Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 8 février 2012

N° de pourvoi: 10-27250 10-31074
Non publié au bulletin Cassation partielle

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 16 septembre 2010), que la société civile immobilière (SCI) Penker (la société Penker), propriétaire d'un immeuble comportant huit appartements sur quatre niveaux, a conclu avec la SCI 9 rue du Pré (la société 9 rue du Pré), une promesse de vente par acte sous seing privé du 7 janvier 2003 auquel était annexé un état parasitaire négatif, rédigé par M. X... le 24 décembre 2002, ne mentionnant que des traces d'humidité dues à une absence de ventilation ; qu'une clause de cet acte imposait au propriétaire, selon devis annexé, de faire des travaux dans trois appartements et la cage d'escalier à partir du deuxième étage, avant la date limite prévue pour la signature de l'acte authentique, sous peine d'annulation de la vente ; que la vente a été réitérée par un acte authentique du 4 avril 2003 auquel était annexé un second état parasitaire daté du 2 avril 2003 identique à celui du 24 décembre 2002 ; qu'à la suite d'une expertise ordonnée en référé mettant en évidence la présence de champignons lignivores, d'insectes xylophages, de coniophores et de mérule, la société 9 rue du Pré a assigné la société Penker, M. X... et l'assureur de celui-ci, la société Mutuelle des architectes français (la MAF), pour obtenir leur condamnation solidaire à lui restituer le prix de vente de l'immeuble et à lui verser des dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° B 10-27.250 :

Attendu que la société 9 rue du Pré fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en annulation de la vente fondée sur l'existence de vices cachés, alors, selon le moyen :

1°/ que si le vendeur n'est pas garant des vices apparents de la chose vendue, c'est à la condition que l'acheteur ait pu s'en convaincre lui-même ; qu'en estimant, pour débouter la société 9 rue du Pré de son action rédhibitoire, que "la présence d'humidité, de champignons lignivores, d'insectes xylophages était décelable au moment de la vente en de nombreux endroits, et qu'au demeurant l'état des façades et des colombages était tel qu'un acquéreur, y compris profane, ne pouvait se méprendre sur la nécessité de mettre en oeuvre des travaux de rénovation d'importance", sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée si, comme l'avait constaté l'expert dans des termes que les premiers juges s'étaient appropriés, la réalisation de travaux par la société Penker entre la signature du compromis de vente et la réalisation de la vente définitive n'avait pas eu pour effet de masquer les infiltrations ou les défauts d'étanchéité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à son arrêt au regard des articles 1641 et 1642 du code civil ;

2°/ que si le vendeur n'est pas garant des vices apparents de la chose vendue, c'est à la condition que l'acheteur ait pu s'en convaincre lui-même ; qu'en estimant que les désordres invoqués par la société 9 rue du Pré constituaient des vices apparents qui ne pouvaient donner lieu à la garantie du vendeur, sous prétexte que "la présence d'humidité, de champignons lignivores, d'insectes xylophages était décelable au moment de la vente en de nombreux endroits, et qu'au demeurant l'état des façades et des colombages était tel qu'un acquéreur, y compris profane, ne pouvait se méprendre sur la nécessité de mettre en oeuvre des travaux de rénovation d'importance", après avoir pourtant constaté que les états parasitaires annexés, respectivement, au compromis de vente du 7 janvier 2003 et à l'acte notarié du 4 avril suivant, non seulement ne relevaient pas les importantes attaques d'insectes xylophages et sous-estimaient la présence d'humidité, mais attribuaient encore l'origine de celle-ci à une cause bénigne (défaut de ventilation) sans commune mesure avec son origine réelle (état très dégradé des façades et de la toiture), ce dont il résultait nécessairement que, eu égard aux informations erronées qui lui avaient été communiquées, l'acquéreur n'avait pu se convaincre lui-même des désordres présents dans l'immeuble, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1641 et 1642 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant souverainement relevé le caractère apparent pour un acquéreur profane des vices dont était atteint l'immeuble vendu par la société Penker à la société 9 rue du Pré, malgré le caractère défectueux des diagnostics parasitaires établis par M. X..., retenu que cette société, en ne visitant qu'une partie de l'immeuble, n'avait pas accompli les diligences minimales que doit effectuer tout acquéreur, et que les travaux de rénovation de l'immeuble avaient été effectués par le vendeur, en exécution de la clause insérée à cet effet dans la promesse de vente, la cour d'appel a pu en déduire que la société Penker n'était pas tenue des vices apparents dont la société 9 rue du Pré pouvait se convaincre elle-même ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi n° B 10-27.250 :

Attendu que la société 9 rue du Pré fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en annulation de la vente pour dol, alors, selon le moyen :

1°/ que manque à son obligation de contracter de bonne foi et commet un dol par réticence le vendeur qui fait insérer à l'acte un état parasitaire négatif alors qu'il se devait de signaler la présence de ces insectes à l'acquéreur, peu important qu'ait existé ou pas une collusion frauduleuse entre le vendeur et le diagnostiqueur ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1116 et 1134, alinéa 3, du code civil ;

