Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 4 février 2010

N° de pourvoi: 08-70373
Non publié au bulletin Cassation


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1384, alinéa 1er, du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que le 10 octobre 2003, un incendie s'est déclaré dans la maison d'habitation de M. et Mme X... et l'a endommagée ; qu'une expertise ordonnée en référé ayant établi que l'incendie avait pris naissance dans le sèche-linge de marque Whirlpool, par suite d'un échauffement de cet appareil, M. et Mme X... et leur assureur, la sociéte Les Mutuelles régionales d'assurances devenue société Thelem assurances, ont assigné en responsabilité et réparation la société Sogara, propriétaire du magasin "Carrefour" où ils avaient acquis cet appareil le 13 novembre 1999, et la société Whirlpool France ;

Attendu que pour déclarer la société Whirlpool responsable du dommage subi par M. et Mme X... et la condamner à leur payer diverses sommes, l'arrêt énonce qu'il ressort du rapport d'expertise de M. Z... que, s'il est patent que le feu est parti du sèche-linge fabriqué par la société Whirlpool, les causes de ce départ de feu sont ignorées ; qu'aucun vice de l'appareil n'a été mis en évidence ni aucune faute en relation avec l'incendie à l'encontre de M. et Mme X... et de ladite société ; que lorsque la chose à l'origine du dommage a un dynamisme propre et dangereux, ce qui est le cas de ce sèche-linge à la fois chauffant et soufflant, doté d'un dynamisme interne qui lui est propre, et dont les potentialités de mise à feu, selon l'expert, existent au regard de ses effets de chauffe et de ses effets électrostatiques, il est acquis que la responsabilité du fabricant en sa qualité de gardien de la structure peut être mise en cause, et qu'il lui appartient, pour s'exonérer de sa responsabilité, de démontrer l'existence d'un cas fortuit ou de force majeure, ou d'une cause étrangère ; que la société Whirlpool ne rapporte pas cette preuve ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que les causes de l'incendie étaient ignorées et que l'appareil était exempt de vices, et alors qu'un sèche-linge, à raison d'une potentialité de mise à feu au regard des effets de chauffe et des effets électrostatiques indissociables des propriétés chauffantes et soufflantes qui le rendent conformes à sa destination, ne constitue pas, de ce seul fait, une chose dotée d'un dynamisme propre et dangereux par nature, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Whirlpool France

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit la société WHIRLPOOL responsable du dommage subi par les époux X... et de l'avoir condamnée à payer à la société THELEM et aux époux X... différentes sommes,

AUX MOTIFS QU' il ressort du rapport de l'expert que si le feu est parti du sèche linge fabriqué par la société WHIRLPOOL, les causes de ce départ de feu sont ignorées : aucun vice de l'appareil n'a été mis en évidence et aucune faute en relation avec l'incendie n'est établie ni à l'encontre des époux X... ni à l'encontre de la société WHIRLPOOL ; que lorsque la chose à l'origine du dommage a un dynamisme propre et dangereux, ce qui est le cas de ce sèche linge à la fois chauffant et soufflant, doté d'un dynamisme interne qui lui est propre et dont les potentialités de mise à feu selon l'expert judiciaire existent au regard de ses effets de chauffe et de ses effets électrostatiques, il est acquis que la responsabilité du fabricant en sa qualité de gardien de la structure peut être mise en cause et qu'il lui appartient de démontrer pour s'exonérer de sa responsabilité l'existence d'un cas fortuit ou de force majeure ou d'une cause étrangère ; que la société WHIRLPOOL ne rapporte pas cette preuve ; qu'elle invoque les dispositions de l'article 1384 al 2 du code civil selon lesquelles celui qui détient à un titre quelconque tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance ne sera responsable vis à vis des tiers des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable ; que certes, les dommages invoqués par les époux X... ont été causés par l'incendie et la société WHIRLPOOL a la qualité de gardienne de la structure du sèche ligne où le feu a pris naissance ; mais si aucune faute n'est établie à son encontre, elle ne détenait pas au sens de l'article 1384 al 2 du code civil le sèche linge litigieux puisqu'elle était dépourvue de tout pouvoir d'intervention sur celui-ci ; que par ailleurs, les époux X... acquéreurs de la machine et propriétaires de l'immeuble où elle était déposée ne sont pas des tiers au sens de l'article 1384 al 2 du code civil ; que celui-ci n'est donc pas applicable dans le présent litige,

1) ALORS QUE la distinction entre la garde de la structure et celle du comportement n'est applicable qu'aux choses animées d'un dynamisme propre et intrinsèquement dangereuses en raison de propriétés explosives, ou devenues dangereuses en raison d'un vice ; qu'un sèche linge, qui possède des propriétés chauffantes mais pas explosives, n'est pas une chose intrinsèquement dangereuse ; que la cour d'appel a par ailleurs constaté que le sèche-linge litigieux n'était pas affecté d'une défectuosité le rendant dangereux ; qu'en retenant néanmoins la responsabilité de la société WHIRLPOOL en tant que gardienne de la structure du sèche-linge, la cour d'appel a violé l'article 1384 al 1 du code civil ;

2) ALORS QUE, subsidiairement, en cas d'incendie ayant son origine dans une chose, la responsabilité du détenteur s'apprécie au regard des conditions posées par l'article 1384 al 2 du code civil ; que le détenteur au sens de ce texte correspond au gardien au sens de l'article 1384 al 1 du code civil ; que le détenteur peut ainsi être le gardien de la structure, quand bien même il n'appréhende pas matériellement la chose siège du sinistre ; que sa responsabilité est engagée non seulement envers les tiers mais encore à l'égard de l'utilisateur de la chose siège du sinistre ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel, qui a énoncé que la société WHIRLPOOL si elle était la gardienne de la structure n'était pas la détentrice au sens de l'article 1384 al 2 du code civil, a violé ce texte ;

3) ALORS QU'en déclarant la société WHIRLPOOL responsable des conséquences de l'incendie ayant eu son siège dans le sèche linge dont elle avait la garde, sans relever à son encontre de faute, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 al 2 du code civil.

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 5 octobre 2006

N° de pourvoi: 04-18775
Non publié au bulletin Cassation
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1384, alinéa 1er, du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., alors qu'il cuisinait au domicile de M. Y..., a placé une friteuse sur le feu et s'est absenté quelques instants ; qu'ayant constaté à son retour que la friteuse avait pris feu, et essayé en vain de la retirer, la poignée droite de l'appareil s'étant brisée, il a tenté d'éteindre l'incendie en jetant le contenu d'une casserole d'eau sur la friteuse, provoquant ainsi un retour de flamme qui lui a occasionné diverses brûlures ; qu'il a assigné M. Y... et son assureur, la société Rhodia assurances, en responsabilité et indemnisation devant le tribunal de grande instance, sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du code civil ;
Attendu que, pour débouter M. X... de ses demandes l'arrêt énonce que le premier juge a retenu qu'au moment où M. X... était rentré dans la cuisine il avait souhaité retirer la friteuse du feu mais que la poignée de celle-ci s'était cassée et que dès lors il était démontré que la garde de la structure de la friteuse était restée à M. Y... ; que ce dernier ne fait nullement mention de la rupture de la poignée droite de la friteuse et, qu'à supposer ce fait établi, il n'est pas à l'origine des blessures de M. X... qui, selon sa déclaration, se trouve dans deux éléments qui lui sont imputables, le premier est le fait d'avoir oublié la friteuse sur le feu, ce qui a été à l'origine de l'inflammation de l'huile bouillante, et le deuxième de ne pas avoir eu le réflexe de jeter un élément tel qu'une couverture sur l'huile mais d'y avoir jeté de l'eau, ce qui est à l'origine immédiate de ses blessures ; qu'il ne peut donc être tiré de ces éléments que l'éventuelle rupture de la poignée droite de la friteuse est à l'origine de l'accident et traduirait la permanence de la garde de la structure de la friteuse à M. Y... ; que l'origine de l'incendie et de l'accident n'est pas dans une défectuosité de la structure de l'engin mais bien dans une défectuosité du comportement de cet engin, comportement dont M. X... avait l'exclusive garde et qu'il a détourné de sa fonction normale en omettant de le surveiller par rapport à sa dangerosité potentielle ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résultait pas de ses constatations que la garde de la chose dont M. Y... était propriétaire avait été transférée à M. X..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 23 septembre 2004

