Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces
de procédure qu'Emile X..., médecin gynécologue, a assuré
pendant plusieurs années le suivi de patientes présentant des
troubles de la fécondité et leur a appliqué des traitements
aux fins de stimulation ovarienne ;
qu'à la suite de la plainte de l'une d'elles pour mise en danger d'autrui
et escroquerie, une information a été ouverte à l'issue
de laquelle il a été renvoyé devant le tribunal correctionnel,
notamment pour avoir mis en danger la vie de six personnes et pour avoir, à
de nombreuses reprises, fait signer des patientes au verso de leurs ordonnances,
multiplié les factures subrogatoires sur la base d'une même ordonnance
et utilisé des feuilles de remboursement vierges portant l'empreinte
du tampon de plusieurs pharmacies afin d'obtenir la délivrance de médicaments
payés par la caisse primaire d'assurance maladie ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 70 du
décret du 6 septembre 1995 (devenu R. 4127-70 du code de la santé
publique), de l'arrêté du 12 janvier 1999, des articles 223-1 du
code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a déclaré Emile X... coupable
de mise en danger de la vie d'autrui ;
" aux motifs qu'une expertise a été diligentée par
les professeurs B... et Y... et les docteurs M... et N..., aux termes de laquelle
les hommes de l'art ont conclu que la prise en charge et le suivi du dossier
médical de certaines patientes n'avaient pas été réalisés
conformément aux règles de l'art et que les soins pratiqués
avaient constitué pour ces patientes, un danger certain ;
a) le cas d'Odile Z... épouse A... :
que, s'agissant d'Odile Z..., les experts judiciaires ont relevé qu'Emile
X... a pratiqué sur celle-ci, de février 1997 à fin octobre
1999, de multiples traitements enchaînés rapidement ayant consisté
en des stimulations d'ovulation créant un risque d'hyperstimulation susceptible
d'entraîner une infirmité permanente, ainsi qu'en des actes d'insémination
artificielle avec sperme du conjoint et de fécondation in vitro, outre
en des examens par coelioscopie ;
que les experts ont indiqué que de tels traitements, relevant d'un acharnement
thérapeutique, ont été mal conduits et inutiles,
dès lors qu'ils n'étaient pas de nature à permettre d'éviter
la survenance de fausses couches répétées, spécialement
en raison de l'absence de bilan étiologique préalable propre à
en établir la cause ;
que les experts ont également estimé que de tels traitements ont
été dangereux pour la patiente, laquelle a été
exposée à un risque vital, en raison de la mise en oeuvre d'une
thérapeutique anticoagulante en début de grossesse, destinée
à en favoriser l'évolution, par l'administration d'héparine
à des doses non reconnues par la profession médicale dans une
telle situation, créant ainsi un risque hémorragique vital, susceptible
de provoquer une embolie pulmonaire mortelle ;
que les premiers juges en ont conclu " qu'Emile X..., en s'abstenant
d'établir le diagnostic approprié, préalablement à
la mise en oeuvre d'actes d'assistance médicale à la procréation,
et en appliquant des traitements inutiles et dangereux ayant exposé directement
Odile Z... à un risque injustifié et immédiat de mort ou
de blessures de nature à entraîner une infirmité permanente,
a manifestement violé de manière délibérée
les obligations particulières de prudence imposées au médecin
par les articles R. 4127-33, R. 4127-37 et R. 4127-40 du code de la santé
publique " ;
Article R4127-33
Le médecin doit toujours élaborer son diagnostic avec le plus grand soin, en y consacrant le temps nécessaire, en s'aidant dans toute la mesure du possible des méthodes scientifiques les mieux adaptées et, s'il y a lieu, de concours appropriés.Article R4127-37
Modifié par Décret n°2010-107 du 29 janvier 2010 - art. 1 et art. 2
I.-En toutes circonstances, le médecin doit s'efforcer de soulager les souffrances du malade par des moyens appropriés à son état et l'assister moralement. Il doit s'abstenir de toute obstination déraisonnable dans les investigations ou la thérapeutique et peut renoncer à entreprendre ou poursuivre des traitements qui apparaissent inutiles, disproportionnés ou qui n'ont d'autre objet ou effet que le maintien artificiel de la vie.II.-Dans les cas prévus au cinquième alinéa de l'article L. 1111-4 et au premier alinéa de l'article L. 1111-13, la décision de limiter ou d'arrêter les traitements dispensés ne peut être prise sans qu'ait été préalablement mise en œuvre une procédure collégiale. Le médecin peut engager la procédure collégiale de sa propre initiative. Il est tenu de le faire au vu des directives anticipées du patient présentées par l'un des détenteurs de celles-ci mentionnés à l'article R. 1111-19 ou à la demande de la personne de confiance, de la famille ou, à défaut, de l'un des proches. Les détenteurs des directives anticipées du patient, la personne de confiance, la famille ou, le cas échéant, l'un des proches sont informés, dès qu'elle a été prise, de la décision de mettre en œuvre la procédure collégiale :
La décision de limitation ou d'arrêt de traitement est prise par le médecin en charge du patient, après concertation avec l'équipe de soins si elle existe et sur l'avis motivé d'au moins un médecin, appelé en qualité de consultant. Il ne doit exister aucun lien de nature hiérarchique entre le médecin en charge du patient et le consultant.L'avis motivé d'un deuxième consultant est demandé par ces médecins si l'un d'eux l'estime utile.
