Cour de Cassation
Commission de révision
Audience publique du 16 novembre 1998

SAISINE de la Cour de révision de la demande présentée par X... et tendant à la révision du jugement du tribunal correctionnel de Paris en date du 22 mai 1996, qui, pour complicité d'abus de biens sociaux et recel, l'a condamnée à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 francs d'amende .
LA COMMISSION DE REVISION,
Vu la demande susvisée ;
Vu les articles 622 et suivants du code de procédure pénale ;
Attendu que Y..., gérant d'une société à responsabilité limitée, et X..., salariée de celle-ci, ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel, le premier, pour abus de biens sociaux, et la seconde, pour complicité de ce délit et recel des sommes provenant de l'infraction ;
Que, par jugement du 22 mai 1996, le tribunal a condamnée Y..., par défaut, à 8 mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende, et X..., contradictoirement, à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et à 5 000 francs d'amende ;
Que, statuant, le 24 septembre 1997, sur l'opposition formée audit jugement par Y..., les juges ont décidé que la participation du prévenu à l'infraction poursuivie n'était pas suffisamment établie et l'ont renvoyé des fins de la poursuite ;
Attendu que X... sollicite la révision de sa condamnation, en se prévalant, à titre d'élement nouveau, du jugement de relaxe intervenu en faveur de l'auteur principal de l'infraction ;
Attendu que la requête apparaît fondée en ce qui concerne la condamnation de la demanderesse en qualité de complice du délit poursuivi ;
Qu'en effet, constitue, au sens de l'article 622.4o du code de procédure pénale, un fait nouveau de nature à exclure la culpabilité d'une personne condamnée pour complicité d'un délit par une décision passée en force de chose jugée, la relaxe de l'auteur principal intervenue devant une autre juridiction, quel que soit le motif de cette décision ;
Attendu que, par ailleurs, si la relaxe de l'auteur du délit d'où proviennent les objets recelés ne fait pas obstacle à la poursuite de l'auteur du recel, celle-ci nécessite cependant la constatation, par le juge, de l'existence du délit fondamental ;
Qu'en l'espèce, le jugement ayant relaxé Y..., qui retient que sa participation au détournement d'espèces n'est pas suffisamment établie par les éléments de la procédure, revient à nier l'existence de l'infraction principale, laquelle ne pouvait être imputée qu'à ce seul prévenu, en vertu de l'article 425.4o de la loi du 24 juillet 1996 ;
Que, dès lors, la requête est également fondée en ce qui concerne la condamnation de X... pour recel ;
Par ces motifs :
DIT qu'il y a lieu de saisir la chambre criminelle de la Cour de Cassation, statuant comme Cour de révision.
Publication : Bulletin criminel 1998 N° 299 p. 867 ; JCP 99, II, 10118

Cour de Cassation
Cour de révision
Audience publique du 16 février 2000 Rejet

LA COUR DE REVISION,
Vu le mémoire produit ; Vu la décision de la commission de révision des condamnations pénales, en date du 16 novembre 1998, saisissant la cour de révision ;
Vu les convocations régulièrement adressées aux parties ;
Vu les articles 622 à 626 du Code de procédure pénale, et notamment son article 622.4° ;
Attendu que le dossier est en état ;
Attendu que, par le jugement susvisé, X..., salariée d'une SARL, a été condamnée, pour complicité et recel d'abus de biens sociaux, commis par Y..., gérant de ladite SARL, à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 francs d'amende ;
Attendu, que, sur opposition formée par Y..., condamné par le même jugement comme auteur principal, le tribunal a relaxé ce dernier de l'infraction dont X... avait été déclarée complice et receleuse, au motif que sa participation aux faits n'était pas établie ;
Attendu, cependant, que cette relaxe ne suffit pas à exclure que l'infraction d'abus de biens sociaux ait été commise, dès lors que Y... n'a pas été le seul gérant de droit ou de fait de la SARL pendant la période au cours de laquelle des sommes d'argent ont été détournées ;
Qu'il s'ensuit que la mise hors de cause de ce dernier est sans incidence sur la déclaration de culpabilité de X... pour complicité et recel et qu'ainsi elle ne constitue pas un fait nouveau au sens de l'article 622 du Code de procédure pénale ;
Par ces motifs :
REJETTE la demande en révision.
Publication : Bulletin criminel 2000 N° 73 p. 216