En l'affaire M.C. c. Bulgarie,
La Cour européenne des Droits de l'Homme (première section), 4
décembre 2003
DÉFINITIF 04/03/2004
Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE (…)
EN FAIT
I. LES CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE
9. La requérante, née en 1980, est de nationalité bulgare.
10. Elle affirme avoir été violée par deux hommes le 31
juillet et le 1er août 1995, alors qu'elle était âgée
de quatorze ans et dix mois. L'enquête qui s'ensuivit aboutit à
la conclusion qu'il n'existait pas de preuves suffisantes pour établir
que la requérante avait été contrainte à avoir des
relations sexuelles. (...)
EN DROIT
I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DES ARTICLES 3, 8 ET 13 DE LA CONVENTION
109. La requérante se plaint du fait que le droit et la pratique bulgares
n'assurent pas une protection effective contre le viol et les violences sexuelles
puisque seuls les cas dans lesquels la victime a fermement résisté
donnent lieu à des poursuites. Elle soutient en outre que les autorités
n'ont pas mené d'enquête effective sur les événements
survenus le 31 juillet et le 1er août 1995. Selon elle, ces déficiences
constituent une violation de l'obligation positive incombant à l'Etat
de protéger l'intégrité physique et la vie privée
de l'individu et de prévoir des recours effectifs à cet égard.
110. Aux termes des dispositions pertinentes de la Convention :
Article 3
« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines
ou traitements inhumains ou dégradants. »
Article 8 § 1
« Toute personne a droit au respect de sa vie privée (...) »
Article 13
« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (...)
Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un
recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation
aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice
de leurs fonctions officielles. »
A. Thèses défendues devant la Cour
(…)
b) Conception moderne des éléments constitutifs
du viol et son incidence sur la substance de l'obligation positive pour les
Etats membres de garantir une protection adéquate
154. En ce qui concerne les moyens de garantir une protection adéquate
contre le viol, les Etats jouissent incontestablement d'une large marge d'appréciation.
Ils doivent notamment prendre en considération les sensibilités
d'ordre culturel, les particularités locales et les habitudes liées
à la tradition.
155. Les dispositions de la Convention définissent toutefois les limites
de la marge d'appréciation des autorités nationales. La Convention
étant avant tout un mécanisme de protection des droits de l'homme,
la Cour, lorsqu'elle l'interprète, doit tenir compte de l'évolution
de la situation dans les Etats contractants et réagir, par exemple, au
consensus susceptible de se faire jour quant aux normes à atteindre (Christine
Goodwin c. Royaume-Uni [GC], no 28957/95, § 74, CEDH 2002-VI).
156. La Cour relève que, traditionnellement, le droit et la pratique
internes d'un certain nombre de pays exigeaient la preuve de l'emploi de la
force physique et celle de la résistance physique dans les cas de viol.
Depuis quelques décennies, on observe cependant en Europe et dans d'autres
parties du monde une tendance nette et constante à l'abandon des définitions
formalistes et des interprétations étroites de la loi en la matière
(paragraphes 88-108 et 126-147 ci-dessus).
157. On constate tout d'abord que l'exigence selon laquelle la victime doit
résister physiquement n'a plus cours dans la législation des pays
européens.
158. Dans les juridictions de common law, en Europe et ailleurs, la notion de
force physique a disparu des textes de loi et/ou de la jurisprudence (voir les
paragraphes 98, 100 et 138-147 ci-dessus au sujet des systèmes juridiques
de l'Irlande, du Royaume-Uni, des Etats-Unis d'Amérique et d'autres pays).
Le droit irlandais déclare expressément que le consentement ne
peut être déduit de l'absence de résistance (paragraphe
98 ci-dessus).
159. Dans la plupart des pays européens influencés par la tradition
juridique continentale, la définition du viol mentionne l'emploi de la
violence ou de menaces de violence par l'agresseur. A noter toutefois que, dans
la jurisprudence et la doctrine, c'est l'absence de consentement, et non pas
l'usage de la force, qui est considérée comme l'élément
constitutif de l'infraction de viol (paragraphes 90-97, 99 et 130-137 ci-dessus).
