Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 12 mars 1985
N° de pourvoi: 84-17163
Publié au bulletin Cassation
Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches : vu l'article
1134 du code civil, ensemble l'article 1er de la loi du 28 juillet 1824 ;
attendu que le principe de l'inaliénabilité et de l'imprescriptibilité
du nom patronymique, qui empêche son titulaire d'en disposer librement
pour identifier au même titre une autre personne physique, ne s'oppose
pas a la conclusion d'un accord portant sur l'utilisation de ce nom comme dénomination
sociale ou nom commercial ;
Attendu que M. Pierre Bordas a demande qu'il soit ordonne sous astreinte a
la société anonyme "éditions Bordas" de cesser
toute utilisation du nom Bordas dans sa dénomination sociale et a cette
société et a la société a responsabilité
limitée société générale de diffusion de
cesser toute utilisation de ce nom dans leurs "dénominations commerciales"
;
Attendu qu'après avoir constate que M. Pierre Bordas et son fils Henri
avaient licitement choisi la dénomination "éditions Bordas"
par acte sous seing prive du 23 janvier 1946 pour une société
a responsabilité limitée dont ils étaient les fondateurs,
ultérieurement transformée en société anonyme, la
cour d'appel, pour accueillir la demande de M. Pierre Bordas, énonce
qu'il n'y a eu aucune convention sur l'usage du nom Bordas par la société
ou sur l'inclusion de ce nom dans la dénomination sociale et que le patronyme
étant inaliénable et imprescriptible, l'incorporation du nom Bordas
dans la dénomination sociale ne peut s'analyser que comme une simple
tolérance a laquelle M. Pierre Bordas pouvait mettre fin sans pour autant
commettre un abus des lors qu'il justifiait de justes motifs ;
Attendu qu'en se déterminant par ces motifs, alors que ce patronyme
est devenu, en raison de son insertion le 23 janvier 1946 dans les statuts de
la société signes de M. Pierre Bordas, un signe distinctif qui
s'est détache de la personne physique qui le porte, pour s'appliquer
a la personne morale qu'il distingue, et devenir ainsi objet de propriété
incorporelle, la cour d'appel a viole les textes susvisés ;
par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la quatrième
branche du premier moyen ni sur le second moyen ;
Casse et annule l'arrêt rendu le 8 novembre 1984, entre les parties, par
la cour d'appel de paris ;
Publication : bulletin 1985 IV n° 95 p. 84