Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
attendu que des énonciations de l'arrêt infirmatif attaque, il
résulte que le 5 octobre 1957, Pierre z..., alors âgé de
8 ans, ayant fait une chute, a été soigné par le docteur
a..., qui avait diagnostique une fracture de l'extrémité inferieure
de l'humérus y..., sans déplacement ;
Que par la suite, l'enfant, éprouvant toujours une grande gène
dans les mouvements du coude, fut examine par d'autres médecins qui décelèrent,
non une fracture de l'humérus, mais une luxation du coude ;
Qu'a la suite de deux expertises, les premiers juges ont retenu a la charge
du docteur a... une faute initiale dans la méthode de recherche du diagnostic,
ayant entraine l'erreur du praticien et aussi l'erreur dans le traitement a
appliquer ;
Que le tribunal de grande instance a cependant déboute Robert z...,
agissant en qualité de représentant légal de son fils mineur
de son action en payement de dommages-intérêts, estimant que la
relation de causalité entre les fautes caractérisées du
docteur a... et le prejudice sérieux dont reste atteint le jeune z...
n'est pas établie d'une façon certaine ;
Que, sur le seul appel de Eobert z..., les juges du second degré ont
décide qu'il existait des présomptions suffisamment graves, précises
et concordantes, pour admettre que l'invalidité dont est aujourd'hui
atteint Pierre z..., est la conséquence directe de la faute retenue a
l'encontre de l'intime ;
Qu'il est fait grief a la cour d'appel d'avoir ainsi statue, alors que, d'une
part, le docteur a... ne pouvait être condamne que si une preuve
certaine d'un lien de causalité entre le dommage et la faute
était rapportée, sans que les juges du fond puissent se contenter
de présomptions dont le caractère hypothétique avait été
relevé par les experts ;
Que, d'autre part, selon le pourvoi, l'arrêt attaque ne pouvait, sans
se contredire, décider que les erreurs commises par le docteur a... avaient
eu pour effet de priver l'enfant des chances de guérison, et condamner
le praticien a réparer, en totalité, les conséquences de
l'invalidité invoquée ;
Mais attendu qu'après avoir exactement rapporte les avis formules par
les experts x..., et rappelé que les fautes reprochées au docteur
a... se trouvaient définitivement établies, la cour d'appel a
pu déduire des documents fournis, dont elle a souverainement apprécie
la valeur probante qu'il existe des présomptions suffisamment
graves, précises et concordantes pour admettre que l'invalidité
dont est aujourd'hui atteint pierre z..., est la conséquence directe
de la faute retenue a l'encontre de l'intimé ;
Qu'en se prononçant ainsi, elle ne s'est nullement mise en opposition
avec les conclusions des experts, en ce qu'ils ont déclare émettre
des doutes sur les résultats de la réduction, qu'il est reproche
au docteur a... de ne pas avoir pratiquée ;
Et attendu qu'ayant a apprécier
les chances de guérison dont a été prive
le blesse, les juges du second degré ont, sans se contredire, partiellement
fait droit a la demande de Robert z..., et souverainement évalué
a 65000 francs la juste réparation du dommage subi, toutes causes de
préjudice étant confondues ;
Qu'ainsi, le moyen ne saurait être accueilli dans aucune de ses branches ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi
Publication : Bull. N° 707
Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mardi 27 janvier 1970
N° de pourvoi: 68-12782
Publié au bulletin
REJET
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il resulte des enonciations de l'arret attaque qu'en juillet 1961
la dame z..., desirant voir disparaitre les cicatrices dont elle restait affligee
a la suite d'une operation pour une ptose mammaire bilaterale, eut recours aux
soins du docteur y..., chirurgien plasticien qui pratiqua sur elle une intervention
sous anesthesie locale a base de xylocaine;
Que l'intervention touchait a sa fin lorsque, brusquement, l'operee fut prise
de convulsions, lesquelles provoquerent une syncope cardiaque dont la dame z...
Deceda peu apres malgre les soins dont elle fut l'objet;
Attendu qu'il est reproche a la cour d'appel d'avoir retenu la responsabilite
du docteur Y, alors qu'un medecin ne peut etre rendu responsable d'une imprudence
ou d'une negligence que si celle-ci revele, eu egard "aux donnees actuelles
de la science et aux regles consacrees par la pratique medicale", une meconnaissance
"certaine" de ses devoirs;
Que la prudence incombant a celui-ci ne saurait s'apprecier in abstracto et
que des l'instant ou elle constatait elle-meme "qu'il n'etait pas d'usage"
pour les chirurgiens de s'assurer le concours d'un medecin anesthesiste pour
une intervention sous anesthesie locale et qu'en outre l'accident survenu etait
"imprevisible et exceptionnel", la cour d'appel ne pouvait legalement
considerer que ce dernier aurait neanmoins engage la responsabilite du chirurgien;
Mais attendu qu'ayant constate que le docteur y... Avait administre a l'operee une "assez forte dose de xylocaine" et "qu'il savait ou devait savoir que, s'il est exceptionnel, un accident convulsif peut neanmoins survenir apres une anesthesie locale", l'arret attaque en a deduit que le chirurgien avait l'obligation de s'assurer, n'etant pas en mesure de proceder lui-meme au traitement approprie, de l'intervention immediate d'un medecin anesthesiste;
Que l'arret releve encore "que les usages ne sauraient dispenser des precautions
qu'impose la prudence, surtout quand la vie d'etres humains est en jeu";
Que par ces motifs, la cour d'appel a necessairement admis l'imprudence commise
par le docteur y... Au cours des soins donnes a la dame z...;
Qu'elle a ainsi legalement justifie sa decision, et que le moyen n'est pas fonde;
Sur le second moyen pris en sa premiere branche : attendu qu'il est encore fait grief a l'arret attaque d'avoir decide que le docteur y... avait "compromis la chance de survie" de l'operee, alors que la cour d'appel reconnaissant elle-meme "qu'il n'etait pas certain" que les consequences fatales survenues auraient pu etre evitees, aucune responsabilite ne pouvait etre retenue en l'absence d'un lien certain de cause a effet entre la faute pretendue et le dommage;
Mais attendu qu'un prejudice peut etre invoque du seul fait qu'une chance existait et qu'elle a ete perdue;
Qu'ainsi, le moyen doit etre ecarte;
Par ces motifs : rejette le pourvoi
Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation
Chambre civile 1 N. 37 P. 31