Cet arrêt applique l'art. L. 89-2 du Code du domaine de l'Etat
devenu art. L5112-3 du Code général de la propriété
des personnes publiques
Les droits des tiers détenteurs de titres qui n'ont pas été
examinés par la commission prévue par les dispositions de l'article
10 du décret n° 55-885 du 30 juin 1955 sont appréciés
dans les conditions particulières suivantes.
La commission départementale de vérification des titres, créée
dans chacun des départements de la Guadeloupe et de la Martinique par
le I de l'article 1er de la loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996, apprécie
la validité de tous les titres antérieurs à l'entrée
en vigueur de ce décret, établissant les droits de propriété,
réels ou de jouissance sur les terrains précédemment situés
sur le domaine de la zone des cinquante pas géométriques dont
la détention par la personne privée requérante n'était
contrariée par aucun fait de possession d'un tiers à la date du
1er janvier 1995.
Sous peine de forclusion, seuls les titres présentés dans un délai
de deux ans à compter de la constitution de la commission départementale
de vérification des titres sont examinés.
Les personnes privées qui ont présenté un titre ne peuvent
déposer une demande de cession à titre onéreux pour les
mêmes terrains, dans les conditions fixées aux articles L. 5112-5
et L. 5112-6 tant que la commission n'a pas statué sur la validation
de ce titre.
Les personnes privées qui ont déposé un dossier de demande
de cession à titre onéreux dans les conditions fixées aux
articles L. 5112-5 et L. 5112-6 ne peuvent saisir la commission en vue de la
validation d'un titre portant sur les mêmes terrains tant que la demande
de cession n'a pas fait l'objet d'une décision de l'Etat.
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 16 novembre 2005
N° de pourvoi: 04-16936
Publié au bulletin Rejet
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 12 mars 2004),
que M. X..., se prétendant propriétaire de parcelles situées
dans la zone des cinquante pas géométriques, a saisi la commission
de vérification des titres ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande,
alors, selon le moyen :
1 / qu'il résulte notamment de la combinaison des articles 544 et suivants
du Code civil, 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen
du 26 août 1789 et de l'article 1er du premier protocole additionnel à
la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, que le
droit de propriété juridiquement protégeable a un caractère
absolu, exclusif et perpétuel, ce dont il découle notamment que
la propriété dure aussi longtemps que le bien lui-même et
ne se perd pas par non-usage, de sorte que l'action en revendication peut être
exercée par le propriétaire détenteur de titres, aussi
longtemps qu'un tiers ne justifie pas être lui-même devenu propriétaire
de l'immeuble revendiqué, par le résultat d'une possession contraire,
réunissant tous les caractères exigés par la prescription
acquisitive ; qu'ainsi, en refusant de reconnaître à M. X... un
droit de propriété sur une parcelle pour laquelle il justifiait
de titres et pour laquelle aucun fait de possession d'un tiers
de nature à faire obstacle à ce droit n'avait été
constaté au 1er janvier 1995, uniquement parce qu'il ne justifierait
pas de l'usage de ladite parcelle à cette date, la cour d'appel
a violé les textes et principes susvisés ;
2 / qu'aux termes du 2 alinéa de l'article L. 89-2 du Code du domaine
de l'Etat instituant une commission de vérification des titres dans chacun
des départements de la Guadeloupe et de la Martinique, "cette commission
apprécie la validité de tous les titres antérieurs à
l'entrée en vigueur du décret n° 55-885 du 30 juin 1955 qui
n'ont pas été examinés par la commission prévue
par l'article 10, établissant les droits de propriété,
réels ou de jouissance sur les terrains précédemment situés
sur le domaine de la zone des 50 pas géométriques dont la détention
par la personne privée requérante n'était contrariée
par aucun fait de possession d'un tiers à la date du 1er janvier 1995
; qu'en l'espèce, M. X... avait régulièrement soumis, dans
les conditions et délais requis, à la commission de vérification
compétente, deux actes notariés du 20 janvier 1936 et 17 septembre
1951, dont il se prévalait comme titres, en vue de se faire reconnaître
un droit de propriété sur une parcelle de terre pour partie située
dans la zone des 50 pas géométriques, à propos de laquelle
il n'a été relevé aucun fait de possession d'un tiers,
ni à la date du 1er janvier 1995, ni même avant ou après
cette date, qui seul aurait été de nature à remettre en
cause cette revendication de propriété, aux termes des dispositions
précitées ; qu'en affirmant, malgré cette absence de fait
de possession d'un tiers dûment constaté, que M. X... ne pouvait
prétendre faire valider ses titres par la commission de vérification,
faute de justifier qu'il occupait la parcelle revendiquée à la
date du 1er janvier 1995, la cour d'appel a violé, par fausse application,
l'article L. 89-2 du Code du domaine de l'Etat ;
Mais attendu que les dispositions de l'article 1er du protocole additionnel
à la Convention européenne des droits de l'Homme et des libertés
fondamentales reconnaissent aux Etats le droit de mettre en vigueur
les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des
biens conformément à l'intérêt général
; que la cour d'appel, qui a constaté qu'il n'existait pas de preuve
d'une occupation du bien au 1er janvier 1995, a exactement retenu que, selon
l'article L. 89-2 du Code du domaine de l'Etat, seuls les titulaires
de titres apportant la preuve qu'ils occupaient la parcelle revendiquée
à cette date pouvaient prétendre les faire valider ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Publication : Bulletin 2005 III N° 221 p. 201
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 13 décembre 2006
N° de pourvoi: 05-19808
Publié au bulletin Rejet.