N° de pourvoi: 03-10672
Non publié au bulletin Cassation

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., alors qu'il se tenait sur un plateau ancré à un échafaudage emprunté à la société Cape Contract Socap pour réaliser des travaux que cette entreprise lui avait confiés, a été blessé à la suite de la chute de ce plateau ; qu'il a assigné en réparation cette société et son assureur, la société Guardian risques, aux droits de laquelle agit la compagnie Le Continent assurances, ainsi que la Caisse régionale d'assurance maladie des artisans commerçants de Picardie, sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Attendu que, pour débouter M. X... de ses demandes, l'arrêt retient, tant par motifs propres qu'adoptés des premiers juges, que c'est la défaillance du plan de travail sur lequel il se trouvait qui a entraîné l'accident ; qu'il s'agissait d'un plateau que M. X... avait emprunté à la société Cape Contract Socap et qu'il avait lui-même monté sur l'échafaudage après avoir procédé à un examen visuel qui, de son propre aveu, n'avait révélé aucune défectuosité ; que c'est la rupture des soudures des crochets de maintien du plateau au niveau de l'ancrage sur les tubulaires de l'échafaudage qui a provoqué la chute de M. X... sans que l'origine de cette rupture ne puisse être établie ; qu'au regard des dispositions de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, si le propriétaire de la chose est présumé en être le gardien, il peut toutefois établir qu'il y a eu transfert de cette garde en prouvant qu'il a été privé de l'usage, du contrôle et de la direction de cette chose ; qu'en l'espèce, le jour de l'accident, M. X... avait la libre disposition du plan de travail litigieux ; que dans ces conditions, il est établi qu'au moment des faits il était gardien du plateau ; que s'agissant d'une chose inerte et non douée d'un dynamisme propre et dangereux, la distinction entre garde de la structure et garde du comportement ne saurait être opérée ; qu'en outre, il n'est pas établi que le plateau était en mauvais état ou qu'il présentait un vice interne qui soit à l'origine de la défaillance impliquant l'accident ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la chute du plateau sur lequel se tenait M. X..., qui n'avait pu déceler aucune défectuosité à l'examen visuel, avait été provoquée par la rupture des soudures des crochets qui l'ancraient sur les tubulaires de l'échafaudage, ce dont il résultait que le plateau était affecté d'un vice interne et qu'ainsi la garde de sa structure n'avait pu être transférée à la victime, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE


Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 20 novembre 2003

N° de pourvoi: 01-17977
Publié au bulletin Rejet.
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 10 septembre 2001) que Richard X..., fumant depuis l'âge de treize ans, soit depuis 1963, des cigarettes "Gauloises", et victime en 1988 d'un cancer du poumon puis en 1995 de cancers du poumon et de la langue, ainsi que son épouse née Lucette Y..., leurs enfants Sébastien et Richard- Pierre X... et Mme Charlotte Z... veuve Y..., grand-mère de Mme X..., ont assigné la société anonyme Service d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes (la Seita), devenue société Altadis, sur le fondement des articles 1382 et 1384, alinéa 1er, du Code civil, en réparation des préjudices causés par la consommation du tabac ; que la Caisse primaire d'assurance maladie du Loiret est intervenue à l'instance ; qu'après le décès de Richard X... et de Charlotte Z... veuve Y..., l'action a été poursuivie par leurs héritiers (les consorts X...) ; qu'un jugement a partiellement accueilli leurs demandes et a ordonné une expertise avant dire droit sur l'évaluation des dommages ;

Sur le premier moyen :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leurs demandes dirigées contre l'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) Seita pour la période allant de 1963 à 1976 année de l'adoption de la loi "Veil", alors, selon le moyen :
1 ) que tout fabricant d'un produit susceptible d'avoir un effet nocif pour la santé doit en informer le consommateur ; que pareille obligation d'information pré-contractuelle pèse sur le fabricant de tabac - dont les effets nocifs étaient déjà avérés en 1963 - qu'il s'agisse d'une personne morale de droit privé ou de droit public, soumise ou non à la tutelle de l'Etat ; qu'en retenant cependant le contraire motif inopérant pris de ce que l'EPIC Seita avait pour seule mission de maximiser les recettes de l'Etat dans le secteur du tabac, mission étrangère voire incompatible, avec une obligation d'information sur les dangers du tabac, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
2 ) qu'en tout état de cause, l'EPIC Seita, à défaut de pouvoir de son propre chef directement informer les consommateurs sur les dangers du tabac, devait à tout le moins - comme elle en avait le pouvoir - suggérer et inciter l'Etat à prendre les mesures nécessaires pour assurer la diffusion de cette information essentielle ; qu'en s'abstenant de le faire, le fabricant de tabac a commis une faute ; qu'en refusant de sanctionner le comportement complaisant de la Seita, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, que l'arrêt retient que par lettre du 10 juin 1964, le ministre de la Santé publique et de la Population, au fait des conclusions des études françaises et étrangères sur les risques liés à l'abus de la consommation du tabac, notamment celui de cancer du poumon, proposait au ministre des Finances d'envisager des campagnes sanitaires, puis, après deux vaines lettres de rappel des 9 septembre 1964 et 14 mars 1968, lui proposait par lettre du 18 mars 1968 d'envisager l'impression sur les paquets de cigarettes de la mention "la consommation excessive des cigarettes peut être nuisible pour la santé" ; que de plusieurs courriers internes émanant du ministère de la Santé publique, il ressortait que le ministère des Finances ne répondait pas à ces propositions et que, notamment après une réunion de l'Assemblée mondiale de la santé établissant que la consommation abusive de tabac était cause d'une surmortalité et d'une surmorbidité des fumeurs, par cancers du poumon, du larynx et de la bouche, l'obstacle essentiel à la mise en oeuvre des mesures préconisées ne pouvait résider que "dans la réticence que ne manquerait de susciter une telle action, surtout au ministère de l'Economie et des Finances qui y verrait un risque sérieux pour l'activité du Seita et le rendement de la fiscalité sur le tabac" ; qu'encore, par lettre du 18 décembre 1971, le ministre de l'Economie et des Finances, s'adressant au ministre de la Santé publique et de la Sécurité sociale, après avoir relativisé les risques dénoncés par son collègue, écrivait que si l'apposition sur les paquets de cigarettes d'un message sanitaire lui paraissait une suggestion intéressante en son principe, "elle ne semblait pas avoir donné des résultats très caractérisés dans les pays où elle avait été rendue obligatoire", en proposant éventuellement et sous réserve d'études, d'autres modalités d'information des consommateurs par l'intermédiaire des débitants de tabac ; qu'il ressort de ces correspondances que les autorités gouvernementales, dont le ministre des Finances, autorité de tutelle de la Seita, informées dès avant 1964 des dangers liés à la consommation excessive de tabac, divergeaient sur le caractère impératif et sur les modalités de l'information à fournir à la population ;
Que de ces constatations et énonciations découlant d'une appréciation souveraine des éléments de preuve soumis au débat, la cour d'appel a pu déduire qu'il ne pouvait être reproché à la Seita d'avoir, antérieurement à la loi du 10 juillet 1976 dite "loi Veil", manqué à une obligation d'information à l'égard des fumeurs ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leurs demandes dirigées contre l'EPIC Seita devenu en 1980 société d'économie mixte Seita puis en 1995 société anonyme Seita, pour la période allant de 1976 à 1999, année du décès de Richard X..., alors, selon le moyen :
1 ) que, en cas de concours entre une faute simple et une faute intentionnelle, la seconde efface la première et devient la cause exclusive du dommage ; qu'en l'espèce, à supposer même que Richard X... ait commis une faute en continuant de fumer, nonobstant les risques de cancer connus du public à partir de 1976, cette faute s'effaçait devant les fautes intentionnelles de la SA Seita, dont certaines ont été pénalement sanctionnées, consistant à minimiser les dangers du tabac ; qu'en retenant cependant que les fautes commises par la SA Seita n'avaient joué aucun rôle dans le décès de M. X..., lors même qu'il s'agissait de fautes intentionnelles exclusives du dommage, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
2 ) que dans leurs conclusions d'appel récapitulatives, les consorts X... faisaient expressément valoir que la SA Seita avait commis une faute en s'abstenant de prendre des mesures de prévention destinées à inciter les fumeurs à arrêter de fumer ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt retient que la loi "Veil" a imposé l'indication sur les paquets de cigarettes des taux de nicotine et goudron, ainsi qu'un avertissement sanitaire sur le danger de l'abus de la consommation du tabac ; que les consorts X... soutiennent que la Seita n'a pas respecté les prescriptions de la loi en tentant d'en réduire la portée ou en donnant au message sanitaire un caractère technocratique et ridicule aux yeux des consommateurs ; que cependant, Richard X..., âgé de 27 ans en 1976, ne pouvait alors ignorer les méfaits de l'usage abusif du tabac, non seulement du fait de l'information légale portée sur les paquets de cigarettes, mais encore du fait de toutes les informations présentées à la connaissance de tous par les médias, presse et radio-télévision, comme l'établissent à suffisance 530 pièces produites par la Seita ; que Richard X..., gros fumeur, depuis l'âge de treize ans, de Gauloises bleues sans filtre, à raison d'au moins deux paquets par jour selon l'aveu de ses proches, était seul à pouvoir prendre les décisions qui s'imposaient ; que si l'avertissement sanitaire légal pouvait influencer un fumeur récent ou une personne envisageant de fumer, il était improbable, même au regard du caractère "addictif" du tabac sur lequel insistent les consorts X..., que Richard X..., qui avait assisté en 1980
au décès par cancer du poumon d'un membre de sa famille, qui avait été lui-même atteint d'un cancer en 1988 sans cesser de fumer, eût été influencé par ce message,même s'il n'était pas rigoureusement conforme à la loi ; qu'il était ainsi pratiquement certain que même en retenant la thèse des consorts X... suivant laquelle l'information légale due par la Seita, en application de la loi du 10 juillet 1976, aurait été faite de façon critiquable, Richard X... n'aurait pas eu alors une attitude différente et que le dommage se serait produit de toutes façons ; qu'il n'est pas démontré, d'une part que la "désinformation" que les consorts X... imputent au directeur de la Seita, et qui se serait caractérisée par une seule communication dans une publication destinée aux seuls débitants de tabac ou par la publicité, alors non réglementée, d'autre part que l'ensemble des fautes qu'ils reprochent à la Seita postérieurement à 1976, aient joué quelque rôle que ce soit dans l'habitude prise depuis longtemps par leur auteur ; qu'ainsi , en l'absence de lien de causalité, il n'apparaît pas nécessaire d'examiner la réalité des manquements à l'obligation d'information allégués par les consorts X... et la responsabilité de la Seita pour la période postérieure à 1976 ne peut être retenue ;
Que de ces constatations et énonciations découlant d'une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis au débat, la cour d'appel, répondant aux conclusions, a pu déduire que le lien de causalité entre le dommage invoqué par les consorts X... et les fautes alléguées de la Seita n'était pas établi ;
D'ou il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur le troisième moyen :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leurs demandes en réparation pour la période allant de 1963 à 1999, alors, selon le moyen :
1 ) que les cigarettes sont, en l'état de leur caractère additif et cancérigène, des choses dangereuses dotées d'un dynamisme propre, en sorte que le fabricant est gardien de leur structure ; qu'en retenant cependant le contraire, la cour d'appel a violé l'alinéa 1er de l'article 1384 du Code civil ;
2 ) que la structure dangereuse d'une chose est réputée être à l'origine exclusive du dommage subi par son utilisateur, sauf à ce que ce dernier ait été en mesure, lors de l'usage de la chose, d'en maîtriser le danger ; qu'un fumeur n'est jamais en mesure de contrecarrer les méfaits de la cigarette puisque ces derniers sont provoqués par la seule consommation du produit ; qu'il en va d'autant plus ainsi du fumeur excessif qui, par définition, est celui qui est sous la dépendance directe du produit et qui a perdu tout pouvoir de contrôle ; qu'en décidant que le comportement de Richard X... constituait la cause de son dommage, la cour d'appel a violé l'article 1384, alinéa 1er du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient que le dommage causé par les cigarettes est dû de manière indissociable aux produits contenus et dégagés par elles, nicotine, goudron, gaz, et au comportement du fumeur qui consomme excessivement ce produit, que la garde de la structure suppose que le fabricant d'un produit même dangereux ait le pouvoir de surveiller, de contrôler les éléments de la chose et de prévenir le dommage ; qu'il n'est pas démontré que la Seita ait fabriqué ses cigarettes de manière anormale compte tenu des connaissances actuelles ; que la théorie distinguant garde de la structure et garde du comportement, applicable uniquement aux choses dotées d'un dynamisme propre et dangereuses ou encore dotées d'un dynamisme interne et affectées d'un vice interne, n'est pas applicable aux cigarettes fumées par Richard X... ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que la responsabilité de plein droit de la Seita du fait des cigarettes détenues par Richard X..., qui en était le seul gardien, ne pouvait être recherchée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

