Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 12 décembre 2007

N° de pourvoi: 07-82353
Publié au bulletin Rejet
Statuant sur le pourvoi formé par :-X... Christian,
-Y... Gérard,
-LA SOCIÉTÉ LES VINS DU CONCOURS,

contre l'arrêt de la cour d'appel de DIJON, chambre correctionnelle, en date du 14 mars 2007, qui, sur renvoi après cassation, pour infractions à la législation sur les contributions indirectes et à la réglementation sur l'organisation et l'assainissement du marché du vin, les a solidairement condamnés à des amendes et pénalités fiscales ;

... Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte du procès-verbal d'infractions et de saisie, dressé le 10 octobre 2002 par des agents des douanes, faisant foi jusqu'à preuve contraire non rapportée en l'espèce, que la société Les Vins du concours, gérée par Christian X..., a loué un local dans lequel, sous le couvert du statut inapplicable d'entrepositaire sans magasin, elle détenait plusieurs palettes de cartons de vins, dont 405 bouteilles de vin des coteaux du Languedoc dépourvues de capsule représentative de droit ; que la société, son gérant et Gérard Y..., mandataire spécial, sont poursuivis à la requête de l'administration des douanes et droits indirects pour avoir détenu des boissons alcoolisées par quantités supérieures à celles prévues par l'article 111-O A de l'annexe III au code général des impôts, sans avoir obtenu l'agrément d'entrepositaire, et pour avoir omis de tenir une comptabilité matières et d'inscrire les opérations effectuées sur les registres vitivinicoles, infractions prévues et réprimées par les articles 302 G,1791,1798 bis et 1798 ter du code général des impôts ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de ces infractions et les condamner solidairement à des amendes et pénalités fiscales, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ;

Que, d'une part, tout assujetti qui achète, reçoit, expédie, vend ou transforme des produits qui ne proviennent pas de sa propre production, doit avoir le statut d'entrepositaire agréé dès lors qu'il détient plus de 90 litres de vins, peu important que les droits de circulation aient été ou non acquittés, et doit, à ce titre, tenir une comptabilité matières et mentionner les opérations effectuées sur les registres vitivinicoles, qui doivent être présentés à première réquisition, fût-elle verbale ;

Que, d'autre part, le principe du non-cumul des peines est étranger aux sanctions fiscales qui présentent à la fois le caractère d'une peine et celui d'une indemnisation pour le préjudice subi par l'État ;

Qu'enfin, l'appréciation de la conformité des articles 1791,1798 bis et 1798 ter du code général des impôts au principe conventionnel de proportionnalité relève du contrôle de leur constitutionnalité et échappe à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Publication : Bulletin criminel 2007, N° 311

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 15 décembre 2010

N° de pourvoi: 10-80675
Non publié au bulletin Rejet

Statuant sur les pourvois formés par :- M. Joachim X...,
- La société Epur industrie, contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 8 décembre 2009, qui, sur renvoi après cassation, pour importation sans déclaration de marchandises prohibées, les a solidairement condamnés à une pénalité fiscale ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la Société marseillaise de récupération industrielle (SMRI), devenue la société Epur industrie, dirigée par M. X..., dont l'activité est le négoce des métaux ferreux et non ferreux, s'est fait livrer des marchandises par des fournisseurs algériens, sous le couvert de déclarations d'importation dites IM4 ; que les contrôles a posteriori effectués par les agents des douanes ont révélé des minorations des valeurs déclarées, sous le couvert d'une facturation fictive, et l'inexactitude des mentions relatives à l'identification du destinataire de ces marchandises ; que M. X... et la société SMRI sont poursuivis à la requête de l'administration des douanes pour importations sans déclaration de marchandises prohibées, délit prévu et réprimé par les articles 426-3° et 414 du code des douanes ;

...