La décision de limitation ou d'arrêt de traitement prend en compte les souhaits que le patient aurait antérieurement exprimés, en particulier dans des directives anticipées, s'il en a rédigé, l'avis de la personne de confiance qu'il aurait désignée ainsi que celui de la famille ou, à défaut, celui d'un de ses proches.
Lorsque la décision de limitation ou d'arrêt de traitement concerne un mineur ou un majeur protégé, le médecin recueille en outre, selon les cas, l'avis des titulaires de l'autorité parentale ou du tuteur, hormis les situations où l'urgence rend impossible cette consultation.
La décision de limitation ou d'arrêt de traitement est motivée. Les avis recueillis, la nature et le sens des concertations qui ont eu lieu au sein de l'équipe de soins ainsi que les motifs de la décision sont inscrits dans le dossier du patient. La personne de confiance, si elle a été désignée, la famille ou, à défaut, l'un des proches du patient sont informés de la nature et des motifs de la décision de limitation ou d'arrêt de traitement.
III.-Lorsqu'une limitation ou un arrêt de traitement a été décidé en application de l'article L. 1110-5 et des articles L. 1111-4 ou L. 1111-13, dans les conditions prévues aux I et II du présent article, le médecin, même si la souffrance du patient ne peut pas être évaluée du fait de son état cérébral, met en œuvre les traitements, notamment antalgiques et sédatifs, permettant d'accompagner la personne selon les principes et dans les conditions énoncés à l'article R. 4127-38. Il veille également à ce que l'entourage du patient soit informé de la situation et reçoive le soutien nécessaire.
Article R4127-40
Le médecin doit s'interdire, dans les investigations et interventions qu'il pratique comme dans les thérapeutiques qu'il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié.
que si, comme le souligne le défenseur d'Emile X..., aucun des textes
visés par le tribunal n'édicte des obligations particulières
de sécurité ou de prudence, au sens de l'article 223-1 du code
pénal, il n'en demeure pas moins que le docteur X... a méconnu
des obligations particulières de prudence et de sécurité
;
que tout d'abord, s'agissant de la coelioscopie, l'article 70 du décret
du 6 septembre 1995 stipule " tout médecin est, en principe,
habilité à pratiquer tous les actes de diagnostic, de prévention
et de traitement, mais, il ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles,
entreprendre ou poursuivre des soins, ni formuler des prescriptions dans des
domaines qui dépassent ses connaissances, son expérience et les
moyens dont il dispose " ; que ces prescriptions ne sont pas de simples
recommandations, mais des règles de droit qui s'imposent à ceux
qui y sont assujettis ; que l'article 70 du décret du 6 septembre 1995
édicte une règle objective qui constitue une obligation particulière
au sens de l'article 223-1 du code pénal ; que seule la qualification
de gynécologue obstétricien autorise les actes chirurgicaux, notamment
les coelioscopies et les hystéroscopies ;
qu'en l'espèce, les experts ont pu relever que le docteur Emile X...
