt, critiqué par le
moyen, relatif à la faute intentionnelle de M. Y... susceptible d'exclure
la garantie de ce contrat, est erroné, mais surabondant ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal n° K 07 21. 634, ci-après
annexé :
Attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que la
société I2 E rénovation avait été chargée,
par contrat du 16 mars 2001, de la réalisation des études d'extension
de la maison des époux X..., maîtres de l'ouvrage, comportant,
d'une part, la modification du devis de la structure, avec proposition de solutions
techniques et économiques adaptées, fourniture des plans et croquis
d'exécution et de la méthodologie de mise en oeuvre, d'autre part,
le suivi de l'exécution du gros oeuvre avec une visite de contrôle
par semaine pendant la durée de cette exécution, et fourniture
d'un procès verbal à chaque visite, et retenu, sans être
liée par l'avis de l'expert, que, même investie d'une mission limitée,
ce maître d'oeuvre, professionnel spécialisé, qui avait
accepté sa mission huit jours seulement avant le démarrage du
chantier, avait manqué à son obligation de diligence en s'abstenant
de tout relevé sur l'existant, de tout descriptif initial de la structure
à réaliser et de toute reconnaissance préalable des travaux
de gros oeuvre nécessaires, et à son obligation de conseil en
ne mettant pas en garde les maîtres de l'ouvrage sur le climat de précipitation
et d'inorganisation dans lequel les travaux étaient engagés, la
cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef
;
Sur le second moyen du pourvoi incident des époux X..., ci-après
annexé :
Attendu que les époux X... n'ayant pas critiqué devant la cour
d'appel la décision des premiers juges ayant déduit l'indemnité
versée par l'assureur dommages-ouvrage du montant hors taxes des travaux
nécessaires à la reprise des désordres, le moyen est nouveau,
mélangé de fait et de droit, et partant irrecevable ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi n° W 07 21. 782 :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 1er octobre 2007),
que, courant mars-avril 2001, les époux X..., maîtres de l'ouvrage,
assurés en police dommages-ouvrage par la société Axa France
IARD, ont confié à M. Y..., assuré par la société
Assurances générales de France Iart, les travaux de rénovation
et d'agrandissement de leur maison ; que M. Y... a sous-traité les lots
" électricité ", " plomberie " et " chauffage
" à M. Z..., et, les autres lots à la société
Vito Bât ; que la société I2 E rénovation, assurée
par la société Souscripteurs du Lloyd's de Londres, a été
chargée par les maîtres de l'ouvrage d'une mission limitée
de maîtrise d'oeuvre ; qu'invoquant l'abandon du chantier par M. Y...
avant réception, l'inachèvement des travaux et des désordres,
les époux X... ont, après expertise, assigné en réparation
de leurs préjudices les locateurs d'ouvrage et les assureurs ; que des
recours en garantie ont été formés ;
Attendu que pour condamner M. Z... in solidum avec d'autres locateurs d'ouvrage
à payer des sommes aux époux X... et à l'assureur dommages-ouvrage,
et à garantir à hauteur de 70 % l'entrepreneur principal, l'arrêt
retient que les fautes d'exécution commises par ce sous-traitant dans
l'exécution de ses lots ont directement contribué à l'entier
préjudice des époux X... ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater que les travaux relevant des lots
dont M. Z... était titulaire avaient indissociablement concouru, avec
ceux ressortissant des autres lots à la création de l'entier dommage,
la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision
de ce chef ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 9 septembre 2009
N° de pourvoi: 08-17354
Publié au bulletin
Cassation partielle
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 27 mars
2008), que la société Magetrans Prevote (Magetrans), qui exerce
une activité de transport routier, a entrepris de réaliser une
aire de lavage ; que, le 27 juillet 1998, la société
Magetrans a commandé à la société Christ un
portique de lavage pour poids lourds, la réalisation d'un puits permettant
l'alimentation en eau de source de l'installation, les travaux de génie
civil nécessaires et des automates de gestion du portique et d'alimentation
d'eau ;
que la société Christ a sous-traité les travaux
de forage à la société Boniface et la fourniture et la
pose de la pompe à la société Sogeflu ; que la
société Magetrans s'est prévalue d'un fonctionnement défectueux
de l'installation apparu après sa mise en service en décembre
1998 ; qu'après expertise, la société Magetrans a assigné
la société Christ en indemnisation de ses préjudices et
que cette dernière a appelé en garantie la société
Boniface et la société Sogeflu ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal, en son grief relatif à la
condamnation de la société Christ à payer à la société
Magetrans la somme de 51 344, 68 euros HT et à la condamnation de la
société Boniface à garantir la société Christ
à hauteur de 10 % de cette somme :
Attendu que la société Christ fait grief à l'arrêt
de la condamner à payer à la société Magetrans la
somme de 51 344, 68 euros HT et de condamner la société Boniface
à la garantir à hauteur de 10 % de cette somme alors, selon le
moyen :
1°/ que les demandes de la société Magetrans concernaient
les désordres affectant le forage et son équipement réalisés
par les sociétés Boniface et Sogeflu et les préjudices
en résultant ; qu'en condamnant la société Christ en principal
à indemniser la société Magetrans au motif de fautes commises
dans la réalisation de ses prestations, qui avaient toutes été
réparées jusque dans le courant de l'expertise en 2003, sans caractériser
aucune faute de la société Christ, qui s'était bornée
à construire un portique ne présentant aucune incompatibilité
avec l'eau de la nappe, dans la réalisation du forage et de son équipement,
site des désordres, la cour d'appel a privé sa décision
de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
2°/ que les demandes de la société Magetrans concernaient
les désordres affectant le forage et son équipement réalisés
par les sociétés Boniface et Sogeflu et les préjudices
en résultant ; qu'en condamnant la société Christ à
indemniser la société Magetrans des dommages résultant
des désordres affectant le forage et son équipement au motif qu'elle
aurait dû s'assurer de la qualité de l'eau qui s'est révélée
incompatible avec les installations réalisées par les sociétés
Boniface et Sogeflu, sans constater que la société Christ assurait
une mission complète de maîtrise d'oeuvre sur le chantier, ce qu'elle
contestait expressément dans ses conclusions, la cour d'appel a privé
sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code
civil ;
3°/ que le débiteur n'est tenu que des dommages intérêts
qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du
contrat ; qu'en condamnant la société Christ à indemniser
la société Magetrans du chef de la surconsommation d'eau sans
s'expliquer sur le moyen tiré de ce qu'il avait toujours été
prévu au contrat que le portique de lavage fonctionnerait selon deux
alimentations, sur l'eau de ville d'une part, sur l'eau pompée dans la
nappe d'autre part, et que la consommation d'eau dépassait très
largement les prévisions contractuelles, la cour d'appel a privé
sa décision de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure
civile ;??
