Abus de fonction

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 10 avril 2002

N° de pourvoi: 00-82029
Non publié au bulletin Rejet

Statuant sur les pourvois formés par :- Z... Frédéric,
- La SOCIETE ALEF GROUP, représentée par son liquidateur judiciaire, civilement responsable et partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 9ème chambre, en date du 6 mars 2000, qui, pour escroqueries en bande organisée, a condamné le premier à 30 mois d'emprisonnement dont 15 mois avec sursis, le deuxième à 1 an d'emprisonnement dont 6 mois avec sursis et mise à l'épreuve, le troisième à 18 mois d'emprisonnement dont 10 mois avec sursis, a déclaré la quatrième civilement responsable et a prononcé sur les intérêts civils ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé par Frédéric Z..., pris de la violation des articles 313-1, 313-2, 132-71 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut, insuffisance et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'escroquerie réalisée en bande organisée ;

" aux motifs que Frédéric Z... a été employé à l'Alef Bank le 16 mai 1990 en qualité de directeur des opérations ; qu'il avait en charge notamment la surveillance des comptes de ses clients ;

qu'il a admis gérer les comptes des sociétés SOCOOMEC et CECD ainsi que les comptes des investisseurs ; que le prévenu a toujours nié avoir renseigné les clients sur la finalité de l'opération et précisé, en toute hypothèse, avoir seulement compris que B... procédait par ailleurs à des investissements hors Alef Bank dont les produits devaient permettre de rembourser les clients ayant déposé des fonds à l'Alef Bank ; qu'il affirme que les sommes perçues des mains de B... l'ont été à titre de rémunération de conseils donnés sur des opérations totalement extérieures à cette affaire ; qu'il n'apporte cependant pas la moindre preuve de ses allégations, ayant d'ailleurs admis devant le magistrat instructeur " que cet argent était arrivé à un moment donné où c'était pour moi un plus dans un contexte familial et professionnel qu'Henri B... connaissait " ; que le prévenu a admis qu'il avait vu les sous-comptes des investisseurs se vider au profit du compte central CECD, les sommes ainsi transférées ayant servi à payer les dépenses de fonctionnement du bureau de Paris, l'achat d'une voiture et d'une maison au bénéfice de Henri B... ; qu'il est indéniable qu'il était ainsi en mesure de constater qu'aucun autre investissement que celui d'un classique dépôt à terme n'était opéré avec ces fonds ; que malgré la connaissance qu'il avait de ses malversations, il n'en a pas avisé ses clients ; q'il a fait en sorte que les clients de B... soient reçus le cas échéant dans les locaux de la banque, ce qu'il ne conteste pas, mais indique que c'était en accord avec ses supérieurs ; que le 6 février, il a obtempéré à l'ordre de virement donné par B... , de transfert des fonds de Claude G... sur le compte de CECD, alors que depuis le 31 janvier 1997, le bureau de représentation de celle-ci avait fermé ses portes et que B... n'en était plus l'animateur ; qu'il est constant qu'il en a eu connaissance, car seront découvertes à son domicile, lors de la perquisition, les diverses correspondances de CECD relatives à la fermeture du bureau de Paris ; qu'il se contente d'indiquer que c'est par erreur qu'il détenait lesdits documents à son domicile ; que, devant les services de police, il a reconnu que les intérêts annoncés par B... à ses clients étaient de 400 %, qu'il estimait que ce n'était pas crédible mais qu'il s'agissait d'un taux maximal adossé à une rémunération garantie de 8 % ;

qu'il a toujours prétendu ignorer que les sociétés SOCOOMEC et CECD émettaient des bons de caisse ;

que ses déclarations sont en contradiction avec les termes de la lettre à en-tête de SOCOOMEC, en date du 21 février 1996, adressée à l'Alef Bank qui disposait que SOCOOMEC " confirmait que, pour garantir un intérêt pour les clients qui déposeront des fonds dans notre compte, nous verserons le montant des intérêts correspondants dans un compte séquestre, de façon à ce que la banque Alef puisse avaliser le bon de caisse représentant le principal et les intérêts, qui sera émis par SOCOOMEC ", lettre au bas de laquelle le prévenu inscrivait " bon pour accord dans la mesure où les fonds (capital et intérêts) sont bloqués ", suivi de sa signature et du cachet de la banque Alef ; que le prévenu, professionnel de la banque, ne pouvait dès lors ignorer que les opérations menées sous couvert de SOCOOMEC et de CECD l'avaient été dans le cadre d'entreprises exerçant sur le territoire national en infraction bancaire ;

