Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 11 juillet 2006
Rejet
N° de pourvoi : 05-13103 Publié au bulletin
Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Montpellier, 11 janvier 2005), que la société coopérative vinicole les Vignerons d'Opoul (la coopérative) a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 3 juillet 2001 et 4 juin 2002 ; que le juge-commissaire a rejeté les actions en revendication de leurs stocks formées le 1er août 2002 par M. X... et vingt cinq autres adhérents à la coopérative (les coopérateurs) ; que, saisi des recours exercés contre l'ordonnance du juge-commissaire, le tribunal a jugé que les adhérents sont restés propriétaires de leurs stocks de vin conservés par la coopérative au prorata de leurs apports respectifs et, avant dire droit, a ordonné une expertise pour réunir tous les éléments permettant de déterminer les droits effectifs de chacun des coopérateurs ;

Sur le premier moyen :
(...)

Et sur le second moyen :
Attendu que M. Y..., ès qualités, reproche à l'arrêt d'avoir décidé que les coopérateurs restaient propriétaires des stocks conservés par la coopérative au prorata de leurs apports respectifs et dit que n'était pas rapportée la preuve que les adhérents aient été intégralement payés de leurs apports conservés en stocks et encore présents dans la cave, accueillant ce faisant le principe de l'action en revendication des associés coopérateurs, alors, selon le moyen :
1 / que l'action en revendication des marchandises détenues par le débiteur en redressement judiciaire est soumise à la preuve de l'existence de ces marchandises en nature dans le patrimoine du débiteur au moment de l'ouverture de la procédure collective ; que des marchandises transformées peuvent être considérées comme retrouvées en nature s'il est établi que la transformation n'en a pas altéré la substance ; que la seule circonstance que ces biens soient demeurés identifiables ne suffit en revanche pas à établir leur existence en nature ;
qu'en l'espèce, les associés coopérateurs ont livré des raisins à la coopérative ; qu'en décidant que les marchandises revendiquées existaient encore en nature dans le patrimoine du débiteur, en se fondant sur la seule existence de stock de vin en cave, sans constater que ces stocks comprenaient également les récoltes livrées, ou que celles-ci avaient pu être transformées en vin sans altération de leur substance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-122 du code de commerce ;
2 / qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions du liquidateur lequel faisait valoir que les coopérateurs avaient apporté des moûts de raisin, alors que la cave de la coopérative ne comportait plus que du vin élevé, vinifié et stocké en cave, et que dès lors les moûts, qui avaient été transformés et incorporés les uns aux autres, n'existaient plus en nature dans le patrimoine du débiteur au moment de l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé qu'il appartient au propriétaire revendiquant de rapporter la preuve que la marchandise revendiquée se retrouve, à l'ouverture de la procédure collective, en nature entre les mains du débiteur et qu'il doit y avoir identité entre la chose livrée et la chose revendiquée, sous réserve de transformation ou d'incorporation éventuelles n'en modifiant ni les caractères, ni la propriété, l'arrêt relève que chacun des coopérateurs justifie de ses déclarations de récoltes annuelles qui mentionnent de façon distincte et individualisée les différentes productions apportées qui sont ainsi identifiables et que le stock de la cave de la coopérative est constitué d'hectolitres provenant des récoltes 1999, 2000 et 2001 répartis en diverses appellations distinctes ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, répondant en les écartant aux conclusions prétendument délaissées, n'a fait qu'user de son pouvoir souverain d'appréciation en retenant que les marchandises revendiquées se trouvaient encore en nature dans les caves de la coopérative dès lors que l'incorporation des moûts les uns aux autres et le processus d'évolution et de vinification des récoltes apportées n'avaient pas transformé leur substance ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 22 mars 1994

N° de pourvoi: 92-11223
Publié au bulletin Rejet.

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 30 octobre 1991), que la société Boeuf mode a été mise en redressement judiciaire le 10 octobre 1990, sans avoir réglé à la société coopérative agricole Groupement de producteurs bovins de l'ouest (le GPBO), le prix d'animaux que ce dernier lui avait livrés ; qu'excipant d'une clause de réserve de propriété, le GPBO a revendiqué les animaux livrés se trouvant encore dans les entrepôts de la société Boeuf Mode et la partie du prix de revente non payée de ceux déjà vendus par elle ;
Attendu que le GPBO fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que si la revendication du prix de marchandises ne peut être accueillie que dans la mesure où celles-ci existent en nature lors de l'ouverture de la procédure collective, cette existence en nature doit s'entendre comme le maintien de la nature fondamentale de ces marchandises et non pas de leur maintien en l'état ; qu'en conséquence, il suffit que leurs caractères essentiels et substantiels soient inchangés ; qu'ainsi, en considérant que lors de l'ouverture de la procédure collective de la société Boeuf mode, les bovins vendus par le GPBO avaient été abattus et découpés, de sorte que cette transformation des marchandises ne permettait plus la revendication de leur prix, en ce qu'il était incompatible avec l'exigence légale de l'existence en nature des biens revendiqués, la cour d'appel a violé par fausse interprétation les articles 121 et 122 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, d'autre part, que la revendication des marchandises doit être admise, dès lors qu'elles peuvent être identifiées chez l'acheteur comme étant celles qui ont été livrées par le vendeur revendiquant ; qu'après avoir constaté que les bovins avaient été identifiés comme étant ceux livrés par le GPBO, la cour d'appel a néanmoins refusé à ce dernier la possibilité de revendiquer le prix de leur vente ; qu'en ne déduisant pas de ces constatations, d'où il résultait que l'identité des marchandises n'était pas affectée, les conséquences qui en découlaient, la cour d'appel a encore violé les articles 121 et 122 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que la cour d'appel, après avoir relevé que les animaux livrés par le GPBO avaient été abattus et découpés par la société Boeuf mode entre le 11 et le 14 septembre 1990, a retenu que ces opérations de transformation, effectuées en vue de la commercialisation de produits de boucherie, " étaient incompatibles avec l'exigence légale de l'existence en nature des biens revendiqués au jour de l'ouverture du redressement judiciaire " de la société Boeuf mode, prononcé le 10 octobre 1990 ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a établi que les animaux revendiqués ne se retrouvaient pas en nature, au sens de l'article 121, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985, et a ainsi légalement justifié sa décision de rejeter la demande en revendication, peu important l'identification des marchandises ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.
Publication : Bulletin 1994 IV N° 121 p. 94