n'avait pas la compétence pour effectuer des actes de chirurgie ; que,
pour pouvoir les faire, il aurait dû être inscrit auprès
du conseil de l'ordre comme spécialiste en gynécologie ou comme
chirurgien ; que le docteur Y... précise que " la coelioscopie est
classée par la CNAM parmi les actes chirurgicaux sanglants ; que, pour
pouvoir les pratiquer, il faut une formation initiale Internat CHU, ce que n'avait
pas le docteur X... " ;
que, nonobstant ce défaut de qualification, il a pratiqué, sur
la personne d'Odile Z..., des coelioscopies ; qu'en ayant entrepris des soins
dépassant ses connaissances, et sans qu'il puisse se prévaloir
de circonstances exceptionnelles, il a sciemment méconnu l'obligation
particulière de prudence et de sécurité que lui impose
l'article 70 du décret du 6 septembre 1995 ;
qu'en outre, qu'Emile X... a délibérément violé
les obligations résultant de l'arrêté du 12 janvier 1999,
relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques en matière
d'aide médicale à la procréation, entré en vigueur
le 28 février 1999 ;
que l'article L. 152-1 du code de la santé publique, issu de la loi n°
94-654 du 29 juillet 1994, dispose que " l'assistance médicale
à la procréation s'entend des pratiques cliniques et biologiques
permettant la conception in vitro, le transfert d'embryons et l'insémination
artificielle, ainsi que toute technique d'effet équivalent permettant
la procréation en dehors du processus naturel ; qu'en l'espèce,
les techniques de stimulation ovarienne entrent dans le cadre de l'assistance
médicale à la procréation et sont donc soumises également
aux dispositions de l'arrêté du 12 janvier 1999 ; que l'article
1-1-1 de l'arrêté du 12 janvier 1999 précise notamment qu'aucun
patient ne peut être pris en charge en vue d'une assistance médicale
à la procréation dans les établissements autorisés
sans cette évaluation préalable par l'équipe pluridisciplinaire
; qu'en l'espèce, aucune équipe pluridisciplinaire n'est intervenue
dans la prise en charge d'Odile Z... ; que cette équipe pluridisciplinaire
a pour objectif de réunir plusieurs praticiens avant de déterminer
quel est le traitement le plus adapté au cas de la patiente ; que cette
équipe pluridisciplinaire aurait pu éviter les traitements inutiles
et dangereux prodigués à Odile Z... : héparine et corticoïdes
pouvant entraîner un risque mortel d'hémorragie ; que de plus,
il lui a administré de la calciparine, pour fluidifier le sang, ce qui
accroît encore le risque d'hémorragie, à laquelle elle est
devenue allergique ; que selon l'article 1-2-1 dudit arrêté : "
l'assistance médicale à la procréation doit toujours répondre
à une demande parentale, pour remédier à une infertilité
" ;
qu'en l'espèce, Odile Z... consultait le docteur X... non pas pour une
infertilité mais du fait qu'elle subissait de nombreuses fausses couches
et pour déterminer les raisons de ces fausses couches et trouver une
solution à ces problèmes ;
qu'aux termes de l'article 1-2-2, certaines indications sont relatives, notamment
toutes celles qui correspondent à une simple hypofertilité, et
doivent être jugées en fonction du bilan diagnostique, de l'âge
des patients et de la durée d'infécondité ; qu'en cas d'indication
relative, il est recommandé d'observer un délai raisonnable avant
la mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation,
délai dont l'importance dépend de l'âge des patients et
du temps écoulé depuis qu'ils essaient d'obtenir une grossesse
; qu'en effet, dans ce cas, la plus grande partie des couples concevront spontanément
; qu'en l'espèce, en l'absence de bilan diagnostique, le docteur X...
ne pouvait être en mesure de constater l'existence d'une de ces conditions
relatives, et a, de plus, commencé l'assistance médicale à
la procréation immédiatement, ceci ayant notamment comme résultat
une hyper stimulation consécutive d'un surdosage ;
que, toujours selon l'article 1-2-2 : " il n'est pas raisonnable de
proposer une fécondation in vitro à un couple dont la femme a
moins de 35 ans sans une durée d'infécondité d'au moins
2 ans " ;
qu'en l'espèce, lorsque Odile Z..., née en 1967, a commencé
à consulter le docteur X... en 1997, elle avait alors 30 ans, que les
techniques de fécondation in vitro n'étaient pas raisonnablement
envisageables pour cette patiente sur deux points : son âge et l'absence
de problème d'infécondité ; que l'article 1-2-2 de l'arrêté
énonce que : " la réalisation d'une assistance médicale
à la procréation chez un couple infertile ne peut être envisagée
sans un bilan comprenant au moins les examens suivants : examen clinique complet
des deux partenaires " ;
qu'en l'espèce, aucun bilan complet n'a été effectué
par le docteur X..., lui permettant de maîtriser parfaitement les produits