Publication : Bulletin 2003 II N° 355 p. 289

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 11 avril 2002

N° de pourvoi: 00-13387
Publié au bulletin Rejet.

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Bordeaux, 11 janvier 2000), qu'un véhicule automobile appartenant à la société Fondis, assuré auprès de la compagnie UAP, a été percuté et endommagé dans un accident de la circulation dans lequel a été impliqué un camion dont deux roues et un tambour de frein se sont détachés, appartenant à M. X..., transporteur routier, et conduit par son préposé, M. Y... ; que cette société et son assureur, qui avaient assigné MM. X... et Y... en réparation de leur préjudice sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985, se sont désistés à l'égard du commettant, mis en liquidation judiciaire ;
Attendu que la compagnie Axa assurances, venant aux droits de la compagnie UAP, et la société Fondis font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes à l'encontre de M. Y..., tendant à obtenir réparation des conséquences dommageables de l'accident, alors, selon le moyen, que le conducteur victime d'un accident de la circulation qui n'a commis aucune faute est en droit de demander la réparation de son préjudice au conducteur d'un autre véhicule impliqué dans cet accident, fût-il le préposé du gardien de ce véhicule agissant dans l'exercice de ses fonctions ; qu'en l'espèce, si la cour d'appel admet l'implication du poids lourd conduit par M. Y... dans l'accident, elle considère cependant que le fait, pour ce dernier, de ne pas avoir la garde des éléments de la structure du camion ayant causé le dommage constitue une cause d'exonération totale vis-à-vis de la société Fondis et de son assureur qui lui demandaient réparation du préjudice subi ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé par fausse application les articles 1 et 2 de la loi du 5 juillet 1985 ;

Mais attendu que l'arrêt retient que M. X..., propriétaire du camion, n'a pas transféré à son préposé, dont il est civilement responsable, la garde des éléments de la structure du véhicule ayant causé le dommage et qu'il était, seul, tenu de conserver en bon état de fonctionnement et d'assurer ; que dès lors, comme exclusivement exercée contre le préposé qui ne disposait pas de l'ensemble des pouvoirs d'usage, de direction et de contrôle du véhicule impliqué, l'action de la société Fondis et de l'assureur de cette dernière ne peut être accueillie ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu décider, hors de toute violation des textes cités au moyen, que la présomption de garde de l'instrument du dommage pesant sur M. X..., propriétaire du véhicule impliqué et employeur de M. Y..., n'était pas écartée par la preuve d'un transfert de celle-ci, et qu'en conséquence, son préposé, en sa qualité de conducteur du véhicule impliqué, ne devait pas réparation du préjudice subi par la victime, sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi.

Publication : Bulletin 2002 II N° 72 p. 60

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 14 janvier 1999

N° de pourvoi: 97-11527
Publié au bulletin Rejet.
Sur le premier moyen et le second moyen, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 novembre 1996), que M. X..., qui achetait des plaques de bois aggloméré dans un magasin exploité par la société des Etablissements Leroy Merlin (la société), en utilisant un chariot mis à la disposition de la clientèle, a été blessé par la chute de ce chariot et des marchandises qu'il y avait déposées ; qu'il a assigné, en réparation de son préjudice, la société et son assureur, la compagnie Cigna ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté cette demande, alors, selon le moyen, que, d'une part, selon l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, qui a été violé, conserve la garde de la chose confiée à un tiers le propriétaire qui n'a pas établi que ce tiers avait reçu toute possibilité de prévenir le préjudice qu'elle pouvait causer, ce qui implique, à la charge du propriétaire, l'obligation d'informer de manière suffisante le détenteur de la chose sur le risque qu'elle peut présenter ; que, d'autre part, le juge ne peut, sans violer l'article 16 du nouveau Code de procédure civile, écarter des débats un constat d'huissier de justice dressé à la demande d'une des parties, dès l'instant que son adversaire a été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'enfin, la société propriétaire d'un magasin a l'obligation d'informer sa clientèle d'une manière ou d'une autre sur les précautions à observer pour l'utilisation des chariots qu'elle met à sa disposition pour le transport des marchandises et sur les risques liés à leur usage ;