que le prévenu a porté sa signature en qualité de témoin sur la curieuse convention signée entre une société " EASTWOOD TRUST " et la société PSD de l'investisseur Dubois, accord censé être signé à Londres, alors qu'il le sera à Paris ; qu'au sujet de la société SODIBAC, il a prétendu que B... lui avait demandé d'apparaître comme associé, mais qu'il s'agissait d'une prise de participation fictive effectuée par B... en 1996 pour élargir le capital à d'autre personne que sa famille ; qu'a été retrouvé à son domicile un document daté du 19 juillet 1995, en langue anglaise signé de MM. C..., contrôleur financier d'Alef Bank, Z..., Lacroix et B... ; qu'il a indiqué " que cela signifiait que B... devait les intéresser à toutes opérations réalisées par lui et transitant par la banque ; qu'il s'agissait d'un contrat entre personnes privées, et que cela indiquait qu'ils étaient liés à titre personnel envers B... , mais que cela n'avait jamais rapporté " ; que l'ensemble de ces actes tend à démontrer son implication dans les affaires menées par B... ; qu'en juin et juillet, l'attention de la banque avait été attirée défavorablement sur le représentant de CECD, en l'espèce Henri B..., qui à cette date avait initié une opération de présentation de faux certificats de dépôts d'une valeur de 6 millions de dollars, la banque lui facturant, à cet effet, une note de frais de 50 000 francs, ce qui aurait dû à tout le moins amener Frédéric Z... à se montrer particulièrement vigilant sur le fonctionnement des comptes ouverts par B... et sur lesquels aboutissaient de fortes sommes ; qu'il résulte de la procédure que la banque Alef manquait de fonds propres et avait fait l'objet de deux rapports défavorables de la Commission bancaire en 1994 et 1996 qui lui demandait de provisionner et d'augmenter ses fonds propres ; qu'il n'est pas contredit par le prévenu que le compte CECD était le compte le plus important de la banque et permettait à celle-ci de continuer à se maintenir et pour lui de conserver son emploi ; que les investisseurs ont reconnu que leur confiance était née notamment de l'intervention d'une banque pour recueillir leurs fonds, sous forme d'un chèque de banque, la banque Alef garantissant, à leurs yeux, le sérieux de l'opération ; que l'implication de Frédéric Z... était déterminante dans la réalisation de l'escroquerie mise en place par Henri B... ;

" alors que, d'une part, l'intention frauduleuse, élément constitutif du délit d'escroquerie, ne peut être tenue pour établie à l'égard du représentant d'une banque, même si le caractère irrégulier de certaines opérations ne lui avaient pas échappé, dès lors qu'il se trouvait dans un état de subordination vis-à-vis de ses supérieurs ne lui permettant pas de s'y opposer et qu'il est constaté qu'il n'a tiré pour profit essentiel de ces opérations que l'avantage de conserver son emploi'; qu'ainsi l'arrêt attaqué n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a méconnu les textes susvisés ;

" alors que, d'autre part, l'escroquerie ne peut résulter que d'un acte positif et non d'une simple abstention ; qu'en retenant, pour justifier la condamnation du prévenu, qu'il était en mesure de constater qu'aucun autre investissement que celui d'un classique dépôt à terme n'était opérée avec les fonds déposés et que, malgré la connaissance qu'il avait de ces malversations, il n'en a pas avisé ses clients, dont l'arrêt attaqué constate par ailleurs la légèreté et l'appétit de lucre, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

" alors qu'en outre, le délit d'escroquerie n'est établi que si le prévenu a participé à des manoeuvres frauduleuses déterminantes de la remise et antérieures à celle-ci ; qu'en se limitant à retenir que son implication était déterminante dans la réalisation de l'escroquerie mise en place par Henri B..., sans constater que l'intervention du prévenu avait précédé la remise des fonds par les investisseurs, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

" alors qu'en déclarant le prévenu coupable d'escroquerie en bande organisée, sans constater l'existence d'une préméditation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision " ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'escroquerie en bande organisée dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Sur le second moyen de cassation, proposé par Frédéric Z..., pris de la violation des articles 313-1, 313-2, 132-71 du Code pénal, 2 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué, statuant sur l'action civile, a confirmé le jugement déféré en ce qu'il a condamné Frédéric Z... à payer à : Jean-Paul A... 1 120 000 francs à titre de dommages-intérêts et 1 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, Guy D... 520 000 francs à titre de dommages-intérêts et 1 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, Bernard Y... 820 000 francs à titre de dommages-intérêts et 2 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; la société Serge Dubois 2 500 000 francs à titre de dommages-intérêts et 2 000 francs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