à administrer, les doses et le déroulement du traitement ;
que l'article 1-2-4 de l'arrêté énonce que, dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation intraconjugale, il est nécessaire de rechercher des marqueurs biologiques d'infection et, lorsque cela est techniquement possible, d'infectivité par VIH 1, VIH 2, les virus des hépatites B et C et la syphilis chez les deux membres du couple ; que cette recherche doit être réalisée avant la première tentative et, pour les autres tentatives, si le délai depuis la dernière détermination est supérieur à douze mois ; qu'en l'espèce, aucun bilan sanitaire n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de déterminer si un risque de contamination par un virus existait ;
b) le cas de Myriam C..., épouse D... :
que, s'agissant de Myriam C..., épouse D..., les experts judiciaires
ont relevé qu'Emile X... a pratiqué sur celle-ci, de manière
quasi permanente, à la fin de l'année 1997 et jusqu'au mois de
novembre 2000, une stimulation de l'ovulation avec insémination artificielle
avec sperme du conjoint à raison de trente cycles ; qu'ils ont estimé
que de telles stimulations ont été réalisées à
de fortes et excessives posologies exposant la patiente aux risques tant de
grossesse multiple que d'hyperstimulation ovarienne, potentiellement dangereuse
en raison de la possibilité de survenance de torsion ou de rupture ovarienne,
d'épanchement liquidien intra-abdominal ou thoracique, de phlébite
ou d'embolie pulmonaire ;
que, concernant les traitements appliqués postérieurement au 28
février 1999, les experts ont relevé qu'Emile X... s'est abstenu
de procéder à un bilan étiologique complet, propre à
l'établissement d'un diagnostic d'infertilité ou de stérilité
du couple, avant de procéder à des stimulations de l'ovulation
préalables à plusieurs inséminations artificielles avec
sperme du conjoint, et a omis de recourir à la consultation obligatoire
de l'équipe pluridisciplinaire mentionnée à l'article 1-1-1
de l'arrêté précité et compétente pour discuter
au préalable les indications de l'insémination et, plus généralement,
le choix de la technique d'assistance médicale à la procréation
appropriée, ainsi que les modalités de stimulation, de surveillance
de l'ovulation et de prévention du risque de grossesse multiple ;
qu'en conclusion, le collège d'experts concluait au fait que la prise en charge de Myriam D... et le suivi du dossier médical de celle-ci n'ont pas été réalisés conformément aux règles de l'art et aux données actuelles de la science ; que les soins pratiqués et les médicaments prescrits ont constitué un danger pour la femme ;
que le docteur X... a procédé, courant mai 1999, à une coelioscopie sur la personne de Myriam D..., et ce, alors qu'il n'avait pas de compétence pour procéder à cet acte chirurgical, ce qui constitue un manquement délibéré à une obligation particulière de prudence et de sécurité, par violation des dispositions de l'article 70 du décret du 6 septembre 1995 ; que, concernant Myriam D..., le prévenu a délibérément méconnu les dispositions de l'arrêté du 12 janvier 1999 ; que contrairement à l'article 2-1-2 qui précise : " sauf exception, une insémination artificielle par cycle est suffisante, le nombre de cycles d'inséminations ne devrait pas dépasser 6 ; que Myriam D... a notamment subi plus que trente cycles d'insémination en 1997 ;
que contrairement aux dispositions de l'article 1-2-2, selon lesquelles, "
la réalisation d'une assistance médicale à la procréation
chez un couple infertile ne peut être envisagée sans un bilan comprenant
au moins les examens suivants : examen clinique complet des deux partenaires
", aucun bilan complet n'a été effectué par le docteur
X..., lui permettant de maîtriser parfaitement les produits à administrer,
les doses et le déroulement du traitement ; qu'en outre, l'article 1-2-2
énonce : certaines indications sont relatives, notamment toutes celles
qui correspondent à une simple hypofertilité, et doivent être
jugées en fonction du bilan diagnostique, de l'âge des patients
et de la durée d'infécondité ; qu'en cas d'indication relative,
il est recommandé d'observer un délai raisonnable avant la mise
en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation, délai
dont l'importance dépend de l'âge des patients et du temps écoulé
depuis qu'ils essaient d'obtenir une grossesse ; qu'en effet, dans ce cas, la
plus grande partie des couples concevront spontanément ;
qu'en l'espèce, en l'absence de bilan diagnostique, le docteur X... ne
pouvait être en mesure de constater l'existence d'une de ces conditions
relatives, et a, de surcroît, commencé l'assistance médicale
à la procréation immédiatement ;
