Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mardi 16 février 1999

N° de pourvoi: 96-86225
Publié au bulletin Irrecevabilité et cassation partielle par voie de retranchement sans renvoi

IRRECEVABILITE ET CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement sans renvoi sur le pourvoi formé par la société ACDS, civilement responsable, contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 28 novembre 1996, qui, après condamnation de Jean-Pierre X... et Eric Y... pour vol, l'a déclarée civilement responsable et a prononcé sur les intérêts civils.

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1384, alinéa 5, du Code civil, 591 du Code de procédure pénale :
" en ce que la société ACDS a été déclarée civilement responsable de ses préposés Jean-Pierre X... et Eric Y... ;
" aux motifs, qu'il a été ainsi établi que, depuis 1990 jusqu'au 16 août 1991, Jean-Pierre X... et Eric Y... ont dérobé, à l'occasion de leur service de gardiennage, assuré par leur employeur, la société ACDS, dans les locaux du centre logistique de la SERNAM, à Trappes, de nombreux appareils de nettoyage ainsi que des articles vestimentaires qui avaient été confiés en dépôt à la SNCF... ; qu'au cas d'espèce il a été établi par le dossier de la procédure que Jean-Pierre X... et Eric Y..., tous 2 salariés de la société ACDS, chargée du gardiennage des locaux de la SERNAM, à Trappes, ont agi à l'intérieur de ces locaux dont ils avaient la garde en dérobant des marchandises confiées par ses clients à la SNCF, qu'ils ont par ailleurs opéré pendant leur temps de travail et à l'occasion de la mission qui leur était confiée ; que même si le préjudice résulte en l'espèce d'une infraction par définition intentionnelle de ses préposés, la société ACDS ne peut s'exonérer de sa responsabilité, dès lors qu'il est établi que ceux-ci se sont servi des moyens matériels liés à leurs fonctions pour causer les dommages ;

" alors que le commettant s'exonère de sa responsabilité si son préposé a agi en dehors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions ; que le préposé se place nécessairement hors de ses fonctions lorsqu'il agit à des fins non seulement étrangères, mais encore contraires à ses attributions ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que les 2 préposés incriminés avaient volé des biens qu'ils étaient chargés de surveiller ; qu'ils s'étaient nécessairement placés hors de leurs fonctions dès lors que leur action était non seulement étrangère, mais encore contraire à leurs attributions ; que leur commettant ne pouvait par suite répondre de cet abus de fonction " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Jean-Pierre X..., salarié de la société ACDS, chargée de la surveillance d'un dépôt de colis de la SNCF, a été condamné pour avoir dérobé des marchandises confiées à cette société, qui a indemnisé leurs propriétaires ;
Attendu que, pour déclarer la société demanderesse civilement responsable du fait de son préposé, et la condamner solidairement avec lui à payer à la SNCF la somme de 963 715,70 francs en réparation de son préjudice matériel, et 10 000 francs en réparation de son préjudice commercial, l'arrêt attaqué relève que le salarié a agi pendant son temps de travail dans les locaux dont il avait la garde, et s'est servi, pour causer les dommages, des moyens matériels procurés par sa fonction ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations la cour d'appel a justifié sa décision au regard de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil ;

Qu'en effet le commettant ne s'exonère de sa responsabilité qu'à la triple condition que son préposé ait agi en dehors des fonctions auxquelles il était employé sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions ;
Que, dès lors, le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le moyen relevé d'office, pris de la violation de l'article 475-1 du Code de procédure pénale :
Vu ledit article ;
Attendu que, selon l'article 475-1 du Code de procédure pénale, seul l'auteur de l'infraction peut être condamné à payer à la partie civile la somme que le juge détermine, au titre des frais non payés par l'Etat et exposés par celle-ci ;
Attendu qu'en condamnant la société ACDS, en qualité de civilement responsable, à verser à la partie civile une somme de 6 000 francs en application de ces dispositions, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs : DECLARE IRRECEVABLE en l'état le pourvoi de ACDS en ce qu'il concerne Eric Y... ;
CASSE ET ANNULE

Publication : Bulletin criminel 1999 N° 23 p. 53