2°/ qu'en retenant, pour la débouter de son action en nullité, que les travaux de remise en état dont se prévalait la SCI 9 rue du Pré afin de justifier le comportement frauduleux du vendeur avaient été réalisés postérieurement à la vente, "laquelle était déjà parfaite lors de la signature du compromis du 7 janvier 2003", après avoir pourtant constaté que ce compromis était assorti de plusieurs conditions suspensives, et en particulier "d'une clause en vertu de laquelle les vendeurs, à peine de nullité de la vente", s'étaient engagés à "effectuer les travaux de remise en état de deux appartements du rez-de-chaussée ainsi que celui du deuxième étage gauche et de la cage d'escalier à partir du premier étage", ce dont il résultait que la vente ne pouvait être réputée parfaite avant la réalisation de ces différentes conditions, la cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient et a violé les articles 1116 et 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les vices étaient apparents, que l'absence de diligence des acquéreurs ne pouvait être imputée aux vendeurs et que les travaux de rénovation étaient postérieurs à la vente qui était parfaite dès la signature de la promesse de vente, la cour d'appel en a souverainement déduit que le dol de la société Penker n'était pas établi ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° G 10-31.074 :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société rue du Pré une somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, qu'une faute ne peut engager la responsabilité de son auteur que pour autant qu'elle est à l'origine du dommage dont se plaint la victime ; qu'en jugeant que la faute de M. X..., ayant consisté à ne pas déceler la présence d'humidité, de champignons lignivores et d'insectes xylophages dans l'immeuble dont il était chargé d'établir le diagnostic parasitaire avant sa vente, était à l'origine de la perte de chance, pour l'acquéreur, d'avoir eu son attention suffisamment attirée sur les désordres présents dans l'immeuble pour comprendre la nécessité de le visiter intégralement et de se renseigner utilement sur le coût des travaux de remise en état, tout en ayant constaté, d'une part, que la société 9 rue du Pré avait, au minimum, vu l'extérieur de l'immeuble qu'elle se proposait d'acquérir, visité ses parties communes et un des huit appartements, d'autre part, que la présence d'humidité, de champignons lignivores et d'insectes xylophages était décelable pour des acquéreurs profanes en de nombreux endroits, intérieurs et extérieurs, au mois de décembre 2002, de sorte que la société 9 rue du Pré, signataire du compromis de vente le 7 janvier 2003, ne pouvait qu'être consciente de la nécessité de réaliser des travaux de rénovation d'importance sur les colombages et les façades, ce dont il résultait que la faute de M. X... ne pouvait pas avoir fait perdre à la société 9 rue du Pré une chance d'avoir eu son attention attirée sur la nécessité de se renseigner sur le coût de travaux de remise en état, nécessité évidente indépendamment de cette faute, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que le premier diagnostic, établi le 24 décembre 2002 et annexé à la promesse de vente, n'était pas conforme à la norme XPP03.20, faute d'indications sur les parties de l'immeuble visitées par M. X..., que celui-ci n'y avait pas relevé d'importantes attaques d'insectes xylophages, avait sous-estimé la présence d'humidité dont il avait attribué l'origine à une cause bénigne et avait omis de mentionner des attaques fongiques visibles sans sondages destructifs à différents endroits de l'immeuble, et que le second diagnostic, daté du 2 avril 2003 et annexé à l'acte authentique de vente, n'était que la copie du premier diagnostic et avait été réalisé sans visite concomitante de l'immeuble, en violation des dispositions réglementaires applicables en l'espèce, la cour d'appel a pu en déduire que par ces fautes, M. X... avait fait perdre une chance à la société 9 rue du Pré d'avoir son attention suffisamment attirée sur les désordres présents de l'immeuble, sur la nécessité de le visiter intégralement et de se renseigner sur le coût des travaux de remise en état et le condamner à l'indemniser du préjudice en découlant ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen du pourvoi n° G 10-31.074 :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. X... à l'encontre de la MAF, l'arrêt retient que l'article 8 du contrat impose à l'assuré de déclarer pour le 31 mars l'intégralité de l'activité professionnelle réalisée l'année précédente et de payer la cotisation qui en découle, que M. X... n'a pas déclaré à la MAF le 31 mars 2003 les diagnostics effectués le 24 décembre 2002 et n'a pas payé de cotisations pour eux, et que la déclaration de ce risque était une condition d'application du contrat dont il déduit une absence d'assurance ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, selon l'article 5.222 du contrat, la sanction de la non déclaration d'un risque est la réduction proportionnelle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen du pourvoi n° B 10 27.250 :

CASSE ET ANNULE

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 25 juin 2009

N° de pourvoi: 08-17128
Non publié au bulletin Cassation partielle

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 1er septembre 2002, M. Y... à vendu à M. X... un véhicule, pour lequel le contrôle technique effectué le 29 août 2002 par la société Auto Bilan du Soleil (la société) ne révélait aucun défaut ; qu'à la suite d'un éclatement du pneu arrière gauche et d'un accident de la circulation survenus le 17 septembre 2002, M. X... a saisi le juge des référés d'une demande d'expertise ; que le rapport de l'expert ayant été déposé le 7 janvier 2005, M. X... a assigné M. Y... et la société devant le tribunal de grande instance en résolution de la vente et indemnisation de ses préjudices ;

Attendu que pour condamner la société à payer à M. X... la somme de 5 000 euros, l'arrêt retient que vis-à-vis de M. X... la faute de la société de contrôle technique lui a fait perdre une chance d'éviter d'acquérir ce véhicule présentant un vice caché ; que le préjudice lié à cette perte de chance peut être évalué, au vu des éléments fournis, à 5 000 euros ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte des productions que M. X... demandait réparation des préjudices résultant de l'accident en faisant valoir que celui-ci était la conséquence de la faute commise par la société, ce que cette dernière contestait, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société à payer à M. X... la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts et une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 24 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;