Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 5 mai 1997 Rejet
Sur les faits :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, en début
de matinée, neuf personnes se sont introduites dans le service maternité
du groupe hospitalier La Pitié-Salpêtrière et se sont installées
dans le sas d'accès au bloc opératoire où elles sont demeurées,
en prière, jusqu'à leur expulsion forcée par les services
de police ;
Que les membres du groupe sont poursuivis pour tentative d'entrave à
interruption volontaire de grossesse, délit réprimé par
l'article L. 162-15 du Code de la santé publique ; qu'ils ont, par l'arrêt
infirmatif attaqué, été déclarés coupables
de cette infraction, laquelle est exclue du bénéfice de l'amnistie
par l'article 25.23° de la loi du 3 août 1995 ;
(...)
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles
L. 162-15 du Code de la santé publique, 111-4, 121-4, 121-5 du Code pénal
et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et
manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les prévenus
coupables du délit de tentative d'entrave à interruption volontaire
de grossesse, délit prévu et réprimé par l'article
L. 162-15 du Code de la santé publique ;
" aux motifs qu' "il importe peu de savoir si une ou plusieurs IVG
se déroulaient ou avaient été programmées au moment
de l'intervention des prévenus devant l'entrée du bloc opératoire"
et qu'"il suffit, en effet, pour que le délit soit constitué,
que la tentative soit punissable, ce qui est bien le cas de la tentative prévue
et punie par l'article L. 612-15 du Code la santé publique, et que son
échec soit indépendant de la volonté de l'infracteur, ce
qui est également le cas de l'espèce, l'échec de l'action
menée par les prévenus ayant eu, en l'occurrence, une double cause
: l'absence d'IVG en cours et l'intervention de la police" ;
" alors que la loi pénale est d'interprétation stricte, que
l'article L. 162-15 du Code de la santé publique incrimine " le
fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher une interruption volontaire
de grossesse ou les actes préalables prévus par les articles L.
162-3 à L. 162-8 " ; que ce délit n'est constitué
que si les agissements du prévenu ont empêché l'accomplissement
d'une interruption volontaire de grossesse ou d'un des actes préalables
ou auraient eu un tel résultat si des circonstances indépendantes
de sa volonté n'y avaient pas mis obstacle ; que la possibilité
de ce résultat est donc un des éléments constitutifs du
délit de tentative d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse
; qu'en l'espèce cet élément fait défaut,
dès lors qu'au moment des faits, aucune interruption volontaire de grossesse
ou aucun acte préalable n'était prévu et que,
par conséquent, les prévenus ne pouvaient être retenus dans
les liens de la prévention et ce même s'ils ignoraient l'impossibilité
du résultat qu'ils poursuivaient " ;
Attendu que pour caractériser la tentative d'entrave à
interruption volontaire de grossesse l'arrêt attaqué énonce
que, par leur intrusion dans les locaux de la maternité
qui a eu pour effet d'interdire l'accès au bloc opératoire, dans
le but d'empêcher la réalisation de ce type d'intervention, les
prévenus ont perturbé la libre circulation du personnel
soignant et gêné le fonctionnement du service ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs la cour d'appel a justifié
sa décision au regard de l'article L. 162-15 du Code de la santé
publique, qui réprime notamment le fait d'empêcher ou de tenter
d'empêcher une interruption volontaire de grossesse en perturbant l'accès
aux établissements ou la libre circulation des personnes à l'intérieur
de ces établissements ;
Que le moyen ne saurait, dès lors, être accueilli ;
Sur le cinquième moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.
Publication : Bulletin criminel 1997 N° 168 p. 560