Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er avril 2005), que le syndicat national de l'agriculture et de la ruralité Verte France, le syndicat départemental de défense du droit des agriculteurs et plusieurs personnes morales et physiques ont demandé la nullité des caisses régionales de crédit agricole mutuel (CRCAM), soutenant que la nature commerciale de l'activité de ces caisses entraînait leur nullité pour objet illicite ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la
demande en nullité des caisses de Crédit agricole alors, selon
le moyen :
1°/ qu'une société civile coopérative ne peut exercer
à titre principal une activité commerciale ; que les caisses de
crédit agricole mutuel sont des sociétés civiles coopératives
; qu'en décidant, pour rejeter la demande de nullité de ces caisses,
qu'elles pouvaient accomplir des actes de commerce tout en ayant une forme civile,
la cour d'appel a violé les articles 1844-10, 1845, alinéa 2,
du code civil, et L. 210-1 du code de commerce ;
2°/ que les conclusions d'appel ont fait valoir, à l'appui de la
demande de nullité des caisses de Crédit agricole, que les modalités
de financement de l'offre d'acquisition du Crédit lyonnais par le Crédit
agricole méconnaissaient les dispositions impératives applicables
aux sociétéscoopératives et que les sociétaires
avaient été spoliés ; qu'en rejetant ce moyen, au seul
motif inopérant qu'il s'agissait d'une opération d'investissement
au service du but poursuivi par le Crédit agricole, sans rechercher si
les dispositions applicables aux coopératives avaient été
méconnues et si les intérêts des sociétaires avaient
été respectés, la cour d'appel a violé l'article
455 du nouveau code de procédure civile ;
3°/ que le juge a le pouvoir de constater qu'une disposition législative
a été tacitement abrogée lorsqu'elle est incompatible avec
des lois postérieures et que les principes qui la justifiaient ont disparu
; qu'en l'espèce, une loi du 18 avril 1922, aujourd'hui codifiée
à l'article L. 512-30 du code monétaire et financier, a soustrait
les caisses de crédit agricole mutuel à l'obligation de s'immatriculer
au registre du commerce ; que cette disposition, incompatible avec l'article
44 de la loi du 15 mai 2001 obligeant toutes les sociétés à
s'immatriculer au registre du commerce, était justifiée par le
fait que ces caisses, sociétés civiles coopératives, avaient
alors pour objet exclusif de faciliter et de garantir les opérations
concernant la production agricole et l'équipement agricole et rural effectuées
par leurs sociétaires ; que diverses dispositions réglementaires
et législatives ont élargi cet objet et autorisé les caisses
de crédit agricole à effectuer de manière générale
des opérations de banque, donc des actes de commerce ; qu'ainsi, les
principes justifiant l'absence d'immatriculation de ces caisses au registre
du commerce et des sociétés ont disparu ; qu'en refusant néanmoins
de constater que l'article L. 512-30 du code monétaire et financier avait
été tacitement abrogé, et donc que les caisses de crédit
agricole mutuel étaient tenues de s'immatriculer au registre du commerce
et des sociétés, la cour d'appel a méconnu l'étendue
de ses pouvoirs et a violé les articles 44 de la loi du 15 mai 2001 et
L. 512-30 du code monétaire et financier ;
Mais attendu, en premier lieu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a retenu à bon droit, que l'exercice d'une activité commerciale par un établissement de crédit relevant du statut de la coopération n'est pas de nature à entraîner sa nullité ;
Attendu, en second lieu, que les dispositions particulières de l'article
L. 512-30 du code monétaire et financier qui dispense de l'immatriculation
au registre du commerce et des sociétés les caisses de crédit
agricole mutuel n'ont pu, en l'absence de dispositions expresses, être
abrogées par l'article 44 de la loi du 15 mai 2001 ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches
;
PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois ;
Publication : Bulletin 2007, IV, N° 246