Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du jeudi 10 octobre 1996

N° de pourvoi: 96-83079
Publié au bulletin Cassation


CASSATION sur le pourvoi formé par :- le procureur général près la cour d'appel de Toulouse,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de ladite cour d'appel, en date du 14 mai 1996, qui, dans l'information suivie contre Mohamed X... et Mohamed Y... pour infractions à la législation sur les stupéfiants, a annulé l'ensemble de la procédure et ordonné la mise en liberté des personnes mises en examen.

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 78-2, alinéa 3, du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt a annulé le procès-verbal à la base de la poursuite et la procédure subséquente :

" au motif que les termes généraux mentionnés au procès-verbal d'interpellation pour justifier les opérations de contrôle ne caractérisaient aucune circonstance précise établissant le risque d'atteinte à l'ordre public ;

" alors que, selon les dispositions de l'article 78-2, alinéa 3, du Code de procédure pénale, le contrôle d'identité concerné, de nature administrative, obéissait bien aux prescriptions de la loi dans sa rédaction issue de la loi du 10 avril 1993 : "l'identité de toute personne, quel que soit son comportement, pouvant être contrôlée pour y prévenir une atteinte à l'ordre public, notamment une atteinte à la sécurité des personnes et des biens" " ;

Vu ledit article ;

Attendu qu'aux termes de l'article 78-2, alinéa 3, du Code de procédure pénale, l'identité de toute personne, quel que soit son comportement, peut être contrôlée, selon les modalités prévues au premier alinéa de ce texte, pour prévenir une atteinte à l'ordre public, notamment à la sécurité des personnes ou des biens ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Mohamed X... et Mohamed Y... ont été interpellés le 15 février 1996, à 22 h 30, place Wilson, à Toulouse, par une patrouille de police agissant en exécution des instructions et sous la responsabilité du commissaire divisionnaire, chef de la sécurité générale ; que, dans le procès-verbal d'interpellation, les enquêteurs justifient le contrôle d'identité en indiquant que la place Wilson est un lieu où " la sécurité des personnes et des biens se trouve menacée en raison de nombreuses infractions récentes " et qu'à leur vue 2 individus ont pris rapidement la direction des escaliers menant au parking souterrain ;

Attendu que, saisie par une requête de Mohamed X..., la chambre d'accusation, pour prononcer l'annulation dudit procès-verbal, ainsi que celle de tous les actes subséquents, et ordonner la mise en liberté d'office des personnes mises en examen, retient que le seul fait d'accélérer le pas à la vue des policiers ne constitue pas l'indice requis par l'article 78-2, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, et que, pour éviter des contrôles d'identité généralisés et discrétionnaires, le contrôle administratif, prévu par l'alinéa 3 du même texte, pouvant porter atteinte à la liberté de circuler librement, doit être motivé strictement par l'analyse des éléments concrets contenus dans le procès-verbal ;

Que la juridiction du second degré relève, ensuite, qu'en l'espèce le risque d'atteinte à l'ordre public n'est pas caractérisé par les termes généraux et abstraits utilisés au procès-verbal litigieux et en déduit que le contrôle d'identité du 15 février 1996 n'est pas régulier ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il lui appartenait de rechercher si la nature et le nombre des infractions antérieures évoquées par le procès-verbal ne caractérisaient pas un risque d'atteinte à l'ordre public, notamment à la sécurité des personnes ou des biens, la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner le second moyen proposé :

CASSE ET ANNULE

Publication : Bulletin criminel 1996 N° 356 p. 1052