JP violences agressions sexuelles abus de faiblesse / relaxe / faute civile

 

Relaxe mais faute civile admise :

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mardi 5 avril 2016

N° de pourvoi: 15-82343
Non publié au bulletin Rejet
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Alex X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 8-1, en date du 24 mars 2015, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de complicité de violences et extorsion de fonds, a prononcé sur les intérêts civils ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 470-1, 485, alinéa 1, 497, 3°, et 593 du code de procédure pénale, des articles 312-1, 312-8, 312-9 et 312-13 du code pénal, de l'article 1382 du code civil, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué, statuant sur l'appel de la partie civile d'un jugement de relaxe, a retenu la responsabilité civile du prévenu pour des faits d'extorsion de fonds, et a en conséquence alloué diverses indemnités à la partie civile ;

" au motifs qu'il résulte des pièces de la procédure et des débats en cause d'appel que M. Celso Y...a remis une somme de 25 000 euros en numéraire à M. Alex X...au cours du mois de mai 2010 ; qu'il n'est ni allégué et encore moins établi que cette remise de fonds soit intervenue dans le cadre de l'exécution d'un contrat, d'une libéralité voire à titre d'acompte dans le cadre d'une quelconque prestation ;
que si M. X... a nié toute forme de violence à l'encontre tant de M. Y...que d'ailleurs de M. B..., il a reconnu toutefois avoir harcelé l'un et l'autre pendant plusieurs mois pour obtenir la restitution de fonds prêtés au second ; qu'il reconnaissait avoir reçu de M. Y...une somme de 25 000 euros en espèces, sans pour autant pouvoir fournir d'explication crédible ; que de surcroît lors des débats devant la cour, M. X... assisté de son avocat, qui ne peut justifier de cause licite de cette remise d'argent, déclare que les fonds qui lui ont été remis par la partie civile avaient pour finalité la corruption, par le truchement d'un certain « Rachid », d'un fonctionnaire de police pour obtenir des renseignements sur l'état d'une procédure concernant la partie civile ;
ainsi qu'il résulte tant de ces quelques rappels que des déclarations mêmes du prévenu, que ce dernier a commis une faute qui a entraîné pour M. Y...un préjudice direct et personnel ouvrant droit à réparation ; qu'il constant que les agissements de M. X... ont entraîné pour M. Y...non seulement un préjudice matériel, mais aussi un préjudice psychologique en raison de la contrainte dont il a fait l'objet à cette occasion ;

" 1°) alors que la partie civile qui forme un appel d'un jugement de relaxe doit démontrer l'existence d'une faute à partir et dans la limite des faits objets de la poursuite ; qu'en l'espèce, M. X... était poursuivi pour avoir obtenu par violences, menaces de violences ou contrainte, la remise de la somme de 25 000 euros ; qu'en retenant pour caractériser la faute civile qu'il aurait harcelé M. Y...et que ces fonds étaient destinés à la corruption, la cour d'appel a retenu des faits qui n'étaient pas compris dans la poursuite et elle a violé les textes susvisés ;

" 2°) alors que l'engagement de la responsabilité civile du prévenu repose sur l'identification d'une faute ayant causé un préjudice afin d'ouvrir droit au versement de dommages et intérêts ; qu'en se bornant à relever que M. X... reconnaissait avoir « harcelé » M. Y...pour obtenir restitution des fonds prêtés, sans relever aucun agissement concret de nature à caractériser un harcèlement fautif, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision et violé l'article 1382 du code civil ;

" 3°) alors que la cour d'appel ne pouvait affirmer, d'une part, qu'aucun contrat permettant de justifier la remise des fonds n'était allégué, et, d'autre part, que M. X... soutenait avoir recherché à obtenir la restitution de fonds prêtés ; que par cette contradiction la cour d'appel a privé son arrêt de motifs et de base légale " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Alex X...a été poursuivi devant le tribunal correctionnel des chefs d'extorsion de fonds et de complicité de violences ; que les juges du premier degré ont renvoyé le prévenu des fins de la poursuite ; que seule la partie civile a relevé appel de cette décision ;

Attendu que, pour annuler le jugement entrepris et condamner le prévenu à des réparations civiles, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, et dès lors qu'en relevant que la remise d'une somme de 25 000 euros, qui avait été obtenue à la suite de harcèlements répétés, était dépourvue de cause juridique et était assortie d'une contrainte qui avait entraîné des conséquences psychologiques pour la victime, la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé, sans se contredire, l'existence d'une faute civile démontrée à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite engagée du chef d'extorsion de fonds, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que M. X... devra payer à M. Celso Y...au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

 

Faute civile constatée, consistant en la démonstration de l'abus de faiblesse non reconnu en 1re instance

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 13 janvier 2016

N° de pourvoi: 14-87045
Non publié au bulletin Rejet
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Mme Yolande X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, en date du 13 octobre 2014, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef d'abus de faiblesse, a prononcé sur les intérêts civils ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 9 de la Déclaration des droits de l'homme, préliminaire du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a infirmé le jugement entrepris en ses dispositions civiles, a déclaré la demanderesse responsable des conséquences dommageables de l'abus frauduleux de l'état de faiblesse dont avait été victime M. Y...et l'a condamnée à payer à ce dernier la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice matériel et celle de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

