Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 20 janvier 2010

N° de pourvoi: 09-80652
Publié au bulletin Rejet

Statuant sur le pourvoi formé par :- X... Jacques,

contre l'arrêt de la cour d'assises du CANTAL, en date du 19 novembre 2008, qui, pour viols et agressions sexuelles aggravés, l'a condamné à quinze ans de réclusion criminelle, dix ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille et dix ans d'interdiction de séjour, ainsi que contre l'arrêt du même jour qui a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 341 et 802 du code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense ;

" en ce que le président a, en méconnaissance des dispositions de l'article 341 du code de procédure pénale et du principe du contradictoire, à l'audience du 18 novembre 2008, juste avant de suspendre l'audience à 12 heures 15, fait présenter aux assesseurs et aux jurés l'album figurant à la cote D 55 du dossier de la procédure, pièce à charge selon l'ordonnance de renvoi, sans le présenter à la défense et sans laisser le temps à celle-ci d'élever une protestation " ;

Attendu que les conditions dans lesquelles sont présentées les pièces à conviction ne sauraient donner ouverture à cassation dès lors que, comme en l'espèce, ni l'accusé ni son avocat n'ont élevé de protestation au cours de cette présentation et qu'en l'état des seules allégations du demandeur, les droits de la défense n'ont pas été méconnus ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que la cour et le jury ont répondu par l'affirmative aux questions ainsi libellées :

- question n° 1 : « l'accusé Jacques X... est-il coupable d'avoir, à La Pallisse et à Le Vilhain, dans le département de l'Allier, entre le 1er janvier 1993 et le 18 mai 1997, par violence, contrainte, menace ou surprise, commis des actes de pénétration sexuelle sur la personne de Gaëlle Z...? »

- question n° 4 : « l'accusé Jacques X... est-il coupable d'avoir, à La Pallisse et à Le Vilhain, dans le département de l'Allier, entre le 19 mai 1997 et le 31 décembre 1998, par violence, contrainte, menace ou surprise, commis des actes de pénétration sexuelle sur la personne de Gaëlle Z...? »

- question n° 6 : « l'accusé Jacques X... est-il coupable d'avoir, à La Pallisse et à Le Vilhain, dans le département de l'Allier, entre le 1er janvier 1993 et le 18 mai 1997, commis des atteintes sexuelles exemptes d'actes de pénétration sur la personne de Gaëlle Z...? »

- question n° 10 : « l'accusé Jacques X... est-il coupable d'avoir, à Le Vilhain, dans le département de l'Allier, entre le 19 mai 1997 et le 31 décembre 1998, commis des atteintes sexuelles exemptes d'actes de pénétration sur la personne de Gaëlle Z...? »

" alors qu'en se bornant à donner une réponse affirmative aux questions ainsi libellées portant sur de longues périodes sans préciser les dates des faits, leur nombre, modalités selon lesquelles ils se sont réalisés, la cour et le jury n'ont donné aucun motif à leur décision, privant de surcroît la Cour de cassation d'exercer son contrôle " ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire et 349 du code de procédure pénale ;

" en ce que la cour et le jury ont répondu par l'affirmative aux questions ci-dessous ainsi libellées :

- question n° 1 : « l'accusé Jacques X... est-il coupable d'avoir, à La Pallisse et à Le Vilhain, dans le département de l'Allier, entre le 1er janvier 1993 et le 18 mai 1997, par violence, contrainte, menace ou surprise, commis des actes de pénétration sexuelle sur la personne de Gaëlle Z...? »

- question n° 4 : « l'accusé Jacques X... est-il coupable d'avoir, à La Pallisse et à Le Vilhain, dans le département de l'Allier, entre le 19 mai 1997 et le 31 décembre 1998, par violence, contrainte, menace ou surprise, commis des actes de pénétration sexuelle sur la personne de Gaëlle Z...? ».

