Cour de Cassation
Chambre civile 2
Audience publique du 14 janvier 1999 Rejet.

Publié au bulletin
Sur le premier moyen et le second moyen, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 novembre 1996), que M. Lesage, qui achetait des plaques de bois aggloméré dans un magasin exploité par la société des Etablissements Leroy Merlin (la société), en utilisant un chariot mis à la disposition de la clientèle, a été blessé par la chute de ce chariot et des marchandises qu'il y avait déposées ; qu'il a assigné, en réparation de son préjudice, la société et son assureur, la compagnie Cigna ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté cette demande, alors, selon le moyen, que, d'une part, selon l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, qui a été violé, conserve la garde de la chose confiée à un tiers le propriétaire qui n'a pas établi que ce tiers avait reçu toute possibilité de prévenir le préjudice qu'elle pouvait causer, ce qui implique, à la charge du propriétaire, l'obligation d'informer de manière suffisante le détenteur de la chose sur le risque qu'elle peut présenter ; que, d'autre part, le juge ne peut, sans violer l'article 16 du nouveau Code de procédure civile, écarter des débats un constat d'huissier de justice dressé à la demande d'une des parties, dès l'instant que son adversaire a été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'enfin, la société propriétaire d'un magasin a l'obligation d'informer sa clientèle d'une manière ou d'une autre sur les précautions à observer pour l'utilisation des chariots qu'elle met à sa disposition pour le transport des marchandises et sur les risques liés à leur usage ;
Qu'en ne relevant pas le manquement à cette obligation, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que la responsabilité du dommage causé par le fait d'une chose est liée à l'usage et aux pouvoirs de direction et de contrôle qui caractérisent la garde ;
Et attendu que l'arrêt, après avoir relevé, par motifs adoptés, que le chariot en cause ne pouvait être considéré comme une chose intrinsèquement dangereuse, énonce exactement qu'en disposant librement du chariot hors toute directive de la société quant à l'usage, le contrôle et la direction de celui-ci qui lui avait été prêté à l'état inerte et qui était dépourvu de tout dynamisme propre, M. Lesage s'en était vu transférer la garde dans toutes ses composantes ;
Que l'arrêt retient d'autre part, après avoir souverainement apprécié la valeur probante d'un constat d'huissier, et des témoignages soumis au débat, qu'on ne pouvait reprocher à la société une absence de notice d'utilisation et de fonctionnement des chariots, soit sur ces derniers, soit sur les murs du magasin, tant il était évident que l'extrême simplicité d'emploi de ces biens tombait sous le sens de tout un chacun, et qu'on ne pouvait pas non plus reprocher à la société l'absence d'indication de la charge maximale admise par ce type de chariot ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a déduit, à bon droit, sans violer le principe de la contradiction, que la société, qui n'avait pas la garde du chariot lors de l'accident, n'avait pas commis de faute en relation de causalité avec le dommage subi par M. Lesage ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.
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Publication : Bulletin 1999 II N° 13 p. 8

Cour de Cassation
Chambre civile 2
Audience publique du 28 février 1996 Rejet.

