COUR DE CASSATION
- Chambre Commerciale -
- 26 novembre 2003 -
Rejet.
N° de pourvoi : 00-10243 N° de pourvoi : 00-10949
Publié au bulletin
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 octobre 1999), que la
société Alain Manoukian a engagé avec les consorts X...
et Y... (les consorts X...),, actionnaires de la société Stuck,
des négociations en vue de la cession des actions composant le capital
de cette société ; que les pourparlers entrepris au printemps
de l'année 1997 ont, à l'issue de plusieurs rencontres et de divers
échanges de courriers, conduit à l'établissement, le 24
septembre 1997, d'un projet d'accord stipulant notamment plusieurs conditions
suspensives qui devaient être réalisées avant le 10 octobre
de la même année, date ultérieurement reportée au
31 octobre ; qu'après de nouvelles discussions, la société
Alain Manoukian a, le 16 octobre 1997, accepté les demandes de modification
formulées par les cédants et proposé de reporter la date
limite de réalisation des conditions au 15 novembre 1997 ; que les consorts
X... n'ayant formulé aucune observation, un nouveau projet de cession
leur a été adressé le 13 novembre 1997 ; que le 24 novembre,
la société Alain Manoukian a appris que les consorts X... avaient,
le 10 novembre, consenti à la société Les complices une
promesse de cession des actions de la société Stuck ; que la société
Alain Manoukian a demandé que les consorts X... et la société
Les complices soient condamnés à réparer le préjudice
résultant de la rupture fautive des pourparlers ;
Sur le moyen unique du pourvoi formé par les consorts X..., pris en
ses deux branches :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les avoir
condamnés à payer à la société Alain Manoukian
la somme de 400 000 francs à titre de dommages-intérêts
alors, selon le moyen :
1 / que la liberté contractuelle implique celle de rompre les pourparlers,
liberté qui n'est limitée que par l'abus du droit de rompre qui
est une faute caractérisée par le fait de tromper la confiance
du partenaire ; que la cour d'appel, qui n'a relevé aucun élément
à la charge du cédant de nature à caractériser un
tel comportement, contraire à la bonne foi contractuelle, a privé
sa décision de toute base légale au regard des articles 1382 et
1383 du Code civil ;
2 / que celui qui prend l'initiative de pourparlers en établissant une
proposition d'achat de la totalité des actions d'une société,
soumise à plusieurs conditions suspensives affectées d'un délai
de réalisation, et qui ne manifeste aucune diligence pour la réalisation
de ces conditions, ne saurait imputer à faute la rupture par son partenaire
des pourparlers, après l'expiration de ce délai, de sorte que
la cour d'appel, en statuant comme elle l'a fait, a violé les articles
1382 et 1383 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé, d'un côté,
que les parties étaient parvenues à un projet d'accord aplanissant
la plupart des difficultés et que la société Alain Manoukian
était en droit de penser que les consorts X... étaient toujours
disposés à lui céder leurs actions et, d'un autre côté,
que les actionnaires de la société Stuck avaient, à la
même époque, conduit des négociations parallèles
avec la société Les complices et conclu avec cette dernière
un accord dont ils n'avaient informé la société Alain Manoukian
que quatorze jours après la signature de celui-ci, tout en continuant
à lui laisser croire que seule l'absence de l'expert-comptable de la
société retardait la signature du protocole, la cour d'appel a
retenu que les consorts X... avaient ainsi rompu unilatéralement et avec
mauvaise foi des pourparlers qu'ils n'avaient jamais paru abandonner et que
la société Alain Manoukian poursuivait normalement ; qu'en l'état
de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement
justifié sa décision ;
Et attendu, d'autre part, que la cour d'appel ayant relevé, par un motif
non critiqué, que les parties avaient, d'un commun accord, prorogé
la date de réalisation des conditions suspensives, le moyen pris de la
circonstance que la rupture des pourparlers aurait été postérieure
à cette date est inopérant ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses
branches ;
Sur le premier moyen du pourvoi formé par la société Alain
Manoukian :
