Cour de Cassation Chambre civile 1
Audience publique du 12 juillet 2005 Rejet

Attendu que, par acte authentique des 15 et 21 octobre 1988, la Banque nationale de Paris, aujourd'hui dénommée BNP Paribas (la banque), a consenti à M. et à Mme X... un prêt de la somme de 357 000 francs, au taux effectif global de 10,6 % l'an, remboursable en 240 mensualités progressives, à l'effet de financer l'acquisition d'une maison d'habitation destinée à être donnée en location ; qu'en raison de la défaillance des époux X..., la banque a, le 18 juin 1998, fait délivrer à ces derniers un commandement aux fins de saisie immobilière de ce bien ; que, le 10 novembre 1998, les époux X... ont assigné la banque en annulation dudit prêt, à défaut en paiement à titre de dommages-intérêts, pour octroi fautif de celui-ci, d'une somme égale au montant de leur dette ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de la banque :
Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir retenu sa responsabilité alors, selon le moyen, qu'en statuant comme elle a fait "sans rechercher si le prêt litigieux avait été sollicité par les emprunteurs et sans constater que la banque aurait eu sur leur situation financière et les risques de l'opération financée des informations qu'eux-mêmes auraient ignorées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions de l'article 1147 du Code civil" ;
Mais attendu qu'après avoir analysé les facultés contributives des époux X..., en tenant compte notamment des revenus produits par la location de la maison achetée au moyen du prêt litigieux, la cour d'appel, constatant que les emprunteurs ne pouvaient faire face aux échéances de ce prêt avec leurs revenus locatifs, non plus qu'avec leurs très modestes ressources, a retenu que la banque avait méconnu ses obligations à l'égard de ces emprunteurs profanes en ne vérifiant pas leurs capacités financières et en leur accordant un prêt excessif au regard de leurs facultés contributives, manquant ainsi à son devoir de mise en garde ; qu'elle a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le second moyen du pourvoi principal des époux X... :
Attendu que les époux X... reprochent encore à l'arrêt d'avoir limité la réparation du préjudice qu'ils invoquaient à la décharge du paiement des intérêts dus au titre du prêt litigieux alors, selon le moyen, "que la réparation du préjudice subi par l'emprunteur, du fait de la faute commise par la banque pour lui avoir consenti un prêt excessif par rapport à ses facultés de remboursement, consiste, outre la charge des intérêts en résultant, dans l'obligation d'avoir à le rembourser ; qu'ayant constaté la faute du banquier pour n'avoir pas recherché si, lors de l'octroi du prêt, l'emprunteur disposait de ressources lui permettant de rembourser, la cour d'appel n'a pas donné de base légale, au regard de l'article 1147 du Code civil, à sa décision qui déboute l'emprunteur de sa demande tendant à interdire à la banque de lui réclamer quelque paiement que ce soit" ;
Mais attendu que la cour d'appel a estimé qu'en réparation du préjudice né de la faute commise par la banque à l'égard des époux X..., il convenait de décharger ceux-ci des intérêts produits par la somme prêtée ; que c'est cette appréciation, qui est souveraine, que le moyen tente, en réalité, de remettre en cause ; qu'il ne peut donc être accueilli ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois


Cour de Cassation Chambre civile 1
Audience publique du 12 juillet 2005 Cassation partielle

Attendu que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Charente-Périgord (la banque), dans les livres de laquelle Françoise X... avait ouvert un compte de dépôt, un compte d'épargne logement et un plan d'épargne populaire, a consenti à celle-ci, à l'effet de couvrir le solde débiteur de son compte de dépôt, d'abord, par offre acceptée du 28 décembre 1993, un crédit de 5 000 francs au taux de 14,50 % l'an, ensuite, par offre acceptée du 21 février 1997, un crédit de 7 000 francs au taux de 11, 30 % l'an, enfin, par offre acceptée du 28 octobre 1998, un crédit de 15 000 francs pouvant être élevé à 50 000 francs au taux de 13,50 % l'an ; que, prétendant que la banque avait commis divers manquements à son égard, Françoise X... a recherché la responsabilité de celle-ci, et formé diverses demandes à son encontre ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1147 du Code civil ;
Attendu que pour rejeter l'action en responsabilité dirigée par Françoise X... contre la banque, l'arrêt attaqué retient que l'intéressée ne peut reprocher à la banque le choix qu'elle a fait de conserver son épargne, une banque ayant un devoir d'information sur les choix de son client, mais n'ayant pas à s'ingérer dans la gestion des comptes de ce dernier, qu'il ne peut être reproché à la banque d'avoir offert à sa cliente un prêt plutôt qu'un autre, celle-ci en l'absence de toute démonstration contraire pouvant librement souscrire ou non le prêt qui lui était proposé, et que rien ne démontre qu'au moment où elle a souscrit les différents crédits, Françoise X... se soit trouvée dans une situation d'urgence l'empêchant de consulter un tiers qualifié et en particulier son père qui est présenté comme un ancien cadre de la banque ;
Qu'en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si lors de la souscription de chacun des crédits consentis à Françoise X... par la banque, celle-ci avait, comme elle y était tenue en tant que gestionnaire de comptes, éclairé sa cliente sur les avantages et inconvénients du choix qui s'offrait alors à cette dernière, pour couvrir le solde débiteur de son compte de dépôt, entre le recours au crédit et la mobilisation de l'épargne figurant sur ses autres comptes, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs inopérants, n'a pas donné de base légale à sa décision, de ce chef ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