Sur le quatrième moyen de casation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-24 du code pénal, 414 du code des douanes, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... et la société SMRI coupables d'importation sans déclaration de marchandises prohibées, et les a condamnés solidairement au paiement à l'administration des douanes de la pénalité fiscale de 20 000 000 euros ;

"aux motifs que la matérialité des faits décrits dans les procès-verbaux et sur lequel M. X... a pu s'expliquer n'est pas discutée ; qu'elle a consisté, ainsi qu'il est rappelé ci-dessus, à ce que l'exportateur algérien de métaux établisse une facture jointe à la déclaration présentée à la douane algérienne ; qu'à l'arrivée en France, ces mêmes factures étaient jointes à la déclaration d'importation auprès de la douane française (dite « IM4 »), avec le concours d'un transitaire agréé ; que, cependant, il s'est avéré que les quantités ainsi déclarées exportées de l'Algérie et importées en France étaient parfois minorées par rapport aux quantités réelles ; qu'après vérification du poids, soit à la bascule du port, soit dans ses propres locaux, et le cas échéant triage chez l'importateur SMRI, une nouvelle facture portant sur les quantités réelles était établie par l'exportateur, comptabilisée comme telle chez SMRI, puis payée à des tiers avec lequel l'exportateur était en relations ; que de tels procédés sont en infraction, contrairement à ce que soutiennent les prévenus, avec les dispositions de l'article 426 du code des douanes qui prévoit que : « Sont réputés importation ou exportation sans déclaration de marchandises prohibées : … 3° les fausses déclarations dans l'espèce, la valeur, ou l'origine des marchandises ou dans la désignation du destinataire réel ou de l'expéditeur réel lorsque ces infractions ont été commises à l'aide de factures, certificats ou tous autres documents faux, inexacts, incomplets ou non applicables » ; que cette infraction est réprimée par l'article 414 du code des douanes sanctionnant les importations de marchandises prohibées, prévoyant un emprisonnement pouvant aller jusqu'à trois ans de prison et une amende comprise entre une et deux fois la valeur de l'objet de fraude ; que ces sanctions sont encourues quand bien même aucun droit de douane français n'aurait été éludé, puisqu'il est allégué par les prévenus, sans objection de la part de l'administration, que pendant toute la période concernée par les vérifications, les marchandises importées étaient exemptes de tous droits ; que ces sanctions se distinguent de celles prévues à l'article 410 du code des douanes qui répriment les omissions ou inexactitudes dans les déclarations lorsque l'irrégularité n'a aucune influence sur l'application des droits ou des prohibitions ; que ce qui est ici sanctionné c'est l'emploi de factures inexactes qui ont servi à l'appui de déclarations ; que les prévenus font valoir que la divergence entre les quantités déclarées et les quantités réelles ne sont pas leur fait, qu'ils n'ont aucun moyen d'exercer un contrôle sur leurs fournisseurs avant la réception des marchandises ; que, cependant, lors de l'importation les transitaires agréés agissent nécessairement sous les ordres et les instructions de l'importateur à qui il appartenait, s'il avait le moindre doute sur des irrégularités, de faire les déclarations rectificatives selon les formes prévues notamment par l'article 100 du code des douanes ; qu'ils ne peuvent se retrancher derrière leur ignorance alléguée fondée sur l'absence de préjudice et l'absence d'intention frauduleuse, le procédé étant en lui-même irrégulier et tombant sous le coup de la loi même en l'absence de préjudice financier pour l'administration des douanes ; que les prévenus font encore valoir qu'il est paradoxal que ce soit précisément leur souci de régularité et de transparence résultant de leurs exigences à l'égard de leurs fournisseurs et de la précision de leur comptabilité qui a permis la démonstration par l'administration de l'infraction qui leur est aujourd'hui reprochée ; que cet argument n'a pas pour effet de faire supprimer l'infraction mais peut être pris en considération pour l'application de la peine ; qu'ils font encore valoir que des erreurs matérielles auraient été commises dans les procès-verbaux en ce que certaines opérations auraient été comptées deux fois et que d'autres livraisons ne comporteraient qu'un écart de prix minime inférieur à 10.000 francs ce qui n'est pas significatif compte tenu des aléas liés à la nature des marchandises et ne peut être qualifié d'infraction ; que l'administration reconnaît volontiers qu'il y a eu trois opérations reprises en double et en tire les conséquences quant au montant des sommes non déclarées limitées désormais à 21 725 285 euros ; qu'il ne peut être tiré de cette constatation aucune autre conséquence ; que, de même, il ne peut être tiré aucune autre conséquence de l'allégation non contredite des prévenus selon laquelle aucune réserve n'a été émise par les services des douanes à la réception des containers réalisée en présence de fonctionnaires de cette administration et à l'occasion de divers contrôles inopinés alors que les poids déclarés et réceptionnés étaient différents, ce qui est constatable immédiatement ; que c'est également en vain qu'ils invoquent n'avoir pas reçu de réponse à leur demande sur la mise en place d'une procédure douanière particulière pour les déclarations a posteriori ; qu'enfin l'éventuelle responsabilité du transitaire qui, pour le compte de son mandant, a effectué les déclarations de dédouanement n'exonère pas les prévenus de leur propre responsabilité, conformément aux articles 395 et 396 du code des douanes qui rendent responsable tout participant à l'accomplissement des formalités et en l'espèce les prévenus avaient bien conscience de ce que les quantités déclarées à la douane étaient inexactes puisqu'ils faisaient refaire immédiatement après les factures qui avaient servi à ces déclarations, d'où il se déduit, outre les déclarations de M. X..., qu'il donnait les instructions pour les déclarations ou laissaient faire celles qui était faites en leur nom malgré les différences ; qu'il s'ensuit que c'est avec raison que l'administration des douanes sollicite l'application des pénalités fiscales tant à l'encontre de M. X... que de la SMRI dénommée Epur industrie, retenue comme intéressée à la fraude puisque les infractions ont été commises en son nom et pour son compte par l'un de ses organes ou représentant ; que les sanctions découlent de l'article 414 du code des douanes et, en l'espèce, il sera fait application du minimum légal soit une fois la valeur de la marchandise de fraude ramenée par l'administration à la somme de 20 000 000 euros ;