" aux motifs que l'appel interjeté par M. Y..., dans la forme et le délai de la loi, est recevable ; que pour renvoyer Mme X...des fins de la poursuite, les premiers juges ont considéré, par une motivation particulièrement synthétique, " qu'il ressort des éléments du dossier et des débats qu'il n'est pas rapporté la preuve que l'état supposé de faiblesse de M. Y...était apparent ou connu de la prévenue " ;
que pourtant, dans son rapport très complet et argumenté de l'expertise psychiatrique réalisée le 21 juillet 2010, le docteur Z..., tout en notant l'incapacité de l'intéressé à convertir en euros une forte somme d'argent exprimée en francs, a mis en évidence (partie " discussion ") les éléments suivants qu'il importe de rappeler en leur intégralité : " M. Y...ne présente pas de déficience intellectuelle. Il dispose d'un niveau scolaire et culturel modeste, qui plus est sous utilisé, mais qui ne rend pas objectivement incompétent, quoiqu'il en pense. Il souffre en revanche d'un trouble de personnalité caractérisé, trouble caractérisé et qui surdétermine son mode existentiel, son mode de relation interpersonnelle, ses modalités adaptatives, ses conduites sociales. Il s'agit d'un trouble de personnalité dit personnalité dépendante. Ceci va de pair avec le besoin de s'en remettre à un tiers pour la plupart des décisions et qui est sous-tendu par le sentiment d'insuffisance personnelle, d'incomplétude, le besoin d'être aimé et reconnu. M. Y...présente ce trouble à un niveau élevé. Ce trouble a été chez lui compensé, il s'y est adapté, notamment dans le cadre d'une relation conjugale tout à fait singulière qui pourvoyait aux exigences et palliait les insuffisances et limitations qu'induit ce type de personnalité. Il est hautement vraisemblable que cet équilibre a été mis en péril à l'époque des faits en cause, à la fois par l'accumulation récente d'événements défavorables (suicide de sa mère, incendie d'une maison puis décès du père et vieillissement, avec une vraisemblable perte de compétence intellectuelle et sociale, de sa compagne) ¿ Ce type de trouble de personnalité à ce degré d'intensité nous semble devoir être considéré comme constitutif d'une vulnérabilité significative, et expose la personne qui en est affectée à s'en remettre imprudemment à des tiers. On notera incidemment que cette situation justifierait une mesure de protection pour les actes de la vie civile " ; qu'il a conclu de la manière suivante : " Il ressort de l'examen de M. Y...qu'il présente un trouble de personnalité : une personnalité dépendante. Son intelligence de base est normale, ni affectée par une déficience innée, ni affectée par un processus de détérioration ultérieure. Elle est cependant sous-utilisée en raison même de ce trouble de personnalité. Ce trouble de personnalité le rend particulièrement influençable et dans une mesure moindre, impressionnable. Ce trouble est constitutif d'une atteinte psychique de nature à altérer, sans l'empêcher, l'expression de sa volonté. Il était notamment présent au cours de l'année 2004 " ;

que compte tenu de cette appréciation médicale qui ne fait l'objet d'aucune discussion, la situation de faiblesse de M. Y..., à l'époque des faits en cause, en raison de sa particulière vulnérabilité due à une déficience psychique n'est pas " supposée " pour reprendre le terme utilisé par les premiers juges mais au contraire établie ; par ailleurs, le trouble de la personnalité défini par l'expert psychiatre avait pu être parfaitement appréhendé par Mme X...qui, en 2004, côtoyait l'intéressé de manière proche depuis plusieurs années ; que ce trouble était donc connu d'elle ; que du reste, Mme X...a tenu dans le cadre de la procédure diverses déclarations rapportant la " personnalité dépendante " de M. Y...;
- que lors de son audition du 14 mai 2007, dans le cadre de l'enquête préliminaire, " Vis-à-vis de démarches auprès de divers établissements, comme la sécurité sociale, lors d'un prêt au Crédit agricole, sa banque, il me demandait de l'accompagner ; il paraissait mal à l'aise dans ce genre de démarche ¿ À la suite du décès de son père, il m'avait demandé de le suivre au cabinet du notaire qui réglait la succession ; M. Y...semblait croire qu'il avait été roulé par ses frères ; il ne voulait pas présenter à cette réunion seul " ;
- que lors de son interrogatoire de première comparution du 27 mai 2010, " on y allait souvent pour l'aider, deux à trois fois par semaine ¿ Il nous demandait des conseils pour ses papiers ¿ M. Y...voulait trouver un appartement mais il ne voulait pas que sa tatie le sache ; il m'avait demandé de l'aider dans ses démarches ; c'est ce que j'ai fait ¿ Je l'ai aidé à faire le bail et toutes les formalités ; je l'ai aidé aussi auprès de sa banque, le Crédit agricole ; il avait un léger découvert ; il m'a demandé de prendre rendez-vous pour lui auprès de son conseiller car il avait eu un chèque de rejeté ; je l'ai accompagné au rendez-vous ¿ Il m'a appelé très souvent pour les papiers, les impôts ¿ Il me demandait de vérifier ce qu'il avait préparé tout seul ¿ Le jour de la vente de la maison, il m'a demandé de l'accompagner à Toulouse ¿ Il voulait que je l'accompagne car il avait le sentiment d'avoir été dépouillé par ses frères ¿ Il voulait un compte joint pour que je l'aide » ; que ceci étant posé, il ressort des investigations accomplies dans le cadre de l''enquête préliminaire et de l'instruction que M. Y...a ouvert le 26 mai 2004 avec Mme X...un compte joint auprès du Crédit mutuel qui était l'établissement bancaire de cette dernière ; que les relevés de ce compte ont été adressés exclusivement au domicile de Mme X...; que sur ce compte a été déposée la somme totale de 68 127, 58 euros, et notamment, celle de 68 074, 49 euros entre le 26 mai 2004 et le 28 juillet 2004, à savoir :
- que lors de l'ouverture du compte, la somme de 7 264, 38 euros (remise d'un chèque au sujet duquel aucune question n'a été posée aux parties durant la procédure mais pouvant être attribuée à M. Y...puisque Mme X...a déclaré lors de son interrogatoire de première comparution : " je n'ai jamais rien apporté sur ce compte ¿ C'était son argent pas le mien ") ;
- que, le 8 juin 2004, la somme de 53 220, 11 euros correspondant au premier chèque remis à M. Y...par la société civile professionnelle Pourciel-Pourciellavail, notaires associés à Venerque, au titre de la succession Y...Vaysse ;
- que, le 28 juillet 2004, la somme de 7 590 euros correspondant au deuxième chèque remis à M. Y...au titre de la succession ;
- que, le 17 décembre 2004, la somme de 53, 09 euros correspondant au troisième et dernier chèque remis à M. Y...au titre de la succession ;
- que cinq retraits d'espèces pour la somme totale de 25 850 euros ont été effectués au guichet de l'établissement bancaire entre le 26 mai 2004 et le 27 octobre 2005 au moyen de bordereaux dont la signature a été attribuée à M. Y..., à savoir : 300 euros le 26 mai 2004, 3 000 euros le 9 juin 2004, 22 000 euros le 17 juin 2004, 500 euros le 30 mars 2005, 50 euros le 27 octobre 2005 ;
- que dix-sept retraits d'espèces pour la somme totale de 42 100 euros ont été effectués au guichet de l'établissement bancaire entre le 28 mai 2004 et le 17 décembre 2004 au moyen de bordereaux dont la signature a été attribuée à Mme X..., à savoir : 3 000 euros le 28 mai 2004, 2 500 euros le 4 juin 2004, 6 500 euros le 11 juin 2004, 3 000 euros le 28 juillet 2004, 600 euros le 4 août 2004, 3 500 euros le 10 août 2004, 600 euros le 17 août 2004, 2 700 euros le 27 août 2004, 1 300 euros le 7 septembre 2004, 1 500 euros le 14 septembre 2004, 7 000 euros le 24 septembre 2004, 1 500 euros le 22 octobre 2004, 2 600 euros le 28 octobre 2004, 2 000 euros le 9 novembre 2004, 2 400 euros le 3 décembre 2004, 300 euros le 16 décembre 2004, 1 100 euros le 17 décembre 2004 (D 53, après retrait, solde créditeur de 608, 77 euros) ;
que les investigations menées ont également révélé que le compte personnel de M. Y...auprès du Crédit agricole, qui était alimenté par le virement des modiques pensions de retraite de l'intéressé représentant mensuellement une somme de l'ordre de 550 euros, présentait au 25 mai 2004 un solde créditeur de 11, 15 euros et avait enregistré à l'époque des faits en cause les opérations suivantes : des dépôts en espèces de 400 euros le 10 août 2004, 1 000 euros le 29 octobre 2004, 1200 euros le 7 décembre 2004 et 500 euros le 18 décembre 2004, un seul retrait au guichet de 540 euros le 12 juin 2004, avant qu'il ne soit sollicité un prêt de trésorerie de 2 500 euros remboursable sur vingt-quatre mois, montant porté au crédit du compte le 8 février 2005, alors débiteur de 33, 18 euros et qui sera à nouveau débiteur à compter du 26 février 2005 à la suite d'un retrait au guichet de 300 euros (également versements en espèces de 400 euros le 19 mars 2005 et de 500 euros le 30 mars 2005) ;
- que le compte personnel de Mme X...auprès du Crédit mutuel présentait au 26 mai 2004 un solde débiteur de 304, 25 euros et avait enregistré depuis le mois de février 2004 de multiples rejets de chèques ;
- qu'en 2004, Mme X...faisait l'objet d'une saisie des rémunérations auprès du tribunal d'instance de Cahors de la part de quatre créanciers pour une dette totale de 16 437, 32 euros et d'avis à tiers détenteur du Trésor public pour une somme totale de 3 241, 23 euros ;
- que le compte joint de Mme X...et de son concubin M. A... G...auprès du Crédit agricole présentait au 1er juin 2004 un solde débiteur de 203, 50 euros (levée d'une interdiction bancaire le 15 septembre 2004) et avait été alimenté à l'époque des faits en cause, pour permettre le remboursement de deux prêts, exclusivement par sept dépôts en espèces, parfois concomitants aux retraits opérés sur le compte joint ouvert le 26 mai, pour un montant total de 8 370 euros entre le 17 juin 2004 et le 10 décembre 2004, à savoir : 4 000 euros le 17 juin, 270 euros le 2 juillet, 900 euros le 11 août, 850 euros le 7 septembre, 850 euros le 30 septembre, 700 euros le 28 octobre, 800 euros le 10 décembre ;
que, pour expliquer l'ouverture du compte joint, M. Y...a toujours prétendu qu'à la suite de l'incendie de la maison qu'il occupait à titre gracieux à Cabessut en échange du don au propriétaire de légumes toutes les semaines, Mme X...lui avait indiqué que la " mairie " risquait de lui demander de l'argent pour débarrasser les décombres et lui avait conseillé de déposer les fonds provenant de la succession auprès du Crédit mutuel ; qu'il a également toujours affirmé qu'il ignorait ce qu'était un compte joint ; il a précisé avoir prêté à Mme X...la somme de 5 000 euros ; que concernant les retraits opérés sur le compte, il a successivement déclaré dans une confusion manifeste :
- que lors de l'audition du 26 février 2007 puis celle du 27 septembre 2007, qu'il avait effectué trois retraits d'un montant respectif de 600 euros (ou 500 euros), de 1 500 euros et de 50 euros, somme restant alors sur le compte, précisant que lors du retrait de 1 500 euros correspondant à celui du 14 septembre 2004 ou du 22 octobre 2004 (alors que ces retraits n'avaient pas été effectués par lui), il avait donné la moitié de la somme à Mme X...afin qu'elle puisse payer un huissier de justice ;
- que lors de l'audition de partie civile du 30 avril 2010, qu'il avait effectué trois retraits dont il conservait le souvenir du montant pour deux à savoir 500 euros et 1 500 euros, puis sur question du juge d'instruction sur la reconnaissance de sa signature sur les bordereaux figurant au dossier : « je reconnais ma signature pour le retrait de 300 effectué le 26 mai 2004 ¿ peut-être que c'est ma signature pour un retrait de 3 000 euros du 9 juin 2004 ; pour le retrait de 22 000 euros du 17 juin 2004, c'est possible que ce soit ma signature mais je n'ai jamais fait un retrait d'un tel montant ; pour le retrait du 27 octobre 2005, c'est bien ma signature ; je voulais retirer 500 euros et on m'a dit que je n'avais pas assez d'argent et j'ai retiré 50 euros ; pour le retrait de 500 euros du 30 mars 2005, je ne sais pas si c'est ma signature » ;
- que lors de la confrontation du 8 février 2011, qu'il avait effectué trois retraits d'un montant respectif de 500 ou 600 euros, de 1 500 euros et de 50 euros ;
que pour sa part, Mme X...a expliqué l'ouverture du compte joint par la seule volonté de M. Y..., dûment conseillé, lequel voulait notamment cacher son héritage à la personne avec qui il vivait et qu'il qualifiait de " tante " ;

