Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mardi 19 mai 2009

N° de pourvoi: 08-82710
Non publié au bulletin
Rejet
Statuant sur le pourvoi formé par : X... Maurice,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 6 novembre 2007, qui, pour non-assistance à personne en danger, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, 2 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 223-6, alinéa 2, du code pénal et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le docteur X... coupable de non-assistance à personne en péril, puis l'a condamné à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 2 000 euros ;

"aux motifs que l'arrivée de Nicolas Y... au CHU d'Angers n'a été réalisé qu'à 22 heures 30, après de multiples péripéties qui mettent en cause la prise en considération par M. Z... de l'état réel du blessé ; qu'il est en tout cas établi que Nicolas Y... est arrivé à Angers en état comateux et décérébré ; que le scanner réalisé d'urgence a révélé un volumineux hématome extra-dural du vertex qu'une intervention chirurgicale a été réalisée sans délai par le docteur A..., qui a indiqué que la trépanation a permis l'évacuation d'un important volume de sang veineux du crâne du blessé ; que le pronostic vital était déjà en jeu avant l'opération mais aussi après ;
que trois experts ont été désignés au cours de la procédure aux fins d'examiner Nicolas Y... : le professeur B..., le docteur C... et le professeur D... ; que tous trois décrivent les séquences typiques d'un hématome extra-dural post-traumatique qui se déroulent habituellement en trois phases :
1- perte de connaissance initiale contemporaine du traumatisme initial ;
2- retour à la conscience limitée mais présente ;
3- altération de la conscience avec somnolence, céphalées, vomissement, agitation et troubles du comportement ;
que ces experts disent unanimement que les symptômes de l'hématome extra dural font partie des bases de la médecine d'urgence, que la durée des trois phases est de l'ordre de 6 à 12 heures et que l'absence de diagnostic au début de la troisième phase menace le pronostic vital du blessé ; que ce dernier point est confirmé par le docteur E..., autre expert désigné par le juge d'instruction ; que, surtout, les experts affirment avec force que Nicolas Y... présentait à l'évidence les symptômes ci-dessus décrits et sont d'une particulière dureté à l'égard de leur confrère le docteur X... qui, selon eux, a manqué à ses obligations élémentaires et s'est enfermé dans une position intenable de refus de transfert de son patient, mettant ainsi en danger la vie de celui-ci ;
que la succession des événements, tels qu'ils ressortent de l'ensemble de la procédure, permettent à la cour de retenir comme constant que Nicolas Y... présentait les symptômes décrits par les experts d'un hématome extra-dural et que si, dans les premières heures, les effets de l'ivresse de Nicolas Y... se superposaient à ceux de son traumatisme crânien, le temps s'écoulant n'a laissé apparaître que les seules manifestations d'un hématome extra-dural ;
que le docteur X... tente de replacer les échanges qu'il a eus avec ses confrères médecins anesthésistes ou militaires sur le plan de la docte discussion entre praticiens, cherchant ainsi à montrer que ceux-ci partageaient son avis sur l'absence de nécessité du transfert de Nicolas Y... ; que les visites des médecins militaires (notamment à 21 heures un dimanche soir), l'appel du médecin commandant au Val de Grâce ou du médecin anesthésiste au CHU d'Angers, outre les rapports des infirmières faisant état de signes d'une évolution défavorable du blessé, prouvent que ces praticiens nourrissaient une profonde inquiétude sur le sort du blessé et une opposition à la décision réitérée du docteur X... de ne pas transférer Nicolas Y... à Angers ; que les médecins et autres intervenants n'ont pu ainsi finalement que constater leur impuissance à convaincre le docteur X... qui a pris la décision qu'il était seul à pouvoir prendre ;
que la cour estime que le péril imminent et constant de Nicolas Y... existait déjà le dimanche soir et est devenu patent le lundi matin, lorsque le blessé a présenté les symptômes de la phase 3 ci-dessus décrits ; que c'est ce que confirme le docteur E..., médecin expert désigné par le juge d'instruction, qui indique que le retard de transfert de Nicolas Y... au CHU peut être évalué entre 12 et 24 heures ou que ce patient aurait dû avoir un scanner cérébral dans la nuit du 29 au 30 septembre très tôt le matin ;
que le docteur X..., dans ces deux occasions, s'est obstiné à refuser le transfert de Nicolas Y... dans un centre hospitalier disposant d'un plateau technique et de personnels en mesure de procéder aux examens et aux interventions qu'exigeait l'état du blessé malgré les signes d'une hémorragie extra-durale que présentait celui-ci et les observations insistantes de ses confrères, alors qu'il ne pouvait que savoir qu'il existait pour Nicolas Y... un risque de décès ;
qu'ainsi, à deux reprises, le docteur X..., qui avait conscience du péril grave et actuel ou imminent auquel se trouvait exposé Nicolas Y..., avait-il la possibilité, sans risque pour lui, de porter personnellement secours à celui-ci en ordonnant son transfert et s'est abstenu volontairement de le faire ;
qu'à cela s'ajoute le fait que le docteur X... n'a pas donné des consignes claires et pressantes au docteur Z..., qui ne s'est occupé du transfert de Nicolas Y... qu'à compter de 15 heures le lundi, puis n'a pas été en mesure de répondre précisément aux questions des médecins du CHU d'Angers, laissant ces derniers dans la croyance erronée que le cas ne présentait pas d'urgence, et enfin est parti vaquer à d'autres tâches sans que le blessé soit pris en charge ; que ce n'est qu'à partir de la fin d'après-midi que le docteur F... s'est rendu compte que Nicolas Y... n'était toujours pas transféré, a pris les choses en main et a fait en sorte que le blessé soit conduit en urgence à Angers, au moyen d'un hélicoptère ;

