Cour de Cassation Chambre civile 1, 7 octobre 1998
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que, par acte sous seing privé du 17 juin 1981, M. X... a reconnu devoir à son épouse une somme, remboursable avec un préavis de trois mois ; qu'après leur divorce, Mme X..., devenue Mme Y..., a, par acte du 14 juin 1989, accepté que le prêt lui soit remboursé sous forme d'une augmentation de la pension alimentaire que lui versait son ex-mari ; qu'en 1993, elle l'a assigné en remboursement du solde du prêt ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 23 février 1996) d'avoir annulé pour cause illicite l'acte du 14 juin 1989 et fait droit à la demande de son ex-épouse, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en ne constatant pas que l'accord avait eu pour motif déterminant des déductions fiscales illégales et en ne recherchant pas s'il n'avait pas eu pour motif déterminant de réaliser l'étalement du remboursement du prêt dont le paiement était susceptible d'être réclamé à tout moment, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'une convention ne peut être annulée pour cause illicite que lorsque les parties se sont engagées en considération commune d'un motif pour elles déterminant ; qu'ayant constaté que Mme Y... déclarait à l'administration fiscale l'intégralité des sommes reçues de M. X..., il s'en évinçait que Mme Y... ne pouvait avoir eu pour motif déterminant de son accord la déductibilité, par M. X..., des sommes à elles versées, en sorte que la cour d'appel, en retenant une cause illicite, a violé l'article précité ;
Mais attendu qu'un contrat peut être annulé pour cause illicite ou immorale, même lorsque l'une des parties n'a pas eu connaissance du caractère illicite ou immoral du motif déterminant de la conclusion du contrat ; que l'arrêt ayant retenu que l'acte du 14 juin 1989 avait une cause illicite en ce qu'il avait pour but de permettre à M. X... de déduire des sommes non fiscalement déductibles, Mme Y... était fondée à demander l'annulation de la convention ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche inopérante visée à la première branche du moyen, a légalement justifié sa décision
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.
Publication : Bulletin 1998 I N° 285 p. 198 ; Semaine juridique, 1998-12-09, n° 50, p. 2163, note M.-H. MALEVILLE. Dalloz, 1999-06-10, n° 22, p. 237, note O. TOURNAFOND. Gazette du Palais, 2000-04-06, n° 97, p. 26, note F. CHABAS.