" aux motifs que la Cour estime que les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice direct et actuel résultant pour les parties civiles des agissements frauduleux du prévenu ; qu'en conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions civiles en ce qui les concerne ;

" alors que, d'une part, le jugement déféré a condamné solidairement Frédéric Z..., B... E... et I...à payer à Jean-Paul A... la somme de 1 120 000 francs à titre de dommages-intérêts ; à Guy D... la somme de 520 000 francs à titre de dommages-intérêts ; à la société Patrimoine Serge Dubois la somme de 2 500 000 francs à titre de dommages-intérêts ; qu'ainsi, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs ;

" alors, que d'autre part, le jugement déféré a condamné solidairement Frédéric Z..., B... E... et I... à payer à Bernard Y... la somme de 520 000 francs à titre de dommages-intérêts ; qu'ainsi la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs " ;

Attendu, d'une part, que la condamnation, par confirmation du jugement, de Frédéric Z... au paiement de dommages-intérêts aux parties civiles entraîne implicitement l'application de la solidarité avec ses coprévenus non appelants et, d'autre part, que la fixation du préjudice subi par Bernard Y... dans le dispositif de l'arrêt à la somme de 820 000 francs, alors que le jugement confirmé l'avait fixé à 520 000 francs, ne résulte que d'une erreur matérielle ne pouvant donner ouverture à cassation ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le moyen additionnel de cassation, proposé par Frédéric Z..., pris de la violation des articles 1382 et 1384, alinéa 5, du Code civil, 2, 591 et 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a condamné le prévenu, Frédéric Z..., déclaré coupable d'escroquerie en bande organisée, à payer seul, d'une part, et solidairement, d'autre part, avec d'autres prévenus, des dommages-intérêts aux parties civiles ;

" aux motifs propres et adoptés que, compte tenu de la déclaration de culpabilité intervenue à l'encontre du prévenu, les constitutions de partie civile sont recevables et fondées à son encontre ;

" alors que n'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le prévenu, Frédéric Z..., directeur des opérations au sein de la société " Alef Bank ", avait la qualité de préposé de cette banque, que les actes d'escroquerie qu'il a accomplis l'ont été dans le cadre de ses fonctions-pendant les heures de travail, sur les lieux de son travail, au moyen des documents mis à sa disposition par son employeur-qu'il ne peut être valablement soutenu qu'il ait, en ouvrant des comptes, reçu des fonds et procédé à des virements sur ordre d'Henri B..., agi hors de ses fonctions, s'agissant là de pures opérations bancaires ; qu'en l'état de ces constatations, qui établissent que le prévenu n'avait pas excédé les limites de la mission dont l'avait chargé son employeur, la cour d'appel ne pouvait déclarer le prévenu responsable au plan civil, sans méconnaître les textes susvisés " ;

Attendu que Frédéric Z..., préposé de la société Alef Group, ne saurait faire grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à indemniser les victimes, dès lors que, reconnu coupable d'avoir intentionnellement commis une infraction ayant porté préjudice à un tiers, il a engagé sa responsabilité civile à l'égard de celui-ci ;

Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé par la société Alef Group, pris de la violation des articles 1384, alinéa 5 du Code civil, 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré la société Alef Group civilement responsable en qualité de commettant de Frédéric Z... et par conséquent, l'a condamnée in solidum au paiement des dommages-intérêts alloués aux parties civiles ;

" aux motifs qu'il est indéniable que Frédéric Z..., directeur des opérations au sein de la société Alef Bank, avait la qualité de préposé de ladite banque, que les actes d'escroquerie qu'il a accomplis l'ont été dans le cadre de ses fonctions-pendant les heures de travail, sur le lieu de son travail, au moyen des documents mis à sa disposition par son employeur " remises de chèques "-, qu'il ne peut être valablement soutenu qu'il ait, en ouvrant des comptes, reçu des fonds et procédé à des virements sur ordre d'Henri B..., agi hors de ses fonctions, s'agissant là de pures opérations bancaires ; qu'il ne peut se déduire de la légèreté, voire de l'appétit de lucre marqué par les victimes, la connaissance par celles-ci de ce que le préposé de la banque aurait dépassé ses fonctions ;

qu'il convient de rappeler que les victimes ont toutes indiqué qu'elles avaient été rassurées quant à la crédibilité de l'opération par le fait qu'elles déposaient leur argent sur un compte ouvert à leur nom dans une banque et qu'au surplus, il leur était réclamé un chèque de banque, ce qui ajoutait au sérieux des intervenants ;