Attendu que la société Alain Manoukian fait grief à l'arrêt
d'avoir limité à 400 000 francs la condamnation à dommages-intérêts
prononcée à l'encontre des consorts X... alors, selon le moyen,
que celui qui rompt brutalement des pourparlers relatifs à la cession
des actions d'une société exploitant un fonds de commerce doit
indemniser la victime de cette rupture de la perte de la chance qu'avait cette
dernière d'obtenir les gains espérés tirés de l'exploitation
dudit fonds de commerce en cas de conclusion du contrat ; qu'il importe peu
que les parties ne soient parvenues à aucun accord ferme et définitif
; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les consorts
X... avaient engagé leur responsabilité délictuelle envers
la société Alain Manoukian en rompant unilatéralement,
brutalement et avec mauvaise foi les pourparlers qui avaient eu lieu entre eux
au sujet de la cession des actions de la société Stuck exploitant
un fonds de commerce dans le centre commercial Belle Epine ; qu'en estimant
néanmoins que le préjudice subi par la société Alain
Manoukian ne pouvait correspondre, du seul fait de l'absence d'accord ferme
et définitif, à la perte de la chance qu'avait cette société
d'obtenir les gains qu'elle pouvait espérer tirer de l'exploitation du
fonds de commerce et en limitant la réparation du préjudice subi
par la société Alain Manoukian aux frais occasionnés par
la négociation et aux études préalables qu'elle avait engagées,
la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que les circonstances constitutives d'une faute commise
dans l'exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers précontractuels
ne sont pas la cause du préjudice consistant dans la perte d'une chance
de réaliser les gains que permettait d'espérer la conclusion du
contrat ;
Attendu que la cour d'appel a décidé à bon droit qu'en
l'absence d'accord ferme et définitif, le préjudice
subi par la société Alain Manoukian n'incluait que les
frais occasionnés par la négociation et les études préalables
auxquelles elle avait fait procéder et non les gains
qu'elle pouvait, en cas de conclusion du contrat, espérer tirer de l'exploitation
du fonds de commerce ni même la perte d'une chance d'obtenir ces gains
; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen du même pourvoi :
Attendu que la société Alain Manoukian fait encore grief à
l'arrêt d'avoir mis hors de cause la société Les Complices
alors, selon le moyen, que le seul fait pour l'acquéreur de garantir
par avance le vendeur de toute indemnité en cas de rupture des pourparlers
auxquels ce dernier aurait pu se livrer avec un tiers antérieurement
constitue une faute dont l'acquéreur doit réparation envers la
victime de la rupture des pourparlers dès lors qu'une telle garantie
constitue pour le vendeur, et pour le profit de l'acquéreur, une incitation
à rompre brutalement des pourparlers, fussent-ils sur le point d'aboutir,
sans risque pour lui ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté
qu'aux termes de la convention de cession liant les consorts X... à la
société Les complices, celle-ci s'était engagée
à garantir les vendeurs de toute indemnité que ceux-ci seraient
éventuellement amenés à verser à un tiers pour rupture
abusive des pourparlers ; qu'en considérant néanmoins que la société
Les complices, dont les juges du fond ont constaté qu'elle avait profité
des manoeuvres déloyales commises par les consorts X... à l'encontre
de la société Alain Manoukian, n'avait commis aucune faute envers
la société Alain Manoukian, victime de la rupture brutale des
pourparlers qu'elle avait engagés avec les consorts X..., peu important
qu'il n'ait pas été démontré que la société
Les complices avait eu connaissance de l'état d'avancement de ces pourparlers,
la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que le simple fait de contracter, même en connaissance de
cause, avec une personne ayant engagé des pourparlers avec un tiers ne
constitue pas, en lui-même et sauf s'il est dicté par l'intention
de nuire ou s'accompagne de manoeuvres frauduleuses, une faute de nature à
engager la responsabilité de son auteur ; Attendu qu'ayant relevé
que la clause de garantie insérée dans la promesse de cession
ne suffisait pas à établir que la société Les Complices