Qu'en ne relevant pas le manquement à cette obligation, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que la responsabilité du dommage causé par le fait d'une chose est liée à l'usage et aux pouvoirs de direction et de contrôle qui caractérisent la garde ;

Et attendu que l'arrêt, après avoir relevé, par motifs adoptés, que le chariot en cause ne pouvait être considéré comme une chose intrinsèquement dangereuse, énonce exactement qu'en disposant librement du chariot hors toute directive de la société quant à l'usage, le contrôle et la direction de celui-ci qui lui avait été prêté à l'état inerte et qui était dépourvu de tout dynamisme propre, M. X... s'en était vu transférer la garde dans toutes ses composantes ;

Que l'arrêt retient d'autre part, après avoir souverainement apprécié la valeur probante d'un constat d'huissier, et des témoignages soumis au débat, qu'on ne pouvait reprocher à la société une absence de notice d'utilisation et de fonctionnement des chariots, soit sur ces derniers, soit sur les murs du magasin, tant il était évident que l'extrême simplicité d'emploi de ces biens tombait sous le sens de tout un chacun, et qu'on ne pouvait pas non plus reprocher à la société l'absence d'indication de la charge maximale admise par ce type de chariot ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a déduit, à bon droit, sans violer le principe de la contradiction, que la société, qui n'avait pas la garde du chariot lors de l'accident, n'avait pas commis de faute en relation de causalité avec le dommage subi par M. X... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

Publication : Bulletin 1999 II N° 13 p. 8

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du mercredi 16 janvier 1991

N° de pourvoi: 89-18525
Publié au bulletin Rejet.

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 11 mai 1989), rendu sur renvoi après cassation, que leur récepteur de télévision ayant pris feu et provoqué un incendie dans leur pavillon, les époux X... ont assigné, en réparation de leurs dommages sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, le fabricant de l'appareil, la société ITT Océanic, et son assureur, la compagnie Union des assurances de Paris, qui ont appelé en garantie le vendeur, la société Carrefour ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir condamné la société ITT Océanic et son assureur à réparer le dommage provoqué par l'incendie, alors qu'ayant constaté que le sinistre avait été directement causé par la combustion spontanée du téléviseur, l'arrêt attaqué, qui n'a pas tiré les conséquences légales de cette constatation impliquant que l'incendie avait pris naissance dans l'appareil détenu par le propriétaire de l'immeuble auquel il s'était communiqué, et qu'en conséquence, la responsabilité du fabricant ne pouvait être engagée que sur la base d'une faute, aurait violé l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt énonce à bon droit que les dispositions de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ne se trouvent pas exclues par celles de l'alinéa 2 de ce texte lorsque les dégâts sont dus à des causes antérieures à l'incendie telles l'explosion ou l'incendie d'un poste de télévision, lequel n'en a été que la conséquence, les effets de l'incendie étant indissociables de ceux de ces causes antérieures ;
Et attendu qu'ayant relevé que le fabricant avait conservé la garde de la structure de l'appareil et que les époux X... n'avaient commis aucune faute, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi

Publication : Bulletin 1991 II N° 20 p. 10

 

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du mercredi 30 novembre 1988

N° de pourvoi: 86-14325
Publié au bulletin Rejet .
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 3 mars 1986), que M. Y... vendeur d'appareils de radio et de télévision revendit un téléviseur à Mme X... assurée à la société des assurances mutuelles de France (GAMF), un téléviseur qu'il avait acquis du fabricant, la société Téléavia ; que l'implosion de l'appareil a occasionné des dégâts à l'appartement de Mme Marouze ; que la GAMF assigna la société Téléavia et la société Radio-Val venant aux droits de M. Y... en réparation du préjudice subi ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé condamnation contre la société Téléavia in solidum avec M. Y... en paiement d'une certaine somme au profit du GAMF, alors qu'en estimant que le constructeur du poste de télévision avait conservé la garde de sa structure bien qu'il n'en fut plus propriétaire depuis sept ans, sans rechercher les circonstances de nature à caractériser un quelconque pouvoir de surveillance ou de contrôle exercé sur le poste par le constructeur, la cour d'appel aurait privé sa décision de base légale ;

Mais attendu que, par motifs adoptés, la cour d'appel constate qu'il s'agit d'un vice caché de fabrication, que, dès lors, sa décision se trouve justifiée au regard de l'article 1641 du Code civil seul applicable en l'espèce ;

Sur le second moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déduit par motifs adoptés l'antériorité du vice par rapport à la vente du seul fait que ce vice affectait les organes internes de l'appareil, sans rechercher les circonstances précises de nature à établir cette antériorité, et d'avoir ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1641 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient qu'il résulte du rapport de l'expert que le sinistre a pour origine un vice caché du téléviseur et que l'entreprise Radio-Val n'a plus eu à intervenir sur cet appareil qui a fonctionné normalement jusqu'au jour de l'incendie ;
Qu'en statuant ainsi la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi

Publication : Bulletin 1988 II N° 240 p. 130

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du mercredi 4 novembre 1987

N° de pourvoi: 86-14476
Non publié au bulletin Rejet

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué (Agen, 13 mars 1986) et les productions, que M. Z... ne parvenant pas à dévisser le capuchon d'une bouteille de gaz butane qu'il avait achetée chez un quincailler, M. Y..., a eu recours à divers ustensiles pour parvenir à ses fins ; qu'au cours de l'opération le bouchon de la bouteille, qui s'était solidarisé avec le capuchon, se dévissa également et laissa échapper le gaz qui s'est alors enflammé au contact du feu de la cheminée à proximité de laquelle s'était placé M. Z... ; que celui-ci et son épouse ont été blessés tandis que leur maison a été détruite par l'incendie qui s'était propagé ; qu'ils ont assigné le fabricant de la bouteille, la société "Compagnie des Gaz et Pétroles Primagaz" (Primagaz) et leur vendeur afin d'être indemnisés de leurs préjudices ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré Primagaz partiellement responsable des conséquences de l'accident alors que, d'une part, en laissant incertain le fondement de sa condamnation au regard du principe de non-cumul des deux ordres de responsabilité, alors que, d'autre part, en ne procédant pas à la détermination nécessaire à la mise en jeu de la responsabilité contractuelle du fabricant du vice technique allégué, alors qu'en outre, à supposer que l'incendie ait été provoqué par la bouteille de gaz dont Primagaz aurait eu la garde de la structure, en n'établissant pas une faute imputable à cette société, et alors qu'enfin, en ne faisant pas apparaître le défaut de structure reproché, la Cour d'appel aurait privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1641, 1384, alinéa 1, et 1384, alinéa 2, du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt, après avoir énoncé que Primagaz avait conservé la garde de la structure de la bouteille dont le gaz avait provoqué, en s'échappant et en s'enflammant, divers préjudices aux époux Z... et que cette société avait, en conséquence, engagé sa responsabilité en application de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, retient, appréciant souverainement la valeur et la portée des preuves qui lui étaient soumises, que l'irruption soudaine du gaz avait trouvé son origine dans le processus d'ouverture et le dispositif interne de la bouteille dont seule Primagaz avait le pouvoir de contrôler le dynamisme propre ; Et attendu que Primagaz n'a pas soutenu devant la Cour d'appel que les époux Z... auraient dû apporter la preuve de sa faute pour obtenir réparation des dommages qu'avait causés l'incendie ; D'où il suit que le moyen est, en sa troisième branche, nouveau et mélangé de fait et de droit, partant irrecevable, et qu'il est mal fondé pour le surplus ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du mardi 26 mars 1985