" que les évidentes dissimulations opérées par Frédéric Z..., notamment les paiements en espèces à son profit, la dissimulation de certains documents, ne suffisent pas à établir qu'il ait agi en dehors de ses fonctions, celui-ci ayant d'ailleurs toujours indiqué qu'il n'était pas personnellement intervenu auprès des victimes pour vanter les placements mirifiques proposés par Henri B..., ce qui ne permettait pas ainsi aux victimes de se méfier de son intervention en qualité de banquier ; que les personnes tenues de répondre du fait d'autrui au sens de l'article 1384, alinéa 1, du Code civil ne peuvent s'exonérer de la responsabilité de plein droit résultant de ce texte en invoquant qu'elles n'ont pas commis de faute ; que, si la responsabilité du civilement responsable ne peut être engagée devant le juge pénal sur le fondement d'une faute personnelle, la Cour observe, sans engager la responsabilité du civilement responsable, qu'en dépit d'évidentes dissimulations de son préposé, l'Alef Bank, aujourd'hui société Alef Group, a failli à son devoir de vigilance sans exiger de son préposé un contrôle plus serré des comptes de la CECD, notamment en raison de l'incident relatif à la présentation de faux certificats de dépôt à Djanel H..., président de la banque, et de la connaissance évidente qu'avait M. C..., à raison de ses fonctions de contrôleur financier, des opérations effectuées sur le compte des victimes et ceux des sociétés SOCOOMEC et CECD ;

" alors que, d'une part, l'escroquerie poursuivie ayant consisté, selon les énonciations mêmes des juges du fond, dans le fait pour le représentant de diverses sociétés camerounaises d'obtenir d'hommes d'affaires avisés la remise de fonds avec mandat donné à lui-même ou à des tiers de les investir dans de soi disant projets liés au développement d'infrastructures au Cameroun en promettant en contrepartie du versement d'intérêts à un taux parfaitement exorbitant, pour, en réalité, dilapider ces fonds sans procéder à aucun investissement ; il s'ensuit que la circonstance que le directeur des opérations d'une banque où ont ainsi transité les fonds remis par les investisseurs ait pu être associé à cette opération frauduleuse constituait en l'espèce un acte manifestement étranger à ses fonctions, excluant que la banque puisse être retenue en qualité de civilement responsable, les opérations bancaires régulièrement accomplies par ce préposé dans le cadre de ses attributions n'étant pas à l'origine du préjudice invoqué par les parties civiles ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

" que, d'autre part, un commettant ne pouvant être déclaré civilement responsable de son préposé en cas d'agissements fautifs de celui-ci dès lors que la victime n'a pu légitimement croire que ledit préposé agissait dans le cadre de ses fonctions, la Cour, qui, tout en reconnaissant la légèreté et l'appétit de lucre marqué par les victimes, s'est abstenue de prendre en considération les arguments péremptoires développés par la société Alef Group quant à la qualité d'hommes d'affaires avisés des différentes parties civiles excluant qu'elles n'aient pu avoir conscience du caractère anormal des opérations auxquelles ils se livraient car conclues dans des conditions et à des fins manifestement exorbitantes par rapport à des opérations bancaires classiques, n'a pas, en l'état de cette insuffisante de motifs et de ce défaut de réponse, légalement justifié sa décision au regard de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil ;

" qu'enfin, la Cour ne pouvait, sans davantage entacher sa décision tout autant de contradiction que d'insuffisance de motifs, après avoir rappelé que la responsabilité du civilement responsable ne pouvait être engagée devant le juge pénal sur le fondement d'une faute personnelle, relever une prétendue défaillance de l'établissement bancaire Alef Bank, aujourd'hui société Alef Group, dans son devoir de vigilance à l'égard de son préposé, au demeurant contesté par la société Alef Group dans ses conclusions délaissées, exposant que toute anomalie dans le fonctionnement des comptes avait entraîné de sa part la réaction qui s'imposait " ;

Sur le deuxième moyen de cassation, proposé par la société Alef Group, pris de la violation des articles 1146 et suivants et 1384, alinéa 5, du Code civil, 2, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué, statuant sur le fondement de l'article 1384 du Code civil, a déclaré recevables les demandes des parties civiles formées à l'encontre de la société Alef Group prise en qualité de civilement responsable et a déclaré cette dernière tenue in solidum à indemniser lesdites parties civiles de l'intégralité de leur préjudice ;

