Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mardi 18 février 2014

N° de pourvoi: 13-81793
Non publié au bulletin Cassation

Statuant sur le pourvoi formé par :- L'association Les Amis de Saint Palais, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de POITIERS, en date du 5 février 2013, qui, dans l'information, suivie sur sa plainte, contre personne non dénommée du chef de d'infractions au code de l'environnement, a prononcé un non-lieu ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 122-3 du code pénal, 4 du code civil, 17 et 36 du décret n°73-218 du 23 février 1973, 13, 15 et 19 du décret n° 93-742 du 29 mars 1993 (devenus R. 214-15, R. 214-16, R. 214-18 et R. 214-22 du code de l'environnement), L. 214-1, L. 214-2, L. 214-3, L. 214-4 et L. 216-8 du code de l'environnement, 592 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, contradiction de motifs ;

"en ce que l'arrêt à dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef d'exploitation d'un système d'assainissement des eaux usées sans autorisation ;

"aux motifs qu'il ressort de la procédure que le SIVOM a, aux termes d'une délibération datée du 9 octobre 1981, sollicité auprès de l'autorité préfectorale l'autorisation de procéder à une extension jusqu'à 200 000 équivalents habitant de sa capacité de traitement, que la procédure ainsi engagée n'a pu être menée à son terme en temps utile du fait des modifications législatives et réglementaires intervenues au cours des années suivantes, que selon M. X..., ingénieur d'études sanitaires à la DDASS de la Charente Maritime, les retards apportés dans la régularisation des opérations d'extension relevaient en grande partie de négligences des services de 1'Etat au regard des modifications législatives intervenues ; qu'il appartenait à l'autorité préfectorale dès 1990, pour le motif d'intérêt général tiré des graves conséquences qu'aurait pu avoir l'absence d'un dispositif de traitement des eaux usées adapté à l'augmentation des besoins, de maintenir à titre conservatoire le fonctionnement de la station dans l'attente de l'achèvement de la procédure préalable au renouvellement de l'arrêté du 2 mai 1974, comme elle le fera le 25 janvier 2000 ; qu'en l'absence de réaction du représentant de l'Etat face à une situation qu'il ne pouvait ignorer, la communauté de communes et la société des eaux pouvaient légitimement croire qu'elles participaient à l'exploitation de la station d'épuration en vertu d'une autorisation tacite, que le conseil du témoin assisté a, à juste titre, invoqué une jurisprudence de la cour d'appel de Paris selon laquelle des chefs d'entreprise ne pouvaient être poursuivis à raison d'un défaut d'autorisation d'une installation classée lorsque l'absence d'autorisation était imputable à l'administration ;qu'il ne peut être retenu que la communauté d'agglomération Royan Atlantique s'est sciemment ou par négligence placée dans l'illégalité ; qu'au surplus au terme de l'information, un doute sérieux subsiste quant à l'objet de la limitation dans le temps de l'autorisation accordée le 2 mai 1974, qu'un courrier adressé au SIVOM le 8 juillet 1994 par les services de l'Etat a fait état d'une limitation de durée stipulée au seul regard de l'occupation du domaine public maritime, que le décret du 23 février 1973 portant application de la loi du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre la pollution n'avait pas prévu un caractère précaire des autorisations de rejet, ne les soumettant à une aucune obligation de reconduction ;

"1°) alors que nul n'est censé ignorer la loi, seule l'erreur insurmontable sur le droit applicable pouvant exonérer de leur responsabilité pénale les auteurs d'actes réprimés par la loi ; qu'il ressort des énonciations de l'arrêt que la station d'épuration de Saint-Palais-sur mer a fonctionné tout en étant dépourvue des autorisations requises au moins à compter de 1990 et jusqu'au 11 avril 1996, puis du 20 mai 1999 au 25 janvier 2000 ; qu'en retenant néanmoins qu'aucune infraction ne pourrait être poursuivie au motif « qu'en l'absence de réaction du représentant de l'Etat face à une situation qu'il ne pouvait ignorer, la communauté de communes et la société des eaux pouvaient légitimement croire qu'elles participaient à l'exploitation de la station d'épuration en vertu d'une autorisation tacite », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les textes et le principe susvisé ;

"2°) alors qu'au surplus, le juge pénal ne peut accorder à un mis en cause le bénéfice du doute au motif que la loi visée par la prévention est obscure ou que son interprétation est incertaine ; que pour dire n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef d'exploitation d'une station d'épuration sans autorisation, la chambre de l'instruction a cru pouvoir énoncer qu'« un doute sérieux subsiste quant à l'objet de la limitation dans le temps de l'autorisation accordée le 2 mai 1974 » un courrier adressé le 8 juillet 1994 par les services de l'Etat faisant état d'une limitation de durée stipulée au seul regard de l'occupation du domaine public maritime, cependant que le décret du 23 février 1973 n'avait pas prévu un caractère précaire des autorisations de rejet ; qu'en statuant par ces motifs partie inopérants, et partie contradictoires dès lors qu'elle constatait par ailleurs que l'installation litigieuse devait faire l'objet d'une régularisation, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, sur plainte avec constitution de partie civile de l'association des amis de Saint Palais qui dénonçait les conditions dans lesquelles les eaux usées provenant de la station d'épuration implantée sur le territoire de cette commune étaient rejetées en mer, le ministère public a requis l'ouverture d'une information ; que saisie de l'appel d'une ordonnance refusant d'ordonner une contre-expertise, la chambre de l'instruction, après avoir ordonné un supplément d'information, a annulé divers actes de la procédure dont l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction et, en procédant par voie d'évocation, a dit n'y avoir lieu à suivre ;

Attendu que, pour statuer ainsi, l'arrêt, après avoir notamment rappelé que la station d'épuration a fonctionné tout en étant dépourvue des autorisations requises au moins à compter de 1990 et jusqu'au 11 avril 1996 puis, à la suite de l'annulation d'un arrêté préfectoral en date du 12 avril 1996 portant autorisation et régularisation, du 20 mai 1999 au 25 janvier 2000, énonce qu'aucune infraction ne peut être retenue au motif qu'en l'absence de réaction du représentant de l'Etat face à une situation qu'il ne pouvait ignorer, le syndicat intercommunal à vocations multiples (SIVOM) de la presqu'île d'Arvert, dont les compétences ont été transférées à la communauté de communes du pays royannais puis à la communauté d'agglomération de Royan-Atlantique , et la compagnie des eaux de Royan, société exploitant la station d'épuration, pouvaient légitimement croire qu'elles participaient à l'exploitation de cette station en vertu d'une autorisation tacite ; que la chambre de l'instruction ajoute qu'un doute sérieux subsiste quant à l'objet de la limitation dans le temps de l'autorisation initiale accordée le 2 mai 1974 ;

Mais attendu qu'en se déterminant par des motifs empreints de contradiction quant à l'existence des autorisations requises, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE