Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du jeudi 3 novembre 20
16

N° de pourvoi: 15-18444
Publié au bulletin Rejet


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 février 2015) et les pièces de la procédure, que, dans le cadre d'une restructuration tendant à assurer la compétitivité du secteur des produits laitiers frais, la société Danone produits frais France (la société) a regroupé deux de ses établissements du département de la Seine-Maritime en un établissement unique appelé Pays de Bray ; que la société et les trois syndicats représentatifs au sein de l'établissement Pays de Bray ont signé un accord d'établissement "New Deal Pays de Bray" visant à mettre en place "une politique de rémunération qui reconnaisse l'effort des salariés sur la performance économique du site et sa capacité à adapter en permanence ses organisations pour répondre aux besoins des clients" ; que cet accord prévoit, pour les seuls salariés de l'établissement Pays de Bray, une augmentation salariale sur trois ans et le versement d'une prime spécifique dite prime d'amélioration continue ; qu'estimant que cet accord d'établissement instaurait une différence de traitement au détriment des salariés de l'établissement de Le Molay-Littry (Calvados), le syndicat CGT Danone Le Molay-Littry (le syndicat) a saisi le tribunal de grande instance d'une demande tendant à voir les salariés de cet établissement bénéficier des conditions salariales de ceux de l'établissement Pays de Bray ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que le syndicat fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande alors, selon le moyen, qu'une différence de traitement ne peut être pratiquée entre les salariés relevant d'établissements différents et exerçant un travail égal ou de valeur égale que si elle repose sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; qu'en considérant qu'un accord conclu au niveau d'un établissement n'est tenu de respecter le principe d'égalité qu'à l'intérieur dudit établissement et peut instituer dans ce cadre un régime plus favorable aux salariés que celui existant au sein de l'entreprise sans caractériser une atteinte illicite au principe d'égalité et sans qu'il soit nécessaire de rechercher si la différence de traitement instituée par cet accord au bénéfice des salariés de l'établissement considéré repose ou non sur des critères objectifs et pertinents, la cour d'appel a violé le principe à travail égal, salaire égal ;

Mais attendu que les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d'accords d'établissement négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de ces établissements, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l'établissement et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a retenu qu'un accord d'établissement peut instituer dans le cadre de l'établissement un régime plus favorable aux salariés que le régime général existant au sein de l'entreprise, sans pour autant caractériser une rupture illicite du principe d'égalité de traitement au détriment des salariés des autres établissements, et ce, sans qu'il soit nécessaire de rechercher si la différence de traitement instituée par cet accord au bénéfice des salariés de l'établissement concerné repose ou non sur des critères objectifs et pertinents, et qui a fait ressortir que les avantages salariaux dont bénéficiaient les salariés de l'établissement Pays de Bray n'étaient pas étrangers à des considérations de nature professionnelle, a légalement justifié sa décision ;

Attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le second moyen ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mercredi 14 septembre 2016

N° de pourvoi: 15-11386
Publié au bulletin Rejet

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 septembre 2014), que la société Renault applique dans ses établissements situés en Ile-de-France des barèmes de rémunération supérieurs à ceux qu'elle applique au sein de son établissement de Douai ; que dénonçant l'atteinte portée au principe de l'égalité de traitement, le syndicat Sud Renault a saisi un tribunal de grande instance ;

Attendu que le syndicat fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen, qu'il ne peut y avoir de différence de traitement entre salariés d'établissements différents d'une même entreprise exerçant un travail égal ou d'égale valeur que si elles reposent sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; qu'en l'absence d'élément objectif tenant à l'activité ou aux conditions de travail présenté par l'employeur propre à justifier les différences de traitement observées entre les établissements d'une entreprise, ce dernier ne peut valablement justifier lesdites différences par la différence de niveaux de vie existant entre les bassins d'emploi dans lesquels sont situés ces établissements ; qu'en l'espèce, pour considérer que l'existence de barèmes de rémunération différents entre les établissements de région parisienne de la société Renault et celui de Douai était justifiée, la cour d'appel a retenu que la différence de coût de la vie entre l'environnement proche de l'usine de Douai et celui des usines franciliennes était parfaitement établie ; qu'en statuant par ce motif inopérant, la cour d'appel a violé le principe « A travail égal, salaire égal » ;

Mais attendu qu'une différence de traitement établie par engagement unilatéral ne peut être pratiquée entre des salariés relevant d'établissements différents et exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si elle repose sur des raisons objectives, dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence ;

Et attendu qu'ayant constaté que la disparité du coût de la vie invoquée par l'employeur pour justifier la différence de traitement qu'il avait mise en place entre les salariés d'un établissement situé en Ile-de-France et ceux d'un établissement de Douai était établie, la cour d'appel en a exactement déduit que cette différence de traitement reposait sur une justification objective pertinente ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;