" aux motifs que le juge pénal n'est pas compétent pour appliquer les règles de la responsabilité contractuelle, ce qui lui permet d'écarter les clauses exonératoires de la responsabilité valable en matière contractuelle ; qu'en effet, aucune disposition de la loi ne permet de réduire à raison d'une faute de la victime le montant des réparations civiles dues à celle-ci par l'auteur d'une infraction intentionnelle contre les biens, la partie civile étant dès lors en droit d'obtenir du civilement responsable avec l'auteur de l'infraction la réparation intégrale de son préjudice sans que sa prétendue négligence puisse lui être opposée ; qu'en effet, la partie civile, victime des agissements du prévenu reconnu coupable d'une infraction, peut demander une réparation intégrale de son dommage à l'un ou l'autre ou même à l'un et l'autre, ceux-ci étant tenus in solidum ; qu'il convient en conséquence de déclarer la société Alef Group, anciennement Alef Bank, civilement responsable des agissements de son préposé Frédéric Z... ;

" alors qu'en déclarant que Frédéric Z... avait, en sa qualité de directeur des opérations au sein de la société Alef Bank, agi dans l'exercice de ses fonctions en ouvrant des comptes et en recevant des fonds de la part des parties civiles et en procédant à des virements sur instruction des personnes auxquelles ces mêmes parties civiles avaient donné mandat, la Cour a, par là même, implicitement mais nécessairement, reconnu l'existence de relations contractuelles entre les parties civiles et cet établissement bancaire dépositaire de leurs fonds d'où il suit que ;

" d'une part, le dommage invoqué par les parties civiles et tenant à une non restitution de leurs fonds mettait en jeu la responsabilité contractuelle de la banque de sorte que le juge pénal se trouvait radicalement incompétent pour en connaître et ne pouvait en l'espèce prononcer de condamnation à l'encontre de la société Alef Group au profit des parties civiles ;

" que, d'autre part, en tout état de cause, à partir du moment où la Cour se reconnaissait implicitement mais nécessairement la faculté d'indemniser les parties civiles à raison d'un préjudice consistant pour ce qui serait à l'encontre de la banque une méconnaissance de ses obligations contractuelles, elle ne pouvait dès lors se refuser à prendre en considération les graves fautes commises par les parties civiles et de statuer sur leur effet exonératoire quant à l'éventuelle responsabilité de la société Alef Group " ;

Sur le troisième moyen de cassation, proposé par la société Alef Group, pris de la violation des articles 1384, alinéa 5, du Code civil, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué, après avoir déclaré la société Alef Group civilement responsable, en sa qualité de commettant, de Frédéric Z..., l'a condamnée in solidum à la totalité des réparations allouées aux parties civiles ;

" aux motifs qu'aucune disposition de la loi ne permet de réduire à raison d'une faute de la victime le montant des réparations civiles dues à celle-ci par l'auteur d'une infraction intentionnelle contre les biens, la partie civile étant dès lors en droit d'obtenir du civilement responsable, avec l'auteur de l'infraction, la réparation intégrale de son préjudice, sans que sa prétendue négligence puisse lui être opposée ; qu'en effet, la partie civile, victime des agissements du prévenu, reconnu coupable d'une infraction, peut demander réparation intégrale de son dommage à l'un ou l'autre ou même à l'un et l'autre, ceux-ci étant tenus in solidum ; qu'il convient en conséquence de déclarer la société Alef Group, anciennement Alef Bank, civilement responsable des agissements de son préposé Frédéric Z... ;

" alors que la prohibition de tout partage de responsabilité entre la victime d'une infraction volontaire aux biens et l'auteur de celle-ci ayant pour finalité de s'opposer à ce que le prévenu puisse conserver en tout ou partie le produit de son infraction, il s'ensuit qu'elle ne saurait dès lors être opposée au commettant du prévenu dont la responsabilité n'est pas fondée sur une faute, de sorte qu'en déclarant la société Alef Group tenue in solidum en sa qualité de commettant à réparer l'intégralité du dommage des parties civiles, en se refusant à tenir compte des graves imprudences commises par ces dernières et d'en déterminer l'incidence sur le quantum des réparations mises à la charge de la société Alef Group, la Cour a entaché sa décision d'insuffisance " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Frédéric Z..., directeur d'exploitation de la banque Alef Group, a été condamné pour avoir utilisé les comptes de cette banque afin de se faire remettre des sommes d'argent par les victimes ;

