Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mardi 4 juin 2013

N° de pourvoi: 12-85174
Non publié au bulletin
Rejet

Statuant sur le pourvoi formé par :- La société Sita Dectra,
- M. Gérard Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 27 juin 2012, qui, pour infractions au code de l'environnement, a condamné la première, à 30 000 euros d'amende et à un an de surveillance judiciaire, et le second, à 8 000 euros d'amende ;

Vu le mémoire produit ; ...

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 514-11 du code de l'environnement, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt infirmatif a déclaré coupables la société Sita Dectra et de M. Y..., coupables du délit de poursuite d'exploitation d'une installation classée non-conforme à un arrêté de mise en demeure de respecter les prescriptions techniques, les a condamnés à une amende d'un montant respectif de 30 000 et 8 000 euros et a ordonné le placement de la société Sita Dectra sous surveillance judiciaire pendant une durée d'un an ;

" aux motifs que, sur le dépassement des seuils, la cour rappelle être saisie par l'acte de poursuite de faits commis le 6 octobre 2009 relatif à l'exploitation d'une installation classée du site Trival Marne, de transfert et de tri de déchets ménagers et de déchets industriels banals, installation classée pour la protection de l'environnement suivant arrêté d'autorisation et d'exploitation n° 2004- A 193 IC du 13 décembre 2004 sans se conformer à l'arrêté de mise en demeure n° 2008 MED-167- IC du 25/ 11/ 2008 d'avoir à respecter, au terme d'un délai de trois mois les prescriptions techniques relatives aux valeurs limites de rejets toniques dans les eaux de ruissellement s'écoulant dans les ruisseaux Collard et Trois fontaines ;
qu'elle observe que :
- il n'est pas contesté que l'établissement Trival Marne de la société Sita Dectra est bien une IPCE dont les conditions d'exploitation sont fixées par l'arrêté d'autorisation et d'exploitation n° 20 04- A-193 IC du 13 décembre 2004,
- si les prévenus leur culpabilité au plan matériel au motif que le dépassement des seuils n'est pas matérialisé dans le procès verbal du 6 octobre 2009, il apparaît que :
- ils n'ont pas contesté le dépassement des seuils ayant donné lieu à l'arrêté de mise en demeure n° 2008 MED-167- IC du 25/ 11/ 2008 et au contraire pris immédiatement des mesures rappelées dans le courrier du 23 décembre 2008,
- ils n'ont jamais pu justifier depuis la régularisation de la situation, pas même à l'audience devant la cour où s'ils prétendent adresser, conformément à la réglementation, les relevés trimestriels, à l'administration, ce qui n'st pas vérifié, ils indiquent que les seuils, extrêmement difficiles à respecter, sont encore en léger dépassement,
- les constatations de l'administration font foi jusqu'à preuve contraire qui n'est pas rapportée,
- les droits de la défense et notamment l'égalité des armes, sont respectés dès lors que les prévenus savent relever d'une procédure administrative non contradictoire, dans laquelle donc il n'est pas prévu d'expertise contradictoire, qu'ils disposent cependant dans le cadre de celle-ci du moyen de contester les relevés de l'administration, ne serait ce que par le biais de la production de relevés contraires établis par un tiers indépendant, ce qu'ils n'ont jamais fait,
- la société Sita Dectra appartient à un groupe dont la taille et les moyens l'oblige à disposer d'un contrôle interne et d'un dispositif de respect de la conformité, passant selon la défense par des audits internes et l'établissement de bilans réguliers, d'autant plus important que le groupe auquel elle appartient ne peut se permettre de voir ternir sa réputation en matière d'environnement et qu'il se doit de faire annuellement un bilan RSE (en matière de responsabilité sociale et environnementale) ;

que plus spécifiquement, sur la responsabilité de M. Y..., la cour observe que la situation infractionnelle matérialisée le 6 octobre 2009 durait depuis un certain temps puisque l'administration qui déclare que le dépassement était ancien, qu'elle n'a effectué une mise en demeure que le 25 novembre 2008, avec un délai de régularisation de 3 mois qui n'a pas été respecté et ne l'était pas encore au 6 octobre 2009 soit 7 mois plus tard et qu'il n'est pas justifié qu'il le soit à ce jour ; qu'ainsi, la cour infirmera le jugement en déclarant M. Y...coupable ;

