Cour de Cassation
Chambre civile 1
Audience publique du 7 novembre 2006
Rejet.
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que M. X... et Mme Y... (les consorts X...) étaient adhérents de la société coopérative Prune d'Oc Provence, spécialisée dans le séchage des prunes et la commercialisation des pruneaux ainsi obtenus ; que les premiers, après être convenus avec la seconde de limiter au séchage la prestation relative à leur récolte de 1994, ont refusé de payer le prix; que la coopérative a alors exercé la rétention sur les fruits séchés ; que les parties se prétendant mutuellement créancières, une décision de justice a dit les consorts X... débiteurs d'une certaine somme, et les a autorisés à reprendre leur bien lorsqu'ils se seraient exécutés ; qu'après qu'ils se furent acquittés, la marchandise se révélant être devenue impropre à toute consommation et commercialisation, ils ont assigné de ce chef le rétenteur en dommages-intérêts ;

Attendu que la coopérative fait grief à l'arrêt attaqué (Montpellier, 22 septembre 2004) d'avoir, en accueillant la demande, méconnu l'article 1147 du code civil et les principes régissant le droit de rétention, par l'ignorance de ses constatations selon lesquelles la perte de la récolte trouvait sa cause dans la carence initiale des consorts X..., conscients tant de l'inexécution de leurs obligations que du caractère périssable de la chose, et par le refus de tenir compte de la faute causale commise par eux dans leur refus persistant d'acquitter les frais de séchage malgré la décision de justice qui les y condamnait ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a exactement énoncé que le droit de retenir la marchandise jusqu'à complet paiement ne dispense aucunement le rétenteur de procéder aux diligences nécessaires à sa conservation, avec la possibilité de réclamer au débiteur les frais afférents, a relevé que, lors de la récupération des fruits, ceux-ci étaient infectés d'excréments d'insectes, et que la coopérative, qui n'alléguait aucune détérioration étrangère à la période de rétention ni force majeure, ne pouvait ignorer, en tant que professionnel, le risque inhérent à l'exposition des pruneaux, à l'extérieur, sous plastique, et pendant plusieurs mois ; qu'elle a ainsi constaté le manque de diligence du rétenteur et le rôle exclusif de sa faute dans la survenance du dommage ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE
Publication : Bulletin 2006 I N° 459 p. 395
RTDciv 2007, n° 1, Crocq
JCP G, 2007, n° 22, Doctrine, chron. p. 30, Delebecque