Attendu que, pour déclarer la société demanderesse civilement responsable du fait de son préposé, et la condamner avec lui à réparer le préjudice subi par les parties civiles, la cour d'appel relève que les actes d'escroquerie commis par Frédéric Z... " l'ont été dans le cadre de ses fonctions, pendant les heures de son travail, sur les lieux de son travail, au moyen de documents mis à la disposition de son employeur " ; qu'elle ajoute qu'aucune disposition de la loi ne permet de réduire, à raison d'une faute de la victime, le montant des réparations civiles dues à celle-ci par l'auteur d'une infraction intentionnelle contre les biens ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations la cour d'appel a justifié sa décision ;

Que, dès lors, les moyens ne sauraient être accueillis ;

Sur le quatrième moyen de cassation, proposé par la société Alef Group, pris de la violation des articles 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt confirmatif a débouté la société Alef Group de sa constitution de partie civile contre Henri E... dit B... ;

" aux motifs que la société Alef Group, partie civile appelante, sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande la condamnation d'Henri E... à lui verser la somme de 1 franc à titre de dommages-intérêts... Que cette demande est recevable mais qu'elle sera déboutée comme non fondée, la partie civile ne justifiant pas d'un préjudice causé directement par les délits imputables à Henri E... ;

" alors qu'aux termes de l'article 3 du Code de procédure pénale, l'action civile étant recevable pour tout chef de dommage découlant des faits objets de la poursuite, le fait pour un établissement bancaire que ses structures et son personnel aient été utilisés par l'un de ses clients pour mettre en oeuvre à son insu une entreprise frauduleuse destinée à s'approprier les fonds de certains de ses autres clients, en ce qu'il porte nécessairement atteinte à la réputation professionnelle dudit établissement, constitue bien un préjudice découlant directement des faits d'escroquerie retenus à l'encontre de l'auteur de ce montage, de sorte qu'en déclarant, sans aucunement en justifier, que la société Alef Group ne justifiait pas d'un préjudice découlant directement des infractions imputables à Henri E..., la Cour a violé le texte susvisé " ;

Attendu qu'il ne peut être reproché à la cour d'appel d'avoir débouté la société Alef Group de sa constitution de partie civile, dès lors qu'elle a souverainement apprécié que cette partie civile ne justifiait pas d'un préjudice causé directement par les délits imputables à Henri E... dit B... ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

 

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 6 avril 2016

N° de pourvoi: 14-85501
Non publié au bulletin Cassation partielle

Statuant sur les pourvois formés par :- M. Jean-Pierre X...
- Mme Elisabeth B..., civilement responsable,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 2 juillet 2014, qui, pour faux et usage, en récidive, a condamné le premier, à dix-huit mois d'emprisonnement dont quatorze mois avec sursis et mise à l'épreuve, à une interdiction professionnelle définitive, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X..., employé à partir du 17 mars 2008 par Mme Élisabeth B..., avocat au barreau de Rodez, en qualité de rédacteur juridique polyvalent, a transmis
le 13 mars 2008 à M. Michel Y..., et le 18 avril 2008 à M. Christian Z...,
exerçant tous les deux l'activité de promoteur immobilier, de fausses offres d'achat, censées émaner d'investisseurs liés à l'association AGC 12 CER France Aveyron, en utilisant l'en-tête de cet organisme lors de la confection de ces documents ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé par M. X..., pris de la violation des articles 141-1 du code pénal, L. 261-15 al 1er du code de la construction et de l'habitation, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé par M. X..., pris de la violation des articles 331-1 du code pénal, 1172 du code civil, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

Sur le troisième moyen de cassation proposé par M. X..., pris de la violation des articles 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

Sur le quatrième moyen de cassation proposé par M. X..., pris de la violation des articles 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

Sur le second moyen de cassation proposé pour Mme B..., pris de la violation des articles 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, contradiction de motifs, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que, pour condamner Mme B... en qualité de civilement responsable, la cour d'appel a au préalable déclaré M. X...coupable de faux et usage de faux en récidive ;