N° de pourvoi: 83-11944 83-13157
Publié au bulletin
Rejet
sur le moyen unique : attendu, selon l'arret attaque, qu'au cours d'une seance de demontration organisee par la societe cristal, portant sur le fonctionnement d'un compresseur d'air, m. de y... qui assistait a cette demonstration fut blesse par la projection d'un bouchon metallique equipant l'appareil, arrache sous l'effet de la pression ;
qu'il a assigne en reparation la societe cristal ;
que celle-ci a appele en garantie la societe des compresseurs bernard (la societe bernard) constructeur de cet appareil ;

attendu que la societe cristal fait grief a l'arret confirmatif de ce chef, de l'avoir declare entièrement responsable par application de l'article 1384, alinea 1er, du code civil et d'avoir limite a la moitie de cette responsabilite la garantie due par la societe bernard alors que, d'une part, en se bornant a se referer aux conclusions du rapport, non homologue, de l'expert, la cour d'appel aurait omis de repondre aux conclusions par lesquelles la societe cristal soutenait qu'il n'etait pas etabli que la pression etait excessive eu egard a la puissance du compresseur et qu'il n'existait aucune relation entre l'intervention exterieure de l'utilisateur de l'engin et l'accident du au seul vice de structure dont cet appareil anime d'un dynamisme propre, etait atteint et alors que, d'autre part, en deduisant que la societe cristal avait l'usage, la direction et le controle du compresseur du seul fait que son demonstrateur avait procede a des manipulations ayant concouru a la surpression, laquelle etait formellement deniee par la societe, la cour d'appel aurait prive sa decision de base legale pour n'avoir pas constate que l'utilisateur disposait d'un pouvoir de controle sur les organes internes de l'engin tels que le pas de vis du bouchon dont le vice de structure aurait cause l'accident ;

mais attendu qu'apres avoir releve que le prepose de la societe cristal assurait la manipulation du compresseur dont celle-ci etait proprietaire, l'arret retient que c'était l'utilisation qu'il en avait faite en dereglant intentionnellement les soupapes pour obtenir une pression anormale et en procedant a la fermeture des robinets de refoulement, qui avait provoque l'arrachement du bouchon par une pression supérieure a la limite, s'exercant sur des pieces d'une resistance insuffisante ;
que de ces seules enonciations, la cour d'appel répondant aux conclusions par des motifs adoptes du rapport d'expertise qu'elle a souverainement apprecie, a pu déduire que la societe cristal avait sur le compresseur au moment de l'accident les pouvoirs d'usage, de direction et de controle qui caractérisent la garde ;
qu'elle a ainsi legalement justifie sa decision ;

par ces motifs : rejette le pourvoi ;

Publication : Bulletin 1985 II N. 79 p. 51

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du lundi 20 juillet 1981

N° de pourvoi: 80-10450
Publié au bulletin
Cassation
sur le moyen unique :
vu l'article 1384, alinea 1er, du code civil, ensemble l'article 1315 du meme code ;
attendu que le gardien d'une chose responsable du dommage cause par celle-ci n'est exonere de la responsabilite par lui encourue que s'il prouve qu'il a ete mis dans l'impossibilite d'eviter ce dommage sous l'effet d'une cause etrangere qui ne peut lui etre imputee ;

attendu que, selon l'arret infirmatif attaque, dans le magasin ou elle etait employee, mlle y..., aujourd'hui mme x..., fut blessee par l'explosion d'une bouteille de cidre ; qu'elle a demande reparation de son dommage a la societe volcker, fournisseur du cidre ; que celle-ci a appele en garantie la societe bsn fabricant de la bouteille, et la societe anonyme centre distributeur de gros, qui avait livre la bouteille de cidre au magasin ; que la societe anonyme gedial aquitaine, proprietaire du fonds de distribution, est intervenue dans l'instance, ainsi que la caisse primaire d'assurance maladie des landes qui a reclame le remboursement de prestations ;
attendu que, pour debouter mme x... de sa demande fondee sur l'article 1384, alinea 1er, du code civil, l'arret enonce que le caractere spontane de l'explosion dont elle avait ete victime ne resultait que de ses declarations, les autres temoins n'ayant pas assiste a l'accident ;

qu'en se determinant ainsi, alors qu'il resulte des enonciations de l'arret que le dommage provenait de l'explosion de la bouteille de cidre qui avait en elle-meme un dynamisme propre et dangereux, et que, des lors, il n'appartenait pas a mme x... d'etablir que l'accident etait imputable a un fait exterieur a la chose, la cour d'appel, qui a renverse la charge de la preuve, a viole les textes susvises ;

par ces motifs :
CASSE ET ANNULE
Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 2 N. 170

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du mercredi 14 novembre 1979

N° de pourvoi: 77-15823
Publié au bulletin
Cassation
sur le moyen unique :
vu l'article 1384, alineas 1 et 2 du code civil;
attendu, selon l'arret confirmatif attaque, qu'un appareil recepteur de television fabrique par la societe itt oceanic et vendu a pessah par la federation nationale d'achats des cadres (fnac) ayant pris feu, l'incendie se communiqua a l'immeuble occupe par pessah, par la societe office de renovation immobiliere (ori), et par dame x... qui fut blessee; que celle-ci, la societe ori, pessah et son assureur la compagnie la protectrice, ainsi que la compagnie la lutece assureur de la societe proprietaire de l'immeuble ont reclame la reparation de leur prejudice a la societe itt oceanic et a son assureur l'union des assurances de paris, qui a appele la fnac en garantie; que la caisse primaire centrale d'assurance maladie de la region parisienne est intervenue;

attendu qu'apres avoir releve que la fnac etait deja intervenue a deux reprises pour reparer l'appareil, l'arret enonce, pour retenir la responsabilite de la societe itt oceanic, qu'etant anormal qu'un televiseur puisse s'enflammer spontanement, sa combustion etait liee a un defaut de structure particulier au poste qui possedait un dynamisme propre capable de se manifester dangereusement; qu'il ajoute que seul le constructeur de l'appareil detenait le controle de cette structure, des lors que la fnac n'avait commis aucune faute demontree dans son service apres vente; qu'en se bornant a ces enonciations la cour d'appel n'a pas mis la cour de cassation en mesure d'exercer son controle sur l'attribution de la qualite de gardien; en quoi, sa decision manque de base legale;
par ces motifs :
casse et annule
Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 2 N. 262

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du mercredi 7 décembre 1977

N° de pourvoi: 76-13138
Publié au bulletin
Cassation
sur le moyen unique : vu l'article 1384, alinea 1er, du code civil ;
attendu, selon l'arret confirmatif attaque que julien fut victime, dans l'exercice de ses fonctions medicales, d'une affection par l'inoculation accidentelle du vaccin bcg ;
qu'il a assigne l'institut pasteur en reparation du prejudice subi ;

attendu que, pour accueillir la demande sur le fondement de l'article 1384, alinea 1er, du code civil, l'arret releve que le vaccin bcg, fabrique par l'institut pasteur, avait ete l'element de base de l'affection, que julien n'avait ni la direction ni le controle de ce vaccin, et que ce dernier, compose pour partie de germes vivants, avait un dynamisme propre en dehors de son contenant, que la preuve d'une faute de julien n'etait ni rapattendu qu'en l'etat de ces seuls motifs desquels il ne resulte pas que l'institut pasteur puisse etre considere comme ayant eu, au moment des faits, la garde de la chose, cause du dommage, la cour d'appel n'a pas donne une base legale a sa decision ;

par ces motifs : casse et annule

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 2 N. 232 P. 169

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 13 décembre 1973

N° de pourvoi: 72-12915
Publié au bulletin REJET

sur le premier moyen : attendu, selon l'arret confirmatif attaque, que, sur une route, x..., conduisant la voiture du centre de promotion commerciale de cambrai, dans laquelle sa fille alors mineure avait pris place, arrivait a la hauteur de celle de desclos, qui trainait une caravane, appartenant a la societe apal (sapal), lorsqu'une roue de ladite caravane, insuffisamment serree, se detacha et roula sous l'automobile de x..., laquelle, desequilibree, se retourna sur la chaussee ;
que x... et demoiselle x... furent blesses, et le vehicule endommage ;
attendu que x..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de sa fille majeure, a assigne desclos en reparation du prejudice subi, sur le fondement de l'article 1384, alinea 1er du code civil ;
que les caisses primaires d'assurance maladie de la region parisienne et de cambrai sont intervenues a l'instance aux fins de remboursement des prestations servies aux victimes ;
que demoiselle x..., devenue majeure, a repris la procedure en son nom personnel ;
que le centre de promotion commerciale et son assureur, l'union des assurances de paris, ont demande, le premier l'indemnisation de son dommage materiel, la seconde le remboursement du versement fait a son assure ;
que desclos a appele en intervention forcee et garantie la societe sapal ;
que le fonds de garantie automobile est intervenu a l'instance ;

