Cour de Cassation
Chambre civile 1
Audience publique du 2 février 1994 Cassation.
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 1147 et 1315 du Code civil ;
Attendu que l'obligation de résultat qui pèse sur le garagiste
en ce qui concerne la réparation des véhicules de ses clients
emporte à la fois présomption de faute et présomption de
causalité entre la faute et le dommage ;
Attendu que, pour débouter M. Mozat de la demande en indemnisation de
son préjudice, dont il imputait la responsabilité à la
société Auto d'Artagnan, à laquelle il avait confié
son véhicule pour réparation, l'arrêt attaqué a retenu
qu'aucune faute ou omission ne pouvait être relevée avec certitude
à l'encontre du garagiste ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il appartenait au
garagiste de démontrer qu'il n'avait pas commis de faute, la
cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les
textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du
moyen : CASSE ET ANNULE
Publication : Bulletin 1994 I N° 41 p. 32
Les Petites Affiches, 1996-02-07, n° 17, p. 21, note D-R. MARTIN. Semaine
Juridique, Edition entreprise, 1994-06-09, n° 23, p. 119, note P. DELEBECQUE.
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 12 juillet 2005
N° de pourvoi: 04-13272
Non publié au bulletin Cassation partielle
Attendu selon l'arrêt infirmatif attaqué, que, chargée en
sous-traitance par la société Aérospatiale, devenue Eurocopter,
de la révision du mât-rotor d'un hélicoptère "Alouette
II", la société Ratier-Figeac (la société SRF)
a mis en place par erreur un écrou destiné à un modèle
"Alouette III", ce qui a causé la chute de l'appareil en cours
de vol et le décès de ses occupants ; que le tribunal correctionnel
a condamné trois salariés de la société SRF du chef
d'homicides involontaires, puis statué sur les intérêts
civils ; que l'assureur de cette société, la société
Allianz marine et aviation France (la société Allianz), a poursuivi
contre la société Eurocopter et l'assureur de celle-ci, le groupement
d'intérêt économique La Réunion aérienne,
le remboursement des indemnités versées par ses soins ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Allianz fait grief à l'arrêt
d'avoir rejeté ses demandes en retenant une faute de la société
SRF, alors, selon le moyen :
1 / que la cour d'appel se réfère de manière imprécise
au jugement rendu par le tribunal correctionnel le 1er février 1999,
en sorte qu'il n'est pas possible de savoir si elle a entendu faire application
des règles de la chose jugée ou si elle a entendu motiver sa propre
décision par référence à celle du tribunal correctionnel
; qu'en ne précisant pas le fondement de la responsabilité qu'elle
a retenue à l'encontre de la société SRF, la cour d'appel
a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1382 du Code civil ;
2 / qu'à supposer que la cour d'appel ait entendu mettre en oeuvre les
règles de la chose jugée, elle ne pouvait le faire que dans la
limite de ce qu'avait décidé le juge pénal, à savoir
la condamnation pour homicide involontaire de trois des salariés de la
société SRF ; qu'en se fondant sur l'autorité de chose
jugée attachée à la décision pénale qui ne
se prononçait pas sur la responsabilité de la société
SRF pour imputer à cette dernière une faute civile, la cour d'appel
aurait violé les articles 1351 du Code civil et 480 du nouveau Code de
procédure civile ;
3 / que dans l'hypothèse où la cour d'appel aurait entendu motiver
sa propre décision par référence à celle du tribunal
correctionnel rendue le 1er février 1999, elle aurait dû à
tout le moins en reproduire les motifs dans sa propre décision ; qu'en
se bornant à citer certaines pages de ce jugement sans en rappeler le
contenu, la cour d'appel aurait violé l'article 455 du nouveau Code de
procédure civile ;
4 / qu'en toute hypothèse, si l'aléa peut engendrer la perte certaine
d'une chance qui caractérise un préjudice réparable, le
lien de causalité doit, dans tous les cas, être établi avec
certitude, qu'en énonçant que les fautes reprochées à
la société SRF avaient une forte probabilité d'éviter
l'accident, les juges du fond n'ont pas caractérisé un lien de
causalité certain entre ces fautes et le dommage, violant ainsi l'article
1147 du Code civil ;
Mais attendu qu'infirmant le jugement qui avait retenu la faute prouvée de la société SRF, et décidant que cette dernière avait failli à son obligation contractuelle de résultat, la cour d'appel a par là-même écarté les motifs des premiers juges, et caractérisé la faute contestée en constatant l'inexécution d'une obligation de cette nature ; que le moyen, qui s'attaque en ses trois premières branches à des motifs surabondants, et en sa quatrième à des motifs non adoptés, ne peut être accueilli ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1147 du Code civil ;
Attendu que pour écarter toute faute de la société Eurocopter,
l'arrêt retient que les écrous destinés à l'Alouette
II portaient une référence différente de ceux de l'Alouette
III, certes peu lisible, mais qui n'aurait pas dû échapper à
une entreprise spécialisée comme la société SRF
;
Attendu qu'en se bornant à examiner le comportement du sous-traitant,
sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions de la société
Allianz, si le fabricant de l'appareil n'était pas en faute pour n'avoir
pas mis en oeuvre un dispositif propre à supprimer tout risque de confusion,
la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision
;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du
second moyen :
CASSE ET ANNULE