Cass. Civ. 3ème, 18 juin 1997

Sur le premier moyen :
Vu l'article 1382 du Code civil, ensemble l'article 1615 de ce Code ;
Attendu que l'obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 12 juillet 1994), que la société civile immobilière du Théâtre (la SCI), ayant souscrit une police responsabilité civile promoteur auprès de la compagnie Assurances générales de France (AGF), a entrepris la construction d'un immeuble, dont elle a confié le terrassement et le gros oeuvre à M. Bodiou, assuré par la compagnie La Lutèce, qui a sous-traité les travaux de terrassement à M. Espern, assuré par la compagnie Union des assurances de Paris (UAP) ; que, le mur pignon de la maison voisine appartenant à Mme Le Berre s'étant effondré, celle-ci et son fils André Le Berre ont assigné en réparation la SCI et la compagnie AGF ;
Attendu que, pour débouter les consorts Le Berre de leur demande en paiement des frais de reconstruction de l'immeuble, l'arrêt retient qu'il ressort de l'acte du 6 mars 1993 que l'immeuble a été acheté en l'état sans aucune réserve au profit des vendeurs quant à la poursuite de l'action en cours et que les consorts Le Berre n'allèguent et ne démontrent pas, de quelconque façon, qu'ils aient encore qualité pour réclamer, du chef de Mme Le Berre, des dommages-intérêts pour le montant destiné à permettre la réfection de l'immeuble ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la vente de l'immeuble n'emporte pas de plein droit cession au profit de l'acquéreur des droits et actions à fin de dommages-intérêts qui ont pu naître au profit du vendeur en raison de dégradations causées à l'immeuble antérieurement à la vente, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
………………………………
PAR CES MOTIFS, CASSE […], renvoie devant la cour d'appel d'Angers

D. aff. 1997, p. 875

Cass. Civ. 3ème, 28 novembre 2001

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 janvier 2000), que de 1983 à 1985 la société SFRM, appartenant au " groupe Alusuisse ", assurée par la compagnie Albingia, selon police " dommages-ouvrage ", a fait effectuer des travaux de remplacement de la couverture et de renforcement de la charpente de son bâtiment à usage industriel, par la société Heper coordination, entrepreneur, assurée par la compagnie GFA, devenue AM Prudence ; que cet entrepreneur a sous-traité la pose de la nouvelle couverture et l'exécution de la charpente à la société Normacadre, assurée par la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) ; que les bacs en acier ont été fabriqués et fournis à la société Normacadre par la société Les Forges d'Haironville, devenue la société Haironville ; que des désordres de perforation et de corrosion de ces bacs ayant été constatés, la compagnie Albingia, subrogée après paiement dans les droits du maître de l'ouvrage, a sollicité le remboursement des sommes versées par elle en réparation du préjudice ;
Attendu que la société Haironville fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec l'entrepreneur principal, le sous-traitant et leurs assureurs, à payer des sommes à la compagnie Albingia, alors, selon le moyen :
1° que la compagnie d'assurances, subrogée dans les droits du maître de l'ouvrage qui disposait d'une action contractuelle directe contre le fabricant des bacs en acier, ne pouvait pas rechercher la responsabilité de celui-ci sur un fondement quasi délictuel et que la cour d'appel a ainsi violé par fausse application l'article 2270-1 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant exactement relevé que la société Normacadre, sous-traitant, engageait sa responsabilité vis-à-vis du maître de l'ouvrage sur le fondement délictuel, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que le fournisseur de ce sous-traitant, la société Haironville, devait, à l'égard du maître de l'ouvrage, répondre de ses actes sur le même fondement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.

Bull. n° 137

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 4 décembre 2002

N° de pourvoi: 01-02383
Publié au bulletin Cassation.