160. En 1989, la loi belge a été modifiée de sorte que
tout acte de pénétration sexuelle constitue un viol dès
lors qu'il est commis sur une personne qui n'y consent pas. Si les termes de
« violence, contrainte ou ruse » sont toujours cités par
la loi comme des moyens répréhensibles d'imposer un acte non consensuel,
la violence et/ou la résistance physique ne sont donc pas en droit belge
des éléments constitutifs du viol (paragraphes 90 et 130-134 ci-dessus).
161. Indépendamment de la formulation spécifique retenue par le
législateur, dans un certain nombre de pays la répression des
actes sexuels non consensuels, quelles qu'en soient les circonstances, est rendue
possible en pratique par l'interprétation des termes pertinents de la
loi (« contrainte », « violence », « coercition
», « menace », « ruse », « surprise »,
entre autres) et par une appréciation des éléments de preuve
dans leur contexte (paragraphes 95 et 130-147 ci-dessus).
162. La Cour relève également que les Etats membres du Conseil
de l'Europe ont reconnu, par l'intermédiaire du Comité des Ministres,
la nécessité de sanctionner les actes sexuels non consensuels,
y compris « les cas dans lesquels la victime ne montre pas de signes de
résistance », afin que les femmes soient effectivement protégées
de la violence (paragraphe 101 ci-dessus), et ont insisté sur la mise
en œuvre d'autres réformes dans ce domaine.
163. En droit pénal international, il a été admis récemment
que la force n'est pas un élément constitutif du viol et que le
fait de profiter de circonstances coercitives pour accomplir des actes sexuels
est également punissable. Le Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie
a déclaré qu'en droit pénal international toute pénétration
sexuelle sans le consentement de la victime constitue un viol et que le consentement
doit être donné volontairement, dans l'exercice du libre arbitre
de la personne, apprécié au vu des circonstances (paragraphes
102-107 ci-dessus). Si cette définition vise le contexte particulier
des viols commis sur une population dans le cadre d'un conflit armé,
elle n'en reflète pas moins une tendance universelle à considérer
l'absence de consentement comme l'élément constitutif essentiel
du viol et des violences sexuelles.
164. Ainsi que l'explique le tiers intervenant, la manière dont le viol
est vécu par la victime est mieux comprise aujourd'hui et on s'aperçoit
que souvent les victimes de violences sexuelles, en particulier les jeunes filles
mineures, n'opposent pas de résistance physique à leur agresseur
pour un certain nombre de raisons d'ordre psychologique ou par peur de la violence
de l'auteur de l'acte.
165. En outre, l'évolution du droit et de la pratique dans ce domaine
traduit l'avancée des sociétés vers une égalité
effective et le respect de l'autonomie sexuelle de tout individu.
166. La Cour est dès lors convaincue que toute approche rigide de la
répression des infractions à caractère sexuel, qui consisterait
par exemple à exiger dans tous les cas la preuve qu'il y a eu résistance
physique, risque d'aboutir à l'impunité des auteurs de certains
types de viol et par conséquent de compromettre la protection effective
de l'autonomie sexuelle de l'individu. Conformément aux normes
et aux tendances contemporaines en la matière, il y a lieu de considérer
que les obligations positives qui pèsent sur les Etats membres en vertu
des articles 3 et 8 de la Convention commandent la criminalisation et la répression
effective de tout acte sexuel non consensuel, y compris lorsque la victime n'a
pas opposé de résistance physique.
c) Tâche de la Cour en l'espèce
167. Compte tenu de ce qui précède, la Cour doit rechercher si
oui ou non la législation et la pratique incriminées, ainsi que
leur application en l'espèce, associées aux insuffisances alléguées
de l'enquête, ont été défaillantes au point d'emporter
violation des obligations positives qui incombent à l'Etat défendeur
en vertu des articles 3 et 8 de la Convention.
168. La Cour n'a pas à aller au-delà. Elle n'est pas appelée
à se prononcer sur les allégations d'erreurs ou d'omissions particulières
de l'enquête ; elle ne saurait se substituer aux autorités internes
dans l'appréciation des faits de la cause ; elle ne saurait pas non plus
statuer sur la responsabilité pénale des agresseurs présumés.
2. Application de l'analyse retenue par la Cour
169. Selon la requérante, l'attitude des autorités dans la présente
affaire provient d'une législation insatisfaisante et reflète
la pratique courante consistant à ne poursuivre les auteurs de viol que
lorsqu'il existe des preuves d'une résistance physique notable.
170. La Cour observe que l'article 152 § 1 du code pénal bulgare
ne pose nullement l'exigence d'une résistance physique de la part de
la victime et donne du viol une définition qui ne s'écarte pas
sensiblement des formulations figurant dans la législation des autres
Etats membres. Encore une fois, de nombreux systèmes juridiques définissent
toujours le viol à partir des moyens que l'agresseur utilise pour obtenir
la soumission de la victime (paragraphes 74 et 88-100 ci-dessus).
171. Ce qui est déterminant, cependant, c'est le sens attribué
à des termes comme « force » ou « menaces » ou
d'autres figurant dans les définitions légales. Par exemple, dans
certains ordres juridiques, la « force » est considérée
comme étant établie dans les cas de viol du fait même que
l'agresseur ait accompli un acte sexuel sans le consentement de la victime ou
parce qu'il s'est emparé du corps de celle-ci et l'a manipulé
de manière à accomplir un tel acte sans le consentement de l'intéressée.
Comme il est indiqué plus haut, malgré les différences
entre les définitions légales, les juridictions d'un certain nombre
de pays interprètent aujourd'hui la loi de manière à englober
tout acte sexuel non consensuel (paragraphes 95 et 130-147).
172. En l'espèce, faute d'une jurisprudence répondant expressément
à la question de savoir si tout acte sexuel accompli sans le consentement
de la victime tombe sous le coup du droit bulgare, il est difficile de parvenir
à des conclusions générales solides sur ce sujet à
partir des arrêts de la Cour suprême et des publications juridiques
(paragraphes 75-85 ci-dessus). C'est toujours l'appréciation des faits
à laquelle se livrent les tribunaux qui, dans une affaire donnée,
permet de savoir si un acte sexuel a été accompli sous la contrainte.
Une autre difficulté tient à l'absence d'une étude fiable
de la pratique des autorités de poursuite dans des affaires qui n'ont
jamais été examinées par la justice.
173. Il y a toutefois lieu de relever que le Gouvernement n'a pas été
en mesure de fournir des copies d'arrêts ou d'articles de doctrine réfutant
nettement la thèse selon laquelle en Bulgarie les poursuites pour viol
sont déclenchées d'une manière restrictive. Les propres
arguments du Gouvernement sur les éléments constitutifs du viol
en droit bulgare sont incohérents et peu clairs (paragraphes 122 et 123
ci-dessus). Enfin, le fait que la grande majorité des arrêts publiés
de la Cour suprême concernent des viols commis avec une violence considérable
(sauf dans les cas où la victime était handicapée physiquement
ou mentalement), s'il n'est pas déterminant, semble tout de même
indiquer que la plupart des affaires dans lesquelles l'absence totale ou quasi-totale
de force physique et de résistance était établie n'ont
pas débouché sur des poursuites (paragraphes 74-85, 113, 122 et
123 ci-dessus).
174. La Cour n'a pas à se prononcer sur la pratique des autorités
bulgares dans les affaires de viol de manière générale.
Aux fins de l'espèce, il suffit de constater que l'allégation
par la requérante d'une pratique restrictive est fondée sur des
arguments raisonnables et n'a pas été réfutée par
le Gouvernement.
175. Pour en venir aux faits particuliers évoqués par la requérante,
la Cour observe que de nombreux témoins ont été entendus
au cours de l'enquête et qu'un rapport d'expertise a été
demandé à un psychologue et un psychiatre. Une enquête a
été menée et les différents procureurs ont rendu
des décisions motivées, en expliquant leur position avec une certaine
précision (paragraphes 44-65 ci-dessus).
176. La Cour reconnaît que les autorités bulgares n'avaient pas
la tâche aisée puisqu'elles se trouvaient en présence de
deux versions contradictoires des faits et qu'il existait peu de preuves «
directes ». Elle ne sous-estime pas les efforts déployés
par le magistrat instructeur et les procureurs successifs pour traiter cette
affaire.
177. Elle relève toutefois que l'existence de deux versions inconciliables
des faits aurait absolument dû entraîner une appréciation
de la crédibilité des déclarations obtenues par rapport
aux circonstances de l'espèce, lesquelles auraient dû être
vérifiées. Or peu de mesures ont été prises pour
mettre à l'épreuve la crédibilité de la version
des faits donnée par P. et A. et les témoins cités par
eux. En particulier, les témoins dont les déclarations étaient
contradictoires (tels Mme T. et M. M.) n'ont pas été confrontés.
Personne n'a cherché à établir le déroulement des
événements avec plus de précision. La requérante
et son représentant n'ont pas eu l'occasion d'interroger les témoins
que l'intéressée accusait de faux témoignage. Dans leurs
décisions, les procureurs ne se sont pas du tout demandé si la
version des faits exposée par P. et A. était crédible alors
que certaines de leurs déclarations étaient sujettes à
caution, comme leur affirmation selon laquelle la requérante, âgée
de quatorze ans à l'époque, avait commencé à caresser
A. quelques instants seulement après avoir eu avec un autre homme la
première relation sexuelle de sa vie (paragraphes 16-65 ci-dessus).
178. La Cour estime par conséquent que les autorités compétentes
n'ont pas usé de toutes les possibilités qui s'offraient à
elles pour établir les circonstances des actes dont il s'agit et n'ont
pas apprécié avec suffisamment de précision la crédibilité
des déclarations contradictoires recueillies.
179. Il est très significatif que cette carence s'explique apparemment
par l'avis du magistrat instructeur et des procureurs successifs selon lequel,
étant donné que les faits en cause se présentaient comme
un viol perpétré par une connaissance, en l'absence de preuves
« directes » de viol – par exemple des traces de violence
et de résistance ou des appels à l'aide – ils ne pouvaient
déduire de l'appréciation de toutes les circonstances de l'espèce
la preuve d'une absence de consentement et, partant, d'un viol. Cette analyse
est très nette dans la position du magistrat instructeur ; elle est particulièrement
présente dans la décision rendue le 13 mai 1997 par le procureur
régional et le 24 juin 1997 par le procureur général (paragraphes
55, 60, 61, 64 et 65 ci-dessus).
180. En outre, il semble que les procureurs n'aient pas exclu la possibilité
que la requérante n'eût peut-être pas consenti, mais aient
estimé qu'en tout état de cause, en l'absence de preuves d'une
résistance, on ne pouvait conclure que les agresseurs avaient compris
qu'elle ne consentait pas (voir le texte des décisions des procureurs
aux paragraphes 64 et 65 ci-dessus). Les procureurs ont renoncé à
la possibilité de démontrer l'intention criminelle des agresseurs
en appréciant l'ensemble des circonstances – par exemple les dires
d'après lesquels les agresseurs avaient délibérément
trompé la requérante afin de l'emmener dans un lieu désert,
créant ainsi un cadre coercitif – et en jugeant de la crédibilité
des versions des faits avancées par les trois hommes et les témoins
qu'ils avaient cités (paragraphes 21, 63 et 66-68 ci-dessus).
181. La Cour estime que si, en pratique, il peut parfois se révéler
difficile de prouver l'absence de consentement sans preuves « directes
» de viol, comme des traces de violence ou des témoins directs,
les autorités n'en ont pas moins l'obligation d'examiner tous les faits
et de statuer après s'être livrées à une appréciation
de l'ensemble des circonstances. L'enquête et ses conclusions doivent
porter avant tout sur la question de l'absence de consentement.
182. Les autorités n'ont pas procédé ainsi en l'espèce.
La Cour considère qu'elles n'ont pas enquêté suffisamment
sur les circonstances de l'affaire parce qu'elles ont accordé trop d'importance
à la preuve « directe » du viol. Leur démarche a été
restrictive en cela qu'elles ont pratiquement élevé la «
résistance » au rang d'élément constitutif de l'infraction.
183. On peut également reprocher aux autorités d'avoir accordé
peu de poids à la vulnérabilité particulière des
adolescents et aux facteurs psychologiques propres aux cas de viol de mineurs
(paragraphes 58 à 60 ci-dessus).
184. En outre, des retards considérables ont été accusés
au cours de l'enquête (paragraphes 44-46 ci-dessus).
185. En bref, la Cour, sans exprimer d'avis sur la culpabilité de P.
et A., estime que l'enquête menée sur les faits de l'espèce,
et en particulier la démarche adoptée par le magistrat instructeur
et les procureurs, n'a pas répondu aux exigences inhérentes aux
obligations positives de l'Etat, lesquelles, vues à la lumière
des normes contemporaines du droit international et de différents systèmes
juridiques, consistaient à établir et à appliquer effectivement
un système pénal qui punisse toutes les formes de viol et de violence
sexuelle.
186. Quant à la possibilité, dont le Gouvernement tire argument,
d'une action civile en réparation contre les agresseurs qui existerait
dans l'ordre juridique interne, la Cour note qu'elle n'a pas été
établie. Quoi qu'il en soit, encore une fois, une protection effective
contre le viol et les violences sexuelles appelle des mesures pénales
(paragraphes 124 et 148-153 ci-dessus).
187. La Cour conclut par conséquent qu'il y a eu, en l'espèce,
violation des obligations positives qui incombent à l'Etat défendeur
en vertu des articles 3 et 8 de la Convention. Elle estime par ailleurs qu'aucune
question distincte ne se pose sur le terrain de l'article 13 de la Convention.
II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE
L'ARTICLE 14 DE LA CONVENTION
188. En comparant, dans le code pénal bulgare, le texte de l'article
157 § 2 et celui de l'article 152, qui concernent l'âge du consentement
à une activité sexuelle, la requérante se plaint du fait
que la loi prévoit une meilleure protection contre le viol pour les «
enfants homosexuels » que pour les « enfants hétérosexuels
».
Aux termes de l'article 14 de la Convention
« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la (...) Convention
doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment
sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques
ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à
une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.
»
189. A la lumière des conclusions qui précèdent, la Cour
estime qu'il n'y a pas lieu d'examiner le grief tiré de l'article 14
de la Convention.
III. SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
(…)
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L'UNANIMITÉ,
1. Dit qu'il y a eu violation des obligations positives qui incombent à
l'Etat défendeur en vertu des articles 3 et 8 de la Convention ;
2. Dit qu'aucune question distincte ne se pose sous l'angle de l'article 13
de la Convention ;
3. Dit qu'il n'y a pas lieu d'examiner les griefs formulés par la requérante
sur le terrain de l'article 14 de la Convention ;
4. Dit
a) que l'Etat défendeur doit verser à la requérante, dans
les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera devenu
définitif conformément à l'article 44 § 2 de la Convention,
les sommes suivantes, à convertir dans la monnaie nationale de l'Etat
défendeur au taux applicable à la date du règlement :
i. 8 000 EUR (huit mille euros) pour dommage moral,
ii. 4 110 EUR (quatre mille cent dix euros) pour frais et dépens, et
iii. tout montant pouvant être dû à titre d'impôt sur
lesdites sommes ;
b) qu'à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement,
ces montants seront à majorer d'un intérêt simple à
un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal
de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période,
augmenté de trois points de pourcentage ;
5. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.