avait usé de procédés déloyaux pour obtenir la cession
des actions composant le capital de la société Stuck, ni même
qu'elle avait une connaissance exacte de l'état d'avancement des négociations
poursuivies entre la société Alain Manoukian et les cédants
et du manque de loyauté de ceux-ci à l'égard de celle-là,
la cour d'appel a exactement décidé que cette société
n'avait pas engagé sa responsabilité à l'égard de
la société Alain Manoukian, peu important qu'elle ait en définitive
profité des manoeuvres déloyales des consorts X... ; que le moyen
n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois ;
Publication : Bulletin 2003 IV N° 186 p. 206
Revue trimestrielle de droit civil, janvier-mars 2004, n° 1, p. 80-86, note
Jacques MESTRE et Bertrand FAGES
COUR DE CASSATION
- Chambre Commerciale -
- 13 novembre 2003 -
Cassation partielle
N° de pourvoi : 01-00376
Inédit
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 14 novembre 1997, M. X...,
président du conseil d'administration de la société Etablissements
X... et compagnie (la société X...), a cédé la quasi-totalité
des actions composant le capital de cette société à la
société Compagnie agricole de la Crau (la société
La Crau) à l'égard de laquelle il a contracté le même
jour une obligation de garantie de passif cautionnée par la société
Crédit du Nord ; que le 29 janvier 1998, le conseil d'administration
de la société X... a révoqué M. X... de ses fonctions
de président ; que M. X..., invoquant le caractère abusif de sa
révocation, a demandé que les sociétés X... et La
Crau soient condamnées à lui payer des dommages-intérêts
; que la société La Crau a demandé que M. X... et la société
Crédit du Nord soient condamnés à lui payer diverses sommes
au titre de la garantie de passif et du remboursement de dépenses personnelles
;
Sur le second moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que les sociétés X... et La Crau font grief à l'arrêt
d'avoir rejeté leurs demandes alors, selon le moyen :
1 / que les juges ne peuvent dénaturer les clauses claires et précises
d'un contrat ; qu'en l'espèce, il résulte de l'article 1-4 du
contrat de garantie du 14 novembre 1997 consacré aux états financiers
que M. X... a garanti que "Les provisions figurant auxdits états
financiers sont suffisantes pour couvrir les charges et les risques auxquels
les sociétés sont exposées en ce compris notamment tous
les engagements vis-à-vis de ses clients, fournisseurs, prestataires
de services, salariés" ; qu'aux termes de l'article 2-1 du même
contrat M. X... s'est engagé à indemniser les sociétés
de tous les dommages, préjudices, pertes et responsabilités résultant
de tout fait, événement ou circonstance ayant sa cause ou son
origine à une date antérieure à la date des cessions et
qui se révélerait ne pas être en conformité avec
les déclarations et garanties énoncées au contrat ; qu'il
s'est avéré que les provisions figurant auxdits états financiers
relatives aux commissions à payer aux VRP sur les encaissements de septembre
1997 et les créances clients en attente ont révélé
une insuffisance de 493 759 francs, suite notamment à l'application d'un
taux de charge erroné ; que le préjudice de 493 759 francs avait
bien sa cause dans un fait ou événement antérieur aux cessions,
soit dans l'insuffisance de provision dans les états financiers ; qu'en
affirmant néanmoins que la rémunération des VRP, leurs
commissions en attente et non provisionnées, le chiffrage erroné
des charges sociales n'entraient nullement dans le champ d'application des critères
retenus par les parties pour faire jouer la garantie, la cour d'appel a manifestement
dénaturé ledit contrat de garantie, en violation de l'article
1134 du Code civil ;
2 / que les juges ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis
d'un contrat ; qu'en l'espèce, il résulte de l'article 1-3 du
contrat de garantie du 14 novembre 1997 intitulé "Respect des lois
et obligations" que les Etablissements X... et compagnie ont régulièrement
accompli toutes les formalités légales ou réglementaires
obligatoires et plus généralement sont en conformité avec
toutes les lois, règlements et obligations quelconques qui leur sont
applicables ; qu'aux termes de l'article 2-1 du même contrat, M. X...
