Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 22 février 2007

N° de pourvoi: 06-10131
Publié au bulletin Cassation

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu qu'une victime ne peut obtenir la réparation de la perte de ses rémunérations que si celles-ci sont licites ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X... interdit de jeux à sa demande, depuis 1991, a continué à fréquenter le casino de Trouville-sur-Mer, malgré cette interdiction dont il n'a jamais demandé la levée ; que, le 12 avril 2005, il a gagné une somme de 4 000 euros en jouant aux machines à sous ; qu'alors qu'il tentait d'encaisser cette somme par l'intermédiaire d'une tierce personne, le casino, s'apercevant de cette manoeuvre, a refusé de lui payer ses gains ; qu'il a assigné la société du Casino de Trouville-sur-mer (la société) en paiement d'une certaine somme ; que la juridiction de proximité a, par jugement du 1er juillet 2005, ordonné la réouverture des débats pour que les parties produisent toutes pièces pouvant attester de la présence de M. X... au casino de Trouville-sur-Mer dans le courant des années 2002 à 2005 ; que M. X... a versé aux débats des notes d'hôtels qui établissaient sa présence à Trouville-sur-Mer en 2002, 2004 et 2005 ;

Attendu que, pour condamner la société à payer à M. X... une somme à titre de dommages-intérêts, le jugement retient qu'il est établi par diverses pièces au dossier que M. X... avait séjourné plusieurs fois à Trouville-sur-Mer durant ces dernières années ; que sa présence dans la salle des machines à sous et le fait qu'il ait pu jouer sont révélateurs d'une faute de la société, celle-ci ayant enfreint l'obligation d'interdiction de jeux de certaines personnes qui pesait sur lui ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que le contrat de jeu liant M. X... à la société étant nul, celui-ci devait être débouté de sa demande de paiement de son gain, la juridiction de proximité, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : CASSE ET ANNULE

Publication : Bulletin 2007 II N° 49 p. 42

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 25 février 2010

N° de pourvoi: 08-20587
Publié au bulletin Rejet

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 4 septembre 2008), que Krzystof X... est décédé lors d'un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré par la société Macifilia (l'assureur) ; que Mmes Maria, Karolina et Anna Y..., ses veuve et filles (les consorts Y...) ont fait assigner l'assureur en réparation de leurs préjudices économiques ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer diverses sommes aux consorts Y... en réparation de leurs préjudices économiques, alors, selon le moyen, qu'une victime ne peut obtenir la réparation de la perte de ses rémunérations que si celles-ci sont licites ; que les rémunérations provenant d'un travail dissimulé n'ouvrent pas droit à indemnisation ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que "M. Krzystof X... a été recruté par la société MGR aménagement dont la gérante a été déclarée coupable du délit de travail dissimulé par dissimulation d'emplois salariés par jugement du tribunal correctionnel de Mâcon du 10 octobre 2007" et que la chambre sociale de la cour d'appel avait alloué à ses ayants droit l'indemnité prévue à l'article L. 324-11-1 du code du travail, qui est due au salarié auquel un employeur a eu recours dans le cadre d'un travail dissimulé ; qu'il résultait ainsi des constatations de l'arrêt que la perte de rémunérations dont les consorts Y... demandaient la réparation provenait d'un travail dissimulé, et donc illicite ; qu'en condamnant néanmoins l'assureur à indemniser ce préjudice illicite, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient d'abord que Krzystof X... travaillait pour une société dont la gérante a été condamnée pénalement du chef de délit de travail dissimulé par dissimulation d"emplois salariés, puis que par un arrêt du 12 février 2008 la chambre sociale de la cour d'appel a reconnu qu'il était titulaire d'un contrat de travail, avant d'énoncer qu'en l'absence d'écrit la durée de ce contrat devait être considérée comme indéterminée et ensuite d'évaluer le salaire annuel de Krzystof X... au regard des sommes fixées par cet arrêt du 12 février 2008 ;

Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement jugé que le préjudice économique subi par les consorts Y... du fait du décès de leur mari et père pouvait être évalué en tenant compte des rémunérations perçues par lui ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et, sur le cinquième moyen :