qu'elle a reconnu avoir effectué les dix-sept retraits précités, précisant les avoir tous réalisés sur la demande préalable de M. Y...qui l'avait parfois accompagnée à la banque, y compris à l'intérieur de l'établissement ; qu'elle a affirmé qu'elle avait remis leur montant total à M. Y...et que celui-ci en avait fait un usage ignoré d'elle, tout en soulignant sa grande générosité, voire son caractère dépensier malgré la modicité de ses revenus ; qu'elle a admis toutefois avoir bénéficié de sa part d'un prêt de 5 000 euros en espèces, sans jamais en préciser la date ; que concernant le retrait de 22 000 euros opéré le 17 juin 2004, elle a indiqué que M. Y...avait retiré ladite somme, en sa présence, en raison de son intention d'acquérir un nouveau véhicule de type 4x4 ; que pour justifier les sommes en espèces versées sur le compte joint détenu avec son concubin, elle a soutenu qu'indépendamment du prêt de la somme de 5 000 euros par M. Y..., elles provenaient de retraits effectués sur d'autres comptes et " d'aides familiales " ;

qu'elle a produit comme justificatifs, le 23 mars 2011 :
- une attestation de Mme Élodie G..., épouse B..., soeur de son concubin, certifiant avoir prêté la somme de 1 000 euros en 2004,
- une attestation de M. Didier C...certifiant avoir prêté la somme de 1 000 euros en 2004 (et la même somme en 2005), le 15 février 2012,
- une attestation de M. D... G..., père de son concubin, certifiant avoir prêté en mai 2004 la somme de 2 500 euros, le 13 juillet 2012,
- pour justifier du dépôt de la somme de 850 euros effectué le 7 septembre 2004, des documents bancaires faisant ressortir les retraits suivants représentant au total ladite somme : 90 euros le 2 septembre, 120 euros et 40 euros sur son compte personnel ouvert auprès du Crédit mutuel, 20 euros le 7 septembre 2004 sur son livret bleu, 80 euros et 100 euros le 2 septembre sur deux comptes de son concubin ouverts auprès de la Caisse d'épargne et 400 euros le 7 septembre sur l'un de ces comptes ;

que Mme Élodie G..., épouse Ashkour, a confirmé lors de son audition du 30 septembre 2011 les termes de son attestation, ajoutant qu'elle avait connaissance que son père avait également prêté de l'argent et remettant, à titre de justificatifs de son prêt de la somme de 1 000 euros, les trois retraits bancaires qu'elle avait effectués le 17 décembre 2008 auprès de la Caisse d'épargne sur trois comptes différents pour les montants respectifs de 280 euros, 380 euros et 340 euros ;

que M. Didier C..., collègue de travail de Mme X...et membre du même syndicat, a confirmé lors de son audition du 12 juillet 2011 les termes de son attestation, précisant que les sommes en cause avaient été prêtées en espèces après retrait opéré sur son livret A de la Caisse d'épargne ce dont il pouvait justifier ; que, par ailleurs, Mme Séverine H..., épouse I..., conseillère financière au Crédit mutuel, a indiqué lors de son audition du 2 octobre 2007 qu'à l'époque des faits, elle exerçait au guichet et qu'elle était certaine que des retraits en espèces effectués par Mme X...l'avaient été en présence de M. Y...qui ne pouvait donc les ignorer ;

que Mme Christel E..., épouse F..., chargée de clientèle, a déclaré lors de son audition du 24 mai 2007 que Mme X...lui avait présenté M. Y...comme son " oncle germain ", qu'elle avait bien expliqué à celui-ci les implications de l'ouverture d'un compte joint, qu'elle conservait le souvenir du retrait d'une forte somme d'argent en raison de la volonté, semblait-il, de M. Y...de s'acheter une voiture plus moderne que celle qu'il détenait, mais qu'elle ne pouvait préciser si Mme X...avait pu se présenter au guichet pour effectuer des retraits avec un ou des bordereaux portant la signature de ce dernier ;

que cependant, les investigations menées ont permis de démontrer que M. Y...n'avait jamais acquis un véhicule 4x4 mais le 7 décembre 2004 un véhicule Peugeot 205 datant de vingt ans (première mise en circulation le 10 décembre 1984) ; qu'en revanche, M. G... , concubin de Mme X..., avait pour sa part acquis, le 3 septembre 2004 à se fier au procès-verbal établi par l'enquêteur, un véhicule 4x4 d'occasion Mitsubishi Pajero ; que, concernant ce véhicule, M. Romuald G... a commencé à indiquer lors de son audition du 4 novembre 2011 qu'il ne pouvait dire comment le financement avait été opéré, puis a affirmé, sur présentation de pièces émanant de la Société générale (prêt de 6 900 euros porté le 1er octobre 2004 au crédit du compte ouvert le 23 septembre 2004 et prêt de 10 000 euros porté au crédit le 18 novembre 2004), que le premier crédit correspondait à l'achat du véhicule et le second à un crédit à la consommation, alors que Mme X...a prétendu d'abord lors de son interrogatoire du 3 décembre 2010 que son concubin avait contracté pour financer l'achat de deux prêts pour un montant total d'environ 17 000 euros, puis, dans un document (" situation économique ") remis au juge d'instruction par son avocat le 5 février 2011 ; que le véhicule avait été réglé par chèque du 12 octobre 2004 d'un montant de 5 900 euros et financé par le prêt de 6 900 euros contracté auprès de la Société générale, position maintenus lors de la comparution devant le tribunal correctionnel, soit des déclarations évolutives qui posent question et qui sont incompatibles avec la date d'acquisition du véhicule, sauf à considérer une erreur commise par l'enquêteur sur cette date ;

que les quelques témoignages recueillis sur le mode de vie de M. Y...présentent enfin celui-ci comme peu dépensier et vivant de façon solitaire sans grand besoin, ce que confirme si besoin l'achat du véhicule qu'il a effectué ainsi que la modestie de l'ameublement de son logement ressortant des photographies produites dans le cadre de l'instruction ;

qu'au final, il apparaît que le 26 mai 2004, M. Y...se trouvait dans une situation de faiblesse en raison d'une particulière vulnérabilité due à une déficience psychique et connue de Mme X...; qu'à cette date, un compte joint a été ouvert entre Mme X...et M. Y...sans aucun motif légitime pouvant justifier l'ouverture d'un tel compte ; que ce compte a été alimenté par des sommes provenant exclusivement de M. Y...; que M. Y...était à même d'opérer seul des retraits puisqu'il doit être, notamment, considéré comme l'auteur du retrait des sommes de 3 000 euros le 9 juin 2004 et de 22 000 euros le 17 juin 2004, Mme X...a effectué sur moins de sept mois des retraits de sommes très importantes pour atteindre un montant total de 42 100 euros ; que Mme X...n'a produit aucun justificatif sur la remise effective à M. Y...des sommes retirées alors que l'importance des sommes en cause devait nécessairement l'amener à faire établir un reçu ou à se ménager tout autre élément de preuve de la remise ;

que Mme X...ne démontre pas de manière suffisamment probante que tous les dépôts en espèces sur le compte joint détenu avec son concubin aient une origine autre que certains retraits opérés ou encore que l'acquisition du véhicule Mitsubishi ait été autrement financé ; que les investigations menées démentent que M. Y...ait pu être le bénéficiaire des sommes retirées par Mme X..., à l'exception toutefois des sommes suivantes représentant un montant total de 3 100 euros : 400 euros le 10 août pour le retrait de 3 500 euros du même jour, 1 000 euros le 29 octobre pour le retrait de 2 600 euros de la veille, 1 200 euros le 7 décembre pour le retrait de 2 400 euros du 3 décembre ; 500 euros le 18 décembre pour le retrait de 1 100 euros de la veille ; que la mauvaise foi de Mme X..., dont certaines déclarations sont dénuées de la crédibilité la plus totale ou du sérieux le plus élémentaire (à titre d'exemples : " c'est quelqu'un qui flambait beaucoup ", " il organisait des apéros gigantesques dans son jardin ", " dans ma tête, je pensais lui rendre service ", " je ne me serais pas permise de lui demander ce qu'il faisait de l'argent ", " je le mettais en garde "), est patente comme le confirme si besoin la position initiale adoptée dans le cadre de la procédure civile l'opposant à M. Y...sur le prêt de 5 000 euros constamment reconnu dans le cadre de la procédure pénale (et même en invoquant la signature d'une reconnaissance de dette), y compris lors de la comparution devant le tribunal correctionnel, mais nié dans un premier temps devant les juges civils ;

que les faits en cause sont donc constitutifs de l'infraction d'abus frauduleux de l'état de faiblesse, Mme X...ayant conduit de mauvaise foi M. Y..., personne dans une situation de faiblesse en raison d'une particulière vulnérabilité due à une déficience psychique qui était connue d'elle, à un acte gravement préjudiciable pour lui à savoir l'ouverture d'un compte joint ce qui lui a permis de retirer indûment, avec des conséquences financières dramatiques pour sa victime, une somme devant être arrêtée à 39 000 euros au vu des explications qui précèdent, soit la totalité des sommes retirées par la première sous déduction des sommes déposées en espèces par le second sur son compte personnel ;

que Mme X...doit être par suite déclarée responsable des conséquences dommageables de l'abus dont a été victime M. Y..., la constitution de partie civile de celui-ci, déclarée à tort irrecevable par les premiers juges alors qu'il aurait dû être débouté de ses demandes en l'état de la relaxe prononcée, étant recevable et fondée ;
que le préjudice subi est d'abord matériel ;
que sur la base de la somme de 39 000 euros à laquelle doit être fixé le produit de l'abus frauduleux mais en tenant aussi compte de l'indisponibilité de cette somme depuis dix ans, le préjudice matériel sera justement réparé par une indemnisation de 50 000 euros ;
que M. Y...a en outre subi depuis maintenant de nombreuses années d'importants tracas, désagréments et pertes de temps s'ajoutant au désagréable sentiment de la confiance bafouée, soit un préjudice moral qui sera justement réparé par une indemnisation de 5 000 euros ;
qu'il est également inéquitable de laisser à la charge de M. Y...les frais irrépétibles exposés qui peuvent être évalués, en considération des multiples interventions de son avocat, à la somme réclamée de 5 000 euros ; que Mme X...doit être enfin condamnée aux dépens ; que le jugement entrepris doit être en conséquence infirmé en ses dispositions civiles ;

" alors que, saisie du seul appel de la partie civile à la suite d'un jugement de relaxe, la juridiction du second degré ne peut, pour statuer sur l'action civile, rechercher si les faits qui lui sont déférés constituent une infraction pénale ; que la présomption d'innocence et l'autorité de la chose jugée s'opposent en effet à ce que le juge d'appel établisse l'existence d'une infraction pénale et remette en cause la décision de relaxe devenue irrévocable en affirmant que l'infraction poursuivie est constituée ; que la cour d'appel est donc tenue de caractériser, à partir des faits objets de la poursuite, une faute civile distincte de la faute pénale pour laquelle l'intéressé a été définitivement relaxé ; qu'en imputant à la demanderesse la commission du délit d'abus de faiblesse, alors qu'elle avait bénéficié en première instance d'une relaxe devenue irrévocable, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une faute civile distincte de la faute visée par la loi pénale, a violé les textes visés au moyen " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Mme X...a été renvoyée devant le tribunal correctionnel du chef d'abus de faiblesse pour avoir conduit M. Y..., personne vulnérable, à ouvrir un compte joint au Crédit mutuel, et à la laisser y effectuer des retraits importants ; que les premiers juges, après avoir relaxé la prévenue, ont déclaré M. Y...irrecevable en sa constitution de partie civile ;

Attendu que pour infirmer le jugement et allouer des dommages-intérêts à la partie civile, l'arrêt énonce que Mme X...a retiré, à plusieurs reprises, sur le compte joint ouvert sans motif légitime et alimenté exclusivement avec des fonds de M. Y..., des sommes importantes qui, pour l'essentiel, et contrairement aux affirmations de la prévenue, n'ont pas été remises à la partie civile ;

Attendu que si c'est à tort que l'arrêt retient que les faits en cause sont constitutifs de l'infraction d'abus frauduleux de l'état de faiblesse, alors que Mme X...a été définitivement relaxée de ce chef, il n'encourt cependant pas la censure dès lors que la cour d'appel a caractérisé des agissements constitutifs d'une faute civile démontrée à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite, qui ont entraîné, pour M. Y..., un préjudice direct et personnel ouvrant droit à réparation ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

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Faute civile non admise : les fait d'agression sexuelle n'ont pas pu etre démontrés

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 2 mars 2016

N° de pourvoi: 15-81711
Non publié au bulletin Rejet
Statuant sur le pourvoi formé par :- Mme Cécile X...épouse Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-8, en date du 24 février 2015, qui, sur renvoi après cassation (Crim. 23 octobre 2013, n° 12-86. 339), l'a déboutée de ses demandes après relaxe de M. Yousry A...du chef d'agression sexuelle ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 222-22, 222-27 du code pénal, préliminaire, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a débouté Mme Y... de sa demande en réparation des préjudices subis du fait de l'agression sexuelle reprochée à M. A... ;

" aux motifs qu'il convient de rappeler que, la partie civile ayant seule interjeté appel, la décision de relaxe est définitive ; que la cour n'est saisie que de l'action civile en réparation des conséquences dommageables pouvant résulter de la faute civile du prévenu, cette faute devant être démontrée à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite ; que la partie civile dans ses conclusions, afin de caractériser plus sûrement la faute commise par M. A..., fait référence à la définition des violences à caractère sexuel, donnée par l'article 1 de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ; que ce fondement juridique n'entre pas dans les prévisions de l'article 222-22 du code pénal qui dispose que « constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise », seule infraction visée à la prévention ; qu'en l'espèce, aucun élément ne vient étayer l'existence d'une faute civile dont se prévaut M. Y... sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil ; que les dénégations de M. A... ont été constantes et réitérées, que l'expertise psychiatrique dont il a fait l'objet note l'absence de toute maladie mentale et ne mentionne nullement, comme il est prétendu par la partie civile, qu'il a des pulsions sexuelles mal contrôlées ; qu'aucun témoin ne peut attester de la réalité des faits dont M. A... serait l'auteur ; que son casier judiciaire ne mentionne aucun antécédent en relation avec les faits ; que la partie civile n'a pas reconnu le drap saisi lors de l'enquête ; qu'aucune trace de violence n'a pu être mise en évidence ; que la réponse de M. A... rapportée par M. B...« ce n'est pas moi, ce n'est pas moi », sans qu'il puisse être précisé s'il répondrait à une question ou si cette exclamation, au demeurant ambiguë, avait jailli de sa part de façon spontanée, ne peut constituer la preuve d'un aveu ; que les déclarations de la partie civile, qui a déposé plainte très tardivement pour le motif, notamment, exposé qu'elle avait attendu pour le faire la fin des fêtes de Noël, ont varié dans le temps et ont évolué au fil de ses auditions ; qu'elle fait valoir, par le truchement d'une expertise en date du 26 juin 2009, émanant du docteur, M. C..., donc réalisée environ seize mois après les faits dénoncés, l'existence d'un psycho-traumatisme sévère qui serait relié à une agression sexuelle qu'elle aurait subie, sans que cette expertise de nature privée présente un caractère contradictoire et puisse être opposable à l'ensemble des parties alors qu'elle n'a pas été suivie de l'avis d'un autre expert désigné par le ministère public ;

" 1°) alors que tout rapport d'expertise amiable peut valoir à titre de preuve, dès lors, qu'il est soumis à la libre discussion des parties et ce, quand bien même il n'a pas été contradictoirement établi ; qu'en refusant d'examiner le rapport d'expertise de nature privée établi par M. C..., régulièrement communiqué et ayant fait l'objet d'un débat contradictoire, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

" 2°) alors qu'il appartient à la juridiction, si elle s'estime mal renseignée, d'ordonner toute mesure d'instruction utile ; qu'en refusant d'examiner le rapport d'expertise de nature privée établi par M. C...en ce que cette expertise n'aurait pas été suivie de l'avis d'un autre expert désigné par le ministère public, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 9 février 2008, Mme X... a porté plainte pour agression sexuelle contre M. A..., en exposant que ce client de son entreprise, chez lequel elle s'était rendue le 26 novembre 2007, pour un motif professionnel, s'était livré sur elle et, malgré son opposition, à des attouchements de nature sexuelle ; qu'à la suite de l'enquête effectuée sur instruction du procureur de la République, M. A... a fait l'objet d'une convocation à comparaître devant le tribunal correctionnel qui l'a relaxé du chef d'agression sexuelle et a débouté Mme X..., constituée partie civile, de l'ensemble de ses demandes ; que, statuant sur le seul appel de celle-ci, la cour d'appel de Paris, par arrêt du 13 septembre 2012, a confirmé le jugement déféré sur les intérêts civils ; que cette décision a été cassée par arrêt de la chambre criminelle du 23 octobre 2013 ;

Attendu que, pour débouter la partie civile de ses demandes, l'arrêt, statuant sur renvoi après cassation, relève qu'aucun élément matériel n'étaye l'existence d'une faute civile à la charge de M. A..., dont les dénégations ont été constantes et réitérées, que l'expertise psychiatrique à laquelle il a été soumis n'a révélé aucune anomalie, qu'aucun témoin n'a pu attester la réalité des faits révélés plus de deux mois plus tard par la partie civile dont les déclarations ont varié au fil des auditions ;

Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, abstraction faite des énonciations erronées mais surabondantes critiquées par le moyen, la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

legitime défense : exclut toute faute

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mardi 16 février 2016

N° de pourvoi: 15-81880
Non publié au bulletin Rejet

Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Claude X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 25 septembre 2014, qui, pour violences aggravées, l'a condamné à 1 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que MM. X... et Y... ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel, des chefs de violences aggravées, pour le premier, et de violences, pour le second ; que les juges du premier degré ont renvoyé M. Y... des fins de la poursuite au bénéfice de la légitime défense, ont condamné M. X... à une amende de 1 500 euros et ont prononcé sur les intérêts civils ; que M. X... et le ministère public ont relevé appel de cette décision ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 122-5 du code pénal, 459, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré M. X..., prévenu, coupable de violences ;

