sur le moyen unique : vu l'article 1382 du code civil ;
attendu que, selon les enonciations de l'arret attaque, sechet, negociant en
boissons en gros, etait lie par un contrat d'exclusivite, quant au commerce
des bieres, avec la societe "brasserie de la meuse" maintenant absorbee
par la societe europeenne de brasserie (seb) et la societe commerciale europeenne
de brasserie (sceb) ;
que ce contrat fut resilie par sechet ;
que la cour d'appel, sans etre critiquee a cet egard, a declare cette resiliation
reguliere ;
attendu que la cour d'appel, par un autre chef de decision, a refuse a la seb
et a la sceb les dommages-interets que celles-ci reclamaient au meme sechet
pour avoir approvisionne en bieres d'autres provenances que les leurs certains
detaillants, lies avec lesdites societes par des contrats d'exclusivite directs
;
que, a cet egard, l'arret, apres avoir releve que, avant la rupture de la concession
sechet, celui-ci s'etait employe, lui-meme, alors a son propre benefice en meme
temps qu'a celui des concedants, a faire cesser des achats analogues auxquels
les memes detaillants procedaient alors chez d'autres grossistes - circonstance
d'ou resultait necessairement la connaissance, par ledit sechet, de l'existence
de ces contrats - s'est borne a retenir que les faits de complicite commis par
sechet, dont elle constatait l'existence, n'etaient pas fautifs, car commis
posterieurement a la resiliation susvisee, c'est-a-dire apres la rupture reguliere
des relations contractuelles entre parties ;
attendu qu'en statuant ainsi, alors que toute personne qui, avec connaissance,
aide autrui a enfreindre les obligations contractuelles pesant sur lui, commet
une faute delictuelle a l'egard de la victime de l'infraction, la cour d'appel
a viole le texte susvise ;
par ces motifs : casse et annule, mais seulement dans les limites du pourvoi,
l'arret rendu le 18 mars 1970 entre les parties par la cour d'appel de rennes
;
remet, en consequence quant a ce, la cause et les parties au meme et semblable
etat ou elles etaient avant ledit arret et, pour etre fait droit, les renvoie
devant la cour d'appel de caen.
D. 1972, jur. 120
Cass. Civ. 3ème, 21 mars 1972
sur le moyen unique : attendu que de l'arret confirmatif attaque il resulte
que le 6 decembre 1960 la societe diffusion industrielle nouvelle (din) a fait
proceder a la saisie immobiliere d'une exploitation agricole appartenant a dame
lier, epouse separee de biens de jean-jacques manrot le goarnic ;
que christian manrot le goarnic, beau-frere de dame lier, a formule un dire
au cahier des charges en se pretendant locataire du domaine mis en vente ;
attendu que christian manrot le goarnic fait grief audit arret d'avoir decide qu'il ne beneficiait pas d'un bail a ferme sur la propriete de sa belle-soeur alors, selon le pourvoi, que d'une part l'existence du bail verbal invoque ne pouvait dependre de justifications d'ordre fiscal ou de souscriptions d'assurances etrangeres au contrat locatif que, d'autre part, christian manrot le goarnic avait fait valoir, dans des conclusions laissees sans reponse, que le versement periodique des fermages etait etabli par un certificat du notaire et des talons de mandat et que les clauses souscrites par la proprietaire dans des actes etrangers a christian le goarnic etaient inopposables a celui-ci ;
qu'enfin le refus de la cour d'appel d'ordonner une enquete s'appuie sur des motifs purement dubitatifs et hypothetiques envisageant la simple eventualite d'un contrat autre que locatif ;
mais attendu que si, en principe, les conventions n'ont d'effet qu'a l'egard des parties, il ne s'ensuit pas que les juges ne puissent rechercher, dans des actes etrangers a l'une des parties en cause, des renseignements de nature a eclairer leur decision, ni ne puissent considerer comme creant une situation de fait a l'egard des tiers les stipulations d'un contrat ;
attendu que, tant par motifs propres que par adoption de ceux des premiers juges, la cour d'appel enonce que christian manrot le goarnic vit chez sa belle-soeur, partie saisie, qui essaye par tous les moyens de se soustraire a ce qu'elle doit et qui a tout interet a reduire le plus possible l'action de ses creanciers afin de recuperer indirectement son patrimoine par l'eventuel droit de preemption de son beau-frere ;
que si celui-ci a effectue des versements d'argent a sa belle-soeur, ce fut en vertu de conventions dont les elements de la cause ne permettent pas de preciser la nature exacte et que les emprunts contractes par dame lier aupres de la caisse regionale de credit agricole mutuel du finistere et de la societe din demontrent au contraire que ladite dame assure elle-meme l'exploitation de sa propriete et que par consequent son beau-frere ne peut en etre le fermier ;
attendu que par ces seuls motifs, qui ne sont pas dubitatifs et qui relevent
de son pouvoir souverain d'appreciation de la valeur des elements qui lui etaient
soumis, la cour d'appel a estime, sans etre tenue d'ordonner une enquete des
lors que sa conviction etait deja formee, que les versements equivoques effectues
par christian le goarnic ne suffisaient pas a rapporter la preuve de l'execution
du bail verbal allegue ;
qu'elle a ainsi repondu aux conclusions pretendument delaissees et justifie
sa decision ;
d'ou il suit que le moyen n'est pas fonde ;
par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arret rendu le 1er juin 1970
par la cour d'appel de poitiers.
Bull. n° 193