Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du lundi 22 mai 1995

N° de pourvoi: 92-21871
Publié au bulletin Rejet.
ARRÊT N° 2
Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'au cours d'un match de rugby, une bagarre a mis aux prises les joueurs des deux équipes appartenant à des associations sportives différentes ; que M. X..., membre de l'Union sportive de Monteux, a été mortellement blessé ; qu'une information pénale a été clôturée par une ordonnance de non-lieu ; que les consorts X... ont demandé à l'équipe adverse, l'Union sportive du personnel électricité gaz de Marseille (Uspeg), la réparation de leur préjudice ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu la responsabilité de l'Uspeg alors que, selon le moyen, " d'une part, le préposé est celui qui agit pour le compte d'une autre personne, le commettant, lequel exerce à son égard un pouvoir de direction, de surveillance et de contrôle ; que les joueurs de rugby sont des amateurs ; qu'ils ne sont donc pas rémunérés en contrepartie de leur activité sportive ni soumis à aucune contrainte d'entraînement ou de participation aux rencontres ; qu'en retenant cependant l'existence d'un lien de préposition entre le club et les joueurs amateurs qui en sont membres, la cour d'appel a violé les articles 1384, alinéa 5, du Code civil, 101 et 107 du règlement de la Fédération française de rugby ; d'autre part, le rapport de subordination d'où découle la responsabilité des commettants suppose de la part de ceux-ci le pouvoir de donner des ordres à leurs préposés ; que ce lien de subordination n'est pas caractérisé dès l'instant où aucun pouvoir de contrôle et de direction ne peut ainsi être exercé ; que, lors d'un match de championnat, les joueurs présents sur le terrain sont sous la seule autorité de l'arbitre ; qu'il résulte des constatations mêmes de l'arrêt attaqué que la bagarre qui aurait entraîné la mort de Dominique X... s'est déclenchée " au cours du match " (arrêt p. 9, alinéa 3) ; qu'à cet instant, seul l'arbitre, à l'exclusion des clubs sportifs, exerçait un pouvoir de contrôle et de direction sur les joueurs ; qu'en déclarant cependant un club responsable des conséquences dommageables d'une bagarre survenue pendant un match, la cour d'appel a violé les articles 1384, alinéa 5, du Code civil et 206 du règlement de la Fédération française de rubgy ; enfin, la responsabilité du commettant ne peut être engagée que si la preuve d'une faute commise par l'un de ses préposés est rapportée ; que l'auteur de la faute doit être identifié afin que le commettant puisse exercer le recours qui lui est reconnu contre son préposé fautif ; que la cour d'appel n'a pas identifié les joueurs qui auraient frappé M. X... ; qu'en retenant cependant la responsabilité de l'association sportive pour des fautes commises par plusieurs de ses préposés non identifiés, la cour d'appel a violé l'article 1384, alinéa 5, du Code civil " ;

Mais attendu que les associations sportives, ayant pour mission d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de leurs membres au cours des compétitions sportives auxquelles ils participent, sont responsables, au sens de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, des dommages qu'ils causent à cette occasion ;

Et attendu que l'arrêt retient que les joueurs de l'Uspeg participaient à une compétition sportive et que ce sont des joueurs de cette association qui ont exercé sur M. X... des violences ;

Que, par ces seuls motifs, l'arrêt se trouve légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

Publication : Bulletin 1995 II N° 155 p. 88 ;
JCP, II, 22550 note Mouly
Resp civ et ass, chron 36, H. Groutel

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 21 octobre 2004

N° de pourvoi: 03-17910 03-18942
Publié au bulletin Cassation.

Sur le moyen unique du pourvoi n° E 03-17.910, pris en ses deuxième, quatrième et cinquième branches et sur le moyen unique du pourvoi n° B 03-18.942, pris en ses deuxième et quatrième branches :

Vu l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

Attendu selon ce texte, que les associations sportives, ayant pour mission d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de leurs membres, sont responsables des dommages qu'ils causent à cette occasion, dès lors qu'une faute caractérisée par une violation des règles du jeu est imputable à l'un de ses membres, même non identifié ;