"aux motifs que les faits reprochés à M. X... sont suffisamment caractérisés, les dénégations de ce dernier, au regard des constatations faites et des déclarations de la victime et des témoins n'apparaissant en rien convaincantes ; qu'en effet il résulte des propres déclarations du prévenu que ce dernier a refusé de se soumettre à une restriction de circulation parfaitement justifiée que lui signifiait M. Laurent Y... ; qu'il reconnaît également avoir voulu s'approcher au plus près de ce dernier avec son véhicule ; qu'il y est parvenu puisque la victime a été obligée de sauter dans le fossé pour ne pas être renversée ; que ceci est confirmé par le témoin M. Gilles Z... dont les propos apparaissent plus crédibles que ceux du passager du prévenu, M. Gérard A... qui affirmera que M. X... ne s'est jamais emparé d'un manche télescopique alors même que ceci a été parfaitement reconnu par ce dernier ; que par ailleurs le prévenu ne peut valablement soutenir qu'il n'a pas porté de coups à M. Y... avec le manche télescopique du rouleau de peinture alors même que ce dernier a été examiné le jour même des faits par M. B..., médecin, lequel a relevé la présence d'une ecchymose de la pommette droite ainsi qu'une excoriation cutanée sous claviculaire droite, ces constatations corroborant les déclarations de la victime ; qu'enfin la cour ne peut que s'étonner de découvrir aux termes des conclusions de M. X... que M. Joël C... a été témoin des faits alors même qu'à aucun moment au cours de l'enquête et devant le tribunal correctionnel, celui-ci n'a mentionné son existence ; que dès lors les premiers juges ont, à bon droit, retenu M. X... dans les liens de la prévention ;

"1°) alors que dans ses conclusions, le prévenu a exposé qu'il avait « peut-être involontairement, avec cet objet, porté un coup sur le visage de M. Y..., qui présentait en effet une ecchymose de la pommette droite constatée par M. B..., médecin, le 14 juin 2012, mais alors M. X... a agi en état de légitime défense au visa de l'article 122-5 du code pénal puisque la cour sait que M. X... a d'abord été frappé par M. Y... » ; qu'en se bornant à constater que, contrairement à ce qu'il affirmait, M. X... avait porté un ou plusieurs coups à M. Y..., sans rechercher s'il n'avait pas agi en état de légitime défense, la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions dont elle était régulièrement saisie et les a dénaturées ;

"2°) alors qu'en ne recherchant pas si les coups portés par M. X... à M. Y... n'avaient pas été rendus nécessaires par le comportement de ce dernier, qui a cherché à le frapper puis l'a violemment poussé, et en ne vérifiant, dès lors, pas si le prévenu avait agi en état de légitime défense, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Attendu que, pour confirmer le jugement, après avoir estimé, par motifs propres et adoptés, que les violences commises par M. X... avaient précédé celles imputables à M. Y... et écarté le témoignage tardif de M. C... sur lequel se fondait M. X... pour invoquer le bénéfice de la légitime défense, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 122-5 du code pénal, 1382 du code civil, 2, 497, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté la demande de dommages-intérêts formée par M. X..., partie civile ;

"aux motifs qu'il y a lieu de rejeter la demande formée par M. X... au titre de dommages-intérêts, ce dernier ne démontrant pas l'existence d'une faute civile commise par M. Y... ;

"1°) alors que saisie, par la seule partie civile de l'appel d'une décision de relaxe du prévenu, la cour d'appel est tenue de soumettre les faits poursuivis à son propre examen et vérifier si, indépendamment de la décision de première instance concernant l'action publique, les faits objet de la poursuite sont susceptibles de constituer une faute civile ; qu'en l'espèce, le droit de la partie civile à un second degré de juridiction ne pouvait s'exercer qu'à la condition que la cour d'appel examine le comportement de M. Y..., détermine si celui-ci était fautif et s'il pouvait être justifié, en tout ou en partie, par la faute de la victime ; qu'en ne se livrant pas à un nouvel examen du comportement de M. Y..., la cour d'appel n'a pas épuisé sa compétence et n'a pas suffisamment motivé sa décision ;

"2°) alors que la cour d'appel expose que l'ensemble des protagonistes et témoins s'accordent sur le fait que M. Y... a poussé M. X..., occasionnant sa chute ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors exclure la faute de M. Y... sans relever aucun fait de nature à justifier ce comportement" ;

Attendu que, pour débouter M. X... de ses demandes, l'arrêt retient, par motifs adoptés, qu'en repoussant celui-ci face à une agression actuelle et injuste, M. Y... a eu un geste de défense nécessaire et proportionné constitutif de la légitime défense et, par motifs propres, que M. X... ne démontre pas l'existence d'une faute civile ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que la légitime défense exclut toute faute et ne peut donner lieu à une action en dommages-intérêts en faveur de celui qui l'a rendue nécessaire par son agression, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;