" alors que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; que la cour d'appel ne conteste pas que le dépassement des seuils ne se trouvait pas matérialisé dans le procès-verbal du 6 octobre 2009 ainsi que le dénonçaient la société Sita Dectra et son directeur général ; et qu'aucune des énonciations n'établit la matérialité de ces dépassements en l'absence de toute indication quant au seuil fixé par l'arrêté préfectoral d'autorisation du 13 décembre 2004 et quant aux valeurs qui auraient été effectivement relevées le 6 octobre 2009 lors du contrôle inopiné, que la cour d'appel n'a pas en l'état de cette insuffisance de motif caractérisé l'élément matériel du délit ; que l'infraction n'étant pas établi, la déclaration de culpabilité prononcée du chef de poursuite d'une exploitation classée non-conforme à une mise en demeure d'avoir à respecter des prescriptions techniques relatives à des valeurs limites de rejets toxiques dans des eaux de ruissellement est entachée de manque de base légale ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-2 et 121-3 du code pénal, du code de l'environnement, 593 du code de procédure pénale, insuffisance et contradiction de motifs et manque de baser légale ;

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré la société Sita Dectra, personne morale, coupable du délit de poursuite d'exploitation d'une installation classée non-conforme à un arrêté de mise en demeure de respecter les prescriptions techniques, l'a condamné à une amende de 30 000 euros et a ordonné son placement sous surveillance judiciaire pendant une durée d'un an ;

" aux motifs que, sur la responsabilité pénale de la SA Sita Dectra, la cour d'appel observe que :
- l'identité de l'auteur des manquements constitutifs du délit est identifié en la personne du directeur général, organe ou représentant de la personne morale agissant pour le compte de la société
,- l'infraction retenue s'inscrit dans le cadre des choix de politique industrielle de la société en cause et du groupe auquel elle appartient et ne peut dès lors avoir été commise que pour son compte, que par ses organe ou représentant en charge de vérifier la conformité des conditions d'exploitation de l'établissement à la réglementation,
- un fait précis est imputé à l'organe ou représentant de la société et considère ainsi que la responsabilité pénale de la personne morale se trouve bien engagée ; qu'elle infirmera ainsi le jugement et déclarera la SA Sita Dectra coupable,
- qu'elle ajoute que la SA Sita Dectra ne pourrait en l'occurrence s'extraire de sa responsabilité pénale en démontrant une violation par son organe ou son représentant des règles de prévention mises en place, puisque, contrairement à ses obligations réglementaires, elle a fait le choix de modifier les conditions d'exploitation du site, dans le cadre de sa politique industrielle, sans en tirer les conséquences sur la violation des normes relatives au rejet des effluents, ce qu'elle savait devoir faire, se contentant au mieux de maintenir le système de contrôle interne formel en place et devenu ainsi inadapté ;

" 1°) alors que, aux termes des dispositions de l'article 121-2 du code pénal, la responsabilité pénale d'une personne morale ne peut être recherchée que du fait des agissements réalisés pour son compte par ses organes ou représentants, qualité impliquant un pouvoir de diriger et d'engager la personne morale ; que la cour d'appel qui, tout en ayant constaté que M. Y..., directeur général de société Sita Dectra, s'il était en charge de la gestion opérationnelle de l'établissement Trival Marne, était salarié et non mandataire social et qu'il se trouvait pris dans une logique industrielle dont il n'était pas le maître, sans qu'il soit par ailleurs relevé qu'il ait été titulaire d'une délégation de pouvoir, n'a pas, en l'état de ces énonciations, légalement justifié sa décision retenant que M. Y...avait la qualité de représentant de la société Sita Dectra dont la responsabilité pénale en sa qualité de personne morale se trouvait engagée à raison des faits retenus à son encontre ;

" 2°) alors que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; que la cour d'appel qui, sans autrement en justifier, retient à l'encontre de la société Sita Dectra un prétendu choix d'une modification d'exploitation de son site dans le cadre de sa politique industrielle en s'étant abstenue d'en tirer les conséquences sur la violation des normes relatives au rejet des effluents, tout en ayant relevé par ailleurs (arrêt p. 8) la reconnaissance par l'inspection des installations classées de la volonté de mise en place d'une organisation et de systèmes visant à atteindre les valeurs limites dont l'existence d'une convention de gestion permettant à A... d'exploiter le centre de tri pour le compte de Sita Dectra, n'a pas en l'état de ces énonciations entachées de contradiction, établi que les faits retenus à l'encontre du directeur général ait été commis pour le compte de la société Sita Dectra " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, dont ils ont déduit sans insuffisance ni contradiction l'existence d'une délégation de pouvoirs au profit de M. Y..., ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;