4°/ que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut
à l'absence de motifs ; qu'en retenant dans ses motifs qu'il convenait
de condamner in solidum les sociétés Christ et Boniface et en
condamnant dans son dispositif la société Christ à indemniser
la société Magestrans pour le tout, et la société
Boniface seulement à garantir la première à hauteur de
10 %, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure
civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'en sa qualité de seul co contractant de la société Magetrans, la société Christ était tenue d'une obligation de résultat et constaté, répondant aux conclusions, que la société Magetrans, qui avait commandé un portique de lavage fonctionnant grâce à un puits permettant l'alimentation en eau, devait obtenir la réparation exacte de son préjudice, soit les travaux permettant au système prévu de fonctionner et le paiement des dépenses qu'elle avait dû supporter du fait de cette installation inappropriée, soit la surconsommation d'eau et les factures réglées en cours d'expertise, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de caractériser l'existence d'une faute de la société Christ et qui a souverainement apprécié le préjudice subi par la société Magetrans, a pu en déduire, sans se contredire, que la responsabilité de la société Christ était engagée vis à vis du maître de l'ouvrage et a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen du pourvoi principal :
Attendu que la société Christ fait grief à l'arrêt
de condamner la société Boniface à la garantir à
hauteur de 10 %, soit 5.134, 46 euros HT ou 6.140, 82 euros TTC alors, selon
le moyen :
1°/ que les demandes de la société Magetrans concernaient
les désordres affectant le forage et son équipement réalisés
par la société Boniface et les préjudices en résultant
; qu'en condamnant définitivement la société Christ à
indemniser la société Magetrans à hauteur de 80 % des préjudices
reconnus, au motif de fautes commises dans la réalisation de ses prestations,
qui avaient été réparées jusque dans le courant
de l'expertise, sans caractériser aucune faute de la société
Christ, qui s'était bornée à construire un portique ne
présentant aucune incompatibilité avec l'eau de la nappe, dans
la réalisation du forage, site des désordres, la cour d'appel
a privé sa décision de base légale au regard des articles
1147 du code civil et 4 du code de procédure civile ;
2°/ que le sous traitant est tenu d'une obligation de résultat envers
son donneur d'ordre et d'une obligation de conseil lorsque ce dernier n'est
pas également compétent ; qu'en retenant, entre les divers entrepreneurs,
la responsabilité à 80 % de la société Christ, sans
constater qu'une mission complète de maîtrise d'oeuvre lui aurait
été confiée ou qu'elle aurait été compétente
en matière de forage ou d'hydrologie, et tout en constatant que la société
Boniface était spécialisée dans le domaine du forage et
avait réalisé en l'espèce pour la société
Magetrans le forage siège des désordres et préjudices invoqués,
et que la société Sogeflu en avait réalisé l'équipement
défectueux, ce dont il s'évinçait que dans leur rapports
avec la société Christ, leurs fautes avaient été
la source majeure des désordres, la cour d'appel a privé sa décision
de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société Christ avait commis des fautes dans la réalisation de sa prestation, que l'automate de programmation avait connu des dysfonctionnements dès sa mise en oeuvre, que l'installation n'avait pas été opérationnelle durant dix huit mois sur l'année 2000 et les six premiers mois de 2001, qu'elle devait s'assurer de la qualité de l'eau par une étude préalable et de sa compatibilité avec les installations qu'elle mettait en oeuvre et devait livrer une installation en état de fonctionner par alimentation dans la nappe souterraine, que l'installation était entachée d'un défaut de conception et que la société Boniface, qui était spécialisée dans le domaine du forage et connaissait le site et la destination du forage, aurait dû conseiller l'étude et devait s'assurer de la qualité de l'eau par des analyses et que le débit de forage relevait de sa responsabilité dès lors que le forage était colmaté en raison de la nature de l'eau, la cour d'appel a pu retenir qu'eu égard aux fautes respectives, la société Boniface devait être condamnée à garantir la société Christ de la condamnation suivant une proportion qu'elle a souverainement appréciée et a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Mais, sur le grief du premier moyen du pourvoi principal et sur le moyen unique
du pourvoi provoqué relatif à l'application de la TVA :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, dans le dispositif, l'arrêt assortit les condamnations de
la TVA ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions par lesquelles la
société Christ faisait valoir que la société Magetrans
était assujettie à la TVA qu'elle récupérait, n'a
pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et attendu qu'en raison de l'indivisibilité existant entre la condamnation
de la société Christ à payer à la société
Magetrans la somme de 61 408, 24 euros TTC et la condamnation de la société
Boniface à garantir la société Christ à hauteur
de 10 % de cette somme, soit la somme de 6 140, 24 euros TTC, la cassation sera
étendue à ces deux chefs du dispositif de l'arrêt ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE,
mais seulement en ce qu'il a assorti de la TVA les condamnations prononcées
et en ce qu'il condamne la société Boniface à garantir
la société Christ à hauteur de 10 % de la somme de 6 140,24
euros TTC, l'arrêt rendu le 27 mars 2008, entre les parties, par la cour
d'appel d'Amiens ;
Publication : Bulletin 2009, III, n° 183