Cass. Civ., 21 novembre 1911
Sur l'unique moyen du pourvoi :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que des qualités et des motifs de l'arrêt attaqué,
il résulte que le billet de passage remis, en mars 1907, par la Compagnie
Générale Transatlantique à Zbidi Hamida Ben Mahmoud, lors
de son embarquement à Tunis pour Bône, renfermait, sous l'article
11, une clause, attribuant compétence exclusive au tribunal de commerce
de Marseille pour connaître des difficultés auxquelles l'exécution
du contrat de transport pourrait donner lieu ;
Qu'au cours du voyage, Zbidi Hamida, à qui la Compagnie avait assigné
une place dans le sous-pont, à côté des marchandises, a
été grièvement blessé au pied par la chute d'un
tonneau mal arrimé ;
Attendu que, quand une clause n'est pas illicite, l'acceptation du billet sur
lequel elle est inscrite, implique, hors les cas de dol ou de fraude, acceptation,
par le voyageur qui la reçoit, de la clause elle-même ;
Que, vainement, l'arrêt attaqué déclare que les clauses
des billets de passage de la Compagnie Transatlantique, notamment l'article
11, ne régissent que le contrat de transport proprement dit et les difficultés
pouvant résulter de son exécution, et qu'en réclamant une
indemnité à la Compagnie pour la blessure qu'il avait reçue,
Zbidi agissait contre elle non "en vertu de ce contrat et des stipulations
dont il lui imputait la responsabilité" ;
Que l'exécution du contrat de transport comporte, en effet, pour
le transporteur l'obligation de conduire le voyageur sain et sauf à destination,
et que la cour d'Alger constate elle-même que c'est au cours de cette
exécution et dans des circonstances s'y rattachant, que Zbidi a été
victime de l'accident dont il poursuit la réparation ;
Attendu, dès lors, que c'est à tort que l'arrêt attaqué
a refusé de donner effet à la clause ci-dessus relatée
et déclaré que le tribunal civil de Bône était compétent
pour connaître de l'action en indemnité intentée par Zbidi
Hamida contre la Compagnie Transatlantique ; Qu'en statuant ainsi, il a violé
l'article ci-dessus visé ;
Par ces motifs, CASSE
GAJC, T. II, n° 188
Cass. Civ. 1ère, 12 décembre 2000
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu que M. Peyronnaud, qui voyageait dans un train assurant la liaison Marseille-Paris,
a été agressé et blessé par un autre voyageur ;
que la victime a assigné en responsabilité la SNCF ; que l'arrêt
attaqué (Riom, 25 juin 1998) a accueilli cette demande ;
Attendu que la SNCF fait grief à l'arrêt d'avoir écarté
la force majeure, alors, selon le moyen :
1° que l'agression soudaine et brutale d'un voyageur par un autre est irrésistible
pour tout transporteur de voyageurs et que l'irrésistibilité de
ce fait du tiers est, à elle seule, constitutive de la force majeure
lorsque même sa prévisibilité ne permet pas d'en empêcher
les effets ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé
les articles 1147 et 1148 du Code civil ;
2° que la possession ou non d'un titre de transport par l'auteur de l'agression
à l'encontre d'un voyageur au cours du transport est sans incidence sur
le caractère imprévisible et irrésistible de cette agression,
de sorte qu'en se fondant sur l'absence de titre de transport de l'agresseur
de la victime, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa
décision, au regard des textes précités ;
3° qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a mis à la charge
de la SNCF une obligation générale et illimitée de surveillance
de résultat, en violation de l'article 1147 du Code civil ;
4° qu'elle n'a pas caractérisé le lien causal entre les manquements
reprochés à la SNCF et le fait du tiers, privant ainsi sa décision
de base légale, au regard du texte précité ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'agression avait été
commise par un voyageur démuni d'un titre de transport et en état
d'ébriété, la cour d'appel a constaté que la SNCF
n'établissait pas que des rondes avaient été effectuées
par les contrôleurs pour assurer la sécurité des voyageurs
et qu'au moment des faits, l'agresseur avait été contrôlé
; que, sans avoir à caractériser un lien de causalité entre
les manquements de la SNCF à ses obligations de surveillance et de contrôle
des voyageurs et le dommage puisque le transporteur est tenu d'une obligation
de sécurité de résultat, elle en a exactement déduit
que l'agression, qui pouvait être évitée, ne constituait
pas un cas de force majeure ;
D'où il suit qu'en ses première, deuxième et quatrième
branches, le moyen n'est pas fondé, tandis que la troisième branche
manque en fait ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.