" aux motifs que pour échapper aux conséquences des altérations de la vérité M. X...se prévaut de la nature pré-contractuelle des documents et de leur absence d'effets juridiques dès lors qu'ils sont assortis de conditions suspensives irréalisables ; qu'il est constant, d'une part, que l'altération de la vérité est susceptible d'atteindre un avant contrat et, d'autre part, que la nullité du titre altéré n'est de nature à faire obstacle à la qualification de faux que lorsqu'elle est constatée, s'agissant en l'espèce et conformément aux dispositions de l'article 1172 du code civil d'une nullité relative ; que force est de constater que ni les documents ni les opérations immobilières n'ont à ce jour été annulés ; que si le contrat de réservation « Mazars » mentionne que le vendeur doit garantir que l'opération qualifiée de « rénovation lourde » entre dans le champ d'application de la TVA, il n'est pas établi avec certitude que ladite opération n'était pas adaptée à une défiscalisation, alors même qu'il résulte d'un courrier non daté qu'il a adressé à Me C...que M. X...s'interrogeait pour savoir comment appliquer à l'opération l'article 257 du CGI et s'engageait à faire une étude fiscale afin de mesurer les risques compte tenu de la réponse imprécise faite le 20 février 2008 à Me D... par le Cridon ; qu'il n'est d'ailleurs pas démontré que les travaux envisagés ne correspondaient pas à la définition donnée par la Cour de cassation pour être regardée comme des opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles entrant dans le champ d'application de l'article 257-7 du CGI, lesquels, entrepris sur des immeubles existants doivent avoir pour effet soit d'apporter une modification importante à leur gros oeuvre soit d'accroître leur volume ou leur surface soit d'avoir consisté en des aménagements internes qui, par leur importance, équivalent à une véritable construction ; que l'offre d'achat Grefeuille comporte effectivement deux conditions suspensives tenant l'une à la capacité des parties à contracter au jour de la signature des actes authentiques et l'autre à l'obtention d'un permis de construire valant autorisation de diviser ; que la première condition était d'emblée irréalisable par le seul fait de la mention d'une partie dépourvue de toute existence, mention imputable à M. X...qui ne peut s'en prévaloir comme un moyen de défense ; que le fait que l'obtention d'un permis de lotir était impossible dans la zone de situation de l'immeuble est contredit par la délivrance d'un permis de construire cinq pavillons et sa prorogation postérieurement à cette offre et ce d'autant que l'opération de « copropriété horizontale » a été validée par le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand certes dans une décision non définitive mais qui suffit en l'état à considérer que l'opération n'a pas été annulée ;

" alors qu'un acte nul n'a aucun effet juridique et n'est donc pas de nature à causer un préjudice, de sorte qu'il ne peut être qualifié de faux ; que la vente en l'état futur d'achèvement peut être précédée d'un contrat préliminaire par lequel, en contrepartie d'un dépôt de garantie effectué à un compte spécial, le vendeur s'engage à réserver à un acheteur un immeuble ou une partie d'immeuble ; que l'article 226-15 du code de la construction et de l'habitation dispose que toute autre promesse d'achat est nulle ; qu'en l'espèce, M. X...a émis, par deux fois, des promesses d'achat (Grefeuille et Mazars) qui ne respectaient pas les dispositions précitées ; qu'il en résultait que ces promesses étaient nulles et de nul effet, aucun dépôt de garantie n'ayant été versé sur un compte spécial, de sorte que de tels actes étaient insusceptibles de causer un préjudice ; qu'ainsi la cour d'appel ne pouvait qualifier les deux promesses de faux " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable des délits de faux et usage, l'arrêt attaqué énonce, notamment, que le faux en tant qu'infraction formelle est constitué dès lors qu'il est de nature à causer un préjudice qui peut n'être qu'éventuel, que la mention du CER France Aveyron comme partie prenante dans un programme immobilier ou comme ayant un lien avec M. X...est susceptible de générer pour cette association un préjudice au moins moral lié à une atteinte à son image, et que la connaissance qu'avait M. X...d'altérer la vérité dans ces écrits dont il a fait usage suffit à caractériser l'intention frauduleuse, s'agissant en outre d'un professionnel du droit et de la rédaction d'actes juridiques ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que, s'agissant de faux matériels occasionnant un préjudice à la personne dont ils sont censés émaner, il n'importe qu'ils aient eu ou non pour objet ou pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant eu des conséquences juridiques, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Mais sur le premier moyen de cassation proposé pour Mme B..., pris de la violation des articles 1384, alinéa 5, du code civil et 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que la cour d'appel a déclaré Mme B...civilement responsable de son préposé M. X..., renvoyant l'examen de l'affaire sur intérêts civils à une audience ultérieure ;

" aux motifs que Mme B..., employeur de M. X...à compter du 17 mars 2008, doit être déclarée civilement responsable de son proposé conformément à l'article 1384 du code civil, dès lors que, le courrier et l'offre d'achat du 18 avril 2008 ont été envoyés du lieu de travail et grâce aux moyens mis à disposition par l'employeur et que la rédaction d'actes n'était pas étrangère aux attributions de M. X..., engagé comme rédacteur juridique polyvalent ;

" 1°) alors que la responsabilité objective des commettants du fait de leurs préposés suppose l'existence d'une faute du préposé, d'un dommage certain, d'un lien de causalité entre ce dommage et la faute ainsi que d'un lien avec les fonctions exercées par le préposé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré Mme B... civilement responsable de son préposé en se bornant à constater la faute de M. X...et le lien de celle-ci avec ses fonctions, mais n'a pas relevé l'existence d'un préjudice, énonçant même que l'appréciation de celui-ci serait examiné lors d'une audience ultérieure ; qu'en statuant ainsi, sans relever l'existence, à tout le moins dans son principe, d'un dommage certain, lequel ne se confond pas avec l'élément constitutif de l'infraction de faux qui admet l'existence d'un dommage purement éventuel, la cour d'appel n'a pas constaté, comme elle le devait, les conditions d'application de l'article 1384, alinéa 5, du code civil ;

" 2°) alors que la responsabilité civile du commettant ne saurait être engagée dans le cas où son préposé a commis un abus de fonctions en agissant hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions ; que la seule utilisation d'un moyen de communication appartenant à l'employeur ne peut suffire à établir que le préposé a agi dans le cadre de ses fonctions ; qu'en l'espèce, pour juger que Mme B... devait être déclarée civilement responsable des agissements délictueux de M. X..., la cour d'appel a relevé que le courrier et l'offre d'achat du 18 avril 2008 avaient été envoyés du lieu de travail et grâce aux moyens mis à sa disposition de l'employeur ; que cependant, le seul lien avec Mme B... était l'envoi du faux depuis le fax du cabinet, ce qui n'était pas suffisant pour retenir que M. X...ait agi dans le cadre de ses fonctions, d'autant que la cour d'appel avait relevé que tous les protagonistes du dossier avaient attesté que Mme B... était étrangère à cette affaire, qu'elle n'était à aucun moment intervenue lors de l'opération immobilière dont elle ignorait jusqu'à l'existence, M. X...ayant agi sans son autorisation, à des fins étrangères à ses attributions, puisqu'il avait été engagé comme rédacteur d'actes et non comme intermédiaire en immobilier ; qu'en écartant l'abus de fonctions et en retenant la responsabilité civile de Mme B..., la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

" 3°) alors qu'en toute hypothèse, la responsabilité du commettant ne peut être engagée lorsque la victime ne pouvait ignorer que le préposé agissait en dehors de ses fonctions ; qu'en l'espèce, Mme B... rappelait dans ses conclusions que M. Z..., dirigeant des sociétés ATC et MC3P, avait noué des relations avec M. X...à compter de l'année 2007, bien avant son embauche au sein du cabinet B..., et que, pour les projets immobiliers au cours desquels M. X...avait établi des faux, le seul et unique interlocuteur était M. X..., Mme B... n'étant intervenue à aucun moment du dossier ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il lui était demandé si M. Z..., à titre personnel et ès-qualités de dirigeant social, ne pouvait ignorer que M. X...agissait hors de ses fonctions, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision " ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 1384, alinéa 5, du code civil ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte du second de ces textes que le commettant peut s'exonérer de sa responsabilité du dommage causé par son préposé, lorsqu'il établit que celui-ci a agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions ;

Attendu que, pour déclarer Mme B... responsable civilement de son préposé, la cour d'appel énonce que le courrier et l'offre d'achat du 18 avril 2008 ont été envoyés du lieu du travail et grâce aux moyens mis à disposition par l'employeur et que la rédaction d'actes n'était pas étrangère aux attributions de M. X..., engagé comme rédacteur juridique polyvalent ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme B..., qui faisait valoir que M. Z...était de mauvaise foi, et ne pouvait ignorer que M. X...n'agissait pas dans l'exercice des fonctions qui lui avaient été attribuées, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

I-Sur le pourvoi de M. X...:

LE REJETTE ;

II-Sur le pourvoi de Mme B... :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Toulouse, en date du 2 juillet 2014, mais en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;