Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 30 mars 2006), que
les époux X... , dont la maison d'habitation s'adosse à celle
des époux Y... , ont fait procéder par M.Z..., architecte, à
un exhaussement de leur construction qui repose sur le mur de ces derniers ;
que les époux Y... ont assigné les époux X... en vue de
la destruction de la surélévation et en paiement de dommages-intérêts
; que les époux X... ont invoqué l'acquisition par prescription
de la mitoyenneté du mur jusqu'à l'héberge et demandé
le bénéfice de la cession forcée de mitoyenneté
pour la partie du mur située au dessus ;
Attendu que pour constater la cession forcée de mitoyenneté de
la partie du mur sur laquelle s'adosse la surélévation, au delà
de l'héberge, l'arrêt retient que les époux X... ont acquis
par usucapion la mitoyenneté du mur séparatif jusqu'à l'héberge,
que la portion supérieure de ce mur est restée privative et donc
propriété exclusive des époux Y..., que la surélévation
du pavillon des époux X... constitue un empiétement fautif sur
la propriété Y... et que les époux X... sont fondés
à se prévaloir des dispositions de l'article 661 du code civil,
la faculté reconnue par cet article étant absolue et discrétionnaire,
que l'atteinte, faite antérieurement à la volonté exprimée
de son auteur de rendre le mur mitoyen à la propriété voisine,
n'est pas un obstacle au droit d'acquérir la mitoyenneté ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'un empiétement fait obstacle à
l'acquisition de la mitoyenneté, la cour d'appel a violé les textes
susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 22 mars 2006
N° de pourvoi: 05-10093
Publié au bulletin Cassation partielle.
Sur le moyen unique :
Vu l'article 545 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 5 octobre 2004), que Mme
X..., propriétaire d'un immeuble séparé de celui appartenant
aux consorts B... par un mur mitoyen, a, en 1989, fait rehausser ce mur et édifier
un garage dont la toiture recouvrait l'exhaussement ainsi réalisé
;
qu'en 1994, les consorts B... ont construit un hangar prenant appui sur le mur
qu'ils ont à leur tour fait rehausser, en "découpant"
la partie de la toiture du garage de Mme X... qui le surplombait ; que Mme X...
a assigné les consorts B... pour obtenir la démolition de ce second
exhaussement et la remise en l'état du toit ;
Attendu que pour débouter Mme X... de sa demande, l'arrêt retient
que les documents techniques produits aux débats ne font pas apparaître
que l'un ou l'autre des exhaussements serait dangereux pour la solidité
du mur, que les dispositions de l'article 660 du Code civil permettent à
un voisin qui n'a pas contribué à l'exhaussement d'un mur mitoyen
d'acquérir la mitoyenneté de cette partie du mur, que les époux
B... déclarent vouloir acquérir la mitoyenneté et qu'à
raison de la solution retenue quant à la propriété de cet
exhaussement, il ne peut être fait droit à la demande de démolition
et de remise en état formulée par Mme X... sur le fondement de
l'article 545 du Code civil ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que le fait de découper
la toiture de l'immeuble de Mme X... et de construire un exhaussement sur l'exhaussement
appartenant privativement à ces derniers portait atteinte à leur
droit de propriété, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les
conséquences légales de ses propres constatations, a violé
le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a constaté la demande des
consorts B... d'acquérir la mitoyenneté de l'exhaussement réalisé
par Mme X..., fixé la valeur de cette acquisition à la moitié
de la somme de 650 euros et débouté Mme X... de sa demande en
démolition et en remise en état antérieur du mur et de
la toiture, l'arrêt rendu le 5 octobre 2004, entre les parties, par la
cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la
cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour
d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne les consorts B... aux dépens ;
Publication : Bulletin 2006 III N° 81 p. 67