Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 17 décembre 2008

N° de pourvoi: 07-10068
Publié au bulletin Rejet

Attendu que Mme Alice X... épouse Y... a présenté, sur le fondement de l'article 99 du code civil, une requête en rectification de ses actes de naissance et de mariage, de ceux de son père, de son grand-père et de son arrière grand-père ainsi que des actes de naissance de ses enfants et de son conjoint ; qu'elle soutenait que le nom de ses ancêtres depuis le milieu du 16e siècle était " Charles de Z... " et qu'à la suite d'une première erreur involontaire de l'officier de l'état civil, son ancêtre Marie Louis A... avait été nommé " Charles X... " dans son acte de mariage en 1820 puis, qu'à la suite d'une seconde erreur, l'acte de mariage de son ancêtre Pierre Alexandre B... dressé en 1877, et tous les actes postérieurs, ont fait uniquement mention du nom " X... " ; que le tribunal de grande instance puis la cour d'appel l'ont déboutée de sa demande tendant à ce qu'il soit substitué à son patronyme celui de " Charles de Z... " ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 2 novembre 2006) de la débouter de sa requête en rectification d'état civil, alors, selon le moyen, que la renonciation à un droit ne se présume pas et si elle n'est pas expresse, elle doit résulter d'acte manifestant la volonté non équivoque de renoncer ; que, partant, le silence ou le défaut de protestation ne peut valoir renonciation ; qu'en relevant, pour débouter Mme X... de sa requête, que ses ascendants avaient renoncé à utiliser le nom Charles de Z..., sans caractériser d'actes non équivoques manifestant leur volonté de renoncer au port de ce nom tandis que leur défaut de protestation à la suite des erreurs commises par les officiers d'état civil ne pouvait suffire à caractériser cette volonté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 99 du code civil, ensemble la loi du 6 fructidor an II et les principes qui régissent le droit au nom ;

Mais attendu que la cour d'appel a justement rappelé que la possession loyale et prolongée d'un nom est propre à conférer à l'individu qui le porte le droit à ce nom
et que si elle ne fait pas obstacle à ce que celui-ci, renonçant à s'en prévaloir, revendique le nom de ses ancêtres,
il appartient au juge, en considération notamment de la durée respective et de l'ancienneté des possessions invoquées, ainsi que des circonstances dans lesquelles elles se sont succédé, d'apprécier s'il y a lieu d'accueillir cette revendication,
que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève que l'usage du nom patronymique revendiqué n'est établi que pour une durée de 68 ans, en l'absence de toute pièce antérieure à 1752, que depuis plus de 150 ans, les ascendants de la requérante ont porté le patronyme X... sans jamais revendiquer le retour au patronyme originel,
que le jugement en rectification d'état civil du 7 mars 1903 n'a concerné que l'autre branche de la famille et non l'aïeul de la requérante, qui, depuis son mariage en 1877, a été uniquement désigné sous le nom " X... ", patronyme qui dès lors a continué à être constamment et volontairement porté dans sa famille et utilisé dans tous les actes d'état civil postérieurs jusqu'à nos jours ;
que les juges du fond ont pu en déduire que les ascendants de la requérante avaient renoncé à utiliser le nom de Charles de Z... et ont souverainement estimé qu'eu égard aux circonstances, et notamment à la durée des possessions, il n'y avait pas lieu de faire droit à la demande de rectification ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils pour Mme Y... née X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme X... de sa requête en rectification d'état civil ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... expose être la descendante d'une famille de la noblesse rurale de la Haute-Normandie dont le premier membre connu vivait en 1367, et elle produit l'acte de naissance de M. Marie Louis Alexandre Charles de Z..., né le 25 novembre 1752, dont elle revendique l'ascendance et le nom patronymique, dont l'utilisation, dit-elle encore, remonte à 1559 ; que Mme X..., à l'appui de sa prétention, déclare que le patronyme par elle revendiqué a été porté par les membres de sa famille pendant près de 261 années, alors que son patronyme actuel n'a été porté que depuis 150 ans, à la suite de diverses erreurs commises par les officiers d'état civil en 1820 et 1877 ; que la possession loyale et prolongée d'un nom est propre à conférer à l'individu qui le porte le droit à ce nom ; que si elle ne fait pas obstacle à ce que celui-ci, renonçant à s'en prévaloir, revendique le nom de ses ancêtres, il appartient au juge, en considération notamment de la durée respective et de l'ancienneté des possessions invoquées, ainsi que des circonstances dans lesquelles elles se sont succédées, d'apprécier s'il y a lieu d'accueillir cette revendication ; que suivant jugement du tribunal de première instance d'Yvetot du 7 mars 1903, les actes d'état civil de M. Marie Louis Alexandre Charles de Z..., né en 1752 et qui avait contracté mariage en 1820 sous le nom de Charles X..., ainsi que ceux de son fils M. Marie Louis A... D..., né le 14 fructidor an VII, et l'un des enfants de ce dernier, Marie Louis D... A..., né en 1849, sont rectifiés sur la demande de ce dernier, pour s'écrire Charles de Z..., le nom de leur famille au 18ème siècle ; que toutefois le jugement en rectification d'état civil du 7 mars 1903 n'a pas concerné M. Pierre Zéphyrin Charles X..., aïeul de la requérante et second fils de Marie Louis A... D..., dont l'acte de naissance en 1850 porte toujours le patronyme Charles X... ; que lors de son mariage en 1877, M. Pierre E... Charles X... a été uniquement désigné dans l'acte de mariage sous le nom de X..., patronyme qui dès lors a continué à être constamment et volontairement porté dans sa famille et utilisé dans tous les actes d'états civils postérieurs jusqu'à nos jours ; que Mme Alice X..., dont les ascendants depuis 1850 ont renoncé à utiliser le nom de Charles de Z... qui était celui de leurs ancêtres, ne peut demander à se doter de ce nom au moyen d'une action en rectification de son état civil ;
ALORS, premièrement, QUE le nom ne se perd pas par non-usage et si la possession loyale et prolongée d'un nom est propre à conférer à l'individu qui le porte le droit à ce nom, elle ne fait pas obstacle à ce que celui-ci, renonçant à s'en prévaloir, revendique le nom de ses ancêtres, qu'il n'a pas perdu en raison de l'usage d'un autre nom par ses ascendants les plus proches ; qu'ayant constaté que le nom porté pendant plus de 261 années par les ancêtres de la requérante était Charles de Z... et que ce n'est qu'à la suite d'erreurs d'officiers d'état civil que les actes de ses ascendants mentionnaient le patronyme de X..., la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 99 du code civil, ensemble la loi du 6 fructidor an II et les principes qui réqissent le droit au nom ;
ALORS, deuxièmement, QUE la renonciation à un droit ne se présume pas et si elle n'est pas expresse, elle doit résulter d'acte manifestant la volonté non équivoque de renoncer ; que, partant, le silence ou le défaut de protestation ne peut valoir renonciation ; qu'en relevant, pour débouter, Mme X... de sa requête, que ses ascendants avaient renoncé à utiliser le nom Charles de Z..., sans caractériser d'actes non équivoques manifestant leur volonté de renoncer au port de ce nom tandis que leur défaut de protestation à la suite des erreurs commises par les officiers d'état civil ne pouvait suffire à caractériser cette volonté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 99 du code civil, ensemble la loi du 6 fructidor an II et les principes qui régissent le droit au nom ;
ALORS, troisièmement, QUE l'action tendant à faire rectifier des erreurs commises par les officiers d'état civil portant sur le nom ressort de l'article 99 du code civil et non pas de la procédure de changement de nom qui relève de l'autorité administrative ; qu'en retenant, à titre subsidiaire, que la demande de Mme X... relevait non pas d'une requête en rectification d'état civil mais d'une procédure en changement de nom, la cour d'appel a violé l'article 99 du code civil.