1°) alors que les juges ne peuvent prononcer que des peines strictement nécessaires et proportionnées aux faits commis ; qu'en condamnant les prévenus à une amende de 20 000 000 euros pour sanctionner l'importation sans déclaration de marchandises prohibées alors même qu'aucun droit de douane n'a été éludé, la cour d'appel n'a pas respecté un tel principe et a méconnu les textes susvisés ;

2°) alors que des dispositions de l'article 414 du code des douanes qui prévoient le prononcé d'une peine d'emprisonnement, de la confiscation de l'objet de fraude, de la confiscation des moyens de transports, de la confiscation des objets servant à masquer la fraude et d'une amende, permettent aux juges de prononcer plusieurs de ces peines ou une seule de ces peines, voire aucune ; que la cour d'appel qui, après avoir jugé que le souci de transparence et de régularité des prévenus devait être pris en considération pour l'application de la peine, et a estimé qu'il sera ainsi fait application du minimum légal soit une peine d'amende de 20 000 000 euros, s'est contredite et a méconnu les textes précités" ;

Attendu que les demandeurs ne sauraient se faire un grief de ce que la cour d'appel, faisant application des dispositions de l'article 414 du code des douanes, non contraires aux dispositions conventionnelles invoquées, a prononcé une amende égale à la valeur de l'objet de fraude, dès lors que, d'une part, les amendes douanières présentent un caractère mixte, répressif et indemnitaire, d'autre part, les juges répressifs apprécient souverainement, dans les limites fixées par la loi, la sanction à infliger à l'auteur d'une infraction ;

Qu'ainsi, le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;