Statuant sur les pourvois formés par :- M. Jacques X...,
contre les arrêts de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, qui ont :
- le premier, en date du 8 janvier 2014, sur renvoi après cassation (Crim., 25 janvier 2011, n°10-85.968), l'a condamné pour mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques ne bénéficiant pas d'une autorisation, à 800 euros d'amende ;
- le second, en date du 25 mars 2014, prononcé sur une rectification d'erreur matérielle de l'arrêt du 8 janvier 2014 ;
I- Sur le pourvoi formé contre l'arrêt en date du 25 mars 2014 :
Attendu que la déclaration de pourvoi, faite par lettre, ne répond pas aux conditions exigées par les articles 576 et 577 du code de procédure pénale ;
Que, dès lors, le pourvoi n'est pas recevable ;
II- Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 8 janvier 2014 :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles articles L. 253-1 et L. 253-17 du code rural, de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 593 du code de procédure pénale , défaut de motif et manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable du délit d'importation de produits phytosanitaires dépourvus d'autorisation de mise sur le marché commis entre le 5 avril 2001 et l'année 2002 et de l'avoir condamné à la peine d'amende de 800 euros ;
"aux motifs qu'il convient de rappeler le cadre juridique qui régit
les produits phytopharmaceutiques, et son évolution ; que les produits
phytopharmaceutiques (couramment appelés pesticides) sont définis
par la directive 91/414/CEE comme les substances actives et les préparations
contenant une ou plusieurs substances actives qui sont présentées
sous la forme dans laquelle elles sont livrées à l'utilisateur
et qui sont destinées à : - protéger les végétaux
ou les produits végétaux contre tous les organismes nuisibles,
ou à prévenir leur action¿, - exercer une action sur les
processus vitaux des végétaux (sauf substances nutritives), -
assurer la conservation des végétaux (sauf autres dispositions
du Conseil ou de la Commission concernant les agents conservateurs), - détruire
les végétaux indésirables, - détruire les parties
des végétaux, freiner ou prévenir une croissance indésirable
des végétaux ; que cette directive - cadre a fait l'objet d'une
transposition en droit français par le décret 94- 359 du 5 mai
1994 modifié relatif au contrôle des produits phytopharmaceutiques
et par son arrêté d'application du 6 septembre 1994 (décret
: JO 7mai, arr : JO 23 décembre 1994) ; que ce décret a ensuite
été abrogé et codifié au titre V du Livre II du
code rural ( art L. 251-1 à L. 254-10 ) par le décret du 1 er
août 2003 ; que l'autorisation de mise sur le marché est un acte
administratif par lequel l'autorité compétente d'un état
membre de l'union européenne autorise la mise sur le marché d'un
produit phytopharmaceutique sur son territoire. Cette autorisation est délivrée
pour une durée maximale de dix ans renouvelable ; que dans certains cas
elle peut être accordée à titre provisoire pour une durée
de trois ans renouvelables ; que l'article L. 253-1 II du code rural stipule
que : constitue une mise sur le marché toute cession à titre onéreux
ou gratuit, (à l'exception des cessions destinées au stockage
et à l'expédition consécutive à l'extérieur
du territoire métropolitain et des départements d'outre-mer) ;
que l'importation de pays tiers pour la mise en libre pratique constitue une
mise sur le marché ; que l'article L. 253-1-III du code rural précise
que : dans l'intérêt de la santé publique et de l'environnement,
les ministres chargés de l'agriculture et de la consommation peuvent,
par arrêté, prendre toute mesure d'interdiction, de restriction
et de prescription particulières concernant la mise sur le marché
ou la délivrance des produits mentionnés au présent article
; qu'aux termes de l'article L. 253-2 du code rural, les produits définis
à l'article L. 253-1, conditionnés pour la vente au détail,
ne peuvent être importés pour la consommation que s'ils ont fait
l'objet d'une autorisation de mise sur le marché ; quoique ait pu soutenir
M. X..., ces textes dans cette rédaction, est applicable à la
situation juridique soumise à la cour ; que l'autorisation de mise sur
le marché est délivrée après constitution d'un dossier
de demande d'homologation qui doit argumenter sur deux rubriques, l'efficacité
et l'innocuité, soumis, en France et à la date des faits à
un comité d'homologation composé d'experts et de représentants
des ministères ;
que le dossier toxicologique doit comporter toutes les données concernant
l'identité et les propriétés physico-chimiques de la molécule,
le détail des études des toxicités aiguës à
moyen et long terme, les effets spécifiques sur la santé, des
études de métabolisme dans divers milieux d'évaluation
des niveaux résiduels dans les denrées. (depuis 2006, l'évaluation
des risques relève de l'AFSSA - agence française de sécurité
sanitaire des aliments, tandis que l'évaluation des bénéfices
reste du ressort du comité d'homologation) ; que le décret du