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'intérêts au double du taux légal du 2 octobre 2005 jusqu'au 21 avril 2008, alors, selon le moyen, que le délai dont dispose l'assureur pour formuler une offre d'indemnisation motivée à la victime qui n'a pas subi d'atteinte à sa personne ne court qu'à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée ; qu'en condamnant l'assureur à verser aux consorts Y... qui demandaient la réparation de leur préjudice économique par ricochet consécutif au décès de leur époux et père et donc d'un préjudice qui leur était personnel à compter du 2 octobre 2005, soit huit mois après la date du décès dû à l'accident, la cour d'appel a violé l'article L. 211-9 du code des assurances ;

Mais attendu qu'il résulte des articles L. 211-9, alinéa 2, et L. 211-13 du code des assurances, dans leur rédaction issue de la loi n°2003-706 du 1er août 2003, que l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur doit en cas de décès de la victime directe présenter à ses héritiers, et, s'il y a lieu, à son conjoint, dans un délai maximum de huit mois à compter de l'accident, une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice ; qu'à défaut le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge produit de plein droit intérêts au double du taux légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif ;

Et attendu que la cour d'appel, après avoir rappelé ces dispositions et relevé que l'assureur n'avait, avant le 12 avril 2008, présenté aucune offre d'indemnisation du préjudice économique subi par les consorts Y... du fait du décès de la victime, en a justement déduit que les intérêts seraient calculés au double du taux légal à compter du 2 octobre 2005, date d'expiration du délai de huit mois prévu par l'article L. 211-9 du code des assurances ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y pas lieu de statuer sur les deuxième, troisième et quatrième moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Publication : Bulletin 2010, II, n° 49


Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 24 janvier 2002

N° de pourvoi: 99-16576
Publié au bulletin Cassation.

Attendu selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 29 avril 1999) que Mlle X... a été victime d'un accident de la circulation dont la société Mutuelle assurance artisanale de France (MAAF) a été déclarée tenue de réparer les conséquences dommageables ;
Sur le premier moyen :

Attendu que la MAAF fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevables les conclusions de Mlle X..., déposées le 26 février 1999 alors, selon le moyen, que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent afin que chacune soit à même d'organiser sa défense et que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et ne peut retenir dans sa décision les moyens, explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ;

1° qu'en retenant que la MAAF n'avait déposé ses conclusions que vingt jours avant la clôture des débats bien que ce ne soit pas le 23 février 1999 mais le 23 février 1998, soit plus d'un an avant la clôture, que la MAAF a déposé ses conclusions d'appelante principale, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la MAAF et a violé l'article 1134 du Code civil ;

2° qu'en jugeant que les conclusions d'appelante incidente de Mlle X... n'étaient pas tardives bien que ces écritures aient été déposées plus d'un an après les conclusions d'appelante de la MAAF et seulement dix-sept jours avant l'ordonnance de clôture, ce qui a interdit à la MAAF d'y répondre utilement, la cour d'appel a violé les articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt retient que les conclusions de l'intimée sont rédigées dans les mêmes termes que celles de première instance et que l'augmentation de ses prétentions n'a pu empêcher l'appelante d'organiser sa défense puisque les éléments de preuve et les moyens de droit invoqués sont les mêmes qu'en première instance ;

Et attendu que l'appelante, à laquelle les conclusions de l'intimée avaient été signifiées dix-sept jours avant l'ordonnance de clôture, n'ayant invoqué aucune circonstance particulière qui l'aurait empêché d'y répondre, la cour d'appel, abstraction faite de l'erreur qu'elle a commise sur la date des conclusions de l'appelante, a légalement décidé qu'il n'y avait pas lieu d'écarter les conclusions de Mlle X... ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu qu'une victime ne peut obtenir la réparation de la perte de ses rémunérations que si celles-ci sont licites ;

Attendu que pour évaluer comme elle l'a fait les pertes de salaire subies par Mlle X... durant la période de son incapacité temporaire totale de travail la cour d'appel a relevé qu'outre les rémunérations justifiées par la production de bulletins de salaires, il résultait d'attestations que Mlle X... percevait aussi des rémunérations non déclarées ;

Qu'en statuant ainsi alors que de telles rémunérations, provenant d'un travail dissimulé, n'ouvrent pas droit à indemnisation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen :

CASSE ET ANNULE

Publication : Bulletin 2002 II N° 5 p. 4