que, de plus, Myriam D... avait en l'espèce 22 ans et a dû être hospitalisée pour une hyperstimulation ovarienne consécutive au surdosage de médicament ; que l'article 1-2-4 dispose que dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation intraconjugale, ''il est nécessaire de rechercher des marqueurs biologiques d'infection et, lorsque cela est techniquement possible, d'infectivité par VIH 1, VIH 2, les virus des hépatites B et C et la syphilis chez les deux membres du couple ; que cette recherche doit être réalisée avant la première tentative et, pour les autres tentatives, si le délai depuis la dernière détermination est supérieur à douze mois " ; qu'en l'espèce, aucun bilan sanitaire n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de déterminer si un risque de contamination par un virus existait ;
que l'article 1-1-1 de l'arrêté du 12 janvier 1999 dispose notamment qu'aucun patient ne peut être pris en charge en vue d'une assistance médicale à la procréation dans les établissements autorisés sans cette évaluation préalable par l'équipe pluridisciplinaire ; qu'en l'espèce, aucune équipe pluridisciplinaire n'est intervenue dans la prise en charge de Myriam D... ; que cette équipe pluridisciplinaire qui a pour objectif de réunir plusieurs praticiens avant de déterminer quel est le traitement le plus adapté au cas de la patiente, aurait pu éviter les hyperstimulations ovariennes, que, de plus, Myriam D... a dû être hospitalisée pour un épanchement liquidien intra-abdominal du fait des hyperstimulations ;
qu'en conséquence, que la preuve est bien rapportée de manquements délibérés de la part du docteur X... à des obligations particulières de prudence et de sécurité ayant exposé Myriam D..., à tout le moins, à des risques de blessures de nature à entraîner une infirmité permanente ;
c) Le cas de Catherine E... :
que, s'agissant de Catherine F... G..., épouse E..., les experts ont
relevé qu'Emile X... a pratiqué sur celle-ci, courant août
et septembre 2000, une stimulation ovarienne prématurée, en l'absence
de troubles du cycle menstruel et sans établir un diagnostic préalable
suffisant d'infertilité ou de stérilité du couple, et qu'il
a ainsi administré de fortes posologies de produits inducteurs, à
des doses préconisées uniquement pour réaliser une fécondation
in vitro, sur une patiente particulièrement exposée, tant au risque
d'hyperstimulation, en raison de la présence d'ovaires micro-polykystiques,
et de grossesse multiple ou très multiple, que de phlébite potentiellement
mortelle, en raison de l'existence d'un précédent récemment
survenu en février 2000 ;
que de tels risques se sont au surplus réalisés, en suite de la
naissance de quatre enfants prématurés, à vingt-huit semaines
d'aménorrhée, et de la survenance d'une phlébite consécutive
à une hyperstimulation ovarienne grave, ayant nécessité
un long traitement anticoagulant par injection d'héparine pendant six
mois, ainsi qu'une hospitalisation d'une durée de sept jours ; que, quelle
que soit la réalité, invoquée par Emile X..., du désir
d'enfant de la patiente, qui le conteste, les experts ont estimé que
les traitements ainsi appliqués par celui-ci ont gravement exposé
celle-ci à un danger vital ;
qu'Emile X..., en s'abstenant d'établir le diagnostic approprié,
préalablement à la mise en oeuvre d'un traitement de stimulation
ovarienne, sur une patiente particulièrement sujette à un risque
de récidive de phlébite, et en exposant ainsi directement Catherine
F... G..., épouse E... un risque injustifié et immédiat
de mort ou de blessures de nature à entraîner une infirmité
permanente, a manifestement violé de manière délibérée
les obligations particulières de prudence imposées par l'arrêté
du 12 janvier 1999 ;
qu'en premier lieu, et contrairement à l'article 1-1-1 du dit arrêté, aucune équipe pluridisciplinaire n'est intervenue dans la prise en charge de Catherine E..., alors que cette équipe pluridisciplinaire aurait pu adapter le traitement aux risques de phlébite que présentait Catherine E... et tenter de solutionner le trouble de l'ovulation qu'elle présentait avant de commencer les stimulations ovariennes ;