Attendu selon l'arrêt confirmatif attaqué qu'à l'occasion d'une séance d'entraînement , M. X..., membre de l'association de rugby Bleuets Labatutois (l'association), répétant une phase tactique de sortie de mêlée, est tombé en manquant un placage et s'est blessé ; qu'il a assigné en réparation l'association et ses assureurs, la compagnie La Sauvegarde, également assureur de la Fédération française de rugby (FFR), et la Caisse régionale mutuelle agricole Groupama Sud-Ouest (Crama-Groupama) ainsi que la Mutualité sociale agricole ;

Attendu que pour déclarer l'association responsable du dommage subi par M. X... et la condamner solidairement avec la Crama-Groupama et La Sauvegarde à lui payer une provision indemnitaire en ordonnant par ailleurs une expertise médicale, l'arrêt énonce qu'il résulte de la déclaration signée par le responsable de l'association et des témoignages qu'au cours d'un entraînement, pendant la répétition d'une tactique jouée à la sortie de mêlée, M. X... a manqué le placage de son attaquant qui l'a évité, et que, déséquilibré, il est tombé sur le dos, a ressenti une douleur aux vertèbres cervicales et n'a pu bouger; qu'il est donc établi que la chute de M. X... a été causée par l'un des membres de l'association qui a esquivé le placage dont il était l'objet ; que même si l'action de jeu au cours de laquelle M. X... a été blessé était parfaitement régulière, sa chute est le fait de l'un de ses coéquipiers, membre de l'association ; que si cette action a eu lieu au cours de l'entraînement qui précède la compétition, cet entraînement, organisé par l'association, en est le soutien nécessaire et relève de sa préparation; que c'est donc à bon droit, même en l'absence de toute faute d'un joueur de l'association, que le premier juge a retenu la responsabilité de celle-ci, dès lors qu'il est démontré par la victime qu'un des joueurs de cette association est intervenu par son fait dans la production du dommage ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses propres constatations qu'aucune faute caractérisée par une violation des règles du jeu n'avait été commise par un joueur quelconque au cours de la phase d'entraînement durant laquelle M. X... s'était blessé, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE

Publication : Bulletin 2004 II N° 477 p. 404, RTDCiv 2005, p. 412, P. Jourdain

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 12 décembre 2002

N° de pourvoi: 00-13553
Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 octobre 1999), que Mlle X..., qui participait à un défilé de majorettes organisé par l'association Saint-Louis de Poissy (l'association) a été blessée par le bâton manipulé par une autre majorette, Mme Le Y... ; que Mlle X... a assigné en responsabilité et dommages-intérêts Mme Le Y... et la société Assurances générales de France sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, ainsi que l'association et son assureur, la compagnie Axa assurances (Axa), sur le fondement des articles 1382 et 1384, alinéas 1 et 5, du Code civil ;

Attendu que l'association et la compagnie Axa font grief à l'arrêt de les avoir condamnées, solidairement avec Mme Le Y..., à réparer le préjudice subi par Mlle X... alors, selon le moyen, que seules les personnes ayant mission de régler le mode de vie d'autrui ou de contrôler l'activité potentiellement dangereuse à laquelle il se livre répondent, de plein droit, des dommages qu'il peut causer par son fait ;
que tel n'est pas le cas d'une association communale chargée d'organiser un défilé de majorettes, les exercices d'adresse auxquels celles-ci se livrent ne présentant de danger objectif ni pour les participantes, ni pour le public, et cette association n'exerçant de surcroît aucun contrôle sur la réalisation des exercices préparés et répétés à l'avance par un corps constitué, se bornant à donner à l'ensemble des instructions de marche ;
d'où il suit qu'en déclarant l'association, même en l'absence de toute faute de sa part, responsable de plein droit du dommage causé par la chute d'un bâton échappé à la maîtrise d'une participante, la cour d'appel a violé l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt, confirmatif sur ce point, relève, par motifs propres et adoptés, que le dommage a été causé par un membre de l'association, à l'occasion du défilé de majorettes organisée par celle-ci, laquelle avait pour mission d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de ses membres au cours du défilé ;

Que par ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu, sans avoir à tenir compte de la dangerosité potentielle de l'activité exercée par un des membres de l'association, décider que celle-ci était tenue de plein droit de réparer, avec son assureur, le préjudice résultant du fait dommageable commis par l'un de ses membres à l'occasion de la manifestation qu'elle avait organisée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Publication : Bulletin 2002 II N° 289 p. 230
JCP I, 152, obs Viney
RTDCiv 2003, p. 305, P. Jourdain
LPA 7 avril 2003, p. 11, note Buy