Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Faurecia que sur les pourvois incidents relevés par les sociétés Oracle et Franfinance ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Faurecia sièges d'automobiles (la société Faurecia), alors dénommée Bertrand Faure équipements, a souhaité en 1997 déployer sur ses sites un logiciel intégré couvrant principalement la gestion de production et la gestion commerciale ; que conseillée par la société Deloitte, elle a choisi le logiciel V 12, proposé par la société Oracle mais qui ne devait pas être disponible avant septembre 1999 ; qu'un contrat de licences, un contrat de maintenance et un contrat de formation ont été conclus le 29 mai 1998 entre les sociétés Faurecia et Oracle, tandis qu'un contrat de mise en oeuvre du "programme Oracle applications" a été signé courant juillet 1998 entre les sociétés Faurecia, Oracle et Deloitte ; qu'en attendant, les sites ibériques de la société Faurecia ayant besoin d'un changement de logiciel pour passer l'an 2000, une solution provisoire a été installée ; qu'aux motifs que la solution provisoire connaissait de graves difficultés et que la version V 12 ne lui était pas livrée, la société Faurecia a cessé de régler les redevances ; qu'assignée en paiement par la société Franfinance, à laquelle la société Oracle avait cédé ces redevances, la société Faurecia a appelé en garantie la société Oracle puis a assigné cette dernière et la société Deloitte aux fins de nullité pour dol ou résolution pour inexécution de l'ensemble des contrats signés par les parties ;
...
Sur le premier moyen du pourvoi incident de la société Oracle
:...
Et sur le second moyen du pourvoi incident formé par la société
Oracle :...
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article 1131 du code civil ;
Attendu que, pour limiter les sommes dues par la société
Oracle à la société Faurecia à la garantie de la
condamnation de cette société au paiement de la somme de 203 312
euros à la société Franfinance
et rejeter les autres demandes de la société Faurecia,
l'arrêt retient que la société Faurecia ne caractérise
pas la faute lourde de la société Oracle qui permettrait d'écarter
la clause limitative de responsabilité,
se contentant d'évoquer des manquements à des obligations essentielles,
sans caractériser ce que seraient les premiers et les secondes
et dès lors que de tels manquements ne peuvent résulter du seul
fait que la version V 12 n'ait pas été livrée ou que l'installation
provisoire ait été ultérieurement "désinstallée"
;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait,
d'abord, constaté que la société
Oracle s'était engagée à livrer la version V 12 du progiciel,
objectif final des contrats passés en septembre 1999
et qu'elle n'avait exécuté cette obligation de livraison ni en
1999 ni plus tard sans justifier d'un cas de force majeure,
puis relevé qu'il n'avait jamais été
convenu d'un autre déploiement que celui de la version V 12, ce dont
il résulte un manquement à une obligation essentielle de nature
à faire échec à l'application de la clause limitative de
réparation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE
Publication : Bulletin 2007, IV, N° 43
Concentrez-vous, je vous explique :
La CA a appliqué un plafonnement de responsabilité prévu au contrat par le créateur de logiciel, Oracle : c'est la clause limitative de réparation.
La CA considère que la clause de limitation de responsabilité ne peut pas être écartée puisqu'aucune faute lourde n'est prouvée (Chronopost 2002)
La cour de cassation casse, soulignant qu'il y a manquement à une obligation essentielle du contrat:
elle (la CA) avait, d'abord, constaté que la société Oracle s'était engagée à livrer la version V 12 du progiciel, objectif final des contrats passés en septembre 1999 et qu'elle n'avait exécuté cette obligation de livraison ni en 1999 ni plus tard sans justifier d'un cas de force majeure
+ la CA avait relevé qu'il n'avait jamais été convenu d'un autre déploiement que celui de la version V 12, ce dont il résulte un manquement à une obligation essentielle de nature à faire échec à l'application de la clause limitative de réparation, la cour d'appel a violé le texte susvisé
il y a manquement à une obligation
essentielle, ce qui doit conduire à écarter la clause limitative
de responsabilité : si on prévoit, par clause contractuelle, un
refus d'indemniser le manquement à une obligation essentielle, cela prive
le contractant de toute contrepartie, ce risque existant dès la formation
du contrat
(d'où le visa de 1131 : pas de contrepartie les termes du contrat et
le jeu des clauses = pas de cause).
La suite en 2010