qu'en second lieu, qu'il n'est pas raisonnable de proposer une fécondation in vitro à un couple dont la femme à moins de 35 ans sans une durée d'infécondité d'au moins deux ans, article 1-2-2 ; qu'en l'espèce, Catherine E... avait 27 ans quand elle a commencé à consulter le docteur X... en 1997 ; que les techniques de fécondation in vitro n'étaient pas raisonnablement envisageables pour cette patiente en raison de son âge et de la durée insuffisante d'infécondité Catherine E... ayant eu un premier enfant naturellement ; qu'en troisième lieu, que " la réalisation d'une assistance médicale à la procréation chez un couple infertile ne peut être envisagée sans un bilan comprenant au moins les examens suivants : examen clinique complet des deux partenaires " article 1-2-2 ; qu'en l'espèce, aucun bilan complet n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de maîtriser parfaitement les produits à administrer, les doses et le déroulement du traitement notamment compte tenu des risques de phlébite qu'elle présentait ; qu'en quatrième lieu, que certaines indications sont relatives, notamment toutes celles qui correspondent à une simple hypofertilité, et doivent être jugées en fonction du bilan diagnostique, de l'âge des patients et de la durée d'infécondité ; qu'en cas d'indication relative, il est recommandé d'observer un délai raisonnable avant la mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation, délai dont l'importance dépend de l'âge des patients et du temps écoulé depuis qu'ils essaient d'obtenir une grossesse ; qu'en effet, dans ce cas, la plus grande partie des couples concevront spontanément article 1-2-2 ; qu'en l'espèce, en l'absence de bilan diagnostique, le docteur X... ne pouvait être en mesure de constater l'existence d'une de ces conditions relatives, et a, de plus, commencé l'assistance médicale à la procréation immédiatement, ceci ayant notamment comme résultat une hyperstimulation et une hospitalisation de Catherine E... pour une phlébite ;
enfin que selon l'article 1-2-4, que dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation intraconjugale, il est nécessaire de rechercher des marqueurs biologiques d'infection et, lorsque cela est techniquement possible, d'infectivité par VIH 1, VIH 2, les virus des hépatites B et C et la syphilis chez les deux membres du couple ; que cette recherche doit être réalisée avant la première tentative et, pour les autres tentatives, si le délai depuis la dernière détermination est supérieur à douze mois ; qu'en l'espèce, aucun bilan sanitaire n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de déterminer si un risque de contamination par un virus existait ; f
d) le cas de Malika H..., épouse I... :
que, concernant Malika H..., épouse I..., les experts judiciaires ont relevé qu'Emile X... a pratiqué sur celle-ci, d'avril 1997 à mai 2000, une stimulation de l'ovulation avec inséminations artificielles avec sperme du conjoint, à neuf reprises et quasiment chaque mois ; qu'ils ont estimé que de telles stimulations ovariennes ont été réalisées à de fortes posologies potentiellement dangereuses pour la patiente ;
que, concernant les traitements appliqués postérieurement au 28 février 1999, date d'entrée en vigueur de l'arrêté du 12 janvier 1999 relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques en matière d'assistance médicale à la procréation, les experts ont relevé qu'Emile X... s'est abstenu de procéder à un bilan étiologique complet propre à l'établissement d'un diagnostic d'infertilité ou de stérilité du couple, avant de procéder à des stimulations de l'ovulation préalables à plusieurs inséminations artificielles avec sperme du conjoint, et a omis de recourir à la consultation obligatoire de l'équipe pluridisciplinaire mentionnée à l'article 1-1-1 de l'arrêté précité et compétente pour discuter, au préalable, les indications de l'insémination et, plus généralement, le choix de la technique d'assistance médicale à la procréation appropriée, ainsi que les modalités de stimulation, de surveillance de l'ovulation et de prévention du risque de grossesse multiple ;
que les experts ont indiqué, en outre, que le docteur X... avait pratiqué sur Malika I..., le 30 avril 1999, une hystéroscopie avec coelioscopie, deux actes chirurgicaux réservés aux gynécologues obstétriciens, qualification dont le docteur X... ne peut se prévaloir ; que le prévenu, là encore, n'a pas respecté les dispositions de l'article 1-1-1 de l'arrêté du 12 janvier 1999, dans la mesure où aucune équipe pluridisciplinaire n'est intervenue dans la prise en charge de Malika I... ;
qu'aucun bilan complet n'a été effectué en violation de
l'article 1-2-2 de l'arrêté, selon lequel " la réalisation
d'une assistance médiale à la procréation chez un couple
infertile ne peut être envisagée sans un bilan comprenant au moins
les examens suivants : examen clinique complet des deux partenaires ; qu'au
mépris de l'article 1-2-2 qui dispose que compte tenu de la faible efficacité
des techniques au-delà de 37 ans, il est recommandé de ne prendre
en charge des femmes plus âgées que dans les cas où la fonction
ovarienne a été jugée satisfaisante ; qu'en l'espèce,
il n'est fait mention d'aucun contrôle quant à la fonction ovarienne
de Malika I..., née le 15 janvier 1960 ; que l'arrêté, en
son article 1-2-2 dispose encore que certaines indications sont relatives, notamment