Publication : Bulletin 2008, I, n° 290

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mardi 30 septembre 2003

N° de pourvoi: 01-03219
Publié au bulletin Rejet.

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que, M. Henri d’Orléans reproche à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 1er février 2001) d'avoir rejeté sa requête en rectification d'état civil à fin de rétablir son nom d'origine de Bourbon et se nommer à l'avenir Henri de Bourbon, alors, selon le moyen :
1 / qu'en lui déniant le droit de se faire enregistrer sous le nom "de Bourbon", aux motifs que ses ascendants n'auraient pas fait usage de ce nom, et auraient porté pendant trois siècles et demi le nom " d’Orléans", tiré d'un titre ducal, ce qui ne permettait pas de caractériser leur renonciation à se prévaloir de leur rattachement aux Bourbon, et à posséder ainsi, en sus du nom " d’Orléans ", le nom dynastique "de Bourbon", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 99 du Code civil et 1er de la loi du 6 fructidor an II ;
2 / qu'en affirmant que sa demande tendant à recouvrer le nom ancestral "de Bourbon" n'aurait présenté aucun intérêt légitime, au prétexte qu'il se serait agi d'une "querelle dynastique" dont l'issue "ne peut trouver une solution de nature judiciaire", la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé les articles 99 du Code civil et 1er de la loi du 6 fructidor an II ;

Mais attendu que si la possession loyale et prolongée d'un nom ne fait pas obstacle en principe à ce que celui qui le porte, renonçant à s'en prévaloir, revendique le nom de ses ancêtres, il appartient alors au juge, en considération, notamment, de la durée respective et de l'ancienneté des possessions invoquées, ainsi que des circonstances dans lesquelles elles se sont succédé, d'apprécier s'il y a lieu d'accueillir cette revendication ;
Attendu qu'en l'espèce, par motifs adoptés, la cour d'appel a souverainement estimé que c'était volontairement que le nom d’Orléans avait été substitué à celui de Bourbon par le fils cadet de Louis XIII et tous ses descendants qui avaient ainsi abandonné le nom de Bourbon et que cette volonté de porter le nom d’Orléans avait été confirmée par le roi Louis-Philippe lors de son accession au trône ; que, par des seuls motifs, elle a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Publication : Bulletin 2003 I N° 195 p. 152