attendu qu'il est fait grief a l'arret, qui a retenu la responsabilite de desclos, d'avoir declare qu'il etait devenu le nouveau gardien de la caravane, laquelle ne lui aurait ete pretee que pour un voyage et un temps determines, dans le propre interet de la sapal, sans repondre a des conclusions relatives a la garde de la structure de la chose pretee par un professionnel tel que cette societe, et en envisageant a tort l'hypothese d'un changement de roue anterieur a la reprise, par ce professionnel a desclos, de ce vehicule, ou celle d'un tel changement pendant la duree du pret ;
mais attendu que l'arret releve que, desclos ayant remis le 3 mai 1969, sa caravane usagee a la societe sapal en paiement partiel d'une nouvelle caravane, et celle-ci n'ayant pu lui etre livree dans le delai prevu, ladite societe lui avait prete son ancienne caravane "pour le week-end du 31 mai au 2 juin", et que c'est a cette derniere date que l'accident s'etait produit : qu'apres avoir observe que le nouveau gardien d'une chose doit assumer envers les tiers les risques dommageables, meme ceux provenant d'un vice de la chose, sauf son recours contre celui de qui il la tient, l'arret enonce que la societe sapal, "en sa qualite de proprietaire, a prete la caravane a desclos pour que celui-ci l'utilise a son usage personnel comme il l'entendait ;
qu'il en avait la libre disposition pendant la duree d'un week-end pour une distance non determinee et un itineraire absolument libre" ;
attendu que, de ces constatations et enonciations, qui repondent aux conclusions dont elle etait saisie, la cour d'appel, qui n'a nullement fait etat, pour retenir la responsabilite de desclos envers les victimes, de l'eventualite d'un changement de roue anterieurement a la reprise ou posterieurement au pret, a pu deduire que ledit desclos avait recu sur la caravane les pouvoirs d'usage, de direction, de controle et de commandement, et qu'il devait, en tant que gardien, reparer entierement les dommages causes a x... et demoiselle x... ;
d'ou il suit que le moyen n'est pas fonde ;

sur le second moyen : attendu qu'il est fait grief a l'arret d'avoir deboute desclos de sa demande en garantie contre la sapal en relevant, non sans renverser la charge de la preuve, que, n'etant pas demontre que le remontage defectueux de la roue, qui n'etait pas celle d'origine, ait ete opere par ladite societe, celle-ci ne saurait etre responsable de ce defaut dont il n'etait pas prouve qu'elle l'ait connu ou meme soupconne et l'ait cache a l'emprunteur, alors, d'une part, que les juges n'auraient pas eu a envisager l'hypothese d'un changement de roue anterieur au 3 mai, des lors qu'etant devenue proprietaire de la caravane a cette date, la sapal aurait ete tenue, en sa qualite de vendeur professionnel, de son entretien et de son bon etat, qu'au surplus l'hypothese d'un changement de roue durant le week-end du 31 mai au 2 juin 1969 aurait ete invraisemblable, ainsi que desclos l'avait fait valoir dans des conclusions qui seraient restees sans reponse et qui auraient ete ainsi denaturees, et alors, d'autre part, qu'un vendeur professionnel serait necessairement cense connaitre les vices de la chose pretee ;
mais attendu que, tant par motifs propres que par ceux adoptes des premiers juges, l'arret enonce que l'information penale n'avait pas permis de determiner par qui l'operation defectueuse avait ete effectuee et a quel moment elle avait eu lieu ;
que desclos ne faisait nullement la preuve de l'existence d'un vice ou defaut de la chose au moment du pret ;
que par ces seuls motifs, qui, exempts de toute denaturation, relevent du pouvoir souverain appartenant aux juges du fond pour apprecier la valeur et la portee des elements de preuve qui leur sont soumis, la cour d'appel, non tenue de suivre les parties dans le detail de leur argumentation, a, sans intervertir la charge de la preuve, legalement justifie sa decision, qui, des lors, ne saurait etre atteinte par aucune des critiques du pourvoi ;
par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arret rendu le 29 mai 1972 par la cour d'appel d'angers.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 2 N. 335 P. 272

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mardi 4 décembre 1973

N° de pourvoi: 70-13808
Publié au bulletin REJET

sur le premier moyen :
attendu qu'il resulte des enonciations de l'arret attaque que, le 4 mars 1965, l'explosion d'une bouteille de chlore, appartenant a la societe des eaux de marseille et placee dans ses locaux, provoqua l'intoxication de plusieurs employes d'une entreprise voisine ;
que cette bouteille avait ete vendue en 1946 par la societe poulet, son constructeur ;
que la caisse primaire d'assurance maladie des bouches-du-rhone assigna la societe des eaux de marseille en remboursement des prestations versees par elle aux victimes ;
que ces dernieres, assignees par la caisse en declaration du jugement commun, solliciterent de leur cote, l'indemnisation complementaire de leur prejudice ;
que la societe des eaux de marseille appela en garantie la societe poulet ;
que la cour d'appel a retenu la responsabilite de la societe des eaux de marseille et deboute celle-ci de son recours en garantie ;
attendu qu'il est d'abord fait grief a la juridiction du second degre d'avoir declare la societe des eaux de marseille responsable de l'accident, alors, selon le pourvoi, que, dans ses ecritures d'appel, qui seraient demeurees sans reponse, ladite societe avait invoque le dedoublement de la garde de l'engin dangereux, la garde de la structure de la chose demeurant a la charge du constructeur, et que les juges d'appel, tout en omettant de statuer sur le moyen ainsi invoque, auraient fait une fausse application de l'article 1384, alinea 1er, du code civil, en mettant a la charge de la societe des eaux de marseille, " la faveur de considerations d'ordre general non appropriees a l'espece ", une responsabilite de gardienne, bien que les pouvoirs de direction et de controle de la structure eussent toujours ete aux mains du fabricant, et que la societe des eaux de marseille n'aurait eu, pour sa part, que la responsabilite de la manipulation de cette chose, et n'aurait pu, de ce fait, etre declaree responsable de dommages causes par la structure de celle-ci ;
mais attendu que la cour d'appel, qui releve notamment que la societe des eaux de marseille, proprietaire de la bouteille, en avait egalement "la detention materielle dans ses locaux", et que, de surcroit, "la charge de l'epreuve de l'appareil n'incombait plus au constructeur", en a justement deduit, repondant ainsi aux conclusions invoquees, que, au moment de l'explosion, ladite societe avait, outre la propriete, "l'usage, le controle et la direction" de la chose ;
que, des lors, elle pouvait seule etre tenue pour la chose ;
que, des lors, elle pouvait seule etre tenue pour gardienne et etait, en cette qualite, entierement responsable vis-a-vis des victimes et de la securite sociale ;
que le moyen ne peut donc etre accueilli en aucun de ses griefs ;

et sur le second moyen, pris en ses deux branches :
attendu qu'il est encore reproche a l'arret attaque d'avoir rejete le recours en garantie exerce par la societe des eaux de marseille a l'encontre de la societe poulet, alors que, les dispositions du code civil relatives a la garantie des vices caches n'imposant aucun delai particulier a l'acquereur pour mettre en oeuvre la garantie du vendeur, ce dernier ne beneficie d'aucune presomption d'irresponsabilite vingt ans apres la vente de l'objet, et que la cour d'appel n'aurait pu, sans entacher sa decision d'une contradiction de motifs, decider, d'apres le moyen, "que l'accident avait ete exclusivement produit par les corrosions constatees", bien qu'elle ait elle-meme releve que l'examen de la bouteille avait montre certaines insuffisances et que la charge de l'epreuve de l'appareil, qui incombait a l'utilisateur, avait ete regulierement executee par celui-ci, sans que, pour autant, l'usure apparaisse de facon a entrainer la mise hors de service ;
qu'il est egalement soutenu que, s'agissant d'un recours en garantie pour vices caches de la bouteille, il n'y avait pas a rechercher une faute de la part de la societe poulet et que la simple constatation de defauts inherents a lastructure de la chose vendue aurait du suffire a entrainer le jeu de cette garantie ;
mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas declare le recours en garantie irrecevable, faute d'avoir ete exerce avant l'expiration du bref delai edicte par l'article 1648 du code civil, n'a fait etat de la tres longue utilisation de l'appareil apres sa vente que pour retenir, sur le fond, que si "l'examen de la bouteille a montre des insuffisances, notamment dans la qualite de la soudure on a egalement observe des corrosions notables, qui ont pu favoriser la rupture", et que "de telles corrosions peuvent provenir de l'usage de la bouteille durant autant d'annees", ladite bouteille ayant, "pendant plus de dix-huit ans rempli exactement son role" et ayant, en outre, ete verifiee sept fois ;
que la juridiction du second degre enonce egalement que l'explosion pourrait etre imputable a "l'exces de remplissage de la bouteille, execute par une entreprise, non en cause", ou a une "exposition prolongee au soleil", les differentes causes possibles ayant d'ailleurs "pu concourir au dommage" ;
que, par de tels motifs, les juges d'appel, qui ne se sont nullement contredits, ont pu estimer que la preuve du lien de causalite entre le vice originaire de la chose et le dommage n'etait pas etablie, et ont, des lors, legalement justifie leur decision, abstraction faite du motif surabondant critique par la seconde branche du moyen ;
qu'il s'ensuit que le second moyen n'est pas mieux fonde que le premier ;
par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arret rendu le 3 juillet 1970 par la cour d'appel d'aix-en-provence.