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 29 novembre 2000), que, par décision irrévocable en date du 14 décembre 1992, la société Coopérative de production d'habitation à loyer modéré, la société Maison ardennaise, a reçu l'indemnisation, au titre de la garantie décennale, de dommages affectant la toiture de pavillons qu'elle avait fait édifier en 1971 ; que la société Maison ardennaise a décidé de distribuer une quote-part de l'indemnité perçue aux locataires-attributaires, aux propriétaires anciens locataires ainsi qu'aux héritiers des locataires décédés ; qu'elle a refusé toute attribution d'une quote-part aux sous-acquéreurs des locataires devenus propriétaires ;

Attendu que, pour condamner la société Maison ardennaise au paiement d'une quote-part de l'indemnité perçue au profit des sous-acquéreurs, l'arrêt retient que la créance indemnitaire par elle détenue contre le maître d'oeuvre est indissociablement liée aux immeubles considérés pour n'exister que "propter rem" et s'est par suite nécessairement trouvée transmise aux sous-acquéreurs en tant qu'accessoire des immeubles sur lesquels le droit de propriété a fait l'objet d'une mutation et que la société n'est pas davantage fondée à opposer aux sous-acquéreurs les clauses exclusives de garantie des vices apparents ou cachés contenues dans les actes de vente constituant leurs titres en raison du principe de la relativité des contrats posé par l'article 1165 du Code civil ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de clause expresse, la vente d'un immeuble n'emporte pas de plein droit cession au profit de l'acquéreur , des droits et actions à fin de dommages-intérêts qui ont pu naître au profit du vendeur en raison des dommages affectant l'immeuble antérieurement à la vente, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

Publication : Bulletin 2002 III N° 250 p. 217

et encore :
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 7 juillet 2004

N° de pourvoi: 02-11335
Non publié au bulletin Rejet

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 décembre 2001), que, le 19 avril 1995, la ville de Paris a vendu un terrain à l'Etat français en vue de la construction du Stade de France ; que sur ce terrain, la société Total solvants avait exploité, jusqu'en 1992, un dépôt de stockage d'hydrocarbures et une unité de fabrication d'essences spéciales ; que la présence d'hydrocarbures sous l'emprise du stade, ayant, lors de sa construction, entraîné des travaux supplémentaires de dépollution, l'agent judiciaire du trésor a fait assigner la société Total solvants en réparation du préjudice résultant du surcoût des travaux de dépollution ; que cette dernière a soulevé l'irrecevabilité de l'action ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor fait grief à l'arrêt de déclarer l'Etat irrecevable à agir à l'encontre de la société, alors, selon le moyen, que l'action est ouverte à ceux qui ont un intérêt légitime au succès d'une prétention tandis que l'existence du droit invoqué par le demandeur n'est pas une condition de recevabilité de l'action mais de son succès ; qu'en déclarant l'agent judiciaire irrecevable à agir à l'encontre de la société Total solvants faute de bénéficier d'une cession des droits de la ville ou d'une subrogation, la cour d'appel a violé l'article 31 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que la vente d'un immeuble n'emporte pas de plein droit cession au profit de l'acquéreur des droits et actions à fin de dommages-intérêts qui ont pu naître au profit du vendeur en raison des dégradations causées à l'immeuble antérieurement à la vente, la cour d'appel ayant constaté que l'Etat avait acquis en connaissance de cause le terrain dont la nappe phréatique était polluée et relevé que l'acte de vente ne comportait aucune clause expresse de cession par le vendeur à l'acquéreur de droits et actions à l'égard de tiers, a déclaré, à bon droit que l'Etat n' était pas recevable à agir contre la société Total solvants ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que l'agent judiciaire du trésor fait grief à l'arrêt de déclarer l'Etat irrecevable à agir à l'encontre de la société Total solvants en réparation du préjudice causé par l'obligation qui lui a été faite par l'autorité administrative de lutte contre les effets de la pollution des parcelles acquises de la ville de Paris pour l'implantation du stade de France, alors, selon le moyen :

