Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 25 janvier 2005 Cassation.

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 511-33 du Code monétaire et financier, ensemble l'article 10 du Code civil

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Résidence Prestige a fait édifier en Martinique, en 1989, un
ensemble immobilier qu'elle a commercialisé par appartements en état futur d'achèvement avec une garantie
intrinsèque résultant notamment de la participation financière du Crédit Martiniquais aux droits duquel se trouve
la société Financière du Forum lequel avait attesté "avoir accordé à sa cliente un crédit confirmé de 13 000 000
francs pour parfaire le financement de l'opération immobilière..." ; que l'opération ayant été abandonnée avant
son terme et les acquéreurs ayant été contraints de supporter chacun le paiement d'une somme supplémentaire de
200 000 francs pour achever la construction, les intéressés, alors constitués en Syndicat de copropriété, le
Syndicat des copropriétaires "Les Sommets de l'Anse Mitan", ont fait assigner la société Résidence Prestige et le
Crédit Martiniquais en paiement de ce surcoût ; qu'ayant vainement invité la banque à lui communiquer les
factures et les justificatifs des sommes encaissées et décaissées, le syndicat des Copropriétaires "Les Sommets de
l'Anse Mitan" a demandé judiciairement de la condamner sous astreinte à cette production ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient, d'abord, que le Syndicat des copropriétaires "Les
Sommets de l'Anse Mitan", qui poursuit l'indemnisation du coût des travaux nécessaires à l'achèvement de la
résidence, justifie d'un intérêt légitime à l'obtention des pièces relatives au financement des travaux, qu'elles
soient détenues par la société Résidence Prestige ou par le Crédit Martiniquais, celles-ci étant en outre
susceptibles de lui permettre d'engager d'autres procédures à l'encontre d'autres personnes distinctes, et, ensuite,
que si l'exécution des relations contractuelles entre le banquier et son client sont couvertes par le secret bancaire,
ce secret, qui n'est pas absolu, n'est pas opposable par le banquier lorsque la demande est dirigée contre lui ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que s'il était légitime d'exiger de la banque qu'elle démontre avoir délivré
le crédit confirmé conformément aux engagements bénéficiant aux acquéreurs, en revanche, en tant qu'ils étaient
relatifs au fonctionnement d'un compte bancaire ou susceptibles de comporter des informations dont le Crédit
Martiniquais avait eu connaissance dans l'exercice de son activité professionnelle, les documents réclamés pour
permettre d'établir la destination donnée aux fonds perçus par le promoteur pour construire la résidence
inachevée étaient couverts par le secret bancaire dont le Syndicat des copropriétaires "Les Sommets de l'Anse
Mitan" n'était pas bénéficiaire et ce secret constituait un empêchement légitime opposable au juge civil hors les
cas, qui n'étaient pas réalisés en l'espèce, prévus par la loi, ce dont il se déduisait que bien qu'ayant la qualité de
partie au litige, la banque était fondée à l'opposer pour refuser la communication sollicitée, la cour d'appel a violé
les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE
Publication : Bulletin 2005 IV N° 13 p. 12