Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 6 février 2007
Rejet

N° de pourvoi : 04-15362
Publié au bulletin

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 25 mars 2003), que le 8 mars 1988, le Crédit mutuel de l'Ouest ( la banque) a consenti à la société Le Capital un prêt de 360 000 francs au taux effectif global de 11,54 %, remboursable en 84 mensualités de 6 266,88 francs ; que par actes sous seing privé, établis le même jour, M. X... gérant et associé de la société Le Capital qui exploitait un restaurant ainsi que sa compagne, Mme Y..., co-associée qui travaillait dans le restaurant, se sont portés cautions solidaires des obligations contractées dans le cadre du prêt octroyé par la banque ; que la liquidation judiciaire de la société Le Capital a été prononcée le 29 janvier 1992 et que M. X... et Mme Y... ont été condamnés solidairement à payer à la banque la somme de 253 090,13 francs avec intérêts au taux de 11,54 % l'an à compter du 25 septembre 1991 ; que par un jugement du 16 janvier 1995, M. X... et M. Y... ont bénéficié d'un plan de redressement judiciaire civil dans lequel la créance de la banque a été fixée à 348 855,88 francs remboursable en 59 mensualités de 400 francs, le solde devant être réglé lors de la 60e échéance ; que la commission de surendettement ayant été saisie par M. X... et Mme Y..., elle a, déclaré irrecevable leur demande au motif qu'elle portait sur une dette à caractère professionnel; que Mme Y... a, alors, assigné la banque pour la voir condamner à réparer le préjudice qui a résulté d'un manquement au devoir de conseil, qui lui incombait dans le cadre de sa mission, en faisant souscrire à cette dernière un cautionnement manifestement disproportionné au regard des ressources dont elle disposait au moment où elle s'est engagée ; que par jugement du 8 octobre 2002, le tribunal a rejeté les demandes de Mme Y... recevable et a débouté cette dernière de l'ensemble de ses demandes ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à verser à Mme Z... somme de 49 584,94 euros à titre de dommages-intérêts, en raison de la disproportion du cautionnement souscrit par elle en garantie de la dette de la société Le Capital dont elle était associée égalitaire avec son concubin et décidé que cette somme viendrait en compensation de la créance de la banque à son égard alors, selon le moyen, que la caution solidaire, associée égalitaire de la société cautionnée, compagne et collaboratrice du dirigeant de celle-ci, qui n'a jamais prétendu ni démontré que la banque avait sur ces revenus, son patrimoine et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles, en l'état du succès escompté de l'exploitation de la société, des informations qu'elle-même aurait ignorées, n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de ce créancier du fait de la disproportion de son engagement par rapports à ses ressources ; qu'en l'espèce, la banque soutenait expressément dans ses conclusions d'appel, reprenant à son compte les motifs du jugement de première instance, qu'en sa qualité d'associée égalitaire de la société cautionnée et de concubine du dirigeant social, Mlle Y..., qui contribuait en outre aux cotés de M. X... à l'exploitation du fonds de commerce, ne pouvait se prévaloir, à son encontre, d'un défaut d'information ou de conseil pour lui avoir fait souscrire un engagement de caution disproportionné par rapport à ses revenus ; que dès lors, en retenant la disproportion entre les revenus de Mme Y... et le montant de l'engagement souscrit pour dire engagée, à son égard, la responsabilité de la banque sans rechercher, comme elle y était invitée, si celle-ci établissait que la banque avait eu sur ses revenus et ses facultés de remboursement des informations qu'elle-même aurait ignorées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève que Mme Y..., qui n'était pas dirigeante de la société, avait, au jour de la souscription du cautionnement litigieux un revenu mensuel de 3800 francs alors que les mensualités du prêt dont elle s'était portée caution solidaire étaient de 6 266,88 francs, et qu'il était imprudent de déduire des résultats antérieurs bénéficiaires de l'entreprise et de sa qualité d'associée que les revenus de Mme Y... augmenteraient de façon sensible et régulière ;
qu'il en déduit par une appréciation souveraine qu'il existait une disproportion entre les ressources dont elle disposait et l'engagement qu'elle avait souscrit à concurrence de la totalité du crédit ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel qui, s'agissant d'une caution non avertie n'avait pas à procéder à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;