1 ) que la cour d'appel qui retient ensemble que la pollution est la cause du dommage, que pour être recevable à agir contre un tiers, l'acquéreur doit démontrer que le dommage dont il demande réparation est apparu postérieurement à la vente, que le préjudice dont l'Etat demande réparation est constitué par le surcoût des travaux rendus nécessaires par la pollution de la nappe phréatique sur le site du stade de France, et qui, pour rejeter l'action relève que l'immeuble vendu avait subi un dommage antérieurement à la vente, de sorte que l'Etat acquéreur, qui était informé de la présence d'hydrocarbures dans la nappe phréatique, n'avait pas d'action contre la société Total solvants, à laquelle il imputait la pollution faute de cession ou de subrogation consentie, n'a pas tiré de ses propres énonciations les conséquences légales qui en découlent en violation de l'article 1615 du Code civil ;

2 ) que l'action en réparation du dommage naît de sa manifestation ; que la cour d'appel qui constate que le préjudice dont l'Etat demande réparation est constitué par le surcoût des travaux rendus nécessaires par la pollution de la nappe phréatique sur le site du stade de France et qui, pour rejeter l'action retient que l'immeuble vendu avait subi un dommage antérieurement à la vente, de sorte que l'Etat acquéreur, qui était informé de la présence d'hydrocarbures dans la nappe phréatique, n'avait pas d'action contre la société Total solvants, à laquelle il imputait la pollution, faute de cession ou de subrogation consentie par la ville, sans rechercher la date à laquelle le dommage s'était manifesté, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1384, alinéa 1, du Code civil ;

3 ) que l'obligation imposée par l'administration au propriétaire d'un sol pollué de se soumettre, pour exercer son droit de construire à des contraintes rendues nécessaires par la pollution constitue une obligation réelle transmise avec la propriété du sol dont elle constitue l'accessoire ; qu'en décidant que la créance liée à l'obligation de procéder à des travaux pour lutter contre les effets de la pollution et éviter sa propagation n'avait pas été transmise par la ville à l'Etat, dans le silence de l'acte de vente, la cour d'appel a violé les articles 649 et 1615 du Code civil ;

4 ) que les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur ; que la cour d'appel qui constate, d'une part, qu'un arrêté du 7 juillet 1995 du préfet de la Seine-Saint-Denis prescrit à l'Etat, propriétaire du site, la réalisation de travaux de dépollution, d'autre part, que le préjudice dont l'Etat demande réparation est constitué par le surcoût des travaux rendus nécessaires par la pollution de la nappe phréatique sur le site du stade de France et déclare l'Etat irrecevable à agir contre la société Total solvants, à laquelle il imputait la pollution par les hydrocarbures de la nappe phréatique faute de transmission des droits du précédent propriétaire du terrain pollué, n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui en découlaient en violation du principe pollueur-payeur énoncé à l'article L. 110-1 du Code de l'environnement et de l'article 1384, alinéa 1, du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant retenu que le préjudice dont l'Etat demandait réparation était constitué par le surcoût des travaux rendus nécessaires par la pollution de la nappe phréatique sur le site du stade de France qui était la cause du dommage, et constaté, appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, que l'Etat avait connaissance de la pollution de la nappe phréatique avant la vente et avait acquis le terrain en parfaite connaissance de cause et à un prix inférieur à sa valeur primitive pour tenir compte de l'état de la chose, avec renonciation de toute action éventuelle contre le vendeur en raison de l'état du sol ou du sous-sol, la cour d'appel en a déduit exactement, qu'en l'absence de la preuve de l'existence d'une subrogation ou d'une cession de droits consentie au profit de l'Etat par le vendeur, l'action en réparation formée par l'agent judiciaire du trésor était irrecevable ;

Attendu, d'autre part, qu'il ne ressort ni des conclusions ni de l'arrêt que l'agent judiciaire du trésor ait soulevé devant la cour d'appel le moyen tiré d'une violation des dispositions de l'article L. 110-1 du Code de l'environnement ; que le moyen mélangé de fait et de droit est, de ce chef, nouveau ;

D'où il suit que le moyen est irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;