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 1 N. 337 P. 297

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du samedi 5 juin 1971

N° de pourvoi: 70-10668
Publié au bulletin
REJET

sur le premier moyen :
attendu, selon l'arret infirmatif attaque, que le mineur serge z... fut blesse par l'explosion d'une bouteille de limonade que venait de lui remettre sa tante, et que celle-ci avait achetee quelques minutes avant dans un magasin d'alimentation gere par escoffier ;
qu'andre z..., agissant pour son y... serge, a assigne en reparation du prejudice escoffier et la societe d'alimentation et d'approvisionnement du sud-ouest, dite l'aquitaine, exploitante du fonds de commerce ;
que ceux-ci ont appele a leur garantie la societe commerciale europeenne de brasseries bretagne-nantes, dite les brasseries de la meuse, fournisseur de la bouteille de limonade et fabricant de la limonade, et la chappelle dans l'entrepot de qui la bouteille avait ete remplie ;
qu'a leur tour les brasseries de la meuse et la chapelle ont appele en garantie les etablissements boussois-souchon-nevesel (bsn) fabricants de la bouteille, et leur assureur, compagnie la fonciere ;
qu'ensuite z... a aussi dirige sa demande contre les brasseries de la meuse, la chapelle, les etablissements bsn et la compagnie la fonciere ;
que la caisse primaire de securite sociale de la charente-maritime est intervenue dans l'instance ;

attendu que le pourvoi reproche a l'arret, qui a retenu la seule responsabilite des brasseries de la meuse, d'avoir ecarte un vice de fabrication de la bouteille, en tirant argument d'elements d'une expertise faite dans une affaire totalement differente ;

mais attendu que l'arret, apres avoir constate que les etablissements bsn avaient vendu depuis deux ans la bouteille aux brasseries de la meuse, enonce que les nombreuses manipulations ulterieures expliquent parfaitement l'amorce de rupture observee dans le verre par l'expert x... lors de l'information penale qui avait suivi l'accident litigieux, et qu'on ne saurait conclure que cette zone de moindre resistance serait la cause de l'explosion ;
que l'arret se refere a un autre rapport d'expertise, piece regulierement deposee dans la procedure et contradictoirement debattue entre les parties, pour s'en approprier certaines donnees techniques relatives a l'epaisseur du verre et a la pression des gaz, appreciations corroborees par un avis de l'institut du verre ;
attendu que de ces constations et enonciations, la cour d'appel a pu deduire que la preuve d'une faute des etablissements bsn n'etait pas rapportee ;
d'ou il suit que le moyen n'est pas fonde ;

sur le second moyen : attendu que le pourvoi reproche a l'arret d'avoir decide que les brasseries de la meuse avaient conserve la garde de la bouteille de limonade, sans rechercher qui des proprietaires successifs en avait, lors de l'accident, le controle et l'usage , et en retenant que seules les brasseries de la meuse avaient la possibilite de controler le bon etat de la bouteille avant son remplissage, ce qu'elles n'auraient pas fait ;

mais attendu que l'arret, qui a exclu toute faute des brasseries de la meuse, apres avoir observe que la chose presentait en elle-meme un dynamisme propre et dangereux et que sa garde ne pouvait pas etre attribuee a un proprietaire ou detenteur qui ne possedait sur elle aucun pouvoir de controle et aucune possibilite de prevenir le dommage, releve que les brasseries de la meuse avaient procede au remplissage de la bouteille par un liquide gazeux susceptible de provoquer une pression interne, qu'elles avaient eu la charge du controle de la bouteille et de son remplissage, les rotations des bouteilles leur ramenant celles-ci periodiquement pour lavage, verification et remplissage ;

que l'arret ajoute qu'aucun des proprietaires ou detenteurs ulterieurs n'avait eu ensuite la possibilite de faire des verifications, et que la bouteille explosa entre les bras de la victime sans qu'il y ait eu de choc ;
attendu qu'en l'etat de ces constatations et enonciations, s'agissant d'un accident qui n'etait pas imputable a un fait exterieur a la chose, les juges du fond ont pu decider que les brasseries de la meuse avaient conserve la garde de la bouteille de limonade ;
d'ou il suit que le moyen n'est pas fonde ;

par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arret rendu le 23 decembre 1969 par la cour d'appel de poitiers.


publication : bulletin des arrêts cour de cassation chambre civile 2 n. 204 p. 145

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 26 novembre 1970

N° de pourvoi: 69-12146
Publié au bulletin REJET

sur le premier moyen :
attendu qu'il resulte de l'arret confirmatif attaque qu'haury, se trouvant prive de voiture par suite de reparations sur la nouvelle automobile qu'il venait d'acquerir de belloc, garagiste, se fit remettre provisoirement par lui l'ancienne voiture qu'il lui avait cedee en achetant le vehicule neuf ;
qu'au cours d'un voyage, un accident, consecutif a l'eclatement d'un pneumatique, se produisit ;
qu'haury, qui conduisait, fut tue ;
que son epouse et samuel le lamer, son beau-frere, furent blesses ;
que veuve haury et samuel le lamer ont reclame la reparation de leurs prejudices a belloc, que la compagnie la protectrice, assureur de belloc, est intervenue dans l'instance, que la caisse primaire centrale de la region parisienne est egalement intervenue ;
attendu que le pourvoi fait grief a l'arret de n'avoir pas retenu a la charge de belloc la faute qui, invoquee contre lui, s'analyserait dans le fait qu'il n'aurait pas signale a haury le caractere dangereux de la chose qu'il pretait, notamment en raison de l'usure des pneumatiques, de s'etre contredit et d'avoir a tort exonere le garagiste de toute faute personnelle ;

mais attendu que l'arret, par motifs propres et adoptes, observe, d'une part, qu'a supposer que belloc n'eut pas avise haury de l'etat des pneus, ce dernier etait en mesure des'en apercevoir " a premier examen ", d'autre part, qu'il n'etait pas etabli que le garagiste eut utilise le vehicule apres l'avoir acquis et qu'il eut aggrave l'usure des pneumatiques, enfin qu'haury connaissait parfaitement l'etat de son ancienne voiture ;
que l'arret ajoute qu'il avait, a ses risques et perils, entrepris un long voyage ;
attendu que de ces constatations et enonciations, les juges d'appel, qui ont souverainement apprecie l'avis des experts et qui ne se sont pas contredits, ont pu deduire qu'aucune faute en relation directe avec l'accident n'etait susceptible d'etre retenue a la charge de belloc ;
d'ou il suit que le moyen n'est pas fonde ;

sur le second moyen :
attendu que le pourvoi reproche a l'arret d'avoir, pour debouter, sur le fondement de l'article 1384 alinea 1er, du code civil, veuve haury et samuel le lamer de leurs demandes, admis qu'haury avait la garde de la voiture que lui avait pretee belloc alors que l'accident etait du a l'eclatement d'un pneumatique, et que le garagiste aurait conserve la garde de " la structure de la chose " ;

mais attendu qu'apres avoir fait etat d'une lettre par laquelle haury remerciait belloc de lui avoir prete l'ancienne voiture afin de " le depanner ", l'arret, par motifs propres et adoptes, releve qu'haury avait obtenu de son assureur la garantie de sa responsabilite civile pour l'usage de ce vehicule et que belloc lui en avait abandonne la libre disposition ;
attendu que de ces constatations et enonciations, la cour d'appel a pu deduire qu'haury exercait sur la voiture les pouvoirs d'usage, de direction et de controle caracterisant la garde et que celle-ci n'etait pas demeuree a belloc, proprietaire du vehicule ;
d'ou il suit que la cour d'appel a legalement justifie sa decision ;
par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arret rendu, le 26 mars 1969, par la cour d'appel de paris

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 2 N. 329 P. 251

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 1 avril 1965

N° de pourvoi: 62-11403
Publié au bulletin
REJET.

sur le moyen unique :
attendu que, selon les enonciations de l'arret infirmatif attaque, le mineur alain x... fut blesse, a l'oeil, par un sifflet que son camarade alain y..., alors lui aussi mineur, faisait tournoyer au bout d'une ficelle ; que pierre x..., pere et administrateur legal des biens de la victime, a demande la reparation du dommage subi, notamment sur la base de l'article 1384, 1er alinea du code civil, a henri y..., pere d'alain, pris tant en son nom personnel qu'en qualite d'administrateur legal des biens de son fils mineur ; que, devenu majeur, celui-ci est intervenu dans l'instance ;

attendu qu'il est reproche a l'arret d'avoir declare alain y... responsable comme gardien du sifflet, alors que, s'agissant d'une chose denuee de tout dynamisme propre, le dommage n'etait pas imputable a son fait mais a celui de la personne qui le manipulait, fait dont les consequences dommageables ne pouvaient etre reparees, a defaut de la preuve qu'il etait le resultat d'une faute ;

mais attendu que, des circonstances qu'il releve, le juge du fond a pu deduire que le sifflet avait ete l'instrument du dommage et que son gardien n'avait pas rapporte la preuve d'une cause etrangere, normalement imprevisible et insurmontable, propre a l'exonerer de la responsabilite de plein droit mise a sa charge par l'article 1384, alinea 1er ;
que, des lors, la decision se trouve legalement justifiee ;
par ces motifs : rejette le pourvoi

Publication : N° 334

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 6 février 1964

Publié au bulletin CASSATION PARTIELLE.

sur le premier moyen :
attendu que, selon l'arret attaque, partiellement infirmatif, damet, garagiste, ayant achete, en vue de la revendre, une voiture automobile d'occasion a son collegue rissient, remit ladite voiture a x..., qui habitait la meme localite que lui, afin qu'il la conduise dans cette ville, en s'en servant pour regagner son domicile ; qu'en cours de route le vehicule entra en collision avec une camionnette arrivant en sens inverse, a la suite de l'eclatement du pneumatique de la roue droite arriere ; que x... et son fils gerard, qui l'accompagnait, furent blesses, ce dernier mortellement ; que se reclamant de l'article 1382 comme de l'article 1384, alinea 1 du code civil, x... et son epouse ont assigne rissient et damet en reparation du prejudice par eux subi :

attendu que le pourvoi reproche a l'arret d avoir, non sans contradiction, admis que Rissient n'avait commis aucun e faute en laissant circuler une automobile dont un pneumatique etait anormalement use, au motif d'une part, que ce garagiste n avait pas a munir un vehicule d'occasion de pneus neufs, d'autre part, qu'il avait signale a l'acheteur l'etat de ceux qui l'equipaient, alors qu'il etait releve que, selon les constatations effectuees apres l'accident, la bande de roulement de l'enveloppe eclatee etait usee et que ses reliefs, en plusieurs emplacements, notamment a l'endroit de l'eclatement, avaient completement disparu, ce qui interdisait de pretendre qu'en apparence l'utilisation du vehicule ne presentait aucun danger ;

mais attendu qu'apres avoir releve les constatations prerappelees, relatives a l'etat des pneumatiques ainsi que les "declarations loyales" faites a ce sujet par Rissient, lors de l'examen de la voiture, en presence de x..., la cour d'appel remarque que, s'agissant de la vente d'une voiture d'occasion, on ne pouvait reprocher au vendeur de n'avoir pas muni celle-ci de pneus neufs et que dans l'espece, en prenant livraison. damet et x... avaient eu tout loisir de l'examiner ;
attendu qu'il resulte necessairement de ces constatations et de ces enonciations, exemptes de toute contradiction, qu'avertis des defauts affectant certains des pneumatiques et ayant eu la possibilite de s'en convaincre par eux-memes, damet ne pouvait pretendre que la chose vendue presentait un vice cache, qu'il fut en droit de reprocher a rissient de ne point lui avoir revele et que x... ne pouvait, en ce qui le concerne, lui faire grief d'aucune faute ;
d'ou il suit que le moyen n'est pas fonde ;

sur le deuxieme moyen :
attendu qu'il est fait grief a l'arret qui ecarte la responsabilite de damet, sur la base tant de l'article 1382 que de l'article 1384 alinea 1, alors que ledit damet n'aurait pas du laisser circuler une voiture presentant de telles defectuosites et que, de plus, meme s'il avait eu pret a usage par damet, la garde de la structure de ladite voiture serait restee a la charge de ce dernier dont x... n'aurait ete que le prepose :
mais attendu que la cour d'appel releve qu'une convention etait intervenue entre damet et x..., aux termes de laquelle ce dernier avait la faculte d'utiliser, pour ses besoins personnels, la voiture qui lui etait remise, avec obligation de la conduire au domicile de damet, sans qu'un itineraire ou un delai lui fussent impartis, ce qui constituait un contrat de pret a usage, assorti d'un mandat, et que, des lors, la responsabilite contractuelle pouvait etre uniquement invoquee ;
que la decision ajoute que la seule faute qui eut pu etre imputee a damet eut ete d'avoir prete une chose qu'il aurait su dangereuse etant donne ses defauts, sans en prevenir l'emprunteur, mais qu'il resulte de ce qui precede que tel n'etait pas le cas ;
attendu que, par de tels motifs qui se determinant par une appreciation souveraine de l'intention des parties, ecartent necessairement toutes les regles de la responsabilite quasi delictuelle, les juges du fond, sans encourir les reproches du pourvoi, ont donne une base legale a leur decision ;

mais sur le troisieme moyen : vu l'article 7 de la loi du 20 avril 1810 ;
attendu que les arrets qui ne contiennent pas les motifs sont declares nuls ;
attendu que la cour d'appel etait saisie, non seulement de la demande de x..., mais aussi de celle de son epouse qui, du fait de l'accident et specialement du deces de son fils, avait subi un prejudice distinct de celui de son mari, dont elle etait en droit de poursuivre la reparation ;
que, cependant, l'arret s'est borne a rechercher quelle etait la nature juridique des rapports ayant existe entre x... et damet, sans se prononcer sur la situation juridique personnelle de dame x... et le merite de sa demande dont ils l'ont cependant deboutee ;
en quoi, les juges d'appel ont meconnu les exigences du texte susvise et l'ont, par suite, viole ;
par ces motifs : casse et annule

Publication : N° 121

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 5 janvier 1956

N° de pourvoi: 56-02126 56-02138
Publié au bulletin CASSATION

Sur les moyens uniques et identiques des deux pourvois ;

Vu l'article 1384, alinéa 1er du Code civil ;

Attendu que la responsabilité du dommage causé par le fait d'une chose inanimée est liée à l'usage ainsi qu'au pouvoir de surveillance et de contrôle qui caractérisent essentiellement la garde ; qu'à ce titre, sauf l'effet de stipulations contraires valables entre les parties, le propriétaire de la chose ne cesse d'en être responsable que s'il est établi que celui à qui il l'a confiée a reçu corrélativement toute possibilité de prévenir lui-même le préjudice qu'elle peut causer ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt confirmatif attaqué que la société "L'Oxygène liquide" avait expédié, par voie ferrée, au "Comptoir des carburants" un certain nombre de bouteilles métalliques remplies d'oxygène comprimé ; qu'à l'arrivée en gare, ces bouteilles furent prises en charge par X..., entrepreneur de transports ; qu'au cours de leur livraison dans les locaux du comptoir destinataire, l'une d'elles éclata ; que la cause de cette explosion, en l'état de l'expertise effectuée, serait restée inconnue, encore qu'il n'ait point été prouvé, ni même allégué, que l'accident fût la conséquence d'un acte ou d'une circonstance extérieurs à l'objet ; que Y..., préposé de X..., ainsi que Z..., employé au service du "Comptoir des carburants" furent blessés par les éclats de la bouteille ;

Attendu que, pour débouter lesdites victimes, ensemble les Caisses de sécurité sociale intervenantes de leurs actions en réparation, dirigées, sur la base de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, contre la société "L'Oxygène liquide", la Cour d'Appel appuie sa décision sur ce motif que "seul, celui qui a la garde matérielle d'une chose inanimée peut être responsable de cette chose", ce qui n'était pas le cas pour la défenderesse ;

Mais attendu qu'au lieu de se borner à caractériser la garde par la seule détention matérielle, les juges du fond, devaient, à la lumière des faits de la cause et compte-tenu de la nature particulière des récipients transportés et de leur conditionnement, rechercher si le détenteur, auquel la garde aurait été transférée, avait l'usage de l'objet qui a causé le préjudice ainsi que le pouvoir d'en surveiller et d'en contrôler tous les éléments ;
Attendu qu'en refusant de se déterminer sur ce point, la Cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation à même d'apprécier quel était, en l'espèce, le gardien de la chose, au sens de l'article visé au moyen ;
D'où il suit que l'arrêt attaqué manque de base légale ;
Par ces motifs : Casse et annule

Publication : Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 2 N. 2 p. 1