s'est engagé à indemniser les sociétés de tous les
dommages, préjudices, pertes et responsabilités résultant
de tout fait, événement ou circonstance ayant sa cause ou son
origine à une date antérieure à la date des cessions et
qui se révélerait ne pas être en conformité avec
les déclarations et garanties énoncées au présent
contrat ; qu'ainsi M. X... s'est-il engagé à rembourser le préjudice
résultant de toute violation de la loi, antérieure aux cessions
;
qu'il s'est avéré que jusqu'en septembre 1997 la société
Etablissements X... a payé les dépenses personnelles de l'un de
ses dirigeants pour une somme totale de 67 105 francs, en violation manifeste
de la loi ; qu'en affirmant néanmoins que les dépenses personnelles
du dirigeant ne rentraient nullement dans le champ d'application des critères
retenus par les parties pour faire jouer la garantie et qu'il n'avait jamais
été prévu que M. X... puisse avoir à rembourser
des dépenses qui lui auraient été personnelles, quand le
paiement par la société de dépenses personnelles de ses
dirigeants constitue une violation manifeste de la loi, la cour d'appel a dénaturé
l'article 1134 du Code civil ;
3 / que les juges sont tenus de répondre aux moyens invoqués par
les parties et d'examiner tous les documents produits à leur soutien
; qu'en l'espèce, les sociétés soutenaient que toutes les
sommes réclamées étaient certaines et d'ailleurs certifiées
par le commissaire aux comptes et l'expert-comptable ; qu'elles produisaient
les attestations du cabinet Mazars et Guerard Turquin ainsi que du cabinet d'expertise
comptable Union fiduciaire ; qu'en affirmant néanmoins que les sommes
réclamées par les société étaient incertaines
et non certifiées par un expert-comptable ou un commissaire aux comptes,
sans nullement examiner les pièces produites par lesdites sociétés,
la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure
civile ;
Mais attendu qu'ayant estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'interprétation de la convention de garantie, que les sommes réclamées n'entraient pas dans le domaine de l'obligation du cédant, la cour d'appel n'était pas tenue de se prononcer sur les pièces attestant de l'exactitude de ces sommes ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le premier moyen, pris en ses quatre premières branches :
Attendu que les sociétés X... et La Crau font grief à l'arrêt
de les avoir condamnées à payer à M. X... la somme de 1
000 000 francs à titre de dommages-intérêts pour révocation
abusive de sa fonction de président du conseil d'administration alors,
selon le moyen :
1 / que la révocation du président de conseil d'administration
peut intervenir à tout moment, sans préavis, ni précision
de motifs et ne peut donner lieu à des dommages-intérêts
que si elle revêt un caractère abusif eu égard aux circonstances
dans lesquelles elle est intervenue ;
que les juges ne peuvent examiner que les circonstances dans lesquelles sa révocation
est intervenue pour vérifier si elles ont porté atteinte à
l'honneur de celui-ci ou si elle a été décidée sans
respecter le principe de la contradiction ; que pour considérer la révocation
de M. X... abusive, la cour d'appel a relevé que la révocation
était intervenue quatre mois seulement après le projet de cession,
qu'il était compréhensible que M. X... ait mal supporté
la limitation de ses pouvoirs et que la société ne pouvait invoquer
le désintéressement de M. X... de ses fonctions dès lors
qu'elle reconnaissait qu'il avait formé le directeur général
adjoint ; qu'en se déterminant ainsi par une appréciation des
griefs faits par la société au président, et non par les
circonstances propres aux conditions de la révocation, la cour d'appel
n'a pas donné de base légale à sa décision au regard
de l'article 110 de la loi du 24 juillet 1966 devenu l'article L. 225-47 du
