Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 5 novembre
1990), que, le 2 janvier 1986, la société Roussel automobiles
(société Roussel) a conclu un contrat de concession exclusive
à durée indéterminée avec la Régie nationale
des usines Renault (la Régie) ; que cette dernière a résilié
le contrat le 6 janvier 1988, avec effet au 7 janvier 1989, et, le 29 juin 1988,
a fait connaître à la société Roussel qu'elle s'estimait
libérée de son obligation d'exclusivité ; que la société
Roussel a assigné la Régie en paiement de dommages-intérêts
pour rupture abusive du contrat ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Attendu que la Régie reproche à l'arrêt d'avoir décidé
qu'elle avait rompu abusivement et de mauvaise foi le contrat la liant à
la société Roussel, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le
concédant est en droit de résilier le contrat de concession à
durée indéterminée, sans avoir à justifier de motifs
; que, ceux-ci étant inopérants, il ne saurait y avoir abus du
concédant dans l'exercice de son droit de résiliation, ou mauvaise
foi du concédant, si celui-ci donne au concessionnaire des motifs prétendument
erronés ou fallacieux ; que l'abus dans l'exercice du droit de résiliation
ne peut résulter que des circonstances de la rupture révélant
que celle-ci s'est faite brusquement ; qu'en l'espèce, ayant relevé
que la Régie, conformément aux dispositions contractuelles, avait
résilié le contrat de concession avec un préavis d'une
année, la cour d'appel ne pouvait pas en déduire que la résiliation
était abusive, ou faite de mauvaise foi, sans violer les articles 1137
et 1134, alinéa 3, du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé qu' " il ne peut
être reproché à la Régie, qui n'était pas
tenue de motiver sa décision de résiliation, d'avoir avancé
des motifs qui s'avéreraient simplement inexacts " l'arrêt
retient que la Régie, non seulement a eu recours à une série
de motifs délibérément fallacieux, mais encore qu'elle
a violé l'obligation d'exclusivité, qu'elle a été
" de connivence " avec les agents de la société Roussel
qui ont porté à celle-ci, sur le territoire concédé,
des " atteintes systématiques " à leur contrat, au profit
de concessionnaires voisins, qu'elle a alourdi les frais financiers de la société
Roussel et compliqué sa gestion, qu'elle a modifié unilatéralement
les conditions d'approvisionnement de la société Roussel et aggravé
ses conditions d'exploitation, qu'elle a commis des actes de dénigrement
et de discrimination ;
qu'en l'état de ces appréciations, la cour d'appel a pu décider
que la Régie avait rompu le contrat de façon abusive et de mauvaise
foi et désigner un expert en vue de chiffrer le préjudice subi
par la société Roussel " en raison des fautes commises par
la Régie " ;
que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.
Bull. n° 326