5 mai 1994, comme la directive, prévoit plusieurs assouplissements et
dérogations : c'est ainsi qu'une autorisation de mise sur le marché
est accordée par les services français sans exiger la répétition
des tests et analyse déjà effectués dans un autre Etat
membre lorsqu'un produit est déjà autorisé dans cet autre
Etat et sous la réserve que chaque substance soit inscrite sur la liste
communautaire ou bien alors, en entraînant l'octroi d'une autorisation
provisoire de mise sur le marché (valable trois ans renouvelables) pour
un produit contenant une substance active non inscrite sur la liste communautaire
; que par ailleurs, à partir d'une interprétation d'une jurisprudence
de la Cour de justice de la communauté européenne, le décret
200 1-317 du 4 avril 200 1 (JO 14 avril 2001) a défini une procédure
simplifiée pour ce qui est désigné comme "les importations
parallèles", c'est à dire l'importation d'un produit phytopharmaceutique
en provenance d'un Etat membre dans lequel il bénéficie déjà
d'une autorisation de mise sur le marché conformément à
la directive 911414/CEE ; que l'autorisation est accordée dans les conditions
suivantes. - le produit de référence doit bénéficier
d'une autorisation de mise sur le marché délivrée par le
ministre chargé de l'agriculture en application des dispositions du décret
du 5 mai 1994, -le produit introduit sur le territoire national doit être
identique au produit de référence, l'identité étant
appréciée au regard des trois critères suivants. - origine
commune des deux produits (fabriqués selon la même formule, par
la même société ou par des entreprises liées) - fabrication
en utilisant la ou les mêmes substances actives - effets similaires des
deux produits compte tenu des différences qui peuvent exister au niveau
des conditions agricoles, phytosanitaires et environnementales ; que s'il remplit
ces conditions, le produit introduit sur le territoire national se voit accorder
une autorisation de mise sur le marché, laquelle ne peut être délivrée
que pour les mêmes usages et accompagnée des mêmes prescriptions
d'emploi que le produit de référence ; qu'en outre, toutes les
décisions concernant l'autorisation de mise sur le marché accordée
au produit de référence sont applicables au produit introduit
sur le territoire national ; que l'autorisation de mise sur le marché
est accordée de façon nominative (le produit étranger ne
peut être homologué sous le même nom que son équivalent
français ; qu'en deuxième lieu, les prévenus se réfèrent
aux décisions de la CJCE du 8 novembre 2007 (Daniel Y... et Jean Z...)
et du 21 février 2008, mais qu'il convient de rappeler que le premier
arrêt qui est intervenu sur demande préjudicielle d'avis de la
cour d'appel de Montpellier concerne la question de l'importation d'un produit
phytopharmaceutique par un agriculteur pour les seuls besoins de son exploitation,
ce qui n'est pas le cas des quatre prévenus qui ont procédé
à l'importation des produits précédemment cités
dans le cadre d'un négoce ; qu'il rappelle cependant aux points 34 à
37, le bien-fondé d'une intervention étatique dans la délivrance
d'une autorisation de mise sur le marché dans un but de protection d'intérêt
général de la santé humaine, animale et de l'environnement,
qui ne peut relever de la seule responsabilité de l'agriculteur ; que
le second arrêt a été rendu dans le cadre d'un recours de
la Commission des Communautés européennes contre la France et
la CJCE a clairement énoncé aux points 36 et 37 l'absence d'automaticité
d'une autorisation de mise sur le marché pour une importation parallèle
et la légitimité pour Etat membre de vérifier si l'importation
d'un produit phytopharmaceutique qui bénéficie d'une autorisation
de mise sur le marché dans un autre Etat membre constitue une importation
parallèle par rapport au produit bénéficiant déjà
d'une autorisation de mise sur le marché dans l'Etat membre d'importation
et d'examiner si le produit concerné peut bénéficier de
l'autorisation de mise sur le marché délivrée au profit
d'un produit phytopharmaceutique déjà présent sur le marché
de cet Etat ; que le principe de proportionnalité qui "exige d'appliquer
la réglementation en cause dans la limite de ce qui est nécessaire
pour atteindre son objectif essentiel de protection de la santé publique"
est rappelé dans les deux arrêts qui visent deux situations juridiques
distinctes individuelle ou générale et l'arrêt du 8 novembre
2007, reprenant ce principe, consacre la conformité de la législation
française au droit européen ; qu'en troisième lieu, il
a été développé ,dans le cadre du principe de proportionnalité,
les délais excessifs pour obtenir une autorisation de mise sur le marché
parallèle entre la demande et la délivrance par l'administration,
argument contredit par les propres déclarations de M. A... qui les a
obtenues pour les quatre produits énoncés dans la prévention
en moins de trois mois, avec une demande du 21 mai 2002 et des autorisations
de mise sur le marché délivrées le 9 juillet 2002 ; qu'en
dernier lieu, il ne peut qu'être relevé pour ce qui concerne MM.