Code de commerce ;
2 / que les circonstances de la révocation du président, laquelle
peut intervenir à tout moment, ne peuvent être considérées
comme brutales que si le principe de la contradiction n'a pas été
respecté ; qu'en l'espèce, la société établissait
que la révocation de M. X... n'était nullement intervenue dans
des circonstances brutales, dès lors que c'était à l'initiative
de M. X... lui-même que l'assemblée générale (le
conseil d'administration) du 29 janvier 1998 avait été convoquée
et qu'il y était assisté de son conseil ; qu'en affirmant néanmoins
que ces deux éléments étaient sans incidence sur le caractère
abusif ou non de la révocation, quand ils établissaient au contraire
le respect manifeste du principe de la contradiction et partant l'absence de
brutalité de la révocation, la cour d'appel n'a pas donné
de base légale à sa décision au regard de l'article 110
de la loi du 24 juillet 1966 devenu l'article L. 225-47 du Code de commerce
;
3 / que les juges sont tenus de motiver leur décision et de préciser
les éléments sur lesquels ils la fondent ; qu'en l'espèce,
la cour d'appel s'est pourtant contentée d'affirmer "qu'il était
suffisamment établi que La Crau a dépêché sur place
un certain M. Y..., époux de la secrétaire générale
du groupe, pour dénigrer le président auprès des salariés"
; qu'en statuant ainsi sans préciser sur quels éléments
elle se fondait pour l'établir, la cour d'appel a violé l'article
455 du nouveau Code de procédure civile ;
4 / que les juges ne peuvent dénaturer les écrits clairs et précis
soumis à leur appréciation ; qu'en l'espèce, il résultait
d'attestations versées aux débats par M. X..., de MM. Z..., A...
et B... que M. Y..., mari de la secrétaire générale du
groupe, serait intervenu début janvier 1998 dans l'entreprise en informant
les salariés qu'il "fallait oublier M. X... et que le nouveau patron
c'était lui" ; qu'en affirmant néanmoins qu'il résultait
de ces attestations que la société La Crau avait dépêché
M. Y... pour dénigrer le président auprès des salariés,
la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu, par une décision motivée exempte de dénaturation, que la société La Crau avait dépêché sur place M. Y..., époux de la secrétaire générale du groupe, pour dénigrer le président auprès des salariés, ce dont il résultait que la révocation de celui-ci avait été accompagnée de circonstances portant atteinte à sa réputation, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deux premières branches du moyen, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Mais sur les cinquième et sixième branches du moyen :
Vu l'article 1382 du Code civil, ensemble l'article L. 225-47 du Code de commerce
;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que seul peut être
réparé le préjudice trouvant sa cause dans le fait qui
donne lieu à responsabilité ;
Attendu que pour confirmer le jugement ayant condamné les sociétés
X... et La Crau à payer à M. X... la somme de 1 000 000 francs
à titre de dommages-intérêts, l'arrêt, après
avoir relevé que ce dernier ne peut évaluer son préjudice
à 6 000 000 francs en excipant essentiellement d'une perte de revenus
et qu'il ne peut prétendre qu'il serait resté président
pendant dix ans, retient que la perte d ' une chance a été justement
appréciée par les premiers juges ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le préjudice constitué
par la perte d ' une chance de conserver les fonctions est sans lien avec les
fautes commises lors de la révocation, la cour d'appel a violé
les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné
la société Etablissements X... et compagnie et la société
Compagnie agricole de la Crau à payer à M. X... 1 000 000 francs
à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 20
octobre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;