Cour de cassation
chambre mixte
Audience publique du vendredi 8 juin 2007

N° de pourvoi: 05-10727
Publié au bulletin Cassation partielle

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte notarié du 21 septembre 1992, Roland Y...et Mme Jacqueline X..., son épouse, ont fait donation entre vifs à leurs cinq enfants de la nue-propriété d'un immeuble appartenant en propre au mari et en faisant réserve expresse à leur profit et au profit du survivant d'entre eux, pour en jouir pendant leur vie, sans réduction au décès du prémourant, de l'usufruit du bien donné ; qu'après le décès de Roland Y..., survenu le 26 mars 1998, ses héritiers ont renoncé à sa succession ; que l'administration fiscale, estimant que Mme Y...avait procédé à certains actes, au nombre desquels elle incluait l'exercice de l'usufruit, rendant cette renonciation inopérante, lui a notifié un redressement de droits de mutation à titre gratuit ; qu'après le rejet de sa réclamation, Mme Y...a assigné l'administration devant le tribunal pour obtenir la décharge des droits réclamés ;

Sur le premier moyen :
Attendu que le directeur général des impôts fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande alors, selon le moyen, que conformément aux articles 1168 et 1185 du code civil, à la différence du terme qui est lié à un événement futur dont la réalisation est certaine mais dont seul est inconnu le moment auquel l'événement se produira, la condition porte sur un événement futur dont la réalisation est nécessairement incertaine ; que la modalité introduisant dans un contrat la circonstance de la survie d'une personne à une autre constitue un événement dont la réalisation est nécessairement incertaine et qui s'analyse en une condition et non un terme ; qu'il s'ensuit qu'en cas d'usufruits successifs, le deuxième usufruit est soumis à la condition suspensive de la survie du second bénéficiaire ; qu'en considérant que la clause de réversion d'usufruit s'analyse en une donation à terme de biens présents, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 1168 et 1185 du code civil ;

Mais attendu que la clause qui stipule la réserve de l'usufruit au profit des donateurs et du survivant d'entre eux, avec donation éventuelle réciproque, s'analysant en une donation à terme de biens présents, le droit d'usufruit du bénéficiaire lui étant définitivement acquis dès le jour de l'acte, la cour d'appel a exactement retenu que l'exercice de ce droit, différé au jour du décès du donateur, ne constituait pas la manifestation de la volonté de son bénéficiaire d'accepter la succession du défunt ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

(...)

Publication : Bulletin
JCP 2007, II, 10130, note G. Goubeaux
RTDCiv 2007, p. 588, obs Th. Revet