"1°) alors que le délit de non-assistance à personne en péril n'est constitué que lorsque le prévenu, ayant eu conscience du degré de gravité du péril auquel se trouvait exposée une personne, s'est abstenu volontairement de lui porter secours ; que le docteur X... soutenait qu'il n'avait pu avoir conscience de la gravité du péril, auquel Nicolas Y... avait été exposé, du fait de la complexité des symptômes présentés par le patient ; qu'il faisait valoir que l'expert judiciaire avait relevé «une topographie de l'hématome d'évolution sournoise (..) dont habituellement le scénario est beaucoup plus rapide et se déroule en 6 à 12 heures» ; qu'en se bornant à affirmer que les symptômes de l'hématome extra-dural, dont Le Guennec avait été victime, étaient apparus quelques heures après son admission, en dépit de quoi le docteur X... avait persisté dans son refus de transférer le patient au centre hospitalier d'Angers, pour y subir un scanner, malgré les observations insistantes de ses confrères, sans rechercher si le refus du docteur X... d'ordonner le transfert de Nicolas Y... avait pour cause le fait qu'il n'avait pas conscience du péril auquel Nicolas Y... était exposé, en raison des symptômes présentés, ce dont il résultait que le délit n'était pas constitué, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"2°) alors que le docteur X... soutenait qu'il avait rédigé une lettre d'instructions destinée au service de neurochirurgie du centre hospitalier d'Angers, afin d'attirer l'attention de celui-ci sur la gravité de l'état de santé de Nicolas Y..., et qu'il avait chargé le docteur Z... d'organiser le transfert, ce qui constituait la procédure devant être suivie ; qu'en se bornant à affirmer que le docteur X... n'avait pas été suffisamment diligent lors du transfert du patient et n'avait pas informé les médecins du centre hospitalier d'Angers de l'urgence que présentait le cas de Nicolas Y..., sans répondre à ces conclusions du docteur X..., la cour d'appel a exposé sa décision à la censure de la Cour de cassation" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Attendu que Maurice X... se désiste de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les dispositions civiles de l'arrêt ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
DONNE ACTE au demandeur de son désistement partiel ;
REJETTE le pourvoi pour le surplus ;