Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 21 janvier 2004

N° de pourvoi: 01-15563
Non publié au bulletin Cassation partielle

Sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 10 juillet 2001), que la société Stelmi et la société Domibail ont entrepris la réalisation d'une usine, sous la maîtrise d'oeuvre des architectes Bernard et Delalande, assurés par la Mutuelle des architectes français (MAF), et de la société Oth Nord Ouest, assurée par la compagnie Axa courtage ; que les maîtres de l'ouvrage ont souscrit une police d'assurance dommages-ouvrage auprès de la compagnie Axa assurances ; que la société SLMS Briens Lamoureux a été chargée des charpentes métalliques et la société Guérin Peintures du lot "peintures" ; qu'ayant constaté des désordres les sociétés Stelmi et Domibail ont assigné les constructeurs et assureurs en réparation de leur préjudice ;

Attendu que la société OTH et la compagnie Axa courtage font grief à l'arrêt de les condamner à garantir la compagnie Axa assurances du paiement des sommes mises à la charge de celle-ci au profit de la société Stelmi au titre des désordres de la "salle blanche", alors, selon le moyen :

1 / que les désordres, signalés à la réception, ne sont susceptibles de relever de la garantie décennale des constructeurs que lorsqu'ils ne se sont révélés que par la suite dans toute leur ampleur et leurs conséquences ; qu'en considérant que les désordres résultant d'infiltrations n'étaient pas connus dans toute leur ampleur et leurs conséquences alors même que le procès-verbal de réception avait mentionné des réserves quant aux joints entre carreaux et quant à l'insuffisance de pente créant un risque de stagnation dès lors qu'il s'agissait là de défauts d'aspect à reprendre, de finitions et de corrections à apporter, sans s'expliquer sur la circonstance, que déduisait la compagnie Axa courtage des conclusions de l'expert que les défauts réservés entraîneraient inéluctablement des infiltrations, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1792 du Code civil ;

2 / que les maîtres d'oeuvre ne sont tenus que dans les limites de leur mission ; qu'en décidant que la société Oth Nord Ouest devait être tenue à garantie au titre des désordres des revêtements en résine en ce qu'il ressortait du contrat de la compagnie Axa que la société Oth Nord Ouest devait procéder, pour l'ensemble des lots techniques, à l'avant projet détaillé, au dossier de consultation des entreprises, à l'analyse des offres, à la négociation avec les entreprises, au suivi des travaux et à la réception et qu'au nombre des "lots techniques" figurait l'installation de la "salle propre", sans s'expliquer sur les conclusions de la société Oth Nord Ouest qui exposait que sa mission se limitait aux "fluides" alors que les architectes, la SCP Bernard et Delalande, étaient chargés de l'ensemble de la structure et des lots du second oeuvre, et qu'en phase "travaux" les architectes dirigeaient seuls le chantier, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1792 du Code civil ;

3 / que les maîtres d'oeuvre ne sont tenus que dans les limites de leur mission ; qu'en décidant que la société Oth Nord Ouest devait aussi être tenue à garantie au titre des désordres de la zone de lavage, en ce que la "maîtrise d'oeuvre" avait commis un "défaut de conception" en ne prévoyant pas une étanchéité sous dallage, sans mieux s'expliquer sur les conclusions de la société Oth Nord Ouest qui faisait valoir qu'elle n'avait pas pour mission l'étude ou le contrôle de l'étanchéité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1792 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté que les infiltrations affectant les sols rendaient l'ouvrage impropre à sa destination, alors que le procès-verbal de réception n'avait relevé que des anomalies consistant en des défauts d'aspect, finitions et corrections à apporter, la cour d'appel a pu retenir que les désordres dont la réparation était demandée provenaient d'un vice qui n'était pas apparent au moment de la réception de l'ouvrage ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé qu'aux termes du contrat souscrit par la société Oth Nord ouest, l'installation de la "salle propre" figurait parmi les lots techniques relevant de la maîtrise d'oeuvre de cette société, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a pu en déduire que la constatation des désordres engageait la responsabilité de la société Oth Nord ouest ;

D'où il suit que la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que pour écarter les demandes de la société Stelmi à l'encontre de la compagnie Axa assurances en réparation des désordres affectant le lot "charpente métallique", l'arrêt retient que le tribunal avait fondé l'obligation de l'assureur sur les dispositions de l'article L. 242-1 du Code des assurances, mais que celui-ci n'est pas applicable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, la compagnie Axa assurances avait expressément indiqué qu'en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage, elle n'entendait pas critiquer les motifs par lesquels le tribunal avait retenu qu'elle devait sa garantie à la société Stelmi, et avait sollicité la confirmation du jugement de ce chef, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 1315 du Code civil ;

Attendu que pour condamner la société Stelmi à payer à la société Guérin peintures le montant de sa retenue de garantie "sans autre précision", l'arrêt retient que cette demande doit être accueillie à défaut de quelconque contestation ;

Qu'en statuant ainsi, alors que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver, et que la preuve ne peut se déduire du silence opposé par la partie adverse, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mardi 9 décembre 2003

N° de pourvoi: 02-14739
Non publié au bulletin Cassation partielle

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 1147 et 1792-6 du Code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 26 février 2002), que la société Jade, anciennement dénommée Parfumerie Chappe, maître de l'ouvrage, a chargé la société Bet Phidias de travaux d'agencement de ses locaux à usage commercial ; qu'après réception avec réserves, le maître de l'ouvrage a assigné la société Bet Phidias en indemnisation de désordres et non-conformités, tandis que, par voie reconventionnelle, celle-ci a sollicité le paiement d'un solde de travaux ;

Attendu que pour limiter le montant de la condamnation prononcée au bénéfice de la société Jade, l'arrêt retient que la climatisation par air et non par eau était effectivement apparente ;

Qu'en statuant par cette seule affirmation, sans constater que la substitution d'un système de climatisation alimenté par air à celui, contractuellement prévu, alimenté par eau était apparente pour un maître de l'ouvrage profane lors de la réception, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que pour limiter le montant de la condamnation prononcée au bénéfice de la société Jade, l'arrêt retient que l'action de cette société est irrecevable pour l'ensemble des non-conformités non dénoncées lors de la réception ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Jade faisant valoir que la société BET Phidias avait manqué à son obligation de conseil concernant la conception des travaux d'agencement (porte coupe-feu et conforts des "cavaliers") et d'électricité (compteur électrique, prises et spots), la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE