Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mardi 5 octobre 2004

N° de pourvoi: 03-86321
Publié au bulletin
Cassation
Statuant sur le pourvoi formé par :- X... Léonard,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PAPEETE, chambre correctionnelle, en date du 18 septembre 2003, qui, pour pollution maritime par immersion de déchets, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1er et 4 de la loi du 7 juillet 1976, 6 et 8 de la Convention d'Oslo pour la prévention de la pollution par les opérations d'immersion effectuées par les navires et aéronefs du 15 février 1972, 1er, paragraphe a-q, et 31 de la Convention de Paris pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est du 22 septembre 1992, 34 et 66 de la Constitution du 8 octobre 1958, 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 111-3, 111-4, 121-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt a déclaré Léonard X... coupable du délit prévu à l'article 1er de la loi du 7 juillet 1976 et l'a condamné à une peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis ;

"aux motifs que la société Y... avait sollicité le GIP pour procéder au sabordage des cuves ; que le GIP, qui avait l'intention de couler au large le navire Meherio I ainsi que des carcasses de voitures et de scooter, avait sollicité la société Y... pour procéder au sabordage ; que le GIP en a profité pour envisager de couler également les cuves ; que le tractage du convoi a été fait par le Meherio II, commandé par Pierre Z... ; que le sabordage des cuves à la dérive a été fait par la société Y... ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que les cuves ont bien été immergées ;

qu'il convient de déterminer qui a assuré la conduite des opérations d'immersion ; que les opérations de conduite des cuves jusqu'à leur lieu d'immersion reposaient sur la seule personne de Léonard X... qui avait le pouvoir d'ordonner le départ du bateau et son retour et donc les opérations d'immersion ; que le prévenu a notamment déclaré "nous avions prévu de profiter de l'opération pour couler également six cuves de gaz réformées" et qu'il a décidé d'interrompre les opérations lorsqu'il en a reçu l'ordre ; que le prévenu a alors demandé à M. Y... de bien vouloir arrêter ; que Léonard X... a donné l'ordre au capitaine du Meherio II d'appareiller ; que Léonard X... lui a donné l'ordre, ultérieurement, de faire demi tour ; que Léonard X... a appelé M. Y... pour lui dire "c'est bon, on peut y aller" ; que Léonard X... assumant la conduite des opérations d'immersion, il lui appartenait de s'assurer que celles-ci étaient autorisées ; que l'autorisation n'a pas été donnée ; qu'au contraire, Léonard X... a été mis en demeure par l'Administration de surseoir à son projet ; que l'infraction n'a pas été supprimée mais que désormais, les demandes d'autorisation suivent un autre circuit que celui prévu initialement ; que les textes visés à la prévention paraissent applicables et ce d'autant plus qu'une délibération ne peut abroger une loi rendant applicable une convention internationale ; qu'il est donc bien établi que Léonard X... a assumé la conduite des opérations d'immersion prévue par l'article 4 de la loi du 7 juillet 1976 et par les dispositions du décret du 29 septembre 1982 ; qu'il doit donc être déclaré coupable de ce chef de la prévention ;

"1 ) alors que nul ne peut être puni pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi ; que la cour d'appel ne pouvait déclarer Léonard X... coupable du délit prévu à l'article 1er de la loi du 7 juillet 1976 qui renvoie, pour la définition de l'infraction, à l'article 5 de la Convention d'Oslo du 15 février 1972, laquelle a été remplacée par une Convention du 22 septembre 1992, publiée au journal officiel du 31 août 2000, qui ne reprend pas à l'identique les stipulations de la Convention d'Oslo, ce dont il résulte qu'à la date des faits imputés à Léonard X... , le délit n'était pas légalement défini ;

"2 ) alors que l'article 1er de la loi du 7 juillet 1976 dispose que la personne assumant la conduite des opérations d'immersion peut être déclarée coupable de l'infraction aux dispositions de la Convention d'Oslo à la condition qu'elle se trouve sur un engin français ou une plate-forme fixe ou flottante ; que la cour d'appel ne pouvait retenir Léonard X... dans les liens de la prévention sans constater qu'il se trouvait à bord du navire Meherio II lorsque les cuves ont été immergées" ;

Vu l'article 593 du Code de procédure pénale, ensemble l'article 1er de la loi du 7 juillet 1976, devenu l'article L. 218-48 du Code de l'environnement ;
Attendu que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ;

Attendu que, pour déclarer Léonard X... coupable des faits reprochés, l'arrêt attaqué énonce que, responsable du groupement d'intervention de la Polynésie française, il a donné l'ordre au capitaine du remorqueur Meherio II, navire appartenant à cet organisme, de procéder à l'immersion d'objets, parmi lesquels des cuves métalliques usagées, sans avoir obtenu l'autorisation administrative nécessaire ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans avoir invité le prévenu à s'expliquer sur les faits de complicité susceptibles de lui être reprochés et alors que l'auteur principal de l'infraction prévue et punie par le second des textes susvisés ne peut être que le capitaine du navire qui effectue l'opération d'immersion, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, CASSE et ANNULE
Publication : Bulletin criminel 2004 N° 234 p. 841