Cour de Cassation Chambre civile 1
Audience publique du 12 juillet 2005 Rejet

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que, par acte sous seing privé du 30 septembre 1994, le Crédit lyonnais a consenti à M. X..., président du conseil d'administration et principal actionnaire de la société Infovil, un prêt de la somme de 1 000 000 francs destiné à financer un "apport en compte courant bloqué dans la société Infovil" ; qu'après que la liquidation judiciaire de la société Infovil eut été prononcée, le Crédit lyonnais a, en raison de la défaillance de M. X..., assigné celui-ci en paiement du solde de ce prêt ; que M. X... reproche à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 25 octobre 2002) d'avoir accueilli cette demande alors, selon le moyen :

1 / que les contre-lettres produisent effet entre les parties contractantes ; qu'en se bornant néanmoins à affirmer que le prêt avait été formellement consenti à M. X... qui, comptablement, avait procédé à des remboursements, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il résultait du fait que l'acte de prêt mentionnait qu'il avait pour objet d'être apporté en compte courant bloqué dans la société Infovil, que M. X... s'engageait à ne pas exiger de celle-ci le remboursement de son compte courant et que la somme ne pourrait avoir d'autre objet que celui ainsi spécifié, ainsi que du fait que les remboursements étaient intervenus au moyen de virements effectués entre les comptes ouverts dans les livres du Crédit lyonnais, la société Infovil effectuant à chaque remboursement un virement sur le compte de M. X... et le Crédit lyonnais prélevant cette somme, qu'en réalité les parties étaient convenues de ce que le prêt était contracté par la société Infovil et non par M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1321 du Code civil ;
2 / que le banquier commet une faute de nature à engager sa responsabilité s'il fait souscrire à l'emprunteur un engagement qui n'a pas pour objet de lui profiter et qui est manifestement disproportionné par rapport à son patrimoine ou à ses revenus, alors même qu'il ne disposerait pas, sur la situation financière de l'emprunteur, de renseignements que lui-même aurait ignorés ; qu'en décidant néanmoins que M. X... ne prétendant pas que le Crédit lyonnais aurait eu sur sa situation financière des renseignements que lui-même aurait ignorés, il ne pouvait faire grief au Crédit lyonnais de lui avoir accordé un prêt qu'il avait lui-même sollicité, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu, d'abord, qu'en retenant non seulement que M. X... avait "comptablement" procédé au remboursement de la somme prêtée, mais encore que celle-ci, en raison de son inscription au compte courant d'associé de l'intéressé, serait revenue intégralement à ce dernier si le remboursement avait été mené à son terme et si la liquidation judiciaire de la société Infovil n'avait été prononcée, la cour d'appel a écarté les arguments invoqués par M. X... pour prétendre à l'existence d'une contre-lettre qui aurait conféré à ladite société la qualité d'emprunteur de cette somme ; qu'ensuite, c'est à bon droit que l'arrêt énonce que, ne prétendant pas que le Crédit lyonnais aurait eu sur sa situation financière des renseignements que lui-même aurait ignorés, M. X..., emprunteur averti, ne peut faire grief à cette banque de lui avoir accordé un prêt qu'il avait lui-même sollicité ; qu'aucun des griefs n'est donc fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi


Cour de Cassation Chambre civile 1
Audience publique du 12 juillet 2005 Rejet

Sur le deux moyens réunis du pourvoi formé par les époux X..., le premier pris en ses trois branches, tels qu'énoncés au mémoire en demande et reproduits en annexe :
Attendu que la BNP Paribas a, le 14 février 1990, consenti aux époux X... un prêt en deux tranches, l'une de 8 872 000 francs destinée à l'acquisition d'un appartement et l'autre de 3 000 000 francs destinée à financer des travaux ; qu'à la suite d'échéances demeurées impayées, la BNP Paribas a fait délivrer aux époux X... des commandements de saisie immobilière ; que les emprunteurs ont alors recherché la responsabilité de la banque en faisant valoir que les échéances du prêt étaient supérieures à leurs revenus ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 14 décembre 2001) les a déboutés de leurs demandes et les a condamnés à verser à la BNP Paribas des dommages-intérêts ;

Attendu que la cour d'appel a relevé, par motifs propres et adoptés, que les époux X..., cadres supérieurs ayant créé une société qui avait pour objet la réalisation d'opérations immobilières, étaient des emprunteurs avertis, qu'aux revenus certains dont ils faisaient état en 1990 au titre de leurs emplois, devaient être ajoutés les revenus allant raisonnablement leur échoir au titre de leurs activités professionnelles secondaires, qu'il y avait lieu ainsi de prendre en compte les dividendes et la rémunération que Mme X... entendait percevoir au titre de la société créée dont les époux X... étaient les seuls actionnaires, ainsi que ses prévisions de résultat et ses perspectives, celle-ci ayant démarré sous les meilleurs auspices, et qu'en outre les époux X..., condamnés pour soustraction frauduleuse à l'établissement et au paiement de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1990 percevaient d'autres revenus tirés de diverses activités ; que sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, elle a pu en déduire que la BNP Paribas n'avait pas commis de faute ;
que les moyens ne sont pas fondés ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi des époux X...