toutes celles qui correspondent à une simple hypofertilité, et
doivent être jugées en fonction du bilan diagnostique, de l'âge
des patients et de la durée d'infécondité ; qu'en cas d'indication
relative, il est recommandé d'observer un délai raisonnable avant
la mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation,
délai dont l'importance dépend de l'âge des patients et
du temps écoulé depuis qu'ils essaient d'obtenir une grossesse
; qu'en effet, dans ce cas, la plus grande partie des couples concevront spontanément
;
qu'en l'espèce, en l'absence de bilan diagnostique, le docteur X... ne
pouvait être en mesure de constater l'existence d'une de ces conditions
relatives, et a, de plus, commencé l'assistance médicale à
la procréation immédiatement, ceci ayant notamment comme résultat
une hyperstimulation ;
qu'enfin, selon l'article 1-2-4 dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation intraconjugale, il est nécessaire de rechercher des marqueurs biologiques d'infection et, lorsque cela est techniquement possible, d'infectivité par VIH 1, VIH 2, les virus des hépatites B et C et la syphilis chez les deux membres du couple ; que cette recherche doit être réalisée avant la première tentative et, pour les autres tentatives, si le délai depuis la dernière détermination est supérieur à douze mois ; qu'en l'espèce, le bilan sanitaire n'a été effectué par le docteur X... que deux ans après la première visite de Malika I... ;
e) le cas de Jeannette J..., épouse K... :
que, s'agissant de Jeannette J... épouse K..., les experts judiciaires
ont relevé qu'Emile X... a appliqué à celle-ci, de courant
1996 à fin août 1997, un traitement aux fins de stimulation ovarienne
suivie d'un déclenchement d'ovulation, ce de manière prématurée
et en l'absence d'un bilan étiologique complet propre à l'établissement
d'un diagnostic d'infertilité ou de stérilité ;
que les experts ont estimé qu'un tel traitement, pratiqué par
l'injection de produits stimulants à des doses surévaluées,
et même supérieures à celles uniquement préconisées
pour une fécondation in vitro, a exposé la patiente aux risques
vitaux et fonctionnels d'hyperstimulation ovarienne, ainsi que de grossesse
multiple ou très multiple ;
que ce dernier risque s'étant, au surplus, réalisé, la
patiente a donné naissance, à vingt-six semaines d'aménorrhée
plus six jours, et après réduction embryonnaire d'un embryon,
à trois enfants très prématurés dont l'un est décédé
à la naissance, vraisemblablement en raison d'une déficience de
la surveillance bactériologique vaginale et urinaire rendue indispensable
par la rupture prématurée d'une membrane amniotique à vingt
semaines d'aménorrhée, et un autre, gravement handicapé,
en raison de la survenance d'une hémorragie intra-ventriculaire droite
et de lésions ischémo-hémorragiques pariétales droites
ayant entraîné une displégie spastique à prédominance
gauche ;
qu'au terme de leurs minutieuses investigations, les experts concluent ainsi : la prise en charge de madame Jeannette K... et le suivi du dossier médical de celle-ci n'ont pas été réalisés conformément aux règles de l'art et aux données actuelles de la science ; que les soins pratiqués et les médicaments prescrits constituent, et ont constitué, un danger vital pour la femme et les foetus ; que là aussi, il convient de rappeler que l'article L. 152-10 du code de la santé publique, issu de la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 dispose que la mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation doit être précédée d'entretiens particuliers des demandeurs avec les membres de l'équipe pluridisciplinaire ; qu'en l'espèce, aucune équipe pluridisciplinaire ne s'est entretenue tant avec Jeannette J... qu'avec son mari, afin de déterminer le traitement le plus adapté au cas de la patiente ;
f) le cas d'Hayat L... ;
que, s'agissant d'Hayat L..., prise en charge par le docteur X..., de juillet
1998 à juillet 2000, les experts ont relevé la stimulation ovarienne
par injection de Gonadotrophine et l'insémination intra-utérine
réalisée sans bilan médical complet des deux conjoints
(il manque notamment la réalisation d'une hystérosalpingographie
préalable à toute stimulation de l'ovulation devant permettre
d'affirmer la perméabilité des trompes), l'absence de renouvellement
des examens sérologiques chez les deux conjoints, la poursuite pendant
un nombre de cycles significatifs d'inséminations avec préparation
du sperme, contrairement aux données législatives figurant dans
l'arrêté du 12 janvier 1999 et relatif aux couples dont le conjoint
présente une séropositivité pour l'hépatite C, la
pratique de cette technique d'assistance médicale à la procréation,
réalisée sans respect de l'obligation au consentement éclairé