B... et A... - ainsi qu'ils l'ont reconnu et à la différence de
M. X... - que ce sont moins des considérations" politiques"
relatives à un éventuel conflit entre les normes européenne
et française que leurs propres négligences ou défaillances
qui sont à l'origine de leur défaillance et pour M. C... sa méconnaissance
de la législation ; l'erreur de droit ne constitue pas un fait justificatif
et ce d'autant moins de la part d'un professionnel ; qu'en conséquence,
le jugement du tribunal correctionnel de Saint -Gaudens sera confirmé
en ce qu'il les a déclarés coupables du délit d'importation
des produits phytopharmaceutiques sans autorisation de mise sur le marché
; qu'ainsi que l'a requis le ministère public, les sanctions doivent
tenir compte d'une part que l'infraction dont MM. B..., A..., X... et C... sont
déclarés coupables ce jour constituaient une poursuite unique
avec les autres délits déjà condamnés par le jugement
du tribunal correctionnel de Saint-Gaudens, confirmé par l'arrêt
du 28 avril 2010, et d'autre part que depuis la date des faits et ainsi qu'en
témoignent les casiers judiciaires, ils n'ont pas commis d'autres infractions
;
"alors que M. X... avait déposé des conclusions visées par la cour dans lesquelles il faisait notamment valoir que tous les produits phytopharmaceutiques visés à la prévention le concernant contenaient des substances actives autorisées, et que les dispositions du code rural n'autorisent l'administration à prendre des mesures d'interdiction, de restriction ou des prescriptions particulières concernant la mise sur le marché des produits mentionnés à l'article L. 253-1 que dans l'intérêt de la santé publique et de l'environnement, de sorte que les faits qui lui étaient reprochés ne pouvaient pas être pénalement répréhensibles ; qu'en se bornant à rappeler la réglementation concernant la procédure d'autorisation de mise sur le marché et sa compatibilité avec la réglementation communautaire sans répondre au moyen des conclusions susvisées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'une enquête diligentée par le service régional de la protection des végétaux, une information judiciaire a révélé que des produits phytopharmaceutiques provenant d'autres Etats membres de la communauté, où ils étaient homologués, et correspondant à des produits déjà homologués par les autorités françaises étaient commercialisés sur le territoire national sans bénéficier d'une autorisation de mise sur le marché (AMM), en méconnaissance de la réglementation résultant du décret 2001-317 du 4 avril 2001 ayant prévu, dans une telle situation, une procédure simplifiée ; que M. X... a été renvoyé devant le tribunal notamment pour cette importation dite "parallèle"des produits Juwel Top et Gramoxone Plus, constitutive du délit prévu et réprimé par l'article L. 253-17 du code rural ; que le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable des faits reprochés ; que le prévenu et le ministère public ont interjeté appel ;
Attendu que, pour confirmer la déclaration de culpabilité, l'arrêt relève que M. X... a reconnu connaître la dangerosité du Gramoxone Plus espagnol et l'absence d'homologation du Juwel Top ; que les juges ajoutent que les articles L. 253-1 et L. 253-2 du code rural, dans leur rédaction en vigueur à la date des faits, et qui notamment permettent aux ministres chargés de l'agriculture et de la consommation de prendre, dans l'intérêt de la santé publique et de l'environnement, toute mesure d'interdiction, de restriction et de prescriptions particulières concernant la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques et prévoient que ces produits conditionnés pour la vente au détail ne peuvent être importés pour la consommation que s'ils ont fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché, sont applicables en l'espèce ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui a répondu sans insuffisance ni contradiction aux chefs péremptoires des conclusions du prévenu et caractérisé en tous ses éléments le délit dont elle l'a déclaré coupable, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs :
I- Sur le pourvoi formé contre l'arrêt, en date du 25 mars 2014 ;
Le déclare IRRECEVABLE ;
II- Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 8 janvier 2014 ;
Le REJETTE ;