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 18 juin 2004),
que le 13 avril 1999, M. Georges X... a demandé à la commission
départementale de vérification des titres de la Martinique la
validation de son titre de propriété sur la parcelle cadastrée
E n° 16 située dans la zone des cinquante pas géométriques
; qu'en cours d'instance, M. Georges X... étant décédé,
l'un de ses héritiers, Jean-Paul X... a repris l'instance ; qu'en cause
d'appel Mme Marie-Thérèse Y..., veuve de M. Georges X..., Mme
Nicole X..., épouse Z..., Mme Dominique X..., épouse A..., Mme
Isabelle X..., épouse B..., héritiers de Georges X..., sont intervenus
volontairement ;
Attendu que M. Jean-Paul X..., Mme Marie-Thérèse Y..., veuve
X..., et Mme Nicole X..., épouse Z..., font grief à l'arrêt
de rejeter leur demande, alors, selon le moyen :
1 / que la preuve de la propriété immobilière est
libre et, par conséquent, lorsque aucun titre ne peut
être produit, elle peut résulter de la production d'attestations
; qu'en l'espèce, pour démontrer leur droit de propriété
sur la parcelle litigieuse, les consorts X... avaient produit deux attestations
aux termes desquelles il était attesté que la parcelle litigieuse
avait été cédée à M. Georges X... le 8 avril
1955 ; que ces attestations, dont la sincérité n'était
pas discutée, établissaient la réalité de cette
cession et donc du transfert de propriété au profit de M. X...
; qu'en retenant, pour les écarter, que la cession n'avait aucun support
matériel et qu'elles ne prenaient pas parti sur la nature juridique de
l'acte de cession, cependant que cette circonstance était indifférente
au regard de la preuve du droit de propriété invoqué par
les consorts X..., la cour d'appel a statué aux termes de motifs inopérants
et a violé l'article 544 du code civil ;
2 / que la preuve de la propriété est étrangère
à la question de l'opposabilité des actes aux tiers ; que partant,
en décidant que les attestations produites par les consorts X... ne pouvaient
suffire à établir la cession au profit de M. X... dès lors
que cette cession n'avait pas été portée à la connaissance
des tiers, la cour d'appel a violé l'article 544 du code civil ;
3 / que le défaut de publication d'un acte de donation entraîne
seulement son inopposabilité aux tiers mais non pas sa nullité
;
que, dès lors, le défaut de publication ne peut avoir aucune conséquence
sur le transfert de propriété ; qu'en décidant le contraire,
la cour d'appel a violé les articles 931, 939 et 941 du code civil ;
4 / que la nullité d'une donation découlant du défaut de
pouvoir d'un contractant n'est que relative, ne peut donc être invoquée
que par l'intéressé et est susceptible de confirmation ; qu'en
relevant que rien n'indiquait que M. Joseph C... avait reçu procuration
pour céder la parcelle, alors que plus de quarante ans s'étaient
écoulés depuis la cession et alors que les consorts C..., sans
jamais se prévaloir de la nullité, avaient au contraire ratifié
et confirmé la cession, la cour d'appel a violé les articles 1108
et 1304 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le titre dont se prévalaient
désormais les consorts X... était une "cession" du 8
avril 1955 de la parcelle litigieuse faite par M. Joseph C... au profit de M.
Georges X... et que l'existence matérielle de ce titre n'était
nullement prouvée puisque aucun acte n'était produit aux débats,
la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa
décision au regard de l'article L. 89-2 du code du domaine de l'Etat,
devenu l'article L. 5112-3 du code général de la propriété
des personnes publiques ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Publication : Bulletin 2006 III N° 251 p. 214
Code général de la propriété des personnes publiques
Article L5111-1
La zone comprise entre la limite du rivage de la mer et la limite supérieure
de la zone dite des cinquante pas géométriques définie
à l'article L. 5111-2 fait partie du domaine public maritime de l'Etat.
Article L5111-2
La réserve domaniale dite des cinquante pas géométriques
est constituée par une bande de terrain délimitée dans
les départements de La Réunion, de la Guadeloupe et de la Martinique.
Elle présente dans le département de la Guyane une largeur de
81,20 mètres comptée à partir de la limite du rivage de
la mer tel qu'il a été délimité en application de
la législation et de la réglementation en vigueur à la
date de cette délimitation.