Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 2 février 2017

N° de pourvoi: 16-13344
Non publié au bulletin Rejet
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 janvier 2016), que le 20 novembre 2010, Lucie X..., qui fêtait son quinzième anniversaire avec des amis dans la propriété de Mme Y..., a été grièvement blessée par l'inflammation de white-spirit répandu sur ses vêtements, combustible de deux flambeaux, plantés dans le sol du jardin pour l'éclairer, qu'elle-même et un ami, Benoît Z..., alors mineur né en 1996, avaient saisis pour mimer un duel à l'épée ; que M. Damien X..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs, dont Lucie, a assigné en réparation des préjudices subis, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine Maritime, Mme Y..., l'assureur de celle-ci, la société Areas dommages (l'assureur), Mme Z..., en qualité de représentante légale de son fils Benoît, et la société Allianz IARD en qualité d'organisme de santé complémentaire de la jeune victime ; que la société MACIF, assureur de Mme Z..., est intervenue volontairement à l'instance ; que Mme Lucie X... et M. Benoît Z..., devenus majeurs, ont ultérieurement repris l'instance en leur nom ;

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de déclarer Mme Y... seule responsable des conséquences dommageables de l'accident et de les condamner in solidum à payer diverses sommes de ce chef, alors, selon le moyen, que seule la faute présentant un lien de causalité direct avec le dommage, est susceptible d'engager la responsabilité de son auteur ; que ne présente pas un tel lien de causalité direct avec le dommage une faute qui, sans l'initiative dangereuse prise par la victime ou par un tiers, ne l'aurait pas provoquée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les brûlures subies par Mme Lucie X... étaient survenues à la suite du détournement de l'usage normal, par celle-ci et par M. Benoît Z..., des torches enflammées qui illuminaient le jardin, pour mimer une scène de combat à l'épée ; qu'en retenant néanmoins que la faute qu'aurait commise Mme Y... en alimentant ces torches avec du white-spirit, était en lien de causalité directe avec la survenance du dommage de la jeune fille, et qu'elle était dès lors responsable de ce dommage, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations en violation de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir retenu que Mme Y... avait commis une faute majeure en alimentant les torches avec du white-spririt, ce qui rendait le maniement des flambeaux significativement plus dangereux qu'usuellement puisqu'il ressortait de la notice d'utilisation des flambeaux que ces derniers devaient être alimentés avec de l'huile de paraffine, liquide inflammable mais visqueux, et ayant relevé qu'en déterrant le premier flambeau le jeune Benoît Z... avait involontairement aspergé Lucie X... du liquide inflammable contenu dans celui-ci, que même si les flambeaux avaient été détournés de leur utilisation par ces deux personnes, pareil accident ne se serait pas produit s'ils avaient été alimentés avec de l'huile de paraffine, que les cheveux ou les vêtements n'auraient pas pu être aspergés de la sorte, compte tenu du caractère visqueux de l'huile de paraffine, qu'un embrasement sans contact n'aurait pas non plus pu se produire, qu'en effet c'était le caractère volatil du white-spirit qui en faisait son danger et non son caractère inflammable qu'il partage avec l'huile de paraffine, la cour d'appel a pu déduire l'existence d'un lien de causalité direct entre la faute commise par Mme Y... et les dommages subis ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les trois dernières branches du moyen unique annexé qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;