et signé des conjoints avant chaque insémination et la réalisation
de cette technique hors d'une prise en charge à 100 % ainsi que pouvait
en bénéficier le couple, soumettant ainsi les pratiques médicales
du docteur X... au contrôle des médecins conseils de l'assurance
maladie, la réalisation d'une coelioscopie par le docteur X... en juin
1999, reposant le problème d'une pratique médicale sans compétence
reconnue ;
qu'il s'en suit qu'Emile X... a délibérément violé
des obligations particulières de prudence et de sécurité,
imposées par l'article 70 du décret du 6 septembre 1995 et de
l'arrêté du 12 janvier 1999 ;
que le tribunal, après avoir constaté de tels manquements, a cru devoir relaxer Emile X..., au motif que si les traitements pratiqués et les médicaments prescrits, ont constitué un danger pour Hayat L..., il n'est cependant pas établi que cette dernière ait été exposée à un risque de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ; que cette motivation ne saurait être adoptée, en ce que la pratique de la coelioscopie, acte chirurgical sanglant, par une personne n'ayant pas compétence à cet égard, est de nature à exposer la patiente à des conséquences mortelles ;
que, dès lors, la cour infirmera, à cet égard, le jugement entrepris en déclarant le docteur Emile X... coupable d'avoir exposé directement Hayat L... à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'obligations particulières de sécurité ou de prudence imposées par les règlements ; qu'en revanche, la cour confirmera, au besoin par substitution de motifs en ce qui concerne les obligations particulières de sécurité et de prudence délibérément méconnues par Emile X..., la culpabilité de ce dernier à l'égard d'Odile Z..., épouse A..., Myriam C..., épouse D..., Catherine E..., Malika H..., épouse I... et Jeannette O..., épouse K... ;
" 1°) alors que le délit de mise
en danger d'autrui n'est caractérisé qu'en cas de violation manifestement
délibérée d'une obligation particulière de sécurité
ou de prudence prévue par la loi ou le règlement ; que l'article
70 du décret du 6 septembre 1995 (devenu R. 4127-70 du code de la santé
publique) ainsi que l'arrêté du 12 janvier 1999, en ce qu'ils se
bornent à ordonner au médecin de dispenser les soins les mieux
adaptés à l'aide du diagnostic le plus précis possible
et n'imposent donc pas un modèle de conduite circonstanciée précisant
très exactement la conduite que les médecins doivent avoir dans
une situation donnée, n'édictent pas d'obligation particulière
de sécurité ou de prudence au sens de l'article 223-1 du code
pénal, qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a méconnu le
sens et la portée de ce texte ;
" 2°) alors que l'article 223-1 réprime le fait d'exposer autrui
à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à
entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ; qu'en se
bornant à affirmer que le docteur X... n'avait pas la compétence
pour accomplir ou n'a pas accompli certains actes (coelioscopie, stimulation
ovarienne, absence de bilan sanitaire avant PMA ou d'évaluation préalable
par l'équipe pluridisciplinaire), sans rechercher si ces actes avaient
effectivement exposé les patientes d'Emile X... à un risque immédiat
de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou
une infirmité permanente, la cour d'appel a privé sa décision
de toute base légale " ;
Attendu que, pour déclarer Emile X... coupable de délits de mise en danger d'autrui, l'arrêt attaqué énonce que, selon les experts, la prise en charge et le suivi du dossier médical des patientes n'avaient pas été réalisés conformément aux règles de l'art et que les soins pratiqués avaient constitué pour elles un danger certain ; que les juges relèvent que les infractions sont constituées dès lors qu'en méconnaissance de l'article L. 2141-1 du code de la santé publique et de l'arrêté du 12 janvier 1999, la réalisation des assistances médicales à la procréation a été faite sans évaluation préalable d'une équipe pluridisciplinaire, sans un bilan clinique complet des deux partenaires et sans un bilan sanitaire et diagnostique ; qu'ils ajoutent que les traitements de stimulations ovariennes réalisées à de fortes posologies pouvaient entraîner un risque mortel d'hémorragie, un risque d'épanchement liquidien intra-abdominal, de phlébite ou d'embolie pulmonaire ; que la cour d'appel déduit de ces constatations qu'Emile X... a, par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, exposé autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a justifié
sa décision au regard des textes susvisés ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
(…)
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Publication : Bulletin criminel 2010, n° 120