- question n° 6 : « l'accusé Jacques X... est-il coupable d'avoir, à La Pallisse et à Le Vilhain, dans le département de l'Allier, entre le 1er janvier 1993 et le 18 mai 1997, commis des atteintes sexuelles exemptes d'actes de pénétration sur la personne de Gaëlle Z...? »

- question n° 10 : « l'accusé Jacques X... est-il coupable d'avoir, à Le Vilhain, dans le département de l'Allier, entre le 19 mai 1997 et le 31 décembre 1998, commis des atteintes sexuelles exemptes d'actes de pénétration sur la personne de Gaëlle Z...? »

" alors que les infractions de viol et d'agressions sexuelles sont des infractions instantanées et que, par conséquent, la cour et le jury ne peuvent, sans que soient méconnus les dispositions de l'article 349 du code de procédure pénale et le principe du procès équitable être interrogés sur le point de savoir si de telles infractions – se seraient-elles répétées – ont été commises dans un espace de temps couvrant plusieurs mois ou plusieurs années comme s'il s'agissait d'infractions continues " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, d'une part, les questions n° 1, n° 4, n° 6 et n° 10, visées aux moyens, concernent des crimes et des délits distincts ; que chacune des deux premières questions et chacune des deux suivantes énonce des actes de même nature, commis sur la même personne, par le même accusé dans les mêmes conditions, et entraînant les mêmes conséquences pénales ; qu'ainsi, les faits ont pu être réunis dans la même question enfermant l'indication de l'époque dans les limites de laquelle ils se sont succédé, sans que la question soit entachée de complexité ;

Attendu que, d'autre part, sont reprises dans l'arrêt de condamnation les réponses qu'en leur intime conviction, magistrats et jurés composant la cour d'assises d'appel, statuant dans la continuité des débats, à vote secret et à la majorité qualifiée des deux tiers, ont donné aux questions posées conformément au dispositif de la décision de renvoi ;

Qu'en cet état, et dès lors qu'ont été assurés l'information préalable sur les charges fondant la mise en accusation, le libre exercice des droits de la défense ainsi que le caractère public et contradictoire des débats, il a été satisfait aux exigences légales et conventionnelles invoquées ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 222-23 du code pénal, 349 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué mentionne : « vu la délibération de la cour et du jury, attendu qu'il résulte de cette déclaration à la majorité de dix voix au moins que Jacques X... est coupable d'avoir : (…) 2) à Le Vilhain, dans le département de l'Allier, entre le 19 mai 1997 et le 31 décembre 1998, commis des actes de pénétration sexuelle sur la personne de Gaëlle Z...avec cette circonstance que Jacques X... avait autorité sur Gaëlle Z...comme étant son beau-père chez lequel elle vivait » ;

" 1°) alors que les actes de pénétration sexuelle ne constituent le crime de viol qu'autant qu'ils ont été commis par violence, contrainte, menace ou surprise et qu'en ne constatant pas l'existence de cet élément constitutif de l'infraction, la cour d'assises a méconnu les textes susvisés ;

" 2°) alors que les énonciations de l'arrêt de condamnation et de la feuille des questions doivent, à peine de nullité, être en concordance et qu'en ne reproduisant pas les énonciations de la question n° 4 de la feuille des questions relatives à l'existence de l'élément de violence, contrainte, menace ou surprise, la cour d'assises du Cantal, statuant en appel, a derechef méconnu les textes susvisés " ;

Attendu que l'arrêt mentionne que les faits déclarés constants par la cour et le jury constituent, notamment, " pour ceux commis à compter du 1er mars 1994, les crimes de viols sur mineure de quinze ans par personne ayant autorité prévus et punis par les articles 222-23, 222-24 2° et 4° du code pénal " ;

Attendu qu'en cet état, l'arrêt attaqué, qui pouvait, sans méconnaître l'obligation de concordance avec la feuille de questions, au lieu de reproduire les termes de ces questions nécessairement posées en fait, donner aux faits déclarés constants leur qualification légale, n'encourt pas les griefs du moyen, lequel doit, dès lors, être écarté ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ;

" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Jacques X... à quinze ans de réclusion criminelle, dix ans d'interdiction de séjour et dix ans d'interdiction des droits civiques ;

" alors qu'en prononçant les peines sans aucun motif, la cour d'assises a méconnu les textes susvisés " ;

Attendu que la feuille de questions mentionne que la cour et le jury, avant de statuer sur la peine, en ont délibéré dans les conditions prévues par l'article 362 du code de procédure pénale ; que l'observation de ces dispositions apporte la garantie qu'une telle décision a été prise en application de l'article 132-24 du code pénal, dont le président a donné lecture et selon lequel la juridiction prononce la peine, dans les limites fixées par la loi, notamment, en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ; qu'ainsi, les exigences conventionnelles invoquées n'ont pas été méconnues ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que les peines ont été légalement appliquées aux faits déclarés constants par la cour et le jury ;

REJETTE le pourvoi ;

Publication : Bulletin criminel 2010, n° 13