Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 7 novembre 2012

N° de pourvoi: 11-22907
Publié au bulletin Rejet

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 26 mai 2011), que la commune d'Amiens a exercé, au prix indiqué dans la déclaration d'intention d'aliéner, son droit de préemption sur des immeubles vendus par les sociétés civiles immobilières 227 rue d'Abbeville et 219 rue d'Abbeville (les SCI) ; que la commune ayant refusé de signer l'acte de vente en invoquant un problème de pollution du terrain, les SCI l'ont assignée en réitération de la vente paiement du prix et réparation de leur préjudice ;

Attendu que la commune d'Amiens fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en réduction du prix et en indemnisation du préjudice subi en raison de la pollution des sols, alors, selon le moyen :

1°/ qu'à partir du moment où le vendeur dissimule à l'acquéreur un fait dont il avait connaissance et qui aurait empêché ce dernier, s'il l'avait connu, de contracter aux conditions prévues, il manque à son devoir général de loyauté, dont ne le dispense pas l'absence d'obligation légale spécifique d'information sur ledit fait, et commet de la sorte une réticence dolosive ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a constaté que les vendeurs avaient connaissance de la pollution affectant l'immeuble mais n'en avaient pas informé le titulaire du droit de préemption avant sa décision de l'exercer ; qu'en écartant cependant toute réticence dolosive des vendeurs, prétexte pris de ce qu'aucune obligation légale ou réglementaire d'information ne leur imposait de fournir à l'acquéreur les documents révélant la présence de la pollution litigieuse, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1116 du code civil ;

2°/ qu'en outre, le bénéficiaire du droit de préemption urbain n'étant lié que par les conditions de la cession, lui sont inopposables les documents non mentionnés ni joints à la déclaration d'intention d'aliéner notifiée par le vendeur ; qu'en l'espèce, en faisant grief au titulaire du droit de préemption urbain de n'avoir pas réclamé les documents révélant la pollution affectant l'immeuble vendu, qui lui étaient pourtant inopposables en ce qu'ils n'étaient ni mentionnés ni joints à la déclaration d'intention d'aliéner, la cour d'appel a violé les articles L. 213-1, R. 213-2 et R. 213-5 du code de l'urbanisme ;

3°/ qu'en toute hypothèse, la commune faisait valoir qu'il ne pouvait lui être reproché «de ne pas avoir sollicité un complément d'information du notaire et sollicité notamment la production du compromis» auquel était annexé le rapport révélant la pollution affectant l'immeuble vendu, dans la mesure où seuls lui étaient « opposables », en sa qualité de «titulaire du droit de préemption», les « conditions mentionnées dans la déclaration d'intention d'aliéner, ou les pièces qui y (étaient) annexées» ; qu'en délaissant ces écritures déterminantes d'où il résultait qu'en sa qualité de titulaire du droit de préemption de l'immeuble litigieux, il ne lui appartenait pas de se procurer des documents qui lui étaient inopposables, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civil ;


Mais attendu qu'ayant relevé que l'acquéreur initial avait été informé de la pollution du terrain par un rapport annexé à l'acte sous seing privé de vente et qu'aucune obligation n'imposait aux venderesses d'annexer ce "compromis" à la déclaration d'intention d'aliéner et que la commune disposait de services spécialisés et de l'assistance des services de l'Etat, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu retenir que la commune qui s'était contentée des documents transmis ne pouvait se prévaloir d'une réticence dolosive ni de l'existence d'un vice caché et devait régler le prix mentionné à la déclaration d'intention d'aliéner et réparer le préjudice subi par les SCI ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

COUR DE CASSATION, CIVILE,
CHAMBRE CIVILE 3,
5 DÉCEMBRE 2012,

11-20.689, INÉDIT
REJET

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 31 janvier 2011), que par acte authentique du 7 juillet 2006, la société civile immobilière S au carré (la SCI) a acquis de la société civile immobilière JLM (la société JLM), représentée par Mme A..., agissant ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de cette société, un château et des terres attenantes ; que le 7 février 2008, la SCI a assigné la société JLM représentée par Mme A... pour obtenir la diminution du prix de vente en raison de la présence sur la propriété d'une décharge polluante ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé que, le 20 février 2006, Mme A... avait transmis à la SCI le procès-verbal de description et d'estimation de l'immeuble mentionnant l'existence sur une parcelle de terrain d'un dépôt de gravats classés théoriquement en décharge classe 4, et retenu qu'il n'était pas démontré que Mme A..., qui n'avait pas assisté à la visite des lieux effectuée par la direction départementale de l'équipement, avait eu connaissance du procès-verbal dressé par ce service constatant une pollution et avait volontairement caché son existence, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions relatives au défaut d'information sur l'existence de cette procédure administrative que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande fondée sur l'obligation de délivrance en raison de la présence d'une décharge comportant des matières polluantes, alors, selon le moyen, que, le manquement à l'obligation de délivrance est caractérisé dès lors que la chose livrée ne coïncide pas, quant à ses caractéristiques, avec ce qui a été promis dans le cadre des stipulations contractuelles ; qu'en l'espèce, l'acte du vente du 7 juillet 2006 ne faisait état que de terres agricoles ; qu'en admettant même que les constatations figurant au rapport de M. X...aient été un élément de la volonté commune des parties, il ne faisait en tout état de cause état que d'un dépôt de gravats n'impliquant pas que le sol soit dépollué ; qu'ayant constaté que le dépôt avait accueilli, non seulement des gravats, mais des matériaux polluants, obligeant le propriétaire à procéder à une dépollution du sol, les juges du fond ont par là-même caractérisé un défaut de conformité et qu'en refusant de retenir un tel défaut, les juges du fond ont violé les articles 1134 et 1604 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'acquéreur, qui avait pu constater lors de ses visites des lieux l'existence d'un dépôt de gravats sur une parcelle et avait été informé qu'il constituait une installation de classe 4 soumise à autorisation, avait accepté d'acheter l'immeuble incluant cette parcelle, et retenu que le caractère polluant de ces matériaux n'était pas connu des parties lors de la vente, la cour d'appel a pu en déduire que la présence de matériaux polluants sur l'immeuble ne constituait pas un manquement à l'obligation de délivrance ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;