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 14 septembre 1993) que dans un magasin Continent, en libre service, une cliente demeurée inconnue a fait chuter accidentellement une bouteille qui a éclaté au sol ; que Mme Riel blessée par des éclats de verre a assigné la société Continent en réparation ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir retenu la responsabilité de la société Continent sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, alors, selon le moyen, que, d'une part, le supermarché, vendeur, ne peut être tenu en qualité de commettant des faits d'un de ses clients avec lequel il n'est lié que par un contrat de vente ; qu'en déclarant que la magasin le Continent investit chaque client d'une partie du rôle de vendeur et qu'il est responsable de l'attitude de ce client dans l'exercice de cette fonction sans retenir l'existence d'un lien de subordination entre la cliente et le supermarché, la cour d'appel aurait violé l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ; alors que, d'autre part, la garde d'une chose incombe, non au propriétaire, mais à celui qui a reçu les pouvoirs d'usage, de direction, de surveillance et de contrôle sur la chose ; qu'en retenant que le magasin avait conservé la garde juridique des objets sans rechercher qui, du magasin ou de la cliente, avait l'usage et le pouvoir de contrôle de la bouteille et était susceptible de prévenir le préjudice que pouvait causer cette chose, la cour d'appel a violé l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Mais attendu que dans un magasin où la clientèle peut se servir elle-même il ne suffit pas qu'un client manipule un objet offert à la vente pour qu'il y ait transfert de la garde ;
Et attendu que l'arrêt retient qu'il est constant qu'une cliente du magasin Continent a fait chuter accidentellement une bouteille qui, en éclatant au sol, a blessé Mme Riel ; qu'à bon droit il en a déduit que la société Continent était responsable des conséquences dommageables de l'accident en tant que gardienne de la bouteille ; que, par ces seuls motifs, l'arrêt est légalement justifié ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.
Publication : Bulletin 1996 II N° 52 p. 32

Cour de Cassation
Chambre civile 2
Audience publique du 21 octobre 1999 Rejet


Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 27 octobre 1997), que M. Palmier a été blessé par une des tôles qu'il avait achetées à la société Etablissements Maureaux (la société) au cours de leur chargement dans sa camionnette ; qu'il a assigné la société et son assureur, la société PFA, en responsabilité et indemnisation de son préjudice ;
Attendu que la société et la compagnie PFA font grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande, alors, selon le moyen, que, d'une part, le propriétaire est présumé être le gardien de la chose à l'origine d'un dommage ; qu'en se refusant à rechercher si la vente avait eu lieu et si M. Palmier était propriétaire des tôles au moment de l'accident, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 du Code civil ; que, d'autre part, le fait de manipuler un objet avec son propriétaire n'en rend pas gardien ; qu'en déduisant la garde exercée par la société Etablissements Maureaux du seul fait que ses préposés aidaient M. Palmier à charger les tôles dans les locaux de la société Etablissements Maureaux, sans rechercher si M. Palmier n'était pas propriétaire des tôles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que l'accident s'est produit au moment du chargement des tôles auquel participaient deux employés de la société, et au cours de leur livraison au client dans l'enceinte du magasin de celle-ci ;
Que, de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, justifiant légalement sa décision, a pu déduire que, même si la vente des tôles avait déjà eu lieu, leur garde n'avait pas encore été transférée de la société à M. Palmier ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;


Cour de cassation
Chambre civile 2
Audience publique du 6 avril 1987 Rejet

Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué (Versailles, 8 février 1985), qu'ayant été heurtée, dans un magasin de la Société des Nouveaux Supermarchés Levis "Monoprix" (la société), par un chariot ou "caddy" utilisé par une cliente demeurée inconnue, Mme Berdah, blessée, a assigné en réparation la société et son assureur, la Mutuelle Générale Française d'Accidents ; Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir débouté Mme Berdah de sa demande alors qu'en énonçant, sans s'en expliquer, que les attributs de la garde du caddy avaient été transférés par le magasin propriétaire à l'utilisatrice, la Cour d'appel aurait privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384, alinéa 1, du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt, après avoir relevé que les "caddys" appartenaient à la société et que celle-ci les mettait à la disposition de sa clientèle pour transporter, dans le magasin, les marchandises qui y étaient achetées, retient qu'à partir du moment où l'un d'eux était pris en charge par un éventuel client, l'usage, le contrôle et la direction en étaient transférés à celui-ci sans que le propriétaire eût l'obligation ou même la possibilité d'assurer la surveillance et le contrôle de la conduite de cette chose ;
Que de ces constatations et énonciations, la Cour d'appel a pu déduire que la garde du "caddy" avait été